Anomalie industrielle pour ses détracteurs, extension incontournable répond ses défenseurs, le 32X divise comme jamais la communauté des joueurs. C’est sous le signe de rapports de force entre filiales régionales contraire aux intérêts de Sega que le projet s’engage. Au cœur d’un cycle transitif court, les répercussions de ces rivalités intestines gangrènent la réalisation des jeux dédiés à ce périphérique 32bits, alors que le constructeur cherche un titre vendeur.

L’appel de la force ?

Au milieu de titres médiocres, brûlés par des étapes de développement écourtées, brille Star Wars Arcade. Portage du titre éponyme tournant sur Model 1, il fût réalisé par la branche Sega Interactive Development Division (SIDD) en novembre 94. L’enjeu de taille, était de procéder à une conversion sur périphérique en quatre mois seulement. Le directeur technique Christopher Warner estime le défi à la portée du studio. L’ingénieur informatique possède une grande expérience dans l’élaboration d’un moteur de jeux sur Megadrive et est à l’origine de la création du polygon engine dédié au 32X.

 

Problème, l’architecture technique de la carte d’arcade Model 1 est fondamentalement différente de celle du 32X. Le jeu d’instruction de la version arcade repose sur le Motorola 68000 et SH2 pour l’extension de la Megadrive. Un portage brut est écarté au profit d’une réécriture du code de programmation conforme à la configuration du périphérique. Et ce, malgré l’échéance imposée de quatre mois. D’autant que le directeur technique dispose d’un kit de développement 32X encore instable, d’une taille approchant celle d’un petit réfrigérateur. Souvent, la température de celui-ci grimpait rapidement pour devenir gênante pour peu que l’on dispose de son poste de travail à proximité.

La plus grande difficulté rencontrée par C. Warner fût d’éprouver la capacité du polygon engine à soutenir la comparaison avec le référent arcade. Ce dernier s’enferme deux longs mois à trouver trucs et astuces afin d’optimiser les ressources de son moteur 3D. C’est avec l’aide de son homologue Rod Nakamoto qui met au poing une technique de programmation dîtes de rastérisation des polygones, méthode d’affichage empruntée aux jeux PC. Les programmeurs passent de longues heures à jouer à la borne dépêchée par Sega dans leur bureau, leur donnant ainsi un élément de comparaison déterminant alors que les outils de développement étaient lacunaires.

Star Wars Arcade était la marque d’une rupture technologique décisive dans l’appréhension artistique des jeux de salon de Sega. Les créatifs devaient se familiariser rapidement avec les nouveaux logiciels graphiques tels que Deluxe Paint (Electronic Arts). Après quatre mois de développement marathon sur un kit de développement non finalisé, le jeu est fin prêt pour novembre 1994. Le succès commercial est au rendez-vous, le ratio 32X/SWA est de 1:1, du jamais vu. Un véritable system seller contribuant grandement à la vente de 600 000 exemplaires de 32X en janvier 95, propulsant ainsi la part de marché hardware du constructeur à 58% sur le sol nord-américain.