Car oui, même si je me suis volontairement farci jusqu'aux pires épisodes de Voyager ou Enterprise avec les aliens nazis (le point Godwin du scénariste SF qui n'a plus d'idée), j'ai toujours eu du mal avec l'humanité bien proprette de Gene Roddenberry. Mais cela n'enlève rien au fait que Star Trek était une série extrêmement novatrice, où l'intérêt était d'ailleurs bien plus souvent dans la philosophie que dans l'action. Ce qui ne semble pas caractériser notre jeu vidéo d'aujourd'hui.

Dumb me down, Scotty

Situé dans l'univers du reboot cinématographique actuel de JJ Abrams (au scénario plutôt bas du front, trouvé-je), Star Trek, le jeu vidéo se situe chronologiquement juste avant le film qui va bientôt sortir sur nos écrans. Les développeurs étant bien décidés à exploiter le grand spectacle du renouveau de la licence, on se retrouve donc face à l'équipage de l'Enterprise entièrement modélisé sur et joué par les acteurs du film, dans un univers au look très Mass Effect où les lens flares et les explosions vont évidemment fuser. Tant que ça ne bouge pas, tout ceci est fort joli, mais hélas on déchante bien vite dès que l'on prend les commandes.

Le jeu nous propose de jouer le rôle du capitaine Kirk ou de son second Spock, dans un... TPS cover-based coopératif ?! (oui, moi aussi ça m'a fait bizarre). Les deux lurons seront donc inséparables au fil de la douzaine d'heures de jeu, le deuxième étant joué par l'IA si vous ne trouvez pas de volontaire pour vous accompagner à la castagne. Après avoir choisi le Vulcain (pour tester sa célèbre prise incapacitante), les premières ho erreurs de la réalisation me sont tombées dessus comme un Ferengi sur un sac d'or, quand j'ai vu Kirk se mettre à courir en rond sur la passerelle pour aller vers le mauvais turbolift, et les animations bien souvent moches et pleines de clipping.

Après une première mission de sauvetage / tutoriel, où l'on aura déjà bien eu l'occasion de hurler contre ce foutu bouton contextuel "couverture" qui fonctionne au petit bonheur, et la bêtise de l'IA de son coéquipier, qui, incapable de se planquer convenablement derrière vous, se fait cramer régulièrement dans une séquence façon Sunshine, le gros de l' "épisode" commence (Sautez le reste de ce paragraphe si vous ne voulez pas vous faire spoiler le scénario débordant d'originalité de ce ST). Disons qu'il y est question d'un artefact puissant pouvant mettre en danger la galaxie (et qui se fait dérober), d'une jolie Vulcaine (qui se fait enlever), et d'une race extraterrestre reptilienne (très méchante), les Gorns. Oui, oui, ceux-la même, à part que maintenant ils ressemblent plus à l'ennemi générique de n'importe quel jeu de ces dix dernières années. Sauver la fille, détruire l'artefact, c'est frais et innovant, chapeau.

Press E to Spock

Le problème de Star Trek est que ce manque d'originalité ne touche pas seulement le scénario, mais tous les aspects du jeu. Comme si les développeurs avaient décidé de reprendre toutes les mécaniques à la mode des grosses licences, d'en faire un pot-pourri et de passer le tout sous une couche de peinture jaune/rouge/bleu des uniformes de la Fédération. On aura donc le droit à du shoot bien sur, de l'infiltration, du hacking avec des mini-jeux qui lassent très vite (trois différents au total, dont un Snake, bienvenue dans le futur), quelques scènes de vol en wingsuit ou scooter de l'espace à éviter des obstacles, et une unique scène de combat spatial bien dispensable, où on ne contrôle en gros que les boucliers et une tourelle. Alors certes, il y a du rythme, les séquences s'enchainent et sont variées, mais malheureusement jamais la réalisation approximative et la jouabilité ne permettent de vraiment en profiter.

La plupart des actions s'effectuent via le tricordeur, véritable couteau-suisse qui permet d'afficher les objectifs, de scanner des objets (ce qui donne de l'XP et remplit un codex), localiser les ennemis, hacker portes et tourelles, etc. Avec l'XP, on pourra débloquer des upgrades pour le tricordeur et les armes, portée de l'un, cadence de tir... Le problème c'est que le tricordeur est un peu magique (et idiot), il voit les choses au travers des obstacles et permet d'interagir avec des objets lointains, mais pas d'agir au travers d'un obstacle, ce qui ruine le propos et une partie de la furtivité ! Mais de toute façon, l'IA des ennemis est tellement aux fraises, qu'on abandonne vite l'infiltration pour foncer dans le tas, histoire d'en finir plus vite.

Et le coopératif me direz-vous ? Eh bien, à part deux ou trois moments où les deux personnages doivent réellement exécuter chacun une action distincte en même temps, il se résume surtout à soigner l'autre, et à "appuyer plusieurs fois sur le bouton en même temps pour forcer l'ouverture de la porte". Je dois probablement rater quelque chose, à n'avoir jamais compris la satisfaction du button mashing pour une action obligatoire qu'on ne peut rater, mais ça doit être mon esprit chafouin. Autre déception, le coop se fera obligatoirement sur toute la durée d'un niveau, impossible de rejoindre ou de quitter en cours de partie.

Au final, la seule chose qui motive à persévérer dans Star Trek c'est l'interprétation des acteurs (en VO, j'avoue n'avoir pas osé la VF), Zachary Quinto, Chris Pine et les autres fournissant une prestation de qualité. Même si l'écriture ne vole pas forcément haut et qu'on finit par se lasser, on sourit aux répliques pince-sans-rire de Spock, aux vantardises de Kirk, McCoy est trouillard et râleur à souhait, bref l'esprit reste fidèle. Plusieurs références à la série (la bataille de l'épisode "Arena", des Tribbles cachés...) sont même là pour faire plaisir aux fans. Mais est-ce vraiment suffisant pour mettre la main au portefeuille ?

Testé sur PC à partir d'une version commerciale Steam, configuration : core i7 2600, AMD HD 7970, 12Go de RAM. Il faut noter que le jeu a osé ramer sauvagement à plusieurs reprises (en 2560x1440 certes, mais il n'y avait pas vraiment de quoi !)