"Rockstar don't make bad games"


Dixit Oskari Hakkinen, responsable du développement des licences chez Remedy (les créateurs de Max Payne). En effet, chez Remedy, ils n'ont pas été sans donner leur avis en collabrant avec Rockstar sur le troisième opus. Même si pour autant, il ne s'agit pas de développement, juste d'une relation professionnelle et surtout amicale entre les deux groupes de développleurs.

 

C'est ainsi que Rockstar ont pris les rênes du développement de ce troisième opus de la série, là où il n'étaient peu ou prou qu'éditeurs sur les précédents volets. Le jeu a été annoncé en 2009, et dès les premières images de Max -chauve- Payne, des hordes de joueurs attachés à la franchise commencèrent à faire part de leur inquiétude quant à ce qu'ils s'imaginaient.

"Eh mais c'est quoi ça?! Un chauve en débardeur qui canarde en plein soleil accablant, au beau milieu des favelas?! Hein?! Eh mais c'est quoi ce délire, les gars?! Il est où Max Payne en cuir noir et qui canarde de nuit?! "

"Nan mais z'inquiétez pas, jsuis sûr ils nous font une sorte de coup à la Kojima avec les trailers de MGS2, en fait ce mec n'est pas celui qu'on va incarner pendant les 4/5e du jeu, c'est juste un leurre".


Bon. Mettons vite les choses au clair. Max Payne est plus que jamais lui même dans cet opus. Il est dans la parfaite continuité de ce qui lui est arrivé durant les deux premiers opus. Un personnage blessé, ayant traversé d'innombrables évènements traumatisants. Dans le genre pas de chance à la sauce tragique, il est copieusement servi, le pauvre. Alors après des dizaines d'années à New York, il se retrouve au Brésil à assurer la protection de gens riches aimant danser sur fond de musique techno. Comment en est-il arrivé là? Ce serait spoiler.

 

Et sinon, la structure narrative?

Bah en fait, elle est très différente des deux premiers volets, tout en étant plus réussie dans son pacing. Soleil ou pas soleil, l'histoire n'aura jamais été aussi noire, et Max garde toute sa cohérence, puisque la continuité mentale entre les opus est de mise. En ce qui concerne sa "nouvelle coupe", ceci est entièrement justifé par le scénario. Amplement justifié. Max ne commence pas le jeu chauve.

Par ailleurs la structure narrative est anachronique, puisqu'elle insère des flashbacks ça et là durant l'aventure. Flashbakcs nous permettant de comprendre certains points du présent. D'ailleurs, les transitions entre les phases au présent et les flashbacks sont d'une fluidité et d'une classe extrême. Seamless, comme dirait l'autre. Sur ce point là, Max Payne 3 est le premier jeu à enchainer phases in game et cinématiques avec des transitions tellement fines et invisibles que le tout impose le respect. MGS4 l'avait timidement essayé sur certaines cinématiques, les Uncharted le font parfois pour les "petites" cinématiques (les autres étant des vidéos préenregistrées), mais Max Payne 3, comme aucun autre, se permet de passer du in game aux cinématiques sans aucune coupure. Personnellement j'ai toujours attendu un jeu comme ça, et Max Payne 3 l'a fait.

En ce qui concerne la qualité de l'histoire, elle est du même niveau de qualité que les précédents opus. Mais en plus noire. Et avec des personnages plus travailés. Logique, il suffit de comparer le nombre de lignes de textes pour MP3 et ceux des autres opus pour s'en rendre compte.

Une chose à noter, c'est que l'histoire est narrée avec un rythme poussant constamment vers l'avant. Un crescendo constant, servi par des scènes très dynamiques, notamment dans la transition cut-scene/gameplay. L'OST du jeu n'est pas en reste, et contribue éminemment à cette poussée vers l'avant. C'est d'ailleurs une merveille pour les oreilles. Une totale réussite sur le plan sonore, tout comme les doublages. Max retrouve d'ailleurs sa voix, avec le bon vieux James McCaffrey.

 

D'accord. Et le gameplay?

Ben...Classique dans ses bases. Dans les fondamentaux, on retrouve exactement le gameplay de Max Payne 2. Rappel : Max Payne est le jeu qui inventa le Bullet Time. Son gameplay était simple. On peut tirer. Rouler (4 directions) pour esquiver. On shootdogde (saute au ralenti dans la direction souhaité, "comme dans les films" de John Woo) à condition sa jauge de Bullet Time remplie. Dans Max Payne 2, c'est exactement pareil, sauf qu'on peut maintenant shootdodger à volonté, même avec la jauge vide. La seule différence entre shootdodger avec ou sans jauge remplie, c'est que dans le deuxième cas, le temps est moins ralenti.

Max Payne 3, c'est exactement le gameplay de Max Payne 2, mais avec la possibilité de se mettre à cover. Mais pas comme dans Uncharted ou Gears, où c'est la base du gameplay. Ici, pas question de camper. D'une part, car Max Payne, c'est du shoot & run et non du shoot & cover (sinon on n'a rien compris à Max Payne), et d'autre part car de toute façon la majorité des covers sont déstructibles, les ennemis balancent des grenades, ou viennent nous chercher à plusieurs en nous contournant pour nous prendre à revers. C'est donc un système de cover pour réfléchir, souffler, planifier, et repartir en run & shoot.

Une autre nouveauté à signaler, c'est le Last Man Standing. Si Max subit un tir fatal et qu'il lui reste au moins un antalgique, le jeu passe automatiquement au ralenti et légèrement centré sur l'ennemi ayant tiré ce coup fatal. Si l'on parvient à le tuer pendant ce court ralenti, Max se sert alors de l'antalgique et peut alors continuer. Attention à ne pas croire que cela rend les choses faciles. Car à ce moment, Max se retrouve à terre. Et le temps qu'il se relève....

 

Bon alors c'est quoi qui change vraiment de Max Payne 2 niveau gameplay?


L'inventaire. Fini l'inventaire magique. Le jeu se veut réaliste. Chaque arme ramassée reste dans la main de Max. Il n'a que deux rangements pour deux armes de poing. Il est impossible d'avoir plus de trois armes sur soi. Un choix réaliste, et qui ne gêne aucunément. D'autant plus que les animations en découlant imposent le respect. Etant donné qu'il lui est impossible de ranger un fusil (pas de poche magique à la Uncharted dans le dos), Max gardera toujours son fusil à la main, quitte à le tenir de la main gauche quand il utilise son arme de poing de la main droite. Et s'il veut utiliser ses deux armes de point en dual wield, il est alors obligé de lâcher le fusil par terre. Ce qui est marquant dans tout cela, c'est la gestion des animations avec ce système. Du jamais. Il suffit de voir Max recharger son arme de poing tout en tenant brièvement son fusil sous l'aisselle pour le comprendre.

Une chose montre que l'on est une génération au dessus. Les animations. Le soucis du détail de Rockstar. Et Euphoria. Ces trois choses combinées conduisent à un Max plus vrai que nature, aux animations d'une classe jamais vue. Le jeu au ralenti est une pure merveille d'animations. Shootdodger dans n'importe quelle direction, et ce sont des animations d'une finesse déconcertante qui s'offre à vous. Personnellement les animations comptent beaucoup plus que les graphismes, puisque je considère que c'est la source de l'immersion, très loin devant l'aspect graphique.

Et dans ce jeu, tout cela sert le gameplay. Max est conscient de son environnement. Shootdodger vers un mur, et il se courbera à l'approche du mur pour éviter le choc. L'animation la plus classe à mon sens, est le shootdoge vers l'arrière en dual wield, tout en prenant un antalgique. Car oui, il est possible de prendre un antalgique en plein shootdodge, avec l'animation qui va avec. Ce détail rajoute une immersion non négligeable. Et des détails comme ça, le jeu en regorge. Comme Max qui transpire au fur et à mesure, les égratinures, etc.

Le must étant, vu que les cinématiques s'enchaînent sans coupure avec les phases in game, c'est que durant ces cinématiques, Max garde à la main les armes que l'on avait juste avant la cinématique.

Bref, des détails, il y en a à la pelle.

 

Une chose primordiale, le gameplay se prend bien en main, et heureusement. Même si un petit temps d'adaptation sera inévitable pour certains, notamment du fait de sa visée paraissant flottante au départ. Pas de panique, tout est paramétrable dans les options (sensibilité...etc). On prend un malin plaisir à enchaîner les shootdodge. On s'améliore. Il ne faut pas foncer bêtement dans le tas, sinon c'est la mort assurée. D'autant que le jeu est beaucoup plus difficile que les jeux actuels. Finalement, il garde un gameplay très oldschool, avec un habillage totalement contemporain...



C'est tout?


...et c'est aussi ça le problème. Max se fait certes vieux, mais il est des choses du gameplay qui entravent l'expérience de jeu. Des choses indignes d'un studio comme Rockstar.

Après un shootdodge, Max est allongé par terre. On peut alors soit continuer à tirer de cette position à 360° (avec les belles animations qui vont avec), soit se relever. Et c'est là le gros problème de ce jeu. Max met trop de temps à se relever. D'accord. Il se fait vieux, et cela sert de prétexte pour équiibrer la surpuissance du shootdodge (Max est invulnérable dans les air en shootdodge, jusqu'à ce qu'il retombe au sol, où il redevient vulnérable aux tirs), mais il y a une chose qui cloche. Si une cover se trouve devant Max alors que ce dernier est allongé, et que l'on veut aller à la cover directement....Il n'y a tout simplement pas l'animation pour ce faire.

Max va en effet d'abord se remettre debout, puis aller à la cover. Et l'énorme problème est ici. Si la cover n'est pas un mur, Max sera vulnérable, puisqu'il doit passer par le stade "debout", avant de repartir en cover. Totalement illogique. Après 4 ans de développement, ne pas voir ce problème est une faute grave de la part de Rockstar. Comme si le jeu n'était pas fini.

Un autre problème est lié au game design et au level design. Couloir. Couloir. Couloir. Mais vraiment trop. Tellement exagéré, que lorsque l'on passe une porte, celle-ci se referme...Et il est alors impossible de revenir en arrière. Et ceci sans aucune explication, puisque de toute façon ça n'a pas de sens. Ceci est valable pour quasi toutes les portes du jeu. C'est grave. Le hardware est limitant? Alors revoyez vos ambitions à la baisse! Le coup des portes fermées est très mal venu côté immersion. Même si pour que les gens ne remarquent pas cela, encore une fois, le jeu nous encourage constamment à aller de l'avant, que ce soit dans sa mise en scène ou dans son OST merveilleuse dans son rythme et ses mélodies.

Une dernière chose, encore liée à l'optimisation et au hardware, ce sont les temps de chargement déconcertants. Impossible de passer la (quasi) totalité des cinématiques. Un soit-disant message "loading" apparait. Les cinématiques durent parfois plus de 5mn, et le loading est toujours présent. C'est une blague? Quelle déception.

 

 

Rockstar n'a pas encore fait de mauvais jeu sur cette génération. Max Payne 3 reste fidèle à la série. C'est un jeu au gameplay old school et jouissif, mais dans un enrobage moderne, profitant de toute la physique dernier cris, des animations made in Rockstar couplées au moteur de comportement des corps Euphoria, le tout rythmé par une narration de qualité prenant parfois à contre pied, des musiques au rythme hypnotisant, et un Max au sommet de sa forme physique (sauf pour se relever!). Si côté gameplay on retrouve un jeu léché et joussif, il est décevant de constater l'impossibilité de passer la (quasi) totalité des cinématiques, ainsi que certaines fautes de gameplay (absence de certaines animations de transition vers une cover)  et de game design. Le jeu est certes d'une qualité largement au dessus de la moyenne sur certains points, mais on en attendait clairement plus de la part de Rokstar.