Comme beaucoup de gens, j'ai des périodes "à thèmes", quelques semaines ou je veux tout lire, tout savoir, tout voir sur un sujet particulier. Un coup c'est Star Wars, un coup Mass Effect, un coup Deus Ex. Comme vous pouvez le voir, les jeux vidéos sont souvent à l'origine de ces thèmes. Le mois de juillet s'est concentré sur le thème des zombies. En découvrant Walking Dead episode one sur le PSN, je me suis lancé à corps perdu dans la "culture zombie", en mattant plein de films, en lisant le comics Walking Dead par exemple. Et puis je suis tombé sur World War Z un jour à la FNAC, en cherchant un roman à lire. Et c'est de ce livre, faisant partie de ce que j'appelerai une "culture geek globale" et non pas spécialement relié à un jeu, que je voudrais vous parler.

 

World War Z, c'est quoi ? C'est un roman, constitué en fait de nouvelles, sous formes d'interview. En gros, une épidémie d'un virus inconnu qui transforme les gens en zombie est déclarée en Chine, elle se propage dans le monde entier, c'est l'apocalypse. Pendant plusieurs années, les survivants se regroupent, puis se lancent à la reconquête des villes, envahies de zombies, dans ce qui sera la "Zème Guerre Mondiale". L'auteur fictif du receuil travaille pour l'ONU (ou ce qu'il en reste). La guerre est terminée, l'Homme a gagné après de durs combats. L'heure est au bilan, et le rôle de notre auteur, est de compiler les témoignages des survivants, des acteurs de cette guerre, pour les générations futures.

 

La bataille de Yonkers, un des témoignages forts du livre

Le pitsch peut sembler très classique au premier abord : Encore une invasion de zombies ! Oui mais non ! Parce que Max Brooks, l'auteur (réel) aborde la chose d'un point de vue original : Plutôt que d'étudier le combat pour la survie d'un seul groupe, il étudie le combat de la race humaine toute entière. Il aborde la pandémie, puis la guerre dans son ensemble. Comment par exemple le virus passe de la Chine, à l'Inde, au Brésil, aux Etats-Unis, etc ? Dans les autres œuvres comme Walking Dead par exemple, on est dans l'ignorance. Les zombies sont là, c'est l'apocalypse, point. Ici Brooks réussit à rendre plausible une telle épidémie, en l'inscrivant dans notre monde hyper connecté. On passe d'un cas en Chine, à des émeutes dans les townships d'Afrique du Sud, qui marquent le début de ce que les gens appelent alors "la rage africaine". Tout l'intérêt du livre est là, on aborde la pandémie de zombie d'un point de vue plus large, plus global.

 

"La Grande Panique" ou quand les humains fuient inconsciement vers le Nord et les Océans, poursuivit par des zombies

Mais ça ne s'arrête pas là. L'histoire de Brooks, plus que tout autre film ou comics, rend crédible et réaliste cette invasion. En effet, chaque témoignage de survivant, va permettre d'aborder un point de la survie de tous les jours, mais aussi un point chronologique. Au début, personne ne se rend compte de la gravité de la situation (sauf les israeliens qui s'emmurent en Palestine). Ensuite c'est "la Grande Panique" quand les gens s'aperçoivent que le vaccin n'est pas efficace, et quand ils fuient tous vers le Nord ou la mer. Chaque survivant traite ainsi un moment de l'évolution de la pandémie, on a par exemple un témoignage des premiers soldats confrontés à un cas de réanimation, ou celui d'un espion israelien qui va pousser son Etat à prendre conscience de la menace, ou encore un officier de sous-marin nucléaire chinois qui décide de faire défection avec son équipage et leurs familles. Tous les situations ont le mérite d'avoir un fond réaliste : Le Japon ordonne l'évacuation générale vers la Kamchatka. La Corée du Nord et toute sa population (23 millions de personnes) disparaîssent sous terre. Cuba devient une terre d'accueil pour les réfugiés américains et devient la base arrière de la reconquête. Placer l'invasion dans des lieux connus, et dans une époque contemporaine, permet de s'identifier à chaque survivant, et de rendre la chose bien plus effrayante et réaliste qu'en gardant le secret sur l'époque et les lieux comme dans beaucoup de films. Ici tout est abordé, vraiment tout, des conséquences psychologiques de la guerre à la reconstruction d'une économie en passant par les batailles épiques (parfois catastrophiques) et l'après-guerre. Le réalisme et l'intelligence du traitement de la  propagation de l'infection, puis de la guerre, voilà l'autre grande force du livre.

 

La "lobo" (pour "Lobotomizer"), mi pelle, mi hache, est devenu l'outil indispensable au fantassin. Elle est l'exemple même du soucis du détail de l'auteur

Le troisième point que j'aimerais aborder, c'est celui de l'écriture. Même avec l'idée de prendre un point de vue plus global sur la réaction des humains à l'invasion Zombie, et même avec le réalisme des situations traités, le roman aurait pu être chiant ou foireux. Mais Brooks a réussi à rendre une succession de témoignage passionante. Chaque interview, c'est la petite histoire dans la grande. Elles permettent de prendre conscience qu'il n'y a pas un ou deux héros, il y en a des centaines, dans tous les pays. Chaque histoire est passionnante et réussit à nous tenir en haleine, même si certaines retiennent un peu moins l'attention que d'autres. Mais ici j'ai vraiment aimé ce côté "on ne se concentre pas sur un groupe de 6 survivants" mais bien sur tout le monde, et sur la diversité des situations possibles.

 

Une adaptation au cinéma est en tournage : Dur dur d'adapter la richesse et la diversité d'un tel livre...

On peut toujours reprocher au livre un côté un peu trop américano-centré, bien que de nombreux pays soient mentionnés et leur situation développée (comme la France au cours d'une interview). C'est en effet par les USA que commence la lente reconquête, et c'est le président américain qui fait le discours qui lance cette reconquête. Le livre étant écrit par un américain, et connaissant leur propension à se voir comme la "nation élue", ce n'est pas étonnant. Je n'ai néanmoins pas trouvé ça si génant que ça, et si vous n'êtes pas atteint d'anti-américanisme primaire, ça devrait passer sans soucis.

Un film basé sur le roman est apparemment un tournage avec Brad Pitt. Je suis plutôt a priori sceptique, tant le structure du livre est assez peu adaptable. Ils auront vraiment du mal à reproduire la diversité de témoignages, même si ceux-ci sont parfois hautement cinématographiques.

En tout cas j'ai vraiment dévoré le livre et si j'en parle, c'est parce que je pense clairement qu'il fait parti des incontournables littéraires si on aime les histoires de zombies. N'attendez plus, foncez !