En Mars 2004, je suis en troisième ou en quatrième (mes calculs scientifiques ont été renvoyé à la NASA pour confirmation) je suis donc au collège et je me cherche une personnalité. Après des années à écouter les musiques parentales qui comprennent aussi bien le panel français de Nostalgie que UB40, MJ, Tina Turner et Bob Marley, j'écoute enfin ma propre musique sur mon lecteur CD portable. Je suis jeune et je craque donc pour les RHCP, Avril Lavigne et...beaucoup de hip-hop, RN'B et rap venu des États-Unis par le biais de MTV et de ses déclinaisons (MTVBase en premier). Depuis la sortie de NFS Underground, je suis en sus grand amateur de tuning ; je ne vais pas jusqu'à l'abonnement à ADDX, mais mine de rien, je me vois déjà au volant d'une 206 bleue turquoise avec un néon bien comme il faut et des vitres teintées...une certaine idée de la beauferie. Si je me sens obligé de préciser tout cela, c'est pour signifier ce qu'à représenté pour moi GTA:San Andreas à l'époque d'abord en terme d'univers.

Suite à Vice City, inspiré avec talent par Miami Vice et Scarface, l'équipe en charge de Grand Theft Auto, désormais Rockstar North, se sent dans l'obligation de trouver une nouvelle forme de crime organisé dans laquelle immerger le joueur. Puisque la mafia italienne installée à New-York et que les affrontements entre Haïtiens et Cubains de Miami autour du trafique de drogues ont déjà été exploités, Sam et Dan Houser décident d'emmener les millions de fans de la franchise sur la côte Ouest des États-Unis. Cette fois-ci on incarne un jeune afro-américain venant d'un milieu défavorisé, obligé de se mêler à des guerres de territoires entre gangs dans les ghettos noirs. Encore une fois, le succès sera colossale, mais cette fois-ci pas seulement pour le background.

GTA San Andreas Redemption...

Carl Johnson, enfant d'un quartier pauvre et violent de Los Santos, quitte sa ville natale en 1987 suite à la mort d'un de ses frères, Bryan. Il a bien dans l'idée d'oublier les traffiques et les galères et de mener une vie droite. Contraint de revenir dans cette ville cinq ans plus tard pour l'enterrement de sa mère, il décide de rester sur place pour aider ses amis d'enfance et partenaires de crimes à lutter contre les Ballas le gang rival de la Grove Street Family. Toujours tenue depuis son départ par son frère Sweet, ce gang auquel il a lui même appartenu, et dont il a voulu s'échapper pour en décollant pour Liberty City, ne s'avère pas forcément très heureux de son retour. C'est donc dans cette ambiance tendue, entre violents affrontements de territoires, surveillance policière orchestrée par le flic pourri Tenpenny et rancœurs familiales que Carl ''CJ'' va devoir redorer le blason de son gang...pour commencer. Ce scénario sera d'ailleurs l'occasion d'aborder par touches humoristiques, le racisme, la distribution discutable des richesses, la libre circulation des armes (de nouveau) et d'autres thèmes de société de manière un peu plus poussée que GTA:Vice City.

Carl Johnson, ancien footballeur, chef en devenir de la Grove Street Family.

Le point de départ du jeu est vraiment bien vu, puisqu'on démarre dans une partie de la ville assez malfamée et (relativement) pauvre. Cette première partie a d'ailleurs quelques remarques bien senties sur le racisme et la délinquance...et une ou deux bonne vannes à l'encontre Driv3r.

Dès cette introduction sur le scénario du titre, je vais immédiatement mettre en lumière quelque chose qui sera vérifié sur tous les pans du jeu. Alors qu'avec ce synopsis, Rockstar North aurait pu se contenter de faire un jeu dans une seule ville, en jouant surtout sur le changement d'ambiance, comme il l'avait déjà fait (brillamment) avec Vice City, les écossais décident que ce n'est plus suffisant et qu'il faut mettre la barre plus haute. Profitant de deux ans de développement et non plus de neuf mois, ils vont ainsi prendre une par une les spécificités de GTAIII et les pousser à l'extrême de ce que la PlayStation 2 permet. Le jeu ne s'appelle d'ailleurs pas GTA:Los Santos, mais bien GTA:San Andreas, car il prend place, non pas dans une ville, mais dans un état américain complet comprenant trois villes, de la campagne, une montagne et un désert. Le scénario est à la taille de l'environnement, en trois actes commençant par la guerre entre Ballas et Grove Street. Il se déplacera ensuite vers San Fierro pour finir à Las Venturas.

Une nouvelle map, une nouvelle dimension.

Évidemment, les trois villes en question sont encore une fois des modèles réduits de villes réelles. La faille de San Andreas est une ligne de rencontre entre deux plaques tectoniques sur laquelle les étasuniens ont eu le bon goût de construire deux de leurs plus grosses mégalopoles : San Francisco et Los Angeles. Bien évidemment et au vu du nom de leur troisième GTA en 3D, c'est cette fois-ci de ce côté qu'il faut chercher les ressemblances entre les villes fictives de GTA et les versions réelles dont elles s'inspirent. Los Santos est Los Angeles avec son parc d'attraction qui donne sur la plage, ses géantes lettres blanches posées en surplomb de la ville indiquant ici Vinewood et non Hollywood, son Convention Center et ses palmiers. San Fierro est San Francisco avec son Golden Gate, son tramway et ses rues montantes qui ont fait le bonheur de nombreux cinéastes d'action pour les courses-poursuites en voitures. Las Venturas enfin est Las Vegas, avec ses casinos pastiches de monuments du monde entier, ses néons à gogo et sa proximité au désert du Nevada.

Los Santos et Los Angeles.

San Fierro et San Francisco.

Las Venturas et Las Vegas.

Le vrai génie la map de GTA San Andreas, c'est sa diversité jamais vue en terme d'ambiance dans un monde moderne. (notez au passage la montagne de forme phallique derrière l'avion)

Ce terrain de jeu est quatre fois plus grand que Liberty City ou Vice City et pour qu'on ne s'ennuie jamais à le traverser, Rockstar North a rajouté quelques nouveaux véhicules à la liste déjà gonflée du précédent épisode. En plus des motos, on pourra faire les mollets de CJ sur quelques autres deux roues comme les bicyclettes, VTT et BMX ou quatre roues comme les quads. La liste des véhicules loufoques s'étend également avec l'aéroglisseur, qui peut d'ailleurs avec de l'élan planer sur bonne distance et flotter sur l'eau, ou les tracteurs, moissonneuses-batteuses et autres engins agricoles qui seront notamment utiles pour quelques missions loufoques au possible. Les voitures subissent une nouvelle fois quelques retouches et on trouve un design à mi-chemin entre GTAIII et GTA:Vice City sur les voitures connues (puisque l'on est chronologiquement entre les deux) auxquelles s'ajoutent quelques modèles supplémentaires. On peut noter d'ailleurs que la plupart des voitures sont « bolidables ». Pour finir, les hélicoptères et avions sont de retour avec quelques nouveaux venus également ; en effet il sera possible de faire décoller des avions de lignes typés Boing, des jets, des bimoteurs et même des avions de chasse. Comme pour la map qui s'agrandit, le but clairement affiché est de donner au joueur toutes les clés pour s'amuser.

Au niveau des véhicules, c'est une orgie complète.

C'est probablement l'épisode le plus riche également. Le contenu extrêmement vaste est très bien présenté par les diverses objectifs. Toutes les zones sont abordées par les aléas du scénario et ont un rôle à jouer à un moment de l'histoire. Les missions qui s'y déroulent peuvent aller de la fusillade de base, à la course de rue, en passant par le saut en parachute, la destruction de champ de cannabis, la descente de montagne en BMX et même un petit voyage express à Liberty City. Sur Los Santos, il y avait également des bagarres ponctuelles qu'il fallait résoudre pour conserver les territoires acquis à la cause de Grove Street.  En somme, si jamais on considérait la trame, bien plus longue que celle de Vice City n'était pas assez passionnante en elle-même ou que l'ambiance plus « gangsta » ne séduisait pas tout le monde, on ne pouvait pas vraiment faire la fine bouche sur la façon de la délivrer qui elle en revanche ne manquait pas d'imagination.

Le jeu offrait tellement d'à-côté supplémentaires en plus des traditionnelles missions de police, pompiers etc, qu'il était difficile de s'y ennuyer. Les parcours en avion, les courses chronométrés, les cambriolages, les quêtes de paquets de drogue...un vrai puit sans fond. D'ailleurs, la puissance du bac-à-sable était pleinement décuplée par la taille et la diversité de l'état de San Andreas. Les joueurs ayant apprécié avant tout de mettre la pagaille dans les rues avaient désormais la possibilité de balancer des missiles d'un avion de chasse en plein désert, de sauter en parachute au dessus de la forêt après avoir explosé une base militaire, d'y récupérer un quad pour se faire une course contre la police jusqu'à la montagne, d'en redescendre en 4*4 et de finir en fusillade urbaine à San Fiero ou Los Santos. C'est là que San Andreas a mis tout le monde d'accord dans le domaine du GTA-like. Le parti pris du plus de contenu, plus de folie, plus de liberté a décuplé ce qui rendait GTAIII exceptionnel à sa sortie. Malgré une ambiance qui n'aura pas plu à tout le monde, on ne pourra pas lui enlever ça.

Que ce soit en mission principale ou dans les objectifs secondaires, c'est simplement un grand n'importe quoi en terme de diversité.

Pour finir, on pourra ajouter que le titre se voulait un peu plus rôle play que ses prédécesseurs, une tendance qui sera poussée avec le quatrième opus. Outre le fait de pouvoir avoir une petite amie virtuelle, que l'on pouvait allègrement contentée « sessouellement » pour peu que l'on débloque le fameux hot coffee, il était possible de personnaliser sa voiture comme je le disais plus haut, mais surtout de faire varier l'apparence de son personnage en le relookant, en le tatouant et en lui faisant prendre ou perdre du poids. Cette dernière feature était cependant assez mal intégrée, il faut bien le reconnaître, la faute à une quasi-absence de nécessité. Pour prendre du poids, il fallait manger à outrance, ce qui n'est pas obligatoire, loin s'en faut, et pour perdre du poids et/ou gagner du muscle, il fallait aller dans une salle de sport et à part permettre de courir un peu plus longtemps, l'utilité était très limitée.

Pas mal d'idées typées jeu de rôle, mais pas foncièrement utiles, donc intéressantes pour la plupart des joueurs.

Malgré cet ensemble de qualités qui a fait titrer IGN « The best PlayStation 2 game ever? » et qui a permis au jeu de taper une note globale de 95/100 sur metacritic et de crouler sous les tests dithyrambiques, il demeure un jeu imparfait sur le plan technique surtout. La charte graphique de GTA:Vice City est conservée, mais la taille de la map et la quantité d'objet à afficher font que même sans chercher le photo-réalisme, la PlayStation 2 est à genoux. Le bugs graphiques sont légions : si l'aliasing est encore très présent sur cette génération de console, on se chagrinera surtout du poping assez lourd qui fait apparaître beaucoup d'objets à quelques mètres seulement du joueur, parfois même après qu'il soit rentré dedans avec sa voiture. Plus généralement, la réalisation au niveau modélisations, effets et textures ne semble pas avoir été amélioré (ou si peu) par rapport à la dernière mouture. Ça n'enlève sans doute pas le plaisir de jouer, mais clairement, à ce stade et avec tant d'ambition, Grand Theft Auto avait besoin d'une plus grand source de puissance pour fonctionner à plein régime.

Des épisodes sur PlayStation 2, c'est clairement mon préféré et de très, très loin. Avant sa sortie, je l'ai attendu fébrilement, scrutant tous les screens dans les magazines, relisant les previews à de nombreuses reprises, fantasmant complètement sur les possibilités. Au moment de sa sortie, j'étais parfaitement dans l'état d'esprit et dans le trip hip-hop et « gangsta' » qui était nécessaire pour au moins entrer dans la trame et en apprécier les enjeux de plus en plus travaillés malgré un humour toujours omniprésent. Une fois dedans, j'en ai apprécié chaque minute manette en main, que cela passe par les missions principales, plus inventives et parfois débiles que jamais ou par tous les à-côtés qui non seulement semblent sans limite, mais surtout sont tous fun à un moment où à un autre. Permettant de se créer de mini-histoire par sa diversité et le nombre de véhicules à conduire, GTA:San Andreas aura réussi grâce à sa map très grande, mais surtout superbement architecturée, à donner du fun à l'infini. C'est vraiment l'apogée d'une idée de base qui repose sur la liberté de mouvement, d'action et de ton que Rockstar North aura poussé depuis GTAIII. Les limites techniques parfois évidentes n'empêche pas le jeu d'être le maximum faisable à l'époque de la PlayStation 2 et de ses concurrentes. Un chef-d'oeuvre qui a bien mérité ses 17 millions de ventes sur PS2 et ses plus de 21 millions tous supports confondus.

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