Des générations entières de gamins sont passé par ce parcours d’obstacle cruel et exigeant qui à vu le jour au cours des années 70 (impossible de trouver l’année exacte de son apparition) et commercialisé par la grande firme du jouet qu’est TOMY. Dans la peau d’une bille chromée d’un diamètre d’1.3cm, vous devrez réussir toute une série d’épreuves qui feront appel à votre dextérité, vos réflexes, votre sens de l’analyse du terrain, vos talents d’improvisation et aussi de pas mal de bonne fortune. Si jamais vous parvenez à l’issue de ce chemin de croix tumultueux votre sentiment d’accomplissement d’autrefois laissera place à une profonde amertume, car désormais l’aventure est doublement plus longue. En effet, vous découvrez abasourdi que dorénavant il existe un second niveau ! Ni une ni deux vous rassemblez votre courage, buvez un coup, remettez votre paquetage en place et repartez sur la route du danger…

 Niveau 1

Celui que tout le monde connaît. Celui qui a forgé des milliers de caractères. Celui qui fait faire des cauchemars à des millions de mioches. Celui qui terrorise encore des milliards de vieux enfants à travers le monde. Le Mythe. La Légende.

Jouet culte

Le contexte est flou. Tout au plus imaginons nous un explorateur en pleine jongle à la recherche d’une quelconque relique des temps anciens. Soit. Notre rondouillarde héroïne entame son périple par la traversée d’un pont branlant qui met tout de suite dans l’ambiance. On croit que ça va être simple, cela se révèle retors. S’ensuit un peu d’accrobranche au-dessus d’un précipice avant la traversée d’un marais infesté de crocrodiles. Cela demande un peu d’habileté mais ce n’est pas le plus dangereux. On titube ensuite sur un terrain instable avant de rejoindre un ponton salutaire. Mais le repos est de courte durée car vient immédiatement l’épreuve des sauts. Au jugé, sans véritablement savoir où nous allons atterrir on bondit sur quelques plates-formes avant de devoir passer au travers d’un cerceau cabalistique menant tout droit à un sombre labyrinthe. Là, sans aucune visibilité, il faudra rejoindre la sortie en évitant cul-de-sac et nausées. Une fois dehors nous attends un petit parcours en barque qui nous amènera à la catapulte. Pas le choix, c’est le seul moyen de passer le gouffre qui nous sépare du gong sacré qui marque la fin de l’expédition.

Dong !

Une traversée qui est loin d'être de tout repos

Ce petit carnet de voyage bien sympathique ne reflète pas l’âpreté de cette randonnée de l’enfer. Mille fois vous échouerez. Tout autant vous recommencerez. Et je ne parle même pas du chronomètre qui vous fout une pression de dingue sur les épaules. Bon en vrai le chrono, vous le lancez une fois histoire de dire et vous l’abandonnerez assez vite. Belle transition pour parler de la belle mécanique à l’œuvre dans ce jouet qui même après plusieurs décennies surprends par son ingéniosité et son savoir-faire à la fois simple et efficace. Rien d’électrique ou d’électronique là-dedans. Des ressorts, des aimants, des boutons… quelques astuces ici et là héritées des vieux automates d’antan et le tour est joué. Sans doute l’une des raisons pour laquelle il vieillit si bien.

De la belle ouvrage à l'oeuvre dans ce plateau

Pour ce qui est de la maniabilité, cela demandera pas mal de doigté. Et pas forcément évident de jauger de la puissance de son coup sur certaines actions. Il faut rester vigilant par ailleurs sur les leviers à actionner, car dans leur roublardise les concepteurs n’ont pas forcément placé les différentes manivelles dans l’ordre du parcours. Il faut donc être attentif à la fois à sa bille, aux pièges, au rythme et surveiller du coin de l’œil son tableau de bord.

Les contrôleurs au grand complet. Il faudra se les approprier pour parvenir au bout du périple

Cette belle aventure épique possède cependant quelques revers. Avec en premier lieu un choix de couleurs quelque peu audacieux pour cette nouvelle mouture 2020. On est loin de la superbe édition originale et ses teintes ‘cohérentes’. Place à une colorimétrie criarde et fluo qui n’est pas franchement des plus heureuses (mais ouf ce n’est pas non plus l’horrible version bleu !). Et puis mazette mais qu’est ce que ça en fait du boucan ce bidule ! Entre les cliquetis-quetis, les breling-breling-breling et autres Roun-doun-doung, on ne s’entend plus penser avec tout ce bazar ! Je n’ose imaginer quand l’engin se trouve entre les mains de garnements un peu turbulents ! Je préconise le port d’écouteurs avec la musique à fond  histoire de ne pas péter les plombs!!

Petite étrangeté: le jeu se parcourt de droite à gauche, dans un level-design à rebours de toutes nos conventions. Je reste curieux de connaître l’histoire de la conception de ce plateau...

Mais soyons honnête, Tricky Bille reste un objet absolument emblématique, que chaque enfant se doit de posséder dans son coffre à jouets. Alors quand j’ai appris très récemment qu’une ‘suite’ était sortie je n’ai pas su résister et j’ai voulu mettre cette inattendue extension à l’épreuve. Après quelques emplettes me voilà en face de ce nouveau tableau, qu’il est grand temps d’examiner sous toutes ses coutures…

La pièce qui permet de relier les deux jouets

Niveau 2

Globalement le cheminement y est identique à la première partie en termes de ‘construction générale’. On débute par gravir un escalier sans garde-fou pour arriver à un aqueduc qui lui mène à un énorme essieu qui sera central dans cet itinéraire. Divisé en deux partie, - une grande roue et l’essieu en lui-même, le passage nécessitera un peu de pratique mais reste assez simple. Constance et précision seront les maîtres-mots dans cette étape. À mi-parcours, une nouvelle session de sauts qui ne posera pas le moindre problème et qui permettra de passer de l’autre coté de cette vis géante. Passé cette acrobatie place au mini-flipper  - ou pachinko si vous préférez - qui en quelques propulsions vous enverra sur La Spirale de la Chance (une bien belle appellation). Là il n’y a rien d’autre à faire qu’à espérer. La bonne sortie vous conduira au toboggan tandis que la mauvaise vous ramènera à la vis sans fin (vous êtes alors bon pour refaire une partie du parcours). La glissade à bascule vous dépose directement dans la cuillère, qui *boum !* sans attendre vous permet d’atteindre la cloche qui sonne votre réussite.

Une vue d'ensemble un peu bouchée par la Spirale de la Chance

Premier constat, ce parcours est bien plus facile que son aïeul. Et pour une raison simple: bien que présenté comme un ‘Level 2’ il s’agit en vérité d’un ‘Level 0’ qui doit donc se connecter non pas après mais avant l’ancienne version. Je n’ai compris cela qu’en regardant la notice alors que je tape cet article (et après la ‘séance photo’…). La pièce qui permet de relier les circuits peut dans les faits se ‘brancher’ à l’un comme à l’autre et donc il n’y a pas vraiment d’ordre mais comme le livret lui-même l’indique c’est bien à la fin du récent niveau que s’emboite la passerelle reliant les deux odyssées. Et cela se révèle parfaitement logique au vu de l’échelle de progression de la difficulté qui dans cet ordre là fait plus sens.

La véritable disposition a adopter pour une progression plus harmonieuse. Cela permet de plus de conserver la catapulte en bouquet final, de loin l'épreuve la plus compliqué du lot.

Modernité oblige, une encoche pour placer un smartphone à fait son apparition, afin d’usité de ses fonctions diverses de mesure du temps. Même si l’utilité fait du coup doublon avec la maison-chronomètre qui elle aussi peut se placer sur ce nouveau plateau. Apparition notable de plus d’une épreuve basée uniquement sur le facteur chance, ce qui constitue une nouvelle approche qui ne plaira pas à tout le monde (du moins pas à moi…Grrr…). Cependant la relative simplicité de ce tableau fait qu’il est moins pénible à refaire en cas de déroute du destin. Attention toutefois à ne pas prendre cette nouvelle série d’obstacles à la légère. Là où l’incunable faisait appel à des capacités plutôt réflectives cette fois c’est l’adresse qui est plutôt mise en avant. Notamment avec ce fameux moyeu central tout en synchrone subtilité. Le passage du flipper lui demandera d’apprendre à doser son effort, y aller à fond les manettes résultant systématiquement par l’échec.

Vue sur les escaliers et la vis sans fin. Au loin la grande roue, un labyrinthe vertical.

Finalement ces nouvelles étapes se révèlent complémentaires des anciennes et une fois le duo de plateau formé c’est devant une belle panoplie d’épreuves que nous nous trouvons. À la fois diverses, amusantes, frustrantes ou plaisantes. Un bel échantillon des apprentissages de la vie en somme…

~€~

Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas fait une partie de Tricky Bille, est force est de constater que le jeu reste toujours autant efficace des décennies après son invention. Alors oui il reste frustrant parfois, surtout quand pour une raison inconnue le mouvement que vous avez déjà réussi 100 fois sans souci devient tout à coup une gageure insurmontable. Sous son aspect de promenade de santé se dévoile une piste semée d’embûches qui mettront vos qualités à l’épreuve et vos défauts en exergue.
Le niveau 2 lui est une belle idée qui aurait mérité un peu plus de génie pour véritablement se hisser à la hauteur de son illustre ancêtre, sans pour autant démériter de son héritage. Plus qu’une suite, c’est une préquelle que nous découvrons en ce nouveau plateau. Enchainer les deux parcours pour un plaisir sadique deux fois plus long reste une bien belle aventure qui en compagnie de sa progéniture octroiera des moments de convivialité endiablé. C’est donc une grosse recommandation que je formule pour ce dynamique diptyque qui à n’en pas douter restera un classique pour encore des générations de gamins à venir. Cependant un niveau 3 plus ambitieux serait plus que bienvenue. Nul doute que les ingénieurs de chez Tomy se penchent actuellement sur la question.

Les grands cerveaux en pleine réfléxion pour le niveau 3