Je ne sais pas si vous êtes des gens très procéduriers, moi je le suis beaucoup. Non attendez, ça veut dire des gens qui aiment faire des procès ça, non ? Au temps pour moi, je voulais juste dire que j'aime le procédural dans les jeux vidéo. Le procédural, c'est quand une partie du contenu du jeu est générée aléatoirement, selon des règles définies à l'avance. C'est l'enchaînement des salles de The Binding of Isaac, c'est la création du monde de Dwarf Fortress, c'est la composition des secteurs galactiques de FTL, etc. À chaque partie, le challenge est différent... Partiellement, car sinon ça serait le chaos. Mais cela n'empêche pas quelques clashs violents d'avoir lieu entre le gameplay et le joueur, comme celui narré en introduction de ce texte.

So much FUN

Mais de ces clashs souvent injustes, on peut toujours tirer un enseignement sur l'une des règles en question. Vous ne le saviez pas ? Vous le savez à présent. Ça ne vous aurait pas aidé dans cette circonstance précise ? Peut-être que c'est bon à savoir dans d'autres. C'est une façon d'aborder la difficulté qui intègre directement le tutoriel et le plaisir du jeu. Ce concept de « mourir fait partie du fun » n'est pas nouveau, mais on ne le trouve pas à tous les coins de rue. Bizarrement, c'est souvent dans les titres que je préfère... Je ne parle pas forcément de Dwarf Fortress qui est à peine un jeu, juste un bon exemple d'apprentissage par l'échec. Le tout étant de s'en rendre compte et de ne pas recommencer la même erreur. Mais cette difficulté n'est pas l'unique élément de l'alchimie : il faut aussi une grosse dose d'aléatoire. Du random. De l'imprévu.

Aléatoire partout, justice nulle part !

Le contenu procédural peut revêtir de nombreuses formes. Il est très connu dans Diablo et les autres Hack'n slash qui ont suivi. C'est le moteur qui gère le butin aléatoire, mais aussi les cartes du jeu, un point que Blizzard a un peu oublié pour Diablo III. Des cartes extérieures aléatoires auraient sûrement atténué la lassitude des joueurs. C'est un mécanisme très important pour les titres qui proposent une grande rejouabilité. D'ailleurs la création de l'univers de jeu est la cible principale d'un développement procédural dans de nombreux jeux, que ce soit dans Elite, Daggerfall, ou Minecraft. Parfois, le procédural s'incruste dans des aspects inhabituels, comme l'animation des personnages (dans Binary Domain ou Red Dead Redemption, notamment). Dans ce cas, les développeurs visent à renforcer le réalisme des interactions et l'immersion du joueur (avec des résultats très variables, il faut bien le dire : les bugs sont très visibles et souvent risibles).

Diminution de la zone de confort

Mais au-delà du décor, je préfère quand ces techniques sont appliquées à des choses plus proches du gameplay. Dans Left 4 Dead, c'est très subtilement que VALVe génère des vagues de zombies en accord avec différentes statistiques englobant la partie en cours. Et l'on sait que Left 4 Dead peut parfois sembler injuste non ? La force de FTL est autre part : il s'agit d'événements aléatoires avec de vrais pourcentages de chance de gagner des bonus ou au contraire de subir de gros problèmes. Une fois que l'on connaît un peu mieux ces possibilités, il faut se discipliner et se restreindre : ne risquer que ce que l'on peut se permette de perdre. Comme au poker. On repense aussi aux événements qui se déclenchaient lorsque l'on voyageait sur la carte d'un Fallout. Malheureusement, cette philosophie du gameplay demande un travail particulier, et parfois lourd, de la part des développeurs. Les différences sont subtiles entre procédural et aléatoire, comme me le répète sans cesse RaHaN, mais ces deux éléments ne sont pas du tout incompatibles. J'espère même les voir fusionner de plus en plus pour créer des ensembles cohérents. Les armes de Borderlands sont créées de manière procédurale, mais il existe des armes uniques qui font le vrai sel du système. Forcément, c'est plus long de concevoir une arme unique dans un jeu en 3D que d'intégrer des scènes en texte dans FTL...

Jouer épicé

Les exemples ne manquent pas de jeux ayant profité ou au contraire souffert d'une bonne dose de contenu procédural à la sauce aléatoire : Rift a presque réussi à introduire cet aspect random aux MMO, avec ses failles et ses invasions de monstres. Mais pas encore tout à fait : les MMO s'accrochent à ce design où tout le monde doit pouvoir toujours jouer et être content, et qui est en train de tuer le genre à petit feu. SimCity qui revient ? Que serait un city builder sans l'occasionnel Godzilla pour tout casser comme un petit frère pète notre château en lego ? (Réponse : ce serait Cities XL.) Le manque de richesse dans le contenu est aussi une des causes de la note un peu stricte que j'ai mise à XCOM Enemy Unknown, un titre que l'on aurait voulu tellement plus... procédural.

Avec FTL, j'ai vraiment réalisé à quel point ces mécanismes aléatoires m'étaient précieux. Perdre de façon injuste, ce n'est pas grave, cela fait partie du jeu, cela fait partie du fun. Notons tout de même que cela fonctionne surtout pour des jeux courts, que l'on relance facilement... De plus, la force du mélange procédural/aléatoire est aussi sa faiblesse : plus on le connaît (ou plus on le comprend), moins il est fun. Mais à notre époque d'ajout de contenu et de DLC, l'intérêt peut être renouvelé facilement. Je suis sûr que ces idées peuvent être adaptées à des titres plus ambitieux. Si plus de développeurs indés (car les gros éditeurs ne prendront jamais le risque) comprennent cela et que d'autres projets débarquent avec cette philosophie de jeu, je ne donne pas cher de ma vie sociale, pour ce qu'il en reste.