L'acte d'écrire peut ouvrir tant de
portes, comme si un stylo n'était pas vraiment une plume mais une
étrange variété de passe-partout.
Ces
quelques mots, écrits par Stephen King dans son roman La
ligne verte
,
pourraient à eux seuls définir le dernier jeu des créateurs des deux
premiers Max Payne : le très attendu Alan Wake.

Lors de son annonce durant l'E3 de
2005, tout laissait penser que le titre, graphiquement sublime,
proposerait au joueur un monde totalement ouvert. Cinq ans plus tard,
la copie livrée par Remedy diffère légèrement, pour le meilleur
ou pour le pire?


Bienvenue à Bright Falls...

Commençons par le commencement. Alan
Wake, écrivain à succès, décide avec sa femme de prendre du recul
et de changer son train de vie en emménageant dans la petite ville
de Bright Falls. Située au bord d'un immense lac et entourée par
une imposante forêt, cette sympatique bourgade sera le théâtre des sombres
événements que les scénaristes du jeu nous ont réservé. Très
rapidement, Alan sera séparé de sa femme, et se réveillera une
semaine plus tard au volant de sa voiture accidentée, sans aucun
souvenir de la semaine qui vient de s'écouler ni aucune idée de
l'endroit où se trouve son épouse dont la recherche constituera le
fil conducteur du titre.

Lors de son investigation pour
retrouver sa moitié, le héros va très vite s'apercevoir que la
paisible ville de Bright Falls ne l'est pas tant que ça. En effet,
une fois la nuit tombée, le joueur sera témoin de sombres
phénomènes surnaturels qui se dresseront contre lui dans sa quête
de vérité.

Vous l'aurez compris, Alan Wake mise
énormément sur le scénario qu'il met en place, et autant dire que
le résultat est franchement convaincant et prenant. Rarement dans un
jeu vidéo un scénario n'aura été si réussi, avec son lot de
révélations surprenantes et de personnages dont la personnalité
s'approfondit au fur et à mesure de la progression du joueur.

 

Comme une peur du noir?

Découpé en plusieurs épisodes (qui
commencent à chaque fois par un résumé du précédent), Alan Wake
perd son monde totalement ouvert qu'il proposait à ses débuts en 2005, pour
mieux guider le joueur dans sa narration. Bien souvent, les épisodes
suivent le même cheminement : une introduction, plutôt axée aventure
et se déroulant de jour, puis une phase de nuit, orientée action où
le joueur devra braver les dangers qui se dresseront face à lui. Enfin, à chaque fin d'épisode, le scénario s'emballe, afin de
terminer sur une situation bien évidement pensée pour que le joueur
ne lâche pas sa manette.

Mais revenons sur les différences
entre les phase en journée et celles de nuit. Dans le premier cas,
il s'agira bien souvent d'enquêter en ville, en discutant avec les
habitants et en explorant les environs. La première chose qui frappe
le joueur durant la journée sera sans doute les graphismes assez
quelconques du jeu. En effet, les personnages sont modélisés de
manière assez grossière (surtout au niveau des animations faciales)
et certaines textures ne sont clairement pas à la hauteur d'une
production de cette envergure. Néanmoins il faudra attendre la fin
de la journée pour pouvoir apprécier à sa juste valeur la qualité
des graphismes du jeu,où l'expression « c'est le jour et la
nuit » prend tout son sens

 

Ballades nocturnes

Si, de jour, le jeu peut se montrer
assez terne graphiquement, les séquences de nuits ont pour leur part
une toute autre saveur. Dans l'obscurité, les textures grossières
le sont beaucoup moins, et la nature se revêt d'un aspect vivant 
vraiment saisissant. Les arbres se meuvent au grès du vent, des nappes de
brumes rampent dans les allées assombries des bois, les lumières,
impressionnantes de réalismes, éblouissent et rassurent. L'ambiance
mise en place la nuit est tout bonnement stupéfiante et extraordinairement convaincante.
Par ailleurs, l'essentiel du jeu se déroule la nuit, où le joueur
devra arpenter des environnements hostiles.

Ces « hostiles » se
présentent sous diverses formes : êtres possédés entourés de
brumes surnaturelles, oiseaux sortis tout droit des ténèbres, la
nature elle même semble se dresser contre le joueur, en écrasant
des arbres sur son passage ou encore une bien sombre tornade
projetant dur l'écrivain tout ce qui passe sur son passage...

Pour se défendre face à la pénombre,
Alan devra compter sur un allié de taille : la lumière. Armé d'une
lampe torche, il pourra ainsi affaiblir les ennemis en la pointant
vers eux, puis devra les achever avec une arme (pistolet, fusil à
pompes). D'autres équipements, plus puissant comme des fusées de
détresses, ne seront pas de trop dans la progression du joueur.

Car si Alan excelle dans l'écriture,
il n'en demeure pas moins un piètre sportif qui s'essouffle très
rapidement et reste très vulnérables face aux attaques de ses
ennemis

 

Survival Horror? jeu d'aventure? Alan
Wake, c'est quoi?

En soi, Alan Wake est un titre assez
répétitif, linéaire et un brin manichéen. Les phases d'actions
manquent clairement de variétés. La progression se révèle être
plutôt linéaire, malgré des environnements très vastes (reliquat
du désir initial de Remedy à crée un monde totalement ouvert). On
pourrait même constater une certaine rigidité du héros. Quand aux
phases en voitures, bien que maniables, elles sont sans saveur.

Mais alors pourquoi Alan Wake est-il un
des meilleurs jeux de cette année, voir de cette génération de
console? Pour trouver la réponse, il faudra chercher du coté du
scénario, de l'ambiance et de la mise en scène du jeu.

Tous ces éléments se retrouvent
sublimés avec brio par les créateurs du titre. Le scénario se
développe avec génie du début à la fin. La nuit, le joueur se
retrouve plongé dans un univers comme rarement le jeu vidéo n'en
aura proposé. Quand à la bande sonore, magistrale, elle développe
des thèmes collant à la perfection à l'action et l'univers imaginé
par Remedy. Et que dire des doublages français, impressionnants de
crédibilité, même si par moment la synchronisation labiale aurait
gagné à être d'avantage travaillée.

A mi-chemin entre jeu d'aventure et
survival Horror, il est clairement impossible de classer Alan Wake
dans un genre précis. Son découpage en épisode n'est pas sans
rappeler le très moyen Alone in the dark tandis que le traitement de
la narration et la mise en scène se rapprochera d'avantage de celle
mise en place dans le tout aussi inclassable Heavy Rain.

 

De l'ombre à la lumière

Alan Wake est donc , osons le dire, une
œuvre qui se place comme un hommage à la littérature de Stephen
King dont les références se multiplient tout au long de l'histoire.
Comme toute œuvre il a son lot d'imperfections, mais tout au long de
la dizaine d'heures du jeu, jamais le joueur ne sera tenté de lâcher
la manette tant l'envie de découvrir le dénouement est grande.
Décrivant d'une manière exceptionnelle l'éternelle bataille du
bien contre le mal, l'infinie opposition entre ombre et lumière, il
sera difficile de ne pas succomber à l'irrésistible folie que vous
proposera le jeu.