Les connaisseurs auront devinés à mon pseudo que Chrono Cross est un jeu particulièrement cher à mon coeur. J'ai eu la chance de pouvoir m'essayer à quasiment tous les grands RPG de la Playstation, mais aucun ne m'aura laissé pareille impression. Pas mal pour un jeu dont le héros s'appelle Serge !

Le plus beau RPG de l'histoire

Doté de graphismes enchanteurs et de cinématiques encore aujourd'hui magnifiques (mais jamais invasives, suivez mon regard...), Chrono Cross séduit aussi par son
esthétisme. Le(s) paradisiaque(s) archipel(s) d'El Nido regorge(nt) de
lieux plus sublimes les uns que les autres, îles, forêts, village de
pêcheurs, à l'ambiance particulière, souvent loin de celles dont on à
l'habitude avec ce genre de jeux, et pour la plupart, mondes parallèles obligent, en deux versions subtilement différentes.
Et le fait que le jeu se déroule sur une petite région, et pas à travers le monde entier comme souvent dans les RPG, lui donne une unité visuelle et donc une identité très forte (et même si certains décors tranchent avec le reste, comme Chronopolis ou le Vortex, plus beau décor de jeu jamais crée, ils ne détonnent pas). Identité encore renforcée par des musiques absolument
magnifiques, très oniriques, qui cadrent parfaitement avec le ton
général du jeu. Tout s'emboîte, chaque élément renforce les autres, au
niveau de la direction artistique, on touche à la perfection.

La suite la plus intelligente de tous les temps

On commence au coeur de l'action, en infiltrant une tour en compagnie de
la charmant bien que malpolie Kid. Et une fois arrivé en haut... quoi ?
Mais comment ? Pourquoi ? On ne le saura que bien des heures de jeu plus tard. Et les révélations et autres rebondissements ne font que
commencer ; le plus célèbre étant la découverte de votre propre tombe
quasiment dès le début du jeu. Contrairement à d'autres twists plus ou
moins "forcés" ("et oui en fait on a tous grandi ensemble, élevés par la méchante, c'est juste ballot qu'on soit amnésiques"), ici tout fait
sens, tout est logique (jusqu'à la présence des points de sauvegarde
fait partie du scénario). Mais attention, il faut suivre ! Car les
implications de l'histoire sont très complexes, incluant à la fois voyages dans le temps et dimensions parallèles sans que cela vire au grand
n'importe quoi, un véritable tour de force. Et le scénario se fait
encore plus subtil dans la façon dont il lie le jeu à son prédecesseur
Chrono Trigger ; pas évidente au début, malgré de très nombreux clins
d'oeils et indices pour le joueur (très) attentif, ce n'est qu'à la fin
que l'on comprend véritablement l'ampleur de la filiation entre les deux jeux, très particulière mais en totale logique avec l'esprit de la
série. Bref, on se retrouve face à un scénario complexe, original, et à
l'ambiance assez unique.

Les persos les plus classes du monde

Toute cette histoire est habité par une galerie de personnages très variés, au design à tomber,
sans pourtant qu'aucun ne détonne. Et beaucoup sont jouables ! Que ce
soit au niveau du design, du caractère ou des capacités, il y en a
véritablement pour tous les goûts, du plus sérieux au plus loufoque (clown-squelette, fleur, catcheur mexicain...).
L'existence de deux mondes parallèles nous fait rencontrer le plus
souvent deux versions différentes d'un même personnage, ce qui est
parfaitement exploité ; c'est toujours un plaisir de rencontrer
"l'autre", et de constater le chemin qu'il a pris.Là encore, le fait que le jeu ne se passe que sur un petit archipel est un plus : beaucoup des personnages se connaissent, ont des relations plus ou moins difficiles. On a moins l'impression que tout tourne autour du joueur, que le monde
n'est là que pour le servir ; El Nido a une existence propre.

Le gameplay le plus intéressant de l'univers

Chrono Cross contourne, presque l'air de rien, la plupart des clichés agaçants du RPG jap. Les ennemis sont visibles sur la carte, pas d'incessants
combats aléatoires. Le système d'expérience rend de toute façon le
levelling plus ou moins inutile, car si l'on gagne quelques bonus après
les combats, la véritable montée en expérience se fait par paliers, le
plus souvent après avoir vaincu un boss. Ce système permet non seulement de garder le challenge intact (on ne peut pas buter les boss en deux
coups après avoir passer des heures à casser du troufion en forêt), mais aussi de changer régulièrement d'équipe, aucun personnage ne se
retrouvant vraiment à la traîne (et heureusement, s'il fallait les
entraîner tous...). Chacun de nos héros possède un élément inné, trois
attaques spéciales et une grille élémentaire particulière, à remplir à
son gré ; la magie se décompose en éléments et en niveaux, déblocables
au combat grâce aux trois puissances de coups ; les invocations d'une
couleur nécessite de donner au terrain cette couleur grâce aux magies
associés ; sans parler des techniques secrètes nécessitant plusieurs
personnages... Vous l'aurez compris, le système de combat de Chrono
Cross est complexe, profond. Bien qu'étant au tour par tour, le temps
d'action et de charge y a une importance cruciale. Face aux boss les
plus coriaces, on réalise de vraies parties d'échec, où chaque action a
des conséquences plusieurs tours derrière. Et le système de points pour
utiliser la magie nous pousse à utiliser autant cette dernière que les
attaques classiques, alors que dans beaucoup de RPG on finit par
délaisser l'un ou l'autre aspect. Autre écueil contourné, le syndrôme de la planète comptant 8 villes et 120 habitants, le jeu se déroulant sur
un petit archipel et son double. Mais si on ne peut au début passer de
l'un à l'autre à son gré, c'est assez vite le cas, et le joueur est
libre de se balader, sans cependant être jamais perdu. Les quêtes
annexes abondent, notamment pour recruter les personnages (la grande
majorité sont facultatifs), et sont parfois de longue haleine. Ajoutez à cela plusieurs fins, un New Game + excellent (avec notamment la
possibilité, toute bête, de jouer sans Serge dans son équipe),
nécessaire pour pouvoir recruter tous les personnages disponibles, et
vous obtiendrez un jeu ayant toutes les qualités du RPG jap sans en
avoir la plupart des défauts.

Incroyablement cohérent et original sur le
plan artistique, profond, le petit monde de Chrono Cross, injustement dans
l'ombre de son prédécesseur, mérite d'être redécouvert. Moins connu que beaucoup de ses contemporains, il fait pourtant incontestablement partie des très grands du RPG japonais, un des derniers géants de ce genre aujourd'hui à l'agonie. Ayant bien mieux vieillis
techniquement que ses prédécesseurs (tels que Grandia ou Xenogears par exemple), une sortie PSN s'impose. Et, si succès il y avait, pourquoi ne pas rêver à une suite ?