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Il se terminait par :

Alors, si le jeu vidéo, curieusement, se retrouve toujours à évoquer la séduction dans sa représentation de la femme, n'est-il tout simplement pas un reflet de l'image qu'en a le public ?

Just a lady

Le sexe fait vendre, donc la femme fait vendre du jeu vidéo. Propos très basique mais qui semble tout de même fort prégnant au vu des différents exemples que nous avons déjà parcouru. Vous allez me dire : « oui bon c'pas un scoop, je peux pas faire deux pas dans la rue sans voir une affiche de lingerie fine, normal que le jeu vidéo ne soit pas épargné ». Mais vendre un produit est une chose, créer en est une autre. Si la Littérature, la Musique et le Cinéma a su fondamentalement dépasser le stade de la « boniche » en tant que représentation féminine, le jeu vidéo peut réussir à s'en passer, non ? Doucement mais surement, surtout à cause de son histoire encore fraiche et son environnement immature, il nous arrive tout de même de voir des développeurs traiter la femme sans aucun sous-entendus ou thèmes liés au sexe.

Le genre le plus représentatif est le click'n play. Si les plus anciens d'entre vous ont grandi avec Guybrush, Gabriel, Georges, Larry et compagnie, les plus jeunes eux ont plus des héroïnes en tête : Nina de Secret Files, Sunny de So Blonde, Samantha Everett de Gray Matter (écrit par une femme, Jane Jensen), Morgane, spin-off de So Blonde ou encore Mona de A Vampyre Tale. Il y a beaucoup plus de femmes désormais que d'hommes comme héros de click'n play. Pendulo continue avec ses héros masculins mais ça finira bien par basculer...
Quelle en est la raison ? La première est le même principe qu'Heavy Rain : le recul du joueur. Dans un click'n play, vous ne contrôlez jamais votre personnage. Vous contrôlez un curseur et vous résolvez vos énigmes, enclenchez vos dialogues mais vous ne contrôlez pas le comportement du personnage. Ce dernier est toujours bien écrit à l'avance et quand vous essayez une combinaison d'objets qui ne peut fonctionner par exemple, ce héros ira vous envoyer baladé, de manière plus ou moins amusante selon le jeu. A partir de là, aucune raison de ne pas profiter d'une femme, cela ne va pas émasculer les mâles en recherche de sensation forte...
L'autre raison est que le genre du click'n play nécessite patience et réflexion, là où les jeux d'action demande nervosité et skill (toutes proportions gardées). Plutôt que de jouer sur le cliché de la femme désirable, autant miser sur le cliché de la femme plus posé et intelligente que l'homme... Ces personnages cités juste ci-dessus ont toutes la même faculté à user de réflexion, d'ingéniosité saupoudré d'humour spiritueux : bref, une image d'intelligence. Pour le coup, ces personnages féminins ne jouent plus de leur charme, ne montrent pas leurs formes mais mettent en avant leur spiritualité : charmante et intelligente, l'étiquette des héroïnes de click'n play. L'idée est encore simpliste mais a le mérite d'être à contre-courant de la majorité des jeux. Ceci dit, le genre click'n play est lui aussi à contre-courant de la masse. Tout est assez simpliste mais l'image féminine y est ici plus enjolivée. Néanmoins, qu'il soit agréable ou dégradant, un cliché reste un cliché... Chacun jugera de la pertinence de ces images féministes... et donc de leurs qualités intrinsèques. Mis à part le charisme de Samantha de Gray Matter, les autres héroïnes du genre ont pour elles la qualité de leurs dialogues mais n'ont pas un caractère très poussé... Seul le ressort comique des dialogues se démarque des jeux, pas la personnalité des personnages.

Il existe des exceptions, mais très très rares, où l'héroïne d'un jeu vidéo réussit d'être traitée avec humanité et non objet de désir plus ou moins masqué. Il semblerait que la french touch ait beaucoup de respect pour la gente féminine puisqu'on pensera à un excellent personnage comme Jade, de Beyond Good & Evil. En un seul jeu, la miss s'est forgée une belle image. Journaliste engagée et téméraire, Jade est cependant traité avant tout comme une femme, pas comme un symbole à la Croft ou autre. Le personnage est très important, elle se bat pour la liberté de la presse avec un gameplay fouillé axant infiltration, photographie et quelques scènes de beat'm all mais très légères et jamais violente. La mise en forme cartoonesque du jeu aide aussi probablement à empêcher qu'un certain public se forge une fausse image de la journaliste, doublée par Emma de Caunes.
Les jeux vidéo au look cartooniste permettent effectivement de gommer efficacement toute trace de sexe même involontaire, permettant donc de forger des personnages féminins sans aucune ambiguïté. Kya : Dark Lineage, des français d'Eden Games est un autre bon exemple. Même en implantant ce personnage féminin dans un gameplay beat'm all, son traitée graphique et son background dessin animé empêche toute forme de mauvaise pensée. En théorie, tout créateur se doit de maitriser ses choix. C'est à dire que si son personnage doit susciter l'empathie mais qu'en réalité provoque l'envie (exemple à tout hasard), c'est qu'il a fait des mauvais choix : vêtements légers, formes trop amplifiées, attitude ambigüe, animations lascives, ou autres. Mais, on ne peut pas toujours contrôler les fantasmes du public. Un fantasme au sens objectif comme péjoratif. Si un type décide de se taper un film en interprétant des images ou des propos n'importe comment, il y a un moment où vous ne pouvez plus faire grand chose à part s'abaisser à être terre à terre. Et cet absence du contrôle du public apporte quelques dérives. Un personnage féminin n'ayant pas vocation à séduire peut se retrouver détournée sur le net. L'exemple qui illustre ce propos s'appelle Mirror's Edge. Coursière avide de liberté contre un monde futuriste fliqué 24H24, le personnage de Faye d'origine asiatique s'était vu « photoshopé » sur la toile avec seins gonflés, joues arrondies et yeux déridés, telle une pin-up. Kotaku avait massivement fait partagé la comparaison avec l'original et a alimenté les forums. Un détournement fantasmagorique qui a plutôt déçu les développeurs. Le producteur Tom Ferrer avait estimé ceci sur Multiplayer comme étant « triste ». Le travail autour du personnage était de la rendre crédible, humaine en misant sur son physique athlétique. Or, le fait de voir un débat animé pour préférer le travail d'origine ou une version « poupée gonflable » l'avait plutôt refroidi. Nous sommes typiquement en face d'un manque de respect du travail d'origine déjà d'une, mais témoigne surtout de la superficialité d'une bonne partie du public. Pour ne pas avoir capté l'essence d'un jeu et surtout pour dans l'héroïne, un élément de séduction qui était complètement hors-propos dans le jeu. Pourtant, rien dans le game design de Mirror's Edge incite à rendre Faye attirante ou aguichante, d'autant plus qu'on y joue en vue à la première personne... Mais cela n'a pas empêché des interprétations à côté de la plaque, révélant le manque de maturité d'un certain public.

La femme cachée

Nous passons en revue les différentes travaux vidéoludiques autour de la gente féminine, ainsi de ses diverses conséquences et interprétations. Mais en ne le traitant que pour les héroïnes. Ce choix est avant tout évident, le personnage de premier plan est toujours ou du moins le plus souvent, travaillé donc susceptible d'être le plus intéressant. Le fait de s'intéresser aux héros permet aussi de mieux contempler la connexion s'opérer entre elle et le joueur masculin. Mais il faut avouer que le sujet n'est pas intéressant que pour les héroïnes. Il y a d'autres représentations féminines qui n'ont pas besoin d'être en haut de l'affiche pour apporter du contenu.

Quand la seconde dépasse le premier

Si on a rangé certaines héroïnes dans des boites, c'est parce qu'elles n'étaient pas si subtiles que cela. En étant héroïne, elles attirent le regard, elles demandent donc plus d'attention des développeurs. Un héros doit faire vendre son jeu et on tombe fatalement, on l'a vu plus haut, dans des codes marketing de séduction repris avec plus ou moins de tact. Mais que se passe t-il quand on décide de travailler un personnage important sans que ce soit celui qui fasse vendre le jeu ? Exemple : Metal Gear Solid 3. On n'a pas eu à beaucoup retravailler le personnage de Snake pour MGS3, par rapport à son prédécesseur. Le personnage en lui-même ne gagne en épaisseur qu'en avançant dans le jeu et en éliminant les boss. Boss qui symbolisent les faiblesses potentielles du héros (the Sorrow, the End, etc). Ce sont les boss qui forgent le caractère de ce héros au visage si connu. D'un point de vue purement marketing, le joueur voit : « c'est Snake ! ». Pas besoin d'en dire davantage, Naked ou Solid, il a la même gueule, la même voix, les mêmes mimiques. Ce qui permet aux développeurs de se concentrer sur autre chose... Ces fameux boss qui construisent le Big Boss. Et à ce petit jeu qui est le boss final ? Qui sert de Maitre poussant son élève à se surpasser et à comprendre le monde qui l'entoure ? Les fans savent de qui on parle. Le personnage de The Boss est probablement un des plus emblématiques de la saga. Calme, d'apparence froide aux traits sévères, elle surplombe le héros de part son statut mais aussi le joueur par une certaine élégance et une mise en scène efficace. Là encore, le scénario nous en apprend plus au fil du temps, sur la Guerre qu'elle a menée, sur son enfant né sur un champs de bataille, etc. Des épreuves très difficiles qui rendent humain et crédible ce charismatique personnage volant alors la vedette à ce rookie de Naked Snake. Le jeu est maitrisé et cohérent, permettant de trouver dans cet antagoniste féminin un personnage complet sans tomber dans le cliché ou la superficialité.

Un autre exemple issu du Japon, Kaine de Nier. Un personnage là encore au design vestimentaire provocant, qui plus est affublé d'une certaine soif de sang maniant une épée dentelée redoutable. Dans sa partie, le joueur/héros masculin comprend que ce personnage est plein de doutes et a souffert du rejet d'autrui jouant la balance entre la force physique qu'elle incarne et sa faiblesse psychologique. Jusque là rien de bien excitant à raconter vis à vis de ce dossier. Là où le personnage prend du corps, c'est lors de sa troisième et quatrième fin. Nier contient quatre fins et elles apportent toutes des éléments différents. Et justement dans la troisième fin, le background de ce personnage secondaire s'épaissit lui ajoutant un historique un peu plus complexe et surtout on sous-entend d'elle comme étant... hermaphrodite. Un superbe pied de nez vis à vis de son design très sexy dans ses vêtements en dentelle qui a dû en exciter plus d'un... Dans la quatrième fin, le joueur sacrifie toute ses données sauvegardées et donc toute son histoire parcourue (qui représente de très longues heures de jeu) pour permettre à Kaine de vivre, offrant une ultime fin mais surtout une empathie réelle pour ce personnage féminin secondaire se révélant fort bien travaillée. Le seule problème est que pour profiter de cette subtilité d'écriture est qu'il faut quand même boucler le jeu quatre fois (même si les trois dernières fois nous demande que la deuxième moitié de jeu). Ce qui demandera persévérance.

Ultime exemple concret où la femme en second plan souffle la vedette au héros : Half-Life. Là encore, notre exemple n'est pas pris par défaut. La caractéristique du personnage de Gordon Freeman tient dans sa capacité à être le héros le moins stylé de sa génération... Pas seulement parce qu'il a une tête de geek avec ses grosses lunettes. Mais parce que nous le jouons en vue à la première personne et il ne parle pas... On ne voit même pas ses mains à cause de l'absence de body awarness, in-game. Un personnage complètement impersonnel mais avec un visage, donc sans aucun charisme possible puisque dénué d'écriture. Si tout cela passait bien en 1998 quand le jeu fut sorti, à l'heure des jeux intégralement doublés mettant en avant ses héros, le Gordon fait figure de dinosaure. C'est là qu'intervient Alyx, le side-kick féminin du héros, dans HL². D'un point de vue scénaristique, ce personnage n'a rien de très intéressant, elle suit la mouvance de Half-Life, c'est tout. Mais son design soigné, jamais too much (et pourtant on parle de types qui ont trouvé cool de mettre une combinaison orange au héros), tout en jean avec bandana et son interprétation tout en réalisme fait qu'elle a vite fait de s'attirer la sympathie des joueurs. HL n'ayant pas vocation d'en faire des tonnes, le joueur suit son aventure et les personnages qui gravitent autour de lui ne prendront pas la pose attitude pour le style. De par sa qualité tout en pudeur, le personnage d'Alyx réussit à donner de la vie dans ce FPS franchement old-school, et devient une vraie petite tête d'affiche de la série. Sans rien faire d'extraordinaire pour autant. De la sobriété classieuse.

La femme et son esprit d'équipe

D'autres jeux ont aussi accordé autant d'importance aux personnages féminins qu'aux masculins. Un certain type de jeu qui requiert un esprit et une gestion d'équipe : les RPGs. On va être obligé de taper dans le généraliste avec cet exemple mais la plupart des RPGs accordant un minimum d'importance au scénario (donc on évite les hack'n slashs) essayent toujours de gérer un équilibre hommes/femmes dans leur équipe. Un Final Fantasy japonais comme un Baldur's Gate occidental vont créer une relation entre personnages masculins et féminins. Le plus souvent, le héros sera masculin mais en tant que RPG, le switch de personnages et la gestion d'une équipe entière rend finalement l'importance des protagonistes assez équilibré. Le plus souvent dans ces jeux où le scénario mise sur le recrutement, la complicité et les relations entre êtres, les personnages féminins serviront de soutien au héros. Ce dernier ne pouvant avancer sans elle pour quelques raisons : sentimentales, altruisme, but, etc. Un Squall sans Linoa n'est rien dans FF VIII, un Kaïm n'est rien sans Sarah dans Lost Odyssey... Le personnage d'Imoen, premier soutien moral dans le scénario et premier soutien physique dans le gameplay de Baldur's Gate : idem. Au final, dans ces jeux, les personnages de sexe féminin semblant être secondaires ont toujours un rôle déterminant. D'autant plus que le joueur est libre d'accorder autant d'importance qu'il le souhaite à ces personnages en les incluant dans son équipe ou non. Un personnage comme un autre, sans aucun traitement particulier donc. Tout simplement.

Explorez la femme qui est en vous

Justement, ces RPGs offrant liberté d'accorder de l'importance ou non à ses personnages féminins nous amènent sur un autre terrain de jeu. Ceux qui prônent la liberté de mouvement et/ou d'action. Les jeux open-world sont de plus en plus courant dans le jeu vidéo et ceux-ci sont surtout munis d'un éditeur de personnage de plus en plus complet et personnalisable. Ainsi, un homme peut clairement décider de devenir une femme, le temps d'une partie de jeux vidéo. Et les joueurs de MMORPG savent parfaitement que ce genre de personnages pullulent.

Intérêt pour un homme de jouer une femme dans un MMORPG ? La première chose évidente est surtout graphique. On aura beau dire ce que l'on veut, la plupart des design de MMORPG jouent sur les stéréotypes : l'homme sera massif et la femme sera fine et bien formée. Mais là où une féministe un peu trop engagée y verra une insulte, le créateur avec un peu plus de recul verra que de par sa nature « Massive » (Multiplayer Online), on ne peut que créer des gabarits de personnages sous peine de provoquer trop de calculs lors de l'importation en ligne des avatars. Vous pouvez vérifier n'importe quel MMO, vous ne choisissez ni sa taille, ni son poids ni la corpulence. Dans ces moments là, il est obligé d'emprunter des signes reconnaissables : le contraste massif/finesse pour repérer le sexe masculin du féminin. Si on tombe dans le stéréotype visuel, il est évident que sciemment ou non, un joueur masculin va éventuellement vouloir joué avec un personnage plus fin et élégant. En faisant ce choix, nous revenons à ce qui a été décrit plus haut : le plaisir des yeux. Pendant une fraction de temps de jeu, le joueur ne prend plus son « rôle » au sérieux et va plus s'orienter vers un modèle plus fantasmagorique que de se transposer en virtuel. Un MMO fonctionne comme le monde physique et la pluralité des mentalités s'y retrouvent. Certains jouent du rôle, d'autres le skill, certains y vont même pour la tchatche, certains se prennent au sérieux, d'autres aiment flâner ou tripper. Bref, un MMO peut être abordé de différentes façons. On n'est donc pas dans la tête des gens pour savoir si leur choix d'avatar féminin va au delà du simple plaisir oculaire ou s'il y a une volonté réelle de jouer la femme. Car muni d'un chat texte, on y retrouve justement des joueurs qui « jouent » les femmes, dans le sens où ils se font passés pour elles. Soit pour la vanne, soit pour l'expérience, etc... Ce qui serait probablement intéressant pour les psychologues, voir psychanalystes pour certains mais nous ne le sommes pas. Mais c'est assez intéressant de repérer cette féminisation latente chez les joueurs vidéoludiques. Un trait qui est à recouper avec la multiplication des héroïnes de jeux vidéo que l'on a cité ci-dessus. L'autre chose est qu'une règle sur le web consiste à ce que les gens aident plus volontairement les femmes que les hommes. Quand vous demandez des renseignements, vous aurez plus facilement des réponses en montrant que vous êtes une femme (même si c'est faux) que si vous êtes un homme. Dans le cas contraire, les chances d'être moqué de « noob » s'élèvent dangereusement. Il existe ainsi une discrimination sexiste dans les relations sociales du web, bien plus fort qu'IRL. A l'inverse, peu de gens oseront vous insulter de face plutôt que derrière un écran pour le fun. C'est une situation ainsi unique d'internet où vous pouvez jouer sur plusieurs caractères différents pour arriver à vos fins. Le MMORPG fait donc logiquement parti de ce système.

Mais qu'en est-il de ces jeux solos où vous avez liberté d'incarner une femme ? Ces jeux proposant une personnalisation d'avatar sont souvent des open-worlds : Elder Scrolls, Saints Row ou cas assez uniques : les jeux Bioware comme Mass Effect pour ne citer que le plus récent. En proposant une telle option, on laisse la liberté au joueur d'incarner qui il veut. Ainsi, le verbe « jouer » prend son double-sens, vous allez diriger votre personnage mais vous allez carrément prendre ses traits. Cependant, cette liberté a un prix. Le scénario du jeu ne doit pas trop impliquer votre personnage sous peine de perdre le contrôle de votre « moi virtuel ». En effet, vous faites le choix de vous tirer le portrait, vous faites des choix ludiques et même scénaristiques puisque tous ces jeux vous offre le choix : soit de mouvement, soit d'action. Mais si le scénario force à faire faire ce que vous n'aurez pas fait en temps normal, à votre personnage, il y a une contradiction de conception. Et c'est justement le défaut numéro un que les fans ont cité sur Mass Effect 3. Car les scénaristes ont amené à une fin unique, le long de l'épisode vous voyez votre Shepard se restreindre à des choix minimisés (allez relire notre critique : personnages-clés toujours remplacés par avatar similaire ; manichéisme des choix et évidement fin unique réduisant au néant vos choix précédents). C'est donc la principale contrainte. Dans le cas d'un jeu moins scénarisé, les dialogues vont toujours faire attention à ne pas vous nommer sexuellement (monsieur, madame ou votre prénom), à partir de là, que vous soyez homme ou femme la seule différence viendra de votre propre perception. S'il y a autant de joueurs MMO faussement féminins, il y en a forcément offline. De la même manière, il devient difficile de pleinement justifier ce choix autrement que par l'esthétisme et par extension, par attraction du sexe opposé (sans forcément être sale hein...). Enfin, pour revenir sur Terre, la généralisation des créations de personnages permet tout simplement d'ouvrir la porte aux joueuses, dans un simple souci d'équité. Si c'est normal aujourd'hui, ça n'a pas toujours été le cas. Exemple encore récent : le premier Saints Row sur 360 était limité aux personnages masculins. Il y a pourtant des femmes chez les wesh-wesh...

Et donc ?

Que retenir de cette supervision d'héroïnes féminins jouées par un public majoritairement masculin ? On s'aperçoit que leur traitement est finalement très varié. Bien plus qu'un simple cliché aurait pu le laisser croire. Non, le jeu vidéo ne fait pas que de la traite de « femme-objet » ou laisse la femme au second plan. Certes, on a vu que dans la grande majorité des cas, l'esthétisme de l'héroïne prenait beaucoup d'importance, pas seulement dans les formes féminines (après tout, 90% des héros masculins ont des tablettes de chocolat hein) mais cette faculté à laisser apparaître la peau est omniprésente. Il n'y a rien à faire, c'est une tendance importante. A partir du moment que la majorité des character designers sont des hommes, il y a une prédisposition à se laisser aller dans la recherche des canons de beauté. Même si le but d'un créateur est de contourner ces raccourcis... Parfait contre-exemple : Ayami Kojima, illustratrice, a conçu la plupart des personnages de Castlevania, de l'époque Symphony of the Night. Inconsciemment on y retrouve cette même recherche de la beauté physique en dessinant des hommes aux traits efféminés. Comme beaucoup de mangas shojo, soit dit en passant. On a donc un éventail d'exemples différents des femmes virtuelles : caractère fort (presque stéréotypé), sex-appeal assumé (recherchant le désir chez le consommateur), tentatives d'épaissir les personnages (mais avec un frein à main quasi constant), intelligence prononcée (forme de cliché positif). Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'un héros doit être identifié par le public : qu'il soit joueur, spectateur ou lecteur. Il doit plaire ou intriguer, bref accrocher. Faire le choix d'un personnage féminin n'a, en théorie, rien d'anodin. Sauf qu'il y a cette fameuse réalité du marché et il ne faut pas se voiler la face, la vente par le sexe est la tactique la plus primaire mais surtout la moins risquée du marketing. Certains développeurs ne s'en cachent pas (jeux souvent japonais), d'autres essaient de masquer ça avec une tentative de background (le reboot de Lara Croft en est un bel exemple : esquisse de survival et de tension in-game mais joué par une petite nana aux lèvres « glossées » et au nombril délicat doublé par une actrice plus connue pour sa plastique que pour ses qualités). Cette réalité est celle-là. Les exemples de mauvaises interprétations vont aussi dans ce sens comme le cas Mirror's Edge. Cela n'a rien à voir avec le jeu vidéo spécifiquement mais dans la basse culture et bas instincts du consommateur que l'on a bourré le crâne avec un abus de la même stratégie marketing depuis les années 2000.

On a cependant vu au travers d'autres exemples que si un studio prenait du recul, il était capable de mettre en scène des personnages féminins passionnants (MGS3, Catherine même si la thématique sexué reste là). Donc, quand on n'essaye pas de « vendre » son jeu vidéo au travers de son héros, il est possible de se concentrer sur ses fondamentaux. En d'autres termes, choisir une femme comme héroïne c'est prendre le parti d'en faire son principal élément de vente et donc augmenter ses chances de superficialité. Rien n'a voir avec un traitement spécifique de la femme, c'est plus une question de marché. En parlant de marché : cette technique de vendre avec une héroïne sexy fonctionne bien ? Oui et non. Dans le classement des meilleures ventes de l'histoire du jeu vidéo, c'est évidement le phénomène Tomb Raider qui remporte la palme avec le deuxième épisode vendu à environ 5,2M d'unités selon VGChartz. C'est à dire que le jeu vidéo ayant une héroïne (excluant les jeux à avatars) le plus vendu, et donc à succès, est Tomb Raider II de 1997. Mais il y a plus d'une centaine de jeux mieux vendus au dessus. On aurait pu penser qu'avec autant de femmes héroïnes, plus d'une serait entrée au panthéon des jeux les plus « populaires ». Or, on n'a jamais retrouvé le phénomène Lara Croft, alors qu'un plombier italien, une souris électrique, un gangster ou encore un G.I explose ce chiffre. En gros, Tomb Raider où une agence de com' et une branche dédiée chez Eidos a vendu et travaillé l'image de son héroïne virtuelle, telle une actrice ou une chanteuse, est le seul à avoir cartonner, historiquement parlant. Un marketing très agressif qui a complètement dépassé le stade du jeu vidéo. On n'a pas retrouvé une telle « vedette » virtuelle depuis ces années là. Non pas qu'une star fait la qualité mais dans ce cas présent, participe grandement à l'acceptation et la popularisation d'une gente dans le jeu vidéo. A un plus modeste niveau, on voit que le jeu vidéo misant sur une héroïne est un public de niches... On peut mettre dans le lot : les jeux japanim' de séduction ou axé sur le public otaku, exception faite du fort succès de Lollipop Chainsaw aux Etats-Unis. Grâce à la culture « cheerleader » américaine... Mais une campagne aussi très agressive en engageant des mannequins sur un maximum de salons et de photoshootings... comme un certain Tomb Raider. On a cité quoi ? Les click'n plays où l'héroïne abuse de son intelligence qui est un marché en mode « survie » depuis vingt ans, les jeux de baston qui ont certes une bonne popularité chez le joueur moyen mais dont le suivi régulier est réservé à un public hardcore... Après ça, il ne reste plus grand chose. Le FPS et le jeu spectacle sont les succès premiers du milieu. Alors, la simple présence d'une femme fait-elle vendre ? Assurément non, même si un public restreint est forcément concerné. Mais si alimenter un public bien précis est important pour maintenir une diversité, renouveler le travail du personnage féminin en dehors des canons assez stéréotypés que l'on a dépeint va demander un peu plus de travail sur la question. Cette absence de recul étant forcément préjudiciable dans la popularisation de l'héroïne vidéoludique. Les contre-exemples ont montré qu'il n'y avait pas de problèmes pour concevoir des personnages féminins fouillés, il faudrait maintenant l'appliquer au concept d'héroïne. Une héroïne femme. Pas une héroïne qui joue aux hommes tel un énième skin de Lara Croft.

La miss britannique avait provoqué un joli mouvement révolutionnaire dans le média mais finalement personne n'a réellement suivi la pensée, juste une copie en moins bien dans la plupart des cas. Ce serait bien qu'une nouvelle héroïne vienne faire de l'ombre à Nathan Drake, Marcus Fenix, Master Chief et Kratos réunis... Histoire que Lara puisse vieillir tranquillement sous peine d'être rebooté tous les dix ans.

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