La vie est quand même bien faite. Ce petit frisson, ce filet d'émotions qui met les poils au garde-à-vous, les fondus de vélo l'éprouvent chaque été à quelques jours du départ de la Grande Boucle. La raison de ce trouble suspect ? La Pro Cycling Manager-ïte aiguë, du nom de cette simulation ultra-réaliste permettant de vivre l'expérience du Tour de France par procuration et sans bouger les fesses de leur selle. Le beurre et l'argent du beurre, me direz-vous ? Sauf que question oseille, les purs aficionados -ceux qui achètent l'opus chaque année par passion ou par réflexe- ne s'y retrouvent plus car la licence leur donne une nette impression de tourner en rond, ou dans le sens contraire des aiguilles d'une montre. Une mise à jour de 40 balles qui passe encore moins bien qu'un col hors-catégorie.

L'attentisme d'un Quintana

Le changement d'éditeur -Bigben à la place de Focus Home Interactive- laissait espérer un changement de politique, même si Cyanide gardait les mains haut sur le guidon. Beaucoup de points méritaient en effet une remise à niveau comme l'intelligence artificielle, à la limite de la fringale, le moteur de jeu, inspiré des années Hinault, alors que d'autres secteurs avaient besoin d'une refonte totale comme le système d'objectif ou la planification des courses en fonction des pics de forme. Autant se l'avouer de suite, façon Lance Armstrong face à Oprah Winfrey, le studio a misé sur la continuité avec une formule plaisante mais éprouvée. On a ainsi droit à des ajustements mais à aucun bouleversement majeur. Pas besoin de grosse préparation physique, tous les passionnés devraient vite reprendre leurs marques et apprécier la base de données XXL, les "rookies" découvrant quant à eux un jeu complexe, fastidieux mais gratifiant au possible.

Se plonger dans un PCM, c'est assimiler de nombreux mécanismes qui restent assez similaires d'une année sur l'autre. Il faudra ainsi marquer l'histoire de ce sport en enchaînant les succès dans deux grands modes de jeu dont le fameux "Carrière" qui consiste à jouer les apprentis directeurs sportifs et à gérer son équipe de A à Z : le budget, les contrats et les sponsors, le calendrier, les entraînements. Un travail de longue haleine qui trouve toute sa mesure dans le fait de concrétiser tous ces efforts sur la route avec une stratégie de course aboutie.

Premier au jeu des bonifications

Mais c'est le mode "Pro Cyclist" qui a été principalement retouché dans cette édition 2019. Notamment son interface beaucoup plus moderne, épurée et donc lisible avec des tutoriels pertinents pour les débutants. Les autres seront en rendez-vous connu, genre Tourmalet, escamoté pour la énième fois sur ce Tour 2019, puisque objectifs, consignes et interactions avec vos coéquipiers restent dans la même tonalité que l'épisode précédent. Seulement, au moment de choisir son jeune coureur (19 ans), amené à briller dans le peloton, on peut désormais définir son profil grâce à un arbre de compétences à quatre branches : performance (forme, fatigue et enchaînement des compétitions), personnalité (charisme au sein du peloton), découverte (sens de l'observation et de la course) et course (nouvelles aptitudes techniques). Chaque objectif atteint, chaque niveau passé permet d'augmenter ses statistiques et d'obtenir un point de compétence, comme dans un jeu de rôle à l'ancienne. Des propriétés qui ont une incidence encore trop mineure pour pouvoir être appréciées, notamment la sociabilité de notre avatar et son influence sur les décisions managériales au sein de l'équipe.

Le système de transfert a également été repensé puisqu'il est possible d'effectuer des appels du pied à d'autres coureurs/équipes dès le mois d'avril et non plus en août comme avant. Ces prises de contact passent par des points d'intérêts qui sont donnés chaque mois et que vous pouvez ajouter à une armada/coureur qui vous intéresse, histoire de prendre la température, avant de faire votre choix au début du mercato. Des petits plus qui ne bousculeront pas votre quotidien mais qui s'apprécient sur la longueur, comme les nouveaux détails esthétiques visibles pendant l'épreuve (forme des autres coureurs, profil des étapes, pourcentage de la pente).

Mais, de manière générale, Cyanide a bien du mal à retranscrire tous les aléas du cyclisme, et c'est bien normal tant cette discipline demeure beaucoup plus complexe stratégiquement parlant que ce que certains peuvent penser. On remarque néanmoins un peloton beaucoup plus agressif que les éditions précédentes, des cadors difficiles à décrocher dans les grands cols, des favoris qui ne connaissent jamais le fameux "jour sans" ou des raids solitaires qui ne se transforment pas tous en exploit. Ce PCM 2019 est beaucoup moins pollué par les bugs d'affichage (sauf pour le mode multijoueur en ligne) mais mériterait un grand coup de gueule dans les oreillettes pour éviter de se reposer sur ses acquis et viser un autre maillot la saison prochaine.