À lire aussi : Vivendi passe à 24% du capital d'Ubisoft


La version britannique de Kotaku s'est récemment entretenue avec Michel Ancel, le créateur de jeux comme Rayman et Beyond Good & Evil. Lorsque le sujet de la potentielle prise de contrôle d'Ubisoft par Vivendi a été évoquée, le célèbre game designer a expliqué que cette dernière pourrait peser sur le moral des développeurs de l'éditeur français et donc gêner leur processus créatif.

C'est pourquoi il apparaît essentiel pour eux de faire comme si de rien n'était :

Nous essayons de continuer (de travailler) de manière normale. Nous essayons de rester concentrés sur notre boulot et de ne pas trop y penser car sinon... vous n'agissez plus de manière naturelle. Vous ne pouvez pas vivre sous la menace.

Pour Michel Ancel, Vivendi courrait le risque de briser un équilibre à la fois vieux de plusieurs dizaines d'années et fragile s'il venait à prendre le contrôle d'Ubisoft. Ce qui aurait forcément un impact sur la production de l'éditeur :

Ce qui fait d'une société ce qu'elle est, est quelque chose de très fragile. Ce quelque chose est composé des personnes qui travaillent ensemble depuis longtemps. C'est toujours la même chose. Si vous regardez King ou Supercell, il s'agit d'un groupe de personnes qui ont fait quelque chose de très fort à un moment donné.

La plupart du temps, il n'est pas question d'une seule personne. Une équipe fonctionne grâce à de nombreuses personnes. Si vous modifiez l'équipe, ce système fragile pourrait casser. C'est un risque et il n'y a aujourd'hui aucune raison de modifier ce système, sauf si les gens veulent gagner plus d'argent. Mais Ubisoft est bon dans ce qu'il fait.

À propos d'argent, le créateur des Lapins Crétins, les dirigeants d'Ubisoft comme Yves Guillemot (PDG) et Serge Hascoët ("directeur créatif") ne prennent pas de décisions motivées par l'argent.

Ce qui, selon lui, permet le développement de titres commercialement risqués, comme Beyond Good & Evil 2, auxquels d'autres sociétés n'auraient certainement pas donné le feu vert :

Lorsqu'ils se réveillent le matin, ils n'ont pas envie de gagner de l'argent. Ils ont assez d'argent pour dix vies s'ils décidaient d'arrêter (de travailler). Il n'est désormais plus question d'argent ou de pouvoir. Quelle est la raison de vivre de cette société ? Est-ce de battre ses concurrents ? Non, Ubisoft est déjà dans le top trois.

Sa raison de vivre est d'avoir la possibilité de créer des choses qui n'ont jamais été faites auparavant. Guillemot et Hascoët sont ceux qui veulent que cela se fasse. Ils demandent aux créatifs : "vous voulez le faire ? Nous pouvons le faire."

Si les déclarations de Michel Ancel au sujet de la direction actuelle d'Ubisoft peuvent paraître angéliques, il faut garder à l'esprit que s'il a été autorisé à s'exprimer sur le sujet dans les médias, c'est parce qu'il sert de relais à cette même direction.

Cela étant dit, il paraît également évident qu'un changement de direction chez Ubisoft aurait un impact sur la manière de fonctionner des équipes ainsi que sur le processus de création et de validation des jeux.