Le développeur sur lequel nous allons nous attarder a peut-être été le plus nippon des studios Européens. Fort de l'expérience de ses équipes de développement qui ont durant le milieu des années 80 participé à la montée en puissance du jeu vidéo sur ordinateurs, Arcade, et les premières consoles de jeu, c'est début 1987, et avec une équipe déjà aguérrie autour des fondateurs les frères Stamper, que le tout juste fondé Rare sort en grande pompe Slalom, son premier jeu console, sur NES. Sûr de son talent, le jeune studio va vite s'installer parmi les noms qui comptent sur la console de Nintendo. Un privilège assez peu commun pour un studio qui n'est pas implanté au Japon. Mais qu'à cela ne tienne, sans aucun complexe, Rare enchaîne les succès, à l'image des hits que sont Wizard & Warriors et R.C. Pro Am, que tout bon amateur de la 8 bit de Nintendo a forcément au moins essayé une fois dans sa vie. Ces premiers pas prometteurs dans le monde des consoles est annonciateur d'un grand studio en devenir, et c'est exactement la direction que va prendre Rare, inscrivant ainsi son nom de plein pied dans la légende.

Au-delà des quelques premiers jeux de commande, souvent oubliables, Rare prends le temps de se développer à la fin des années 80, une véritable identité, et propose des titres accrocheurs et originaux, toujours dotés d'une réalisation impeccable. Une signature qui fait étalage de ce talent qu'ils continent de cultiver avec soin. Et immanquablement, les éditeurs et constructeurs stars vont leur faire les yeux doux. En tête de liste, Nintendo propose un rapprochement opportun, que les frères Stamper vont s'empresser de saisir. Grand bien leur en a pris, une fois le mariage acté avec le géant de Kyoto, fort de leur solide réputation, de leurs idées de game design qui visent juste, et aidés par l'aura des personnages de Nintendo que ce dernier va leur permettre de mettre en scène, la voie de Rare vers des hauteurs vertigineuses est alors toute tracée, et les hits de la NES vont se transformer en produits phares, capable de porter, ou relancer l'intérêt pour les machines de Nintendo à venir. Une performance qu'aucun autre studio Européen peut prétendre avoir jamais réalisé. Vous l'aurez compris, le Top 5 des jeux développés par Rare sera d'une qualité exceptionnelle, et en sélectionner une simple poignée, n'a pas été chose aisée. Toutefois voici mon avis sur la question!

 

Numéro 5: Battletoads sur NES

Mais avant de parler du mariage doré entre Nintendo et Rare, attardons nous sur le titre qui à définitivement positionné Rare sur le devant de la scène, et ce pendant les quelques années ou ils ont opéré sur les consoles 8 bit. Battletoads est une proposition originale pour un genre alors en pleine expension, le Beat Them All, qui surfe alors sur les phénomènes que sont Double Dragon et Fignal Fight dans les salles d'Arcade. Résolument dans l'air du temps, ce titre exigeant, et déjà, mangifiquement réalisé, vous propose d'affronter des ennemis sans merci à la pelle. Mais il ne se contente pas de cela. Quelques passages de plateforme, qui prennent des formes assez originales, tels que cette course lancé en moto spaciale, ou encore cette descente en rappel, apportent une variété bienvenue à un jeu doté, qui plus est, d'une forte personalité. Il suffit de voir nos trois héros, intéressants hybrides de crapauds aux proportions humaines, se transformer en objets improbables, et enchainer les mimiques et les coups complètement délirants pour s'en convaincre. De très belles qualités au service d'un jeu sans concession, d'une difficulté confondante. Impossible de passer le 2nd niveau sans connaître le jeu dans ses moindres détails. Les passages de plateforme eux, sont, si c'était possible, encore plus inabordables que les niveaux classiques. Un véritable challenge pour tous les joueurs qui désirent se frotter à la crème du Beat Them All sur la 8 bit de Nintendo, et qui apportera son lot de frustration, mais vous l'avez compris, un défi qui en vaut largement la peine, ne serait ce que pour constater, en quelques années, puisque le jeu à vu le jour en 1990, les indéniables progrès de Rare depuis la sortie du vénérable Slalom. Battletoads pour toutes les qualités qu'il possède, et tout ce qu'il annonce pour le futur, est une véritable première pierre angulaire du succès de ce jeune studio Anglais. Et à ce titre il mérite pleinement sa place au sein du classement d'aujourd'hui!

 

Numéro 4: Banjo Kazooie sur Nintendo 64

Faisons maintenant un bon de quelques années en avant, pour nous retrouver au coeur de l'été 1998, en compagnie d'un développeur désormais au sommet de son art, qui a pris toute la mesure de son partenariat préférentiel avec Nintendo et maîtrise toute les arcanes de sa machine alors sur le marché, la Nintendo 64, puisqu'il s'agit rien de moins que leur 5ème jeu développé sur le support. Banjo Kazooie sera donc un titre star de la console, qui va chercher à chatouiller le maître absolu du genre du jeu de plateforme, sur ses propre terres. Super Mario 64 était révolutionnaire, et Banjo Kazooie devra donc, tout en intégrant les nombreux aquis qui font de ces dernières aventures du plombier le jeu phare de la console, proposer quelques petites nouveautés pour se démarquer et créer ainsi sa propre légende. Rare y-est-il parvenu? La présence de Banjo Kazooie en 4ème place de ce classement est un début de réponse. Le titre est certes techniquement irréprochable, et le travail sur l'utilisation des caméras notamment, assez remarquable, d'autant plus qu'il s'agit d'une tare commune à un très grand nombre de jeux de plateforme en 3D sur la période. La durée de vie n'est elle, pas en reste, et le titre garanti une immersion dans un vaste et très joli monde à tous les amateurs du genre. Banjo, votre héros, réponds au doigt et à l'oeil, et les transitions entre les différentes zones de jeu se font de manière fluide, accompagnées par un environnement sonore judicieux. Bref, Rare nous offre ici un sans faute technique et esthétique, et le jeu sera à juste titre très chaudement acceuilli par la critique et le public. Est-il cependant un cran au-dessus de son modèle? A mes yeux, non, la construction des niveaux et le charme n'opérent pas autant que sur Super Mario 64,  mais c'est un avis bien personnel, et un grand nombre de joueurs aura raison de préférer cette magnifique aventure proposée par un Rare alors au firmament.   

 

Numéro 3: Goldeneye 007 sur Nintendo 64

Comment Rare est devenu un tel développeur, véritable mastondonte sur Nintendo 64, et à réussi à fédérer une telle unanimité autour de Banjo et Kazooie, et ce même avant sa distribution auprès du public?  Cette reconnaissance et cette aura, il la doit peut-être bien à un jeu en particulier : Glodeneye 007, sorti quelques mois auparavant, en 1997, inscrit en lettre d'or le nom du studio sur la mythique console de Nintendo, et fait résonner le talent du studio Anglais au-délà du monde du jeu vidéo. Adapter un film grand public en jeu n'est pas chose aisée, et bon nombre de développeurs de talent s'y sont cassés les dents. Dire que Rare a réussi le pari haut la main est un euphémisme, car nous sommes indéniablement face à ce que l'on peut considérer être la meilleure adaptation de film jamais réalisée sur console, ou tout du moins, celle qui a le plus durablement marqué les esprits. Les quelques éléments qui font de GoldenEye 007 un titre résolument à part, et notamment son mode multijoueur absolument déliceux, ne doivent pas pour autant nous faire occulter les solides bases techniques et artistiques proposées par Rare, qui s'est bien décidé à paufiner son bébé jusqu'au bout des ongles. Ou que l'on regarde, ou que l'on écoute, quoi que l'on essaye de réaliser manette en main au sein du jeu, tout est calibré au millimètre pour que le joueur puisse tirer le meilleur de son experience de jeu. En cela, il est l'exact opposé de l'image que renvoie, tout du moins en apparence, le personnage de James Bond, roi de l'adaptation et de la survie, qui arrive toujours in extremis à se sortir des situations imprévisibles les plus extrêmes, tandis que la réalisation est elle, à l'exact opposé, toujours d'une précision chirugicale, voire trop formatée dirons les mauvaises langues. Un parallèle intéressant, qui a le mérite d'éclairer sur les ficelles parfois similaires, qui en arrière plan forment un bon jeu, mais également un bon film. Rare est sûr de ses capacités, et récite sa partition à la perfection, offrant au passage aux joueurs quelques cerises sur le gâteau bien appétissantes une fois l'aventure trépidente bouclée. Le mode multijoueur cité plus haut se pose la, sous la forme d'un bonus incontournable, et fait entrer définitivement cet excellent jeu par ailleurs, dans la légende, et de fait sur le podium du classement d'aujourd'hui.

 

Numéro 2: Conker's Bad Fur Day sur Nintendo 64

Mais il reste à Rare une dernière cartouche à sortir de sa besace sur une Nintendo 64 au crépuscule de sa vie avant que l'on ne détourne notre regard de cette période bénie pour le développeur Anglais. Enchaînant les jeux à la qualité irréprochable, il restait au développeur en réalité une seule et unique option: Profiter de ce perfectionnisme de tous les instants sur la forme, afin de proposer un titre à l'aspect résolument décalé sur le fond. Conker's Bad Fur Day sera ce chant du cygne sur la console. Et quel final que ce pari osé et pourtant, une fois de plus, totalement maîtrisé, pour conclure ce feu d'artifice mémorable de plus de cinq années ou Rare à enchainé les miracles. Certes Conker's Bad Fur Day demeure un jeu de plateforme, genre sureprésenté sur la machine, et sur le CV du studio. Mais un fois ce constat de base effectué, difficile de repprocher au jeu un manque d'originalité ou d'inspiration, qui plus est quand on sait, en coulisse que le développement du titre a été particulièrement long, ce qui équivaut bien trop souvent, à la sortie du jeu, à une...sortie de route. Même pas peur ! Ce temps long sera mis à profit par Rare pour paufinner encore plus que d'habitude son produit. Pour faire simple, le jeu est esthétiquement ce qui se fait de mieux sur Nintendo 64. Inutile de chercher un concurrent qui viendrait le titiller sur sa technique au sein du catalogue de jeux de la console, vous ne trouverez pas. Tout aussi impossible que de prendre à défaut la caméra de Conker's Bad Fur Day, véritable témoin des progrès magistraux réalisés par les développeurs en la matière sur une seule génération de consoles. Autre avantage à bénéficier de plus de temps lors du développement d'un tel jeu : Faire s'impatienter les créatifs aux commandes, et les forcer à transformer le propos d'origine, très, voire trop, formatés, en un délire scénaristique et de mise en scène. C'est un accouchement difficile pour eux, certes, mais une mise à bas presque miraculeuse qui attends les joueurs les plus patients,  à savoir, à ceux qui accordent en 2001 encore un peu d'attention à cette bonne vieille 64 bit de Nintendo. Conker's Bad Fur Day est en quelques sortes un miracle, qui prends la 2nde position de ce classement!

 

Numéro 1: Donkey Kong Country 2 sur Super Nintendo

Et puisque nous en sommes à parler de miracle, inutile de tourner plus longtemps autour du pot, avant d'annoncer un autre miracle, incarné par le grand gagnant du jour: Donkey Kong Country 2. Car la plus belle pépite du catalogue de Rare est peut-être bien cette suite au mythique premier épisode, développé par un studio alors en pleine ascencion, et sorti en trombe, fin 1994, sur une Super Nintendo en pleine lumière. Donkey Kong Country est un jeu de plateforme merveilleux, techniquement extrêmement abouti, à la durée de vie colossale, et à l'ambiance inimitable. Pourtant, après ce succès sans précédent qui voit le jeu devenir la cartouche la plus vendue par un développeur autre que Nintendo sur sa propre 16 bit, nos amis Anglais vont réussir l'impensable : Utiliser toutes les bonnes idées qu'ils n'ont pas eues, faute de temps, l'opportunité d'intégrer au sein du premier épisode, tout en perfectionnant encore techniquement ce qui peut l'être. Et cela avec un objectif, en faire le jeu de plateforme testament de sa génération. Un titre qui, objectivement, est capable d'aller chatouiller les orteils du célèbre plombier nippon. Donkey Kong Country 2 est la transformation réussie de ce pari, et c'est devant nos yeux éhabis que l'on se régale des aventures de Diddy et Dixie Kong, que l'on constate un sourire béat aux lèvres que le level design a encore été amélioré, que la durée de vie a été multipliée, et que David Wise est décidemment un compositeur de grand talent qui nous propose peut-être ici l'oeuvre de sa vie, en symbiose parfaite avec ce que l'équipe de développement propose à l'écran. Le jeu sera certes un succès commercial, et ce même si l'élément de suprise constitué par le premier épisode, cumulé à une sortie tardive sur la console atténuerons quelque peu l'enthousiasme des acheteurs. Il n'en demeure pas moins que Donkey Kong Country 2 constitue une prouesse, indéniablement la plus belle réussite de Rare, celle qui est encore aujourd'hui souvent prise en exemple afin de déterminer ce que devrait être le jeu de plateforme idéal en 2D. Bref, une référence pour l'Histoire.

 

 

Après une telle épopée sur les consoles de 5ème génération, difficile d'imaginer que le destin de Rare soit autant bousculé, et le fasse largement rentrer dans le rang au tournant du millénaire. Après un baroud d'honneur convainquant sur Gamecube avec la sortie du très convaincant Star Fox Adventures fin 2002, le développeur va quitter le giron de Nintendo pour se rapprocher de Microsoft et ainsi développer sur les futures consoles XBOX. Malgré l'enthousiasme des amateurs à l'occasion de cette annonce, les résultats mitigés vont vite faire déchanter. Les Grabbed by the Ghoulies, Kameo: Elements of Power et autres Viva Pinata ne marqueront pas les esprits. Le développement de titres dédiés au support Kinect non plus, et il faudra aller chercher du côté des anciens développeurs historiques du studio, qui ont depuis bien longtemps quitté le navire, pour retrouver un peu de l'esprit perdu de ce Rare béni des années 1990. Fort de ce constat, le plus fidèle représentant de l'ADN du studio est à aller chercher du côté d'un jeu tel que Yooka Lelee and the Impossible Lair, qui sent bon le titre de plateforme maîtrisé, façon Nintendo 64.

Inutile de nous attarder sur les oeuvres plus récentes de Rare donc, et remémorons nous pour conclure ces quelques grands jeux qui sont passés de justesse à la trappe à l'occasion du montage de ce Top 5. A commencer dans l'ordre chronologique par leurs productions sur NES citées en introduction: Wizards & Warriors et RC Pro Am, que l'on peut considérer comme leur premiers véritables succés, et à raison, puis ce que ces deux titres, dans des genres très différents possèdent déjà des bases très solides de gameplay et de game design. La série des Battletoads à connu elle, quelques suites intéressantes, sans jamais égaler le titre d'origine toutefois: Battletoads in Battlemaniacs et Battletoads & Double Dragon, demeurent plaisant à jouer, surtout à plusieurs. Bien sur la saga des Donkey Kong Country mérite d'être citée, et si le 2nd épisode reste le meilleur, Donkey Kong Country et Donkey Kong Country 3, n'en demeurent pas moins des titres de plateforme extraordinaires. Killer Instinct est également une prouesse technique sur Super Nintendo qu'il convient d'intégrer à cette liste. Enfin, tout naturellement le catalogue Nintendo 64 du studio étant d'une telle qualité, cela a été un véritablement déchirement de devoir me passer de Diddy Kong Racing, ou Perfect Dark aujourd'hui, mais surtout de Blast Corps, une production ô combien originale et en avance sur son temps.

Vous connaissez la chanson d'orénavant, n'hésitez pas à laisser un petit commentaire. Ceux-ci sont toujours précieux, et souvent bien trop...Rare! Oui j'étais obligé de la placer avant la fin de ce billet...Désolé.

Et à très vite pour un nouveau Top 5 qui fera le lien entre cinéma, littérature, et RPG légendaire. Vaste programme.