Traiter de la violence dans le jeux vidéo est un acte qui amène souvent la polémie chez les joueurs. Je ne vous cacherai pas pourtant que c'est un thème qui me tient à coeur mais la communauté de Gameblog reste ouvert d'esprit comme le témoigne les commentaires de mon dernier article. Aujourd'hui, on ne prendra pas un, pas deux mais trois gameblogueurs pour bavarder sur le sujet. BlackLabel le rabat-joie de Gameblog, Uspelo le modo infiltré et Kaminos, une de nos mascotte qui a causé la fièvre de 999. N'hésitez pas à votre tour à répondre, à critiquer (poliment) ou constester les réponses et question de cette triple-interview.

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J'espère que vous avez saisi la problématique : BlackLabel a besoin d'un avatar.

Des gamblogueurs, des joueurs

Gameblogueurs, pouvez-vous présenter en quelques mots ?

Upselo : Je suis étudiant en télécom. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours joué aux jeux vidéo, et ça a toujours été ma passion principale, même si je suis loin de délaisser cinéma, séries, musique et un poil de manga à côté (un peu comme tout le monde).

Kaminos : Kaminos, 21 ans. Je fais des études de dev, je suis pigiste / rédacteur pour différents sites jeux vidéo / high-tech. Dans la vie j'aime le heavy metal, jouer tranquillement avec mon chat sur les genoux, et boire de la bière après une bonne répèt' avec mon groupe.

BlackLabel : Je me suis inscrit sur Gameblog principalement pour la lisibilité des tests des membres, et je ne suis pas déçu parce que je peux dire exactement ce que je pense des jeux vidéo en obtenant en retour des avis intéressants et généralement polis, ces deux qualités étant difficiles à trouver sur le Net. Y'a aussi de très bons blogs, le premier que j'ai découvert c'était celui d'Upselo, et maintenant y'en a pas mal d'autres que je suis de près ou de loin, notamment celui d'un gars qui fait des interviews ;)

Quelle est votre principale activité sur Gameblog ?

BlackLabel : Être chiant. Des fois quand je me relis, même moi je me trouve chiant.

Upselo : Flaner un peu partout, que ce soit pour discuter sur des news sur le forum, commenter les tests et articles de blogs ailleurs. En tant que modérateur, j'interviens si nécessaire pour essayer de garder une ambiance sympa où on peut avoir des discussions intéressantes. Sinon, j'ai depuis début 2010 un blog sur lequel j'essaye de proposer des analyses sur le jeu vidéo.

Kaminos : J'y passe un peu ma vie. Sûrement trop d'ailleurs. Je lis toutes les news et commente quelquefois, mais ce qui me prend le plus de temps, c'est bien sûr mon blog, et la partie Communauté, d'une manière générale. C'est un joyeux microcosme dont je suis fier d'être un atome.

Sur quelles machines jouez-vous ?

Upselo : Principalement sur PlayStation 3 cette génération, même si dernièrement, ma PSP, mon PC et mon iPod Touch ont vu leur temps de jeu grimper en flèche.

BlackLabel : Principalement PS3, et un peu Xbox.

Kaminos : Absolument TOUT. Exception faite du PC ces derniers temps (je n'arriverai malheureusement jamais à associer le PC à autre chose qu'au boulot ou au net). Principalement sur 360 / PS3 pour le salon, Vita / 3DS en nomade. J'ai un iPad 2 mais joue assez peu dessus (ce qui ne veut pas dire que je ne m'en sers pas, je vous vois venir !). Récemment je rejoue un peu à la Super Famicom aussi.

Quels sont vos 3 jeux de référence, vos jeux préférés ?

BlackLabel : Motorstorm, Hitman Blood Money, Final Fantasy Tactics.

Upselo : Metal Gear Solid 2 pour le côté auteur et manipulateur de Kojima, sans oublier le gameplay bien riche (je freezais sadiquement les gardes). Sinon, Shadow of the Colossus, épique, touchant et parfaitement ciselé, et Hitman Blood Money pour le côté ouvert et "réaliste".

Kaminos : Mon jeu préféré est sans aucune hésitation Shadow Hearts Covenant. En deuxième je mettrais Xenosaga III et en troisième, un jeu que je viens de faire, 999, sur DS.
Sur cette gen, les jeux qui m'ont le plus marqué sont Heavy Rain, Bioshock, Alan Wake, Gears of War et Dead or Alive 4.

À quel(s) jeu(x) jouez-vous en ce moment ?

BlackLabel : Shadow of the Colossus en difficile.

Upselo : Pas à grand chose pour être honnête, hormis un petit jeu iOS, The Hacker, qui rappelle un peu Uplink. Je compte commencer Dear Esther, une "expérience narrative", faute de meilleur qualificatif. Je dois aussi terminer Tactics Ogre sur PSP.

Kaminos : J'essaye péniblement de finir Silent Hill Downpour, mais je le trouve clairement mauvais. Sinon, pas mal de online avec mon pote Dopamine sur Modern Warfare 3. J'ai pas mal de jeux en cours sur Vita, dont des trucs Japonais chelous comme @field de SEGA (du golf façon Space Channel 5), Little Busters Converted Edition, ou plus simplement WipeOut 2048. Je suis aussi en train de boucler mon deuxième run sur Final Fantasy XIII-2.

Quels jeux attendez-vous pour la fin d'année 2012 ?

Kaminos : Bioshock Infinite bien évidemment. Mais aussi et surtout, Dead or Alive 5, la sortie US de la suite de 999, le bien-nommé Zero Escape : Virtue's Last Reward. Et puis Halo 4 et Tomb Raider. Pour ce dernier, c'est plus de la curiosité que de l'attente.

BlackLabel : Max Payne 3 et Dragon's Dogma principalement, j'ai de grosses attentes sur ces deux-là. Après je surveille Ghost Recon et Spec Ops The Line.

Upselo : J'ai fait un petit article à ce sujet le mois dernier, principalement orienté indé, en oubliant scandaleusement The Witness, mais sinon, j'attends Grand Theft Auto V et The Last Guardian, qui ne sortiront sans doute pas en 2012. Je garde un oeil curieux sur Tomb Raider et BioShock Infinite.

On entre doucement dans le sujet

Comment considérez-vous la violence dans le jeux vidéo en général ?

Upselo : Je la trouve très présente, mais bien dénuée d'impact. Le plus souvent, c'est juste un spectacle gratuit, paradoxalement assaini par l'absence de contexte ou de certains détails qui permettraient d'humaniser les victimes.

BlackLabel : Sous-exploitée et prise à la légère. Les jeux vidéo ne sont pas violents en fait, disons pas vraiment. C'est de la violence pour le fun comme dans les films d'action.

Kaminos : Je la trouve en générale caricaturale et puérile. Mais ce n'est pas forcément un mal. Quand on dégomme la tête de quelqu'un avec un sniper dans Gears of War, ça fait "poc", il y a une giclée de sang et le cerveau se coupe en deux. C'est kitsch au possible, mais c'est ce qui en fait le charme. Un peu comme la violence de Kill Bill. Je n'ai joué qu'à un seul et unique jeu qui m'a sentir la violence en tant que tel : Heavy Rain. Je me permets de spoiler, il y a prescription : mais les scènes où Ethan se coupe le doigt, et où il traverse un champ électrifié m'ont profondément touchées.

Upselo, quels genres de contexte ou de détails en gros ?Useplo : Par exemple dans les jeux vidéo, les ennemis ont très souvent des masques intégraux qui recouvrent tout leur visage et les privent de leur humanité (MGS 2, Deus Ex HR, Killzone 2, etc). On ne tue pas vraiment un être humain dans ce cas là. La seule différence notable doit être leur classe, sinon, les autres éléments capables de les personnaliser sont proscrits.
De plus, on ne voit généralement la population adverse qu'à travers les affrontements, ce qui n'aide pas à les comprendre, à saisir leurs motivations, à faire preuve d'empathie à leur égard. On voit généralement peu de civils.

Dans les films ou la littérature, il est fréquent que les points de vue soient multipliés, qu'on dépasse la vision terre à terre du soldat combattant. Je ne sais pas si c'est réaliste, mais dans le film Démineurs par exemple, les soldats ont des contacts avec la population locale, les enfants qui jouent au foot ou vendent des DVD pirates à la sauvette. Quand le protagoniste retrouve le cadavre d'un de ces enfants plus tard, la charge émotionnelle est bien présente, la violence nous touche, nous fait réagir, cela informe notre regard sur le conflit.

Dans la scène de l'aéroport de Modern Warfare 2, il n'y a aucun enfant, on ne connait aucun des personnages, on ne les reverra jamais, la tension est atténuée par les multiples avertissements préliminaires. Je ne dis pas que la scène est dénuée d'efficacité, c'est quand même des civils, qui implorent notre merci et fuient en criant, mais on en vient presque à se dire que pour invoquer ce même dégoût de la violence, les jeux vidéo en sont réduits à tuer 100 fois plus de personnes.
En comparaison, Elephant de Gus Van Sant passe du temps à établir plusieurs personnages, leurs personnalités, leur quotidien, pour que la tuerie dans l'école implique le spectateur, lui fasse réaliser l'horreur de ce qu'il se passe.

Comment trouvez-vous la violence dans les autres médias tels que la musique, le cinéma ou la littérature. Il y a-t-il eu un changement par rapport aux générations précédente selon vous ?

Kaminos : Dans la musique que j'écoute, le metal, la violence a toujours été omniprésente, pour pas mal de groupes. Je la trouve assez différente de celle dans le jeu vidéo. On est plus dans le cathartique avec le heavy metal. La violence n'y est pas toujours gratuite.
Au ciné, je n'ai pas vu beaucoup de films violents. Je pense que celui qui l'était le plus devait être le premier SAW. J'ai pas vu les suivants. Mais certaines scènes étaient vraiment dégueu pour le plaisir d'être dégueu. Je suis pas fan.

BlackLabel : Généralement la violence est au coeur des questionnements de l'art, tout simplement parce que c'est un problème au coeur de notre condition humaine. Donc à côté de la violence divertissante à la Die Hard, le cinéma et la littérature se questionnent sur les multiples visages de la violence ; la guerre, la corruption, le désir aussi, l'ambition, la jalousie.

C'est surtout au cinéma que cela a évolué le plus, car la littérature a des siècles d'avance. Dans les vieux films en NB y'a souvent un côté manichéen avec les bons d'un côté, mais vraiment très bons voire angéliques, puis les super vilains l'autre. Ma connaissance du cinéma NB* est assez limitée encore aujourd'hui, mais en partie parce que souvent je trouve ça trop simpliste, et qu'à cette époque on ne pouvait pas aller très loin, même ce qu'on suggérait ne devait pas suggérer de choses trop violentes. Genre quand une fille est enlevée, les vilains ne la violent pas, ils lui font... fumer un joint... Terrifiant... Cet exemple vient d'un film d'Orson Welles (La Soif du Mal) qui se déroule dans une ville profondément corrompue. Aujourd'hui ça n'est plus très convaincant malheureusement, et ça a perdu en force d'évocation. Mais ensuite ça a vraiment évolué, et la force de suggestion s'est accrue.

Upselo : Au cinéma et à la télé, je trouve qu'il y a, tout comme dans le jeu vidéo, une certaine radicalisation de la violence (les films Saw, Hostel, Human Centipede me viennent en tête). A l'inverse du jeu vidéo cependant, la violence conserve dans ces cas-là pour moi son caractère dérangeant.
Je suis loin d'être un gros lecteur, mais j'estime que les livres étaient déjà bien décomplexés avant vis à vis de la violence, je ne pense pas que ça ait beaucoup bougé.
De manière générale, s'il y a aussi des films et des livres violents, j'estime qu'il y a suffisamment d'oeuvres qui l'utilisent de façon appropriée, adulte.
Il reste aussi une très large part des films et des livres qui utilisent la violence de manière très parcimonieuse, ou s'en dispensent totalementBlackLabel, pensez-vous qu'une violence suggéré peut être plus dérangeante que une scène gore ? Notre esprit nous tourmenterait-il plus que la réalité ?

BlackLabel : Plus dérangeante pas forcément, plus évocatrice oui. Montrer (ou décrire dans un roman) des scènes répugnantes pour faire vomir c'est malsain et idiot et ça ne véhicule rien. Par contre réussir à dire sans montrer, c'est toucher à quelque chose qui dépasse le cadre de l'oeuvre. Tu rejoins l'autre, tu établis une connexion.

Dans Kane and Lynch Dog Days ils ont suggéré les têtes explosées en les recouvrant de pixels, comme une forme de censure. Quand tu places un headshot tu le sais, et ça fait un drôle d'effet, ça donne un jeu très violent. Pourtant on ne voit rien. Au contraire le jeu passe son temps à nous cacher, ou plutôt à faire semblant de nous cacher le pire. L'important, c'est qu'on sait que ce pire, il est là, plus présent que jamais, tout en étant absent. Très astucieux !

Des jeux, comme Bioshock par exemple, propose des choix moraux et la possibilité de tuer un personnage non-joueur ou non. Comment voyez-vous et réagissez-vous face à cette option ?

Upselo : Si les enjeux du choix sont bien posés, je peux réfléchir et éventuellement tuer quelqu'un si j'estime que ça me profite ou que c'est la meilleure solution. La plupart du temps cependant, je m'aligne du côté des saints sans trop réfléchir, pour ne pas me fermer de quêtes annexes et essayer de garder tout le monde heureux. Dans les décisions conscientes, j'ai essayé au début de GTA IV de faire attention aux piétons, dont l'animation réaliste me dérangeait. Et bien sûr, dans Hitman, j'essaye d'épargner les innocents (j'ai moins de scrupules pour les gardes étrangement).

Kaminos : C'est très intéressant. Je trouve d'ailleurs très dommage que la scène où on découpe la petite soeur ait été censurée. Justement parce que pour une fois, ce n'était pas de la violence gratuite dans un jeu. Au contraire, cela permettait au joueur de bien comprendre que NON, ce ne sont pas des petites filles... 

Pardon ?

Kaminos : Dans Bioshock, un des principaux but du jeu est récupérer de l'Adam, de la drogue. Il est récupéré par des petites filles, qui sont elles-mêmes protégées par des "Protecteurs". Le joueur peut les tuer pour récupérer leur Adam.Mais ces petites filles sont génétiquement modifiées, sont des monstres et ont une vision altérée du monde (cf passage dans Bioshock 2). Les tuer n'est donc pas tuer une vraie petite fille, comme nous le signale Atlas via la radio.

Dans le même genre, il y a la fameuse de l'aéroport dans Modern Warfare 2, un peu dans le même registre qu'Heavy Rain. On a le droit de rester spectateurs. Moi, personnellement, dans mon premier run, j'essayais de tuer un minimum de civils, mais j'en tuais quand même. Je ne voulais pas que ma couverture saute, même si j'ai appris par la suite que ça n'avait aucune incidence. En gros, j'achevais les blessés, ou tirais directement dans la tête pour éviter de la souffrance au type en face de moi. c'est débile je sais. Mais j'aime bien jouer role play, même les FPS.

BlackLabel : J'ai jamais fait face à un système de choix moraux pertinent. La plupart du temps on est comme lourdement encouragé à suivre la même voie du début à la fin, pour gagner des niveaux par exemple. Donc je dirai que j'ai pas d'avis dessus, à part qu'il y a peut-être quelque chose à exploiter, mais que je n'ai pas encore vu la bonne méthode.

Pour la possibilité de tuer des PNJs... comme dans GTA4 ? Ça dépend des jeux. Dans GTA 4 écraser des gens en voiture c'est assez fendard je trouve, notamment grâce au moteur physique qui fait des merveilles. Dans Kane and Lynch Dog Days au cours de la première partie c'est presque dérangeant ; comme les gunfights se passent parfois en pleine rue on ne distingue pas toujours les piétons des ennemis, et lorsqu'on est pris par le jeu, des fois on se dit "Merde, j'ai buté un civil !" comme si c'était important, alors qu'en fait on s'en fout ce sont juste des polygones. Mais sur le moment ça fonctionne, et je trouve cette façon de traiter les dommages collatéraux vraiment réussie pour un jeu. J'avais jamais ressenti ça avant.

Le Fond

Pensez-vous que la violence peut amener le jeu vidéo à la maturité? Ou que le jeu vidéo devrait tendre vers la violence caricaturale et rester du divertissement pur ?

Kaminos : Personnellement, je n'ai pas très envie que le JV devienne mature. Comme il est actuellement, ça me va très bien. Que certains créateurs souhaitent aller plus loin, c'est cool, j'apprécie souvent leurs jeux d'ailleurs. Mais je n'ai pas envie que ça se généralise. Donc en gros, la violence dans les jeux vidéo doit rester ce qu'elle est : de l'exagération à l'état pur, ou même des choses plus réalistes. Mais pas tomber dans le morbide. J'aurais beaucoup de mal à prendre du plaisir sur un shooter qui met en avant la mort comme thème principal. Un jeu d'horreur, pourquoi pas, c'est dans le contrat, après tout. Mais les autres genres, non.

BlackLabel : La violence pour le fun c'est très bien, il en faut comme au cinéma avec les films d'action. Mais on a besoin je pense que le jeu vidéo exploite vraiment son potentiel et l'assume pour trouver quoi raconter. On joue pratiquement toujours des héros violents. Le vrai psychopathe d'Uncharted, ce sont pas les méchants, c'est Drake, c'est lui qui tue le plus de monde. Si un jour un jeu comprend cela, on commencera à jouer des vrais salauds, ou encore des héros hantés par leurs crimes.

Et là y'a vraiment des choses à exploiter. Comme avec le cinéma, on sortirait du fun pur pour avoir aussi des trucs plus intéressants à jouer sur le plan narratif, et aussi sur l'immersion, tout en conservant le fun lié à un bon gameplay. Mais est-ce que ça arrivera un jour ? J'en doute... Y'a des essais ici et là, comme avec Silent Hill. Mais c'est vraiment super minoritaire.

Upselo : Je pense que pour que le jeu vidéo arrive à maturité, il est nécessaire qu'il y ait plus de titres qui traitent la violence de façon plus sérieuse.
Je ne pense pas que le jeu vidéo doive tendre vers la violence caricaturale ou le divertissement, tout comme je ne pense pas qu'il doive tendre exclusivement vers plus de sérieux. Les deux peuvent coexister, ça ne me pose aucun problème. Par contre, je pense que le côté caricatural est plutôt pas mal couvert pour le moment, donc oui, j'aimerai que plus d'efforts soient faits sur le côté sérieux.

Tous les jeux pourraient-ils se passer de violence en terme de fun et de gameplay ?

BlackLabel : Non clairement pas. Y'a beaucoup de jeux auxquels je jouerais avec moins d'enthousiasme voire pas du tout s'il n'y avait pas de gerbes de sang ou ce genre de trucs. Après la violence visuelle doit aussi cadrer avec le ton du jeu, et j'attends pas de voir des intestins ensanglantés dans Uncharted. Mais quand je joue à un jeu de tir, de boxe, etc., j'aime retrouver en partie la violence des impacts du réel. Mais même dans un jeu de voiture c'est pareil, la brutalité des collisions c'est assez fun également. Elle ne fait pas de mal, cette violence-là, contrairement à la vraie dans la vie réelle, y'a probablement comme un plaisir à pouvoir en jouir en toute sécurité.

Upselo : Certains jeux arrivent très bien à s'en passer comme Tetris, donc ils pourraient tous le faire s'ils se limitaient à des jeux de ce type. Par contre, je ne vois pas bien l'intérêt de nécessairement s'en priver, surtout que certains jeux comme les FPS se basent principalement dessus. La violence fait partie de notre monde, de notre vie. Ce serait vraiment dommage de ne pas en parler. Exiger de n'avoir que des FPS à la violence atténuée, c'est nier la violence de la guerre par exemple, et ça me semble bien moins souhaitable que d'exposer cette violence pour ce qu'elle est.

Kaminos : Je ne pense pas qu'un jeu doive être violent pour être fun ou avoir un bon gameplay. Ca n'a même aucun lien logique. J'adore jouer à Rayman Origins ou à Bomberman avec ma copine, et passe les meilleurs heures de ma vie de joueur sur ces jeux, avec elle. On a pas besoin de voir les boyaux de Bomberman.
Après, faire un jeu dont la violence est le maitre mot, commme Manhunt, pourquoi pas. Après tout, je suis sûr qu'il y a un public pour ça. J'ai joué aux deux Manhunt, c'était des daubes. J'aurais rien contre un jeu extrêmement violent et choquant s'il était bon à côté. Mais je n'en ai toujours pas trouvé.

A votre avis, est-ce que, comme le sous-entend certains reportages, le jeu vidéo serait propice aux comportements violents ?

BlackLabel : D'après moi non, après je peux me tromper car dans mon enfance les jeux étaient pas du tout comme aujourd'hui, c'était Mario et Sonic quoi.

D'après moi les gens ont surtout tendance à s'identifier à un héros de cinéma, à cause de l'image. Y'a beaucoup de rappeurs notamment qui citent Tony Montana comme un modèle (Au.Secours.), ou encore des films dénonçant les horreurs du Vietnam ont paradoxalement encouragé des jeunes à devenir Marines, car ils étaient happés par la beauté des images de destruction. Mais un héros de jeu vidéo, c'est "pour du faux", tu peux pas le rencontrer en vrai, l'admirer, et rencontrer le gars qui sert à la motion-capture on s'en fout un peu je pense. La distance entre la réalité et la fiction est beaucoup plus large avec le jeu vidéo qu'avec le cinéma, et beaucoup moins "trompeuse" aussi. Le cinéma, beaucoup n'y voient que ce qu'ils ont envie d'y voir. C'est un média beaucoup moins intelligent que la littérature à cause de cela, car les gens peuvent comprendre seulement ce qui les arrange.

Upselo : Il y a des gens qui cassent des manettes à cause de certains jeux (et bien pire quand on lit certains faits divers) et l'exposition à des images violentes doit sans doute s'accompagner d'un effet de banalisation et de désensibilisation à certaines images. En dehors de ça, je doute cependant sincèrement que les jeux provoquent la violence. S'ils ont une influence quelconque, je doute qu'elle soit plus significative que celle des autres médias.
Notamment, le fait d'être en contrôle ne signifie pas nécessairement que cela a plus d'impact, au contraire. Un petit extrait d'Olivier Mauco " la dimension ludique pouvait créer de la distance au discours tenu dans le jeu. C'est à dire que la relation concurrentielle et sous le règne de l'action interactive entre le joueur et le système de jeu, fait qu'un joueur est un joueur et non un simple spectateur" et "Y en a qui réduisent le jeu vidéo à un amas de pixels à manipuler de manière performante, alors que d'autres s'intéressent aux univers de fiction. Le jeu vidéo est les deux à la fois."

Kaminos :  Je suis plus partagé que nombre de joueurs sur la question : pour moi, y'a pas de fumée sans feu. Même si, j'admets, ce n'est pas parce que j'ai joué à Carmageddon et GTA quand j'étais gosse que je vais pas me mettre à tuer des gens. Pour moi, la violence dans le jeu vidéo est à mettre au même rang que la violence au cinéma, ni plus ni moins.
Mais il est vrai qu'on peut apprendre pas mal de choses grâce à la violence et aux armes vidéoludiques. Par exemple, j'ai eu l'occasion de tirer avec des armes de gros calibre comme des Desert Eagle et des 22 Long Rifle il y a quelques temps. Je n'avais jamais tenu d'arme de ma vie, et pourtant, je savais parfaitement m'en servir. Rechargement rapide, bonne gestion du recul, du cran d'arrêt, bonne visée, etc. J'en étais le premier surpris.
Mais disons que c'est à mettre au même niveau que le reste : j'étais capable de faire voler un avion télécommandé en un temps record grâce à mes heures passées sur Flight Simulator. C'est un peu pareil. Sauf que faire voler un avion avec de l'éthanol et tirer avec une pistolet, ce n'est pas pareil.

Ensuite, si le gars qui joue est un peu taré sur les bords et qu'il passe sa vie sur de vraies simulations de tir ou de guerre (pas CoD ou Battlefield, merci !), ma main à couper que le jeu vidéo va attiser la violence en lui. Mais faut dire que le type était pas sain d'esprit à la base.

Pour les gosses, je vais pas faire original. Y'a PEGI et tout. Même si jouer à CoD, quand on est gosse, ça va, certains jeux ne sont pas faits pour être faits quand on est enfants. Typiquement, je vais pas mettre le dernier Ninja Gaiden devant le petit neveu de 6 ans.

Dans le domaine, ce qui est selon moi plus notable, c'est de voir que le jeu vidéo nous aseptise à la violence. Mais c'est un peu comme les infos. Certains jeux vidéo m'ont appris à n'être choqué de rien. Sérieusement, je ne trouve pas Dead Space 2 choquant, alors que le jeu est de la violence à l'état pur.
C'est sûrement un mouvement de société général, mais je suis totalement immunisé à la violence et au dégoût. Y'a 2 mois, j'ai vu un macchabée dans le métro. C'était bien moche. Pourtant, mon visage n'a pas du tout changé d'expression, et j'ai continué à écouter ma musique tranquille, mon iPod à la main, petit con et produit de la société de consommation que je suis.
Je trouve ça assez grave. Pourtant, c'est qui je suis. Je ne sais pas si j'aurais été différent si j'étais né 30 ans auparavant. Mais toujours est-il que le jeu vidéo a grandement contribué à me créer une carapace : je suis habitué à la violence, c'est un fait.

Merci à vous. En faites une dernière question ! Je sors du lycée pour ma part mais j'ai déjà vu beaucoup de jeune du collège et du primaire. Des jeunes garçons parlent plus de jeux comme Call of Duty et Resident Evil. Je ne comprends pas trop pour ma part. Comment voyez-vous l'attirance pour les jeux d'adultes ?

Upselo : C'est en partie l'attrait de l'interdit, la volonté de montrer qu'on est grand, et ça ne concerne pas que les jeux vidéo. J'ai joué à GTA et Metal Gear Solid bien avant d'avoir l'âge requis, parce que les magazines en faisaient les louanges et que mes potes s'éclataient dessus. On jouait aussi aux Zelda et aux Final Fantasy, donc on ne cherchait pas nécessairement la violence à tout prix. Call of Duty attire les jeunes par effet de réseau (plus il y a de monde qui joue, plus il y a de monde qui veut jouer). C'est grand spectacle, donc c'est populaire.

BlackLabel : Je trouve ça normal. Ce sont pas des jeux adultes, ce sont des équivalents des G.I. Joe de ma génération. Moi je jouais à Mario et Sonic faute de mieux, mais ce sont des univers très enfantins. À partir de 10 ans t'es plus attiré par les films Star Wars que par les Schtroumpfs je pense.

Kaminos : Ca ne me choque pas, parce que je faisais la même chose à leur âge, et que je ne pense pas être devenu un monstre. Je jouais à Medal of Honor, Counter Strike, GTA, Devil May Cry and co, et j'en parlais avec les copains.Je pense que certains jeux sont trop violents : je ne laisserais pas mon hypothétique gosse de 13 ans jouer à Dead Space. Mais la plupart du temps, ça va. D'ailleurs, c'est bien là la limite de PEGI : bien plus que la recommandation, il faut surtout que les parents sachent ce à quoi leur enfant joue. Je pense que ça ira bien mieux avec le temps, quand la génération "internet" aura des enfants : on saura ce qu'on fait, et accessoirement, ce que nos enfants feront.

 

Cinéma NB: Grosso modo, le cinéma américain des années 30 à 50, celui qu'on appelle aujourd'hui "classique".