Notre aventure en compagnie d'Ashley Robins débute très paresseusement dans le camping désert de Lake Juliet. Physionomie douce, limite glaciale, caractère effacé et pourtant bien trempé... elle a 16 ans, et la tête pleine de souvenirs. Ceux de son dernier voyage avec sa mère, assassinée 13 ans auparavant et dont elle va tenter de percer les derniers secrets. Pour ce faire, la jeune fille pourra compter sur ses flashbacks, souvent déroutants, et sur deux gadgets au look plutôt vidéo ludique, offerts par son inventeur de père : la TAS et la DAS, représentations en jeu... d'une Wiimote et d'une DS.

Technologie de pointage

Soyons clairs, les énigmes d'Another Code R se révèlent très simplistes, à la limite de la frustration. On nous prend par la main pour ne pas nous lâcher avant au moins quatre heures de jeu, à tel point que la première partie de l'aventure nous fait penser à un gigantesque tutoriel. Pire, l'utilisation de la Wiimote lors des passages de mimes (secouer une éprouvette, tourner une manivelle...), relèvent du gadget cheap et inutile. En revanche, dès qu'entrent en scène la TAS et la DAS, le plaisir revient. Ces accessoires high tech permettent à Ashley de pirater des caméras de surveillance, ou déverrouiller des serrures électroniques. Déchiffrer des codes à l'aide de la Wiimote en particulier, est une activité qui se corse après quelques heures de jeu pour offrir des défis certes légers, mais agréables à relever. Ces petits casse-tête nous remuent gentiment les méninges, et nous procurent surtout le sentiment délicieux de faire partie, un peu plus que d'habitude, de l'histoire qui se déroule sous nos yeux.

Passés multiples

Car c'est bien du côté des intrigues qu'il faut aller chercher tout l'intérêt d'Another Code R. Trois histoires se jouent lentement et s'entrecroisent au fil des rencontres d'Ashley. Trois récits de disparitions, racontés par tous ces gosses attachants, avec justesse et pudeur. Il y a Ashley, bien sûr, qui tente de percer les mystères qui entourent toujours la mort de sa mère. Elle est rapidement rejointe par le jeune Matt, à la recherche de sa famille disparue ; et croise à plusieurs reprises Elizabeth, qui cache derrière ses colères une immense solitude. Si les adultes ont leur rôle à jouer dans ces drames, ils y font souvent office de menace ou d'obstacle. Et Ashley, plus vraiment en culotte courte, mais pas tout à fait une grande personne, navigue entre ces deux mondes. À la recherche de ses origines, tout en rêvant de musique, elle progresse dans des paysages colorés qui apparaissent à l'écran comme dans un pop-up. Autour d'elle défilent des décors frais et jamais effrayants, comme tirés d'un livre pour enfant.

Tout un poème !

L'ambiance presque mélancolique qu'on avait découverte dans Another Code sur DS entoure toujours une Ashley désespérément muette. Les interminables dialogues qui se déroulent à l'écran, tout juste ponctués de quelques sons censés les dramatiser, rebuteront plus d'un joueur aguerri. Pourtant si on dépasse ces premières heures de jeu ennuyeuses et que l'on se laisse entraîner par une chaude journée d'août dans les méandres de la mémoire, on découvre peu à peu une qualité contemplative, presque poétique, à Another Code R. C'est là, entre deux explorations de zones désespérément vides, que se glisse l'imaginaire japonais, ces détails discrets, ces histoires dans l'histoire. Le petit fantôme qui a perdu sa poupée, les pétales de cerisier qui transforment un kaléidoscope en trésor... On découvre la recette des onigiris appliquée au hamburger, et même les origamis renferment des indices précieux.

Il y a dans Another Code R, dans ses dessins, dans ses personnages, dans son récit plus subtil qu'il n'y paraît, et dans ses énigmes un peu paresseuses, un charme qui ne laisse pas indifférent, à défaut d'envoûter de bout en bout le joueur qui saura faire preuve d'abnégation pour passer outre une première partie fastidieuse.