Récemment, je me suis lamenté sur l'ennui que provoquait le platine de Ni No Kuni, avec son farm bête et méchant pour l'alchimie. Ce à quoi, des gens très censés que je ne citerai pas car j'ai oublié leurs pseudos (mais pour faire plus poli, je vais dire que c'est pour préserver l'anonymat des propos tout ça, de toute manière ils se reconnaîtront et si vous voulez vraiment savoir qui, regardez mes statuts, je les change pas souvent, et sinon la curiosité est un vilain défaut...) m'ont répondu (attention, ceci est une retranscription avec mes mots à moi, ils ont été beaucoup plus gentils) : "Non mais tête de gland, t'es vraiment trop con de t'acharner sur un jeu qui te plaît pas, arrête de te prendre le chou et GET A LIFE !".

Et je n'ai pas su quoi répondre.

C'est vrai, que dire devant tant de réalisme, de pragmatisme ? Je suis en total accord avec ces gens. Pourquoi, POURQUOI je me flagelle ? Pourquoi je m'acharne sur des jeux qui n'en valent pas la peine ? Pourquoi suis-je aussi maso ? J'y ai un peu réfléchi, pas beaucoup car soyons honnête je me fous un peu quand même de répondre à toutes ces questions. Et voici ce que je pense. Bien sûr, tout ce plaidoyer est ici à titre purement personnel et n'engage que moi, si je fais des généralités ce sera plus pour des effets de styles ou de manches que de véritables pensées que j'ai sur le monde qui m'entoure. J'espère que je suis assez clair, sinon, tant pis.

Les trophées partent d'une bonne intention

Comme l'enfer en est pavé, les trophées, les achievements, les succès, appelez ça comme vous voulez mais ils seront regroupés sous le terme TAS à présent dans cet article, ces TAS sont à la base un moyen de montrer son kiki (ou son bonnet de soutif) entre joueurs/ses. Mais si, vous savez, dans la cour d'école, on était toujours super fier de dire à ses potes "hier j'ai battu l'Arme Emeraude trop facilement huhu et j'avais même pas l'équipe à fond...", et y a TOUJOURS un putain d'enfoiré pour te gâcher le plaisir en disant "Ahahah, non mais c'est trop has been quoi l'Arme Emeraude, moi maintenant je la tue sans même la matéria sous-marine, juste pour le kiff...". Vous remarquerez que cette phrase est construire avec un énorme mélange de blablatage générationnel, c'est une astuce pour que tous puissent s'identifier à un exemple. Malin, n'est-ce pas ? Revenons-en à notre jeune Cloud1984 en puissance, humilié par Sephi_du_34. Quelques années plus tard est apparu le réseautage social en ligne. Et là, faut dire ce qui est, c'était chiant de se montrer la kékètte en disant "ahahah j'ai fini le jeu en étant niveau 6 en faisant toutes les quêtes annexes et sans materias" à chaque nouvel ami. Et beaucoup de joueurs répugnaient à ouvrir un blog, à cause de l'image skyblog très kikoololifique.

C'est alors que les TAS sont apparus. Et oui, comment dire à chaque nouvel ami qu'on a bien torché un jeu ? En faisant les TAS. Et c'était bien. Les joueurs prenaient du plaisir à faire des trucs un peu wtf, genre tabasser de l'ennemi avec un réverbère alors qu'on est pas censé pouvoir, finir le jeu de façon totalement sournoise ou au contraire en mode rambo, bref que du bonheur. Mais voilà, le problème des TAS, c'est qu'ils dépendent de la perfidie des créateurs. Et qu'ils jouent sur le besoin de reconnaissance du joueur. Quand je parle du joueur, je parle pas du casual qui s'en fout de son score. Je parle de celui qui a une fierté, mal placée certes mais une fierté quand même. Celui pour qui faire un jeu sans avoir retourné chaque pierre, sans avoir ouvert chaque coffre, sans avoir exploré chaque dialogue n'est juste pas concevable. Et ce sont eux les plus malheureux.

Je fais légèrement parti de cette branche de joueur un peu psychorigide, un peu névrosé sur les bords. Du genre à lire tout le générique au cas où y aurait de l'easter egg, du genre à jamais appuyer sur aucun bouton pendant ce même générique au cas où ça couperait aussi la possible cinématique en sus à la fin... Celui qui guette le 100% dans le journal du jeu. Je dis que j'en fais légèrement parti car si je suis assez fier d'avoir platiné Bayonetta ou NieR, mais je n'ai aucun scrupule à abandonner un jeu que je trouve vraiment merdique sans le platiner, comme pour les Soul Calibur etc...

Et j'en souffre. Mais c'est difficile d'aller voir son médecin pour lui dire "voilà, j'ai besoin de platiner certains jeux car j'en fais une affaire personnelle"... C'est un peu du grand n'importe quoi. Je n'assume pas d'être con. Mais revenons-en aux TAS. Là où le système est perfide, c'est qu'il ment énormément. Ce n'est pas parce que tu as platiné un jeu que tu as vraiment fini un jeu à 100%. Le dernier exemple réel en date est Ni No Kuni pour ma part : impossible d'avoir un bestiaire à 100%, des heures et des heures de farm naze pour avoir 100% en alchimie, mais les éditeurs ont quand même laissé la possibilité d'avoir le platine, en ne faisant "que 90%" pour l'alchimie, en n'ayant qu'environ 85% du bestiaire dompté... Ce qui fait que d'un côté, c'est extrêmement sympathique de leur part, car ça permet à tout un chacun de réussir le platine s'il le veut vraiment (il est pas difficile à obtenir, juste longuet). Mais là où c'est perfide, c'est que ça dévalorise énormément le TAS et la valeur qu'il a. Une personne n'ayant fait le jeu "qu'à" 90% est autant récompensée que le cintré qui a vraiment fini le jeu à 100% (encore que comme je disais, pour Ni No Kuni, je crois pas qu'on puisse finir le bestiaire à 100% réel, merci de m'indiquer si je me trompe...).

Mais d'un autre côté, en faisant des TAS trop difficiles, ça risque de rebuter le joueur. Les TAS en ligne sont aussi une des grandes arnaques de ces dernières années. Quand je parle de "en ligne", je parle sur les maps généralement "multijoueur". Alors OK, quand le jeu est un jeu multijoueur de base, soit, admettons. Mais quand y a des campagnes solo, comme pour Assassin's Creed, je vois pas ce que le TAS online vient foutre là : le gars peut ne rien en avoir à péter du multi, mais sa névrose le fera quand même jouer, et s'emmerder en ligne... Tout ça pour atteindre le niveau 50 et essayer de chopper 15 PUTAINS de bonus en une seule session (oui AC Brotherhood, je parle de toi !). Le genre de TAS qui demande d'avoir des vrais gens avec qui jouer, qu'on connaît, pour pouvoir le débloquer. Et il faut une certaine organisation derrière attention... Bref, c'est vraiment chiant.

Mais dans ce cas, pourquoi continuer à jouer ? Si un jeu n'amuse plus, il perd sa fonction première. Et c'est là où je suis en total accord avec vous, chers lecteurs : pourquoi ? Je crois qu'il peut y avoir plusieurs raisons, en dehors de la névrose susmentionné.

Premièrement, il y a un côté libérateur dans le platine. C'est encore plus vrai lorsqu'on joue à un jeu qui ne nous amuse pas en terme de chasseur de TAS (oui car quand on n'aime pas un jeu dès le début et qu'on s'obstine, là ça dépasse encore plus les troubles précités). Lorsqu'on voit poper cette petite notification disant "c'est bon, aux yeux du monde, tu es un PGM, va te coucher et retire la galette car t'as plus rien à y foutre", ça fait un bien fou. Pour faire une analogie scolaire, c'est un peu comme rendre sa copie lors d'un contrôle en ayant répondu à toutes les questions de façon bien argumentée, en sachant parfaitement qu'on a tout juste : on en a chié, on a eu mal au poignet à force d'écrire vite, on s'est appliqué, on a réfléchi à toute berzingue, mais on sait qu'il y aura un 20 au final.

La seconde chose, c'est la notion de pingre/radin. C'est le sentiment que merde, j'ai payé un jeu une blinde, c'est pas pour le finir en 30h car ça fait du 2€ de l'heure et à ce prix-là je vais m'amuser à la borne avec des potes, à l'époque ma bonne dame on payait un jeu 400 F et il nous faisait plus de120h, soit 3F de l'heure, soit 0.5€ (à une vache près) de l'heure, faut arrêter la déconne, y a plus d'saison et blablabla. Donc je vais l'utiliser jusqu'à la lie. Et tant pis si le reste ne m'intéresse pas des masses, j'ai payé je le fais. Je pars du principe qu'un bon jeu fait environ du 1€ de l'heure, au-dessus c'est de l'arnaque, en-dessous c'est du bonus. Oui, on est d'accord que les vieux FF à ce compte-là aurait coûté très cher, mais ça compte pas car c'est du multi-CD, et c'est une excuse foireuse mais bon j'ai jamais dit que c'était une science exacte : mes règles, mes ajustements.

La dernière chose, assez liée à la précédente, c'est l'envie de respecter un peu le studio de développement, même si ces derniers parfois se torchent avec votre respect (les DLC tout ça... On va pas jeter de l'huile sur le feu, mais faudrait penser à se souvenir que tant qu'on achète les DLC, ils en feront...). C'est vrai, y a un clampin qui a imaginé une solution pour passer tout le niveau sans tuer un garde, c'est qu'il doit bien y avoir un moyen de le réussir, peut-être même qu'à la base on était obligé de tuer le premier méchant mais qu'il a décidé d'introduire un hack contre sa direction pour passer malgré tout sans le tuer, le pauvre designer s'est fait virer, il est peut-être sous les ponts, la moindre des choses c'est de réaliser son rêve, puis merde c'est pas la mer à boire de passer à travers un niveau rempli de laser et de caméra et de gardes avec des rondes aléatoires, tout ça pour faire plaisir à un monsieur dans la rue. J'exagère volontairement vous l'aurez remarqué, mais si une équipe s'emmerde à créer un passage alternatif possible, j'estime que la moindre des choses c'est de le prendre. Si une équipe s'emmerde à créer un boss optionnel super dur, l'intérêt c'est de lui défoncer sa race.

Ce sont ces trois raisons (en plus de mon désordre psychologique évident me faisant aimer les jeux vidéo et par conséquent crâmer les récoltes et bousiller les vaches) qui font que j'ai tendance à me faire violence. Disons plutôt que ce sont les raisons "nobles". Les moins nobles, c'est que j'ai pas de fric pour m'acheter de nouveaux jeux, y a rien le soir à la télé ce qui fait que je m'emmerde grave, et ça m'occupe assez pour attendre le moment d'aller me coucher...