Si on arrive à relever le défi et que le circuit [régional] arrive à se créer, on aura une des meilleures scènes eSportives qui soient.

Boogie a commencé à caster début 2017.

Gameblog : Merci de répondre à nos questions. Tu as commencé le cast sur CS:GO. En quoi est-ce différent de commenter des parties de PUBG ?

Boogie : Dans CS:GO, il y a un temps pour préparer la partie, un temps pour acheter l'équipement... donc on sait à quoi s'attendre pendant un round. C'est plus facile de raconter une histoire quand les rounds respectent un timing précis. Mais dans PUBG, on a un bon nombre d'équipes et les actions peuvent se succéder très rapidement. En plus, les équipes finissent toutes réunies dans un cercle... et l'histoire est plus difficile à raconter. C'est un défi qu'il faut relever et cela demande beaucoup d'effort mental. Pour moi, après quatre rounds à commenter PUBG, mon cerveau se vide complètement ! Mais nous faisons ça depuis un moment maintenant et nous avons appris à appréhender cela, avec les observateurs.

Vous communiquez beaucoup avec les observateurs en compétition ?

Absolument ! Ils constituent un pilier massif de la scène. Ensemble, avec eux, on raconte une histoire et je pense que, maintenant, on y arrive bien. On a vraiment des observateurs géniaux sur la scène, que ce soit en Europe, en Amérique du Nord ou en Corée. On garde un contact proche et on utilise le talent de tous les observateurs pour mieux se comprendre et travailler ensemble sans problèmes.

Au PGI, l'observateur était grandement amélioré.

Les débuts de rounds sont très lents sur PUBG : les joueurs vont chercher leur équipement et il y a peu d'affrontements.Comment parviens-tu à divertir le public sur cette partie de rounds ?

Je comparerais une partie de PUBG à une mélodie délicate au début, qui monte crescendo et se conclut par son point d'orgue. Pour divertir le public en début de round, il y a une myriade de sujets qu'on peut couvrir : ça peut être les particularités d'une équipe sur leur stratégie, leur histoire ou leurs statistiques en loot... ou ça peut être aussi des sujets plus généraux, sur la partie ou la carte. S'il y a de l'actualité sur un joueur ou une équipe, on en parle, tout en commentant ce qu'il se passe dans la partie. Par exemple, quand la première zone apparaît, nous débattons des rotations et stratégies possibles, des positions les plus avantageuses et de quelles équipes bénéficient de la zone etc.

Dans d'autres compétitions, comme la Global Loot League, des moyens créatifs ont été trouvés : dès que la première zone apparaît, le troisième commentateur va inviter les spectateurs sur la « chaîne météo » où l'on dessine sur un écran tactile ce que montre la partie, pour indiquer les rotations possibles et les dangers qui existent en entrant dans la zone. C'est sûr que cela demande de la créativité de la part des commentateurs et une connaissance solide du jeu, c'est pourquoi dans chaque partie, il y aura au moins un talent qui s'y connaît très bien.

Pour le PGI, Boogie donnait les analyses hors-jeu.

Justement, pour le PGI, nous n'avons pas l'impression que les casters et analystes ont des binômes fixes. As-tu pu choisir avec qui commenter ? Comment les binômes se forment-ils ?

Pour ce qui est de l'Analyst desk du PGI, dont je fais partie, nous sommes toujours les 3 mêmes donc la question ne pose pas. Mais pour ce qui est de commenter les parties, j'aimerais beaucoup avoir un binôme régulier pour commenter, ce qui n'est pas encore le cas. En tournoi, ce sont les organisateurs qui déterminent les binômes car ces derniers sont sur la scène depuis tellement longtemps qu'en nous entendant juste une fois, ils sauront avec qui on ira bien. Me concernant, je n'ai pas d'idée de qui ça pourrait être, car pour l'instant, nous avons tous une bonne entente et ce qui est bien avec notre groupe, c'est que nous sommes tous très dynamiques et nous pouvons faire plusieurs choses, comme certaines fois le play-by-play et d'autres fois, les analyses. Cela donne quelque chose de très bien peu importe les binômes.

Que réponds-tu aux critiques sur le hasard lié au genre Battle Royale, qui serait injuste pour les équipes en compétition ?

À un niveau normal, il y a évidemment beaucoup de hasard qui joue. Même sur CS:GO, alors que le jeu est si bien structuré, il y a des éléments de hasard. Mais sur PUBG, les réductions de zone sont faites de telle sorte que le hasard est supprimé. Les équipes ont toutes le temps d'atterrir et d'obtenir leur équipement complet. Et même si des joueurs se font rattraper par la zone, ils ont le temps de courir jusqu'à la prochaine, du moment qu'ils ont des véhicules. Et en plus, il y a plusieurs rounds dans un seul tournoi pour décider du meilleur et filtrer les équipes. Donc oui, il y a du hasard, mais il est pris en main par les zones lentes, les tournois de qualifications et le nombre de parties en tournoi.

Pour toi, quel est le défi que doit relever PUBG dans l'immédiat ?

Pour moi, c'est le fait d'établir une scène eSportive. S'ils font exactement tout ce qu'ils ont prévu de faire, ça donnera une scène fantastique et un bon environnement pour les équipes, qui pourront en vivre. C'est aussi une nouvelle scène, ouverte aux nouveaux arrivants pour prouver leur valeur. Si on arrive à relever le défi et que le circuit arrive à se créer, on aura une des meilleures scènes eSportives qui soient. Enfin, pour moi c'est déjà la meilleure des scènes, mais disons que ce sera sans doute une des scènes les plus fortes !

PUBG fait de la stabilité du jeu et de la scène leur priorité.

J'ai le sentiment que la communauté de PUBG se rapproche d'une grande famille.

Parlons un peu de toi. Comment as-tu commencé à commenter des compétitions ?

Counter-Strike est le premier jeu où j'ai été commentateur... c'était peu de temps avant que je m'intéresse à PUBG. Mon premier tournoi était une compétition SKYLLA, une ligue mixte où coopèrent des joueuses féminines et des joueurs semi-professionnels. Je m'étais beaucoup amusé à le commenter. À l'époque, mon gagne-pain étaient les tournois féminins de CS:GO à travers l'Europe, et aussi quelques tournois d'Amérique du Nord et d'Amérique Latine.

Comment se sont passés tes débuts ?

En fait... j'ai un peu commencé par hasard. Je venais d'acheter un micro pour une amie soprano, qui avait une très belle voix et qui voulait enregistrer des chansons. Bref, finalement, j'avais fini par l'utiliser moi-même en jouant. Et pendant les parties, des gens venaient me demander ma chaîne Twitch car ils aimaient ma voix et pensaient directement que j'en avais une à cause de ma voix. Je n'arrêtais pas de répondre par la négative, mais à force, je me suis dit que je pouvais peut-être essayer quelque chose ! Alors je suis retourné sur ma vieille chaîne Twitch, que je n'utilisais pas, et j'ai cherché à faire ce que j'aimais regarder. À l'époque, je regardais beaucoup de compétitions de CS:GO donc... j'ai décidé de les commenter, et c'est comme ça que ça a commencé !

L'équipe Secret a remporté l'IEM Katowice en 2017.

Dirais-tu que la scène compétitive féminine sur CS:GO est différente que la scène mixte ?

La communauté est très différente. La féminine se rapproche d'une famille, les joueuses se lient d'amitié et on n'y trouve pas de rivalités. Et en termes de niveau, elles ont autant de valeur que les équipes masculines et j'aimerais beaucoup les voir dans des tournois mixtes pour qu'elles puissent montrer de quoi elles sont capables.

Comment t'es-tu retrouvé à commenter les compétitions de PUBG ?

J'ai commencé l'année dernière, en ayant rencontré le staff de la ligue Auzom, qui est une très bonne ligue. À ce moment-là, j'étais caster sur CS:GO, sans être si connu que ça... mais je jouais énormément à PUBG. Quand il a commencé à y avoir une scène eSportive, je me suis dis que ça pouvait devenir l'une des meilleures scènes au monde, alors j'ai commencé à commenter des tournois en ligne avec Auzom, puis des tournois physiques comme le PGI !

La communauté de PUBG est-elle différente de celle de CS:GO ?

J'ai le sentiment que la communauté de PUBG se rapproche d'une grande famille. C'est en partie dû au fait que le jeu n'encourage pas les rivalités directes, car ce ne sont pas deux équipes qui s'affrontent mais toute la map, donc plus d'une dizaine d'équipes. Cela aide beaucoup à rassembler la communauté. Il y a aussi le fait que les joueurs ne prennent pas encore la grosse tête car la scène est jeune : ils ne donnent pas l'impression de se dire qu'ils sont quelqu'un, mais qu'ils font partie d'une grande famille qu'ils adorent retrouver en tournoi.

Après CS:GO, PUBG t'a donc apporté plus d'opportunités en tant que commentateur ?

Dans le monde de PUBG, il y a effectivement beaucoup d'opportunités et maintenant, on peut se faire une vraie place dans l'eSport : ça a commencé avec le PGI, et ça va continuer avec les Pro Leagues. Nous allons avoir plein d'événements géniaux !

T'es-tu engagé dedans à temps plein ?

Plutôt qu'un travail à temps plein, j'appellerais ça du freelance. Mais maintenant, oui, je n'ai plus rien d'autre à côté ! En ce moment, je travaille sur un projet sur PUBG... dont malheureusement, je ne peux pas t'en parler. J'ai quitté mon travail il y a quelques mois. C'était étrange de partir parce qu'il y a beaucoup de facteurs incertains, alors que je dois payer mon logement... mais ça m'a aussi fait du bien de partir et pour l'instant, la décision que j'ai prise est la bonne !

Merci à Boogie de nous avoir accordés du temps. Vous pouvez suivre son actualité sur son compte Twitter !