Hello tous !

Ca commence à devenir une petite tradition. A chacune de mes escapades en terres nippones, j'ai pris l'habitude de vous ramener quelques images, mais j'aime aussi avoir l'une ou l'autre petite anecdote à vous raconter pour partager un peu de l'ambiance unique de ce pays à nul autre pareil. Et ça tombe bien : les circonstances particulières de mon dernier voyage - quelques pépins physiques avec lesquels il a fallu composer là-bas - m'ont amené cette année à découvrir le pays sous un angle encore un peu différent (une petite semaine durant, on ne fait pas toujours ce qu'on veut avec son emploi du temps). Et c'est ce point de vue que j'entends vous présenter dans la bafouille qui suit.

En cette fin de mois de mars, j'avais ainsi prévu de profiter de la période de Hanami pour retourner du côté de Tokyo. Bénéficiant d'une promotion inespérée chez Qatar Airways (385 euros le billet A/R au départ de Paris), quelques amis et moi-même nous sommes donc envolés au pays des cerisiers en fleurs. Avec cette satisfaction immédiate à l'arrivée: nous tombions pile un ou deux jours avant la fameuse floraison. La fête allait donc battre son plein durant le week-end suivant dans le parc de Ueno, à Tokyo, et nous comptions bien être de la partie. Idéal pour boucler la semaine qui démarrait.

 

A la rencontre des Tokyoïtes

Au fil de ce huitième voyage au Japon, j'ai choisi de marcher, au moins en partie, sur des sentiers que j'avais déjà souvent arpentés. C'est une contrainte inévitable lorsque vous partez avec des personnes qui n'ont encore jamais visité le pays. Heureusement, le Japon est de ces destinations qui ne vous lassent jamais. Tokyo est une découverte à chaque voyage, notamment, tant ses quartiers sont mouvants, changeants au fil des multiples chantiers qui rythment les hauteurs en journée, et les axes routiers une fois la nuit tombée. Quintessence de l'esprit nippon, au passage, dans cette approche de la gestion de la voirie: ici, l'on ne bloque jamais un axe aux heures de pointe, on commence à bosser après minuit, lorsque le flot de véhicules s'est tari, et l'on s'arrête à cinq heures, lorsque démarrent les premiers métros et que les salariés redonnent vie aux quartiers.

Et puis il y a l'humain. Partout. Inévitable. Et toujours surprenant. S'offrir un Yakiniku à volonté (en 90 minutes) à Shibuya, et croiser la route de jeunes mariés qui entendent célébrer en votre compagnie - on se sera bien évidemment laissé tenter. Déguster quelques yakitori à Shinjuku, et tomber sur un groupe d'agents du fisc avec qui vous partagez le saké avant de faire le tour des lieux de vie nocturnes du quartier en leur compagnie (ils vous auront invité toute la nuit, c'est leur sens de l'hospitalité)... Et accessoirement rentrer brin éméché à l'hôtel, dans un taxi que vous aurez partagé avec l'un de ces sympathiques amis de fiesta qui a encore moins supporté l'alcool que vous. Tokyo, pour peu que vous parliez un minimum le japonais, c'est une incroyable promesse de rencontres, de découverte de personnes dont on a parfois une image un peu faussée, en Occident. Il y a bien sûr autant de caractères que de Japonais, et tout le monde n'a pas nécessairement le sens de l'accueil chevillé au corps, mais nombre de Nippons savent se montrer étonnamment ouverts et désireux de nouer contact avec des gaïjins, pour peu que vous fassiez preuve d'un minimum de respect. C'est une vérité que j'ai pu vérifier à plusieurs reprises là-bas, et qui s'est encore confirmée cette fois-ci, peut-être même plus qu'à l'accoutumée.

 

Mais revenons à nos moutons. Au menu du voyage, donc, cette année, les grands quartiers tokyoïtes, un petit tour à Akihabara (pour d'ailleurs constater qu'après une longue période de disette, les bons jeux et les bons prix y font leur timide mais bien réel retour, mais aussi pour profiter des jeux d'arcade, dont l'excellent Star Wars Pod à 360 degrés et du surprenant Dragonball Zenkai), une virée à Ginza par un dimanche matin pour découvrir qu'on a pris l'habitude, ce jour-là, de piétonniser la gigantesque avenue dès midi, et quelques escapades ici ou là dans des quartiers moins fréquentés - quelques rues peu passantes de Minami Senju et Asakusa, qui ont bien du charme, une petite halte à Ikebukuro pour y découvrir quelques chemins de traverse à l'ombre des cerisiers, et quelques heures passées à se perdre délibérément au hasard de stations de métro totalement inconnues - un exercice que je ne saurai que trop vous conseiller si vous voulez vraiment découvrir la ville autrement.

Et puis, plus grand chose.

Un petit pépin physique, et il a fallu que, bien vite, je limite mes balades. Mais à quelque chose malheur est bon: lorsque vous n'avez plus la possibilité de vous déplacer comme vous le souhaiteriez, vous cherchez des alternatives. Et au Japon, ces alternatives passent souvent par les sources thermales. Logique, d'ailleurs. A quoi bon se trouver sur une île volcanique si ce n'est pas pour en profiter ?

 

Les petits charmes inattendus d'Odaiba

Pas facile de trouver de tels équipements à Tokyo. Les bains publics existent bien, mais ils sont souvent pris d'assaut et manquent un peu de côté exceptionnel qu'on cherche quoiqu'il advienne quand on est dans un pays étranger. Heureusement, il y a tout de même quelques solutions. Dont celle de l'oedo-onsen monogatari. Histoire d'optimiser le trip, j'ai pris la direction de l'île d'Odaiba, où se trouvent des bains où se croisent chaque jour des milliers de Japonais. Incroyable installation au coeur de l'île artificielle: le lieu ressuscite, avec un kitsch désarmant, l'ambiance du Japon traditionnel. Le prix de l'entrée est un peu élevé (environ 25 euros), mais l'expérience le mérite assurément.

Une fois entré dans le saint des saints, après avoir enlevé vos vêtements (oui, tous), pour enfiler le yukata, vous vous retrouvez dans une sorte de galerie centrale où s'entrechoquent les mondes, les cultures, les personnes, les loisirs. Dans ce petit monde aux couleurs du Japon pré-Meiji, vous pouvez faire un peu de shopping et acheter des babioles ou des pâtisseries à emporter, vous pouvez déjeuner, dîner, goûter, boire un coup ou franchement vous pinter. Vous pouvez jouer à la chasse aux canards, ou tout simplement poser devant la tour centrale qui fait fureur auprès des jeunes couples nippons. Les appareils photo crépitent, les enfants courent partout, le brouhaha est omniprésent, mais diable que cet univers plaisant. Il s'en dégage une envie presque enfantine de jouer au temps d'avant, on s'observe, on s'amuse, on engage la discussion pour peu que l'on ait un peu de temps.

Et puis il y a ce contraste incroyable. Sitôt engagé dans les zones d'eau, le calme reprend ses droits. Quelques petits bassins mixtes, en extérieur, permettent d'abord de tremper ses pieds dans l'eau brûlante tout en discutant avec ses voisins. Puis vient le temps des bains. Là, chaque sexe a son espace dédié. Les femmes disparaissent sur la gauche, les hommes filent vers la droite pour rejoindre un dernier sas avant la partie de fesses à l'air. On enlève le peu de tissu qui nous reste sur le corps, on se lave soigneusement avant d'entrer dans l'eau - c'est une règle absolue des onsens, vous serez très mal vus des Nippons si vous ne la respectez pas - et on se détend.

Les bassins ne sont pas tous identiques, découvre-t-on doucement. La température de l'eau varie fortement de l'un à l'autre, ainsi que ses propriétés minérales. Et si la plupart des bassins sont en intérieur, deux rottenburos donnent malgré tout sur l'extérieur, permettant de profiter de l'air frais printanier. On s'y délasse, on se laisse aller, on papote avec l'un ou l'autre Japonais curieux de nous trouver ici, on se félicite avec lui du plaisir de ce petit moment privilégié de tranquillité quand, soudain, la plupart des baigneurs rejoignent l'intérieur et que vous pouvez profiter du bassin sans  avoir à vous serrer. Et vous y coulez quelques heures paisibles, sans voir le temps passer. De l'art d'occuper une journée, l'air de pas y toucher.

 

En route pour la montagne !

Bien sûr, rien ne vaut un véritable ryokan avec onsens pour se requinquer. Alors ni une, ni deux, c'est  vers le nord-ouest de Tokyo, à la lisière de la préfecture de Fukushima (mais tout de même à plusieurs centaines de kilomètres du site de la catastrophe, la préfecture est très grande), que nous sommes allés. Quelques heures de train pour rejoindre la montagne, faire halte dans la charmante petite ville de Takasaki, passer en vitesse par celle de Minakami pour attraper un taxi et rallier aussi vite que possible le Takaragawa onsen onsenkaku. De quoi l'on parle ? D'un incroyable ryokan traditionnel niché dans la montagne, au bord d'un torrent aux eaux limpides, et doté de rottenburos sans équivalent dans le reste du Japon.

Les rottenburos, ce sont les bains extérieurs. Le Takaragawa onsen onsenkaku en possède pas moins de quatre sur près de 700 mètres carrés, dont trois mixtes et un réservé aux femmes. Vous y allez, ici aussi, dans votre tenue d'Adam, mais la pudeur a le droit de s'exprimer par le port d'une petite serviette par ceux qui ne seraient pas totalement à l'aise avec l'idée de la nudité. C'est étrange comme la timidité européenne s'efface en ces lieux, d'ailleurs: il ne faut guère que quelques minutes pour s'accommoder de la chose et ne plus y prêter attention. D'autant que, pour cette occasion, vous êtes vite accaparés par un autre sujet: à cette altitude, il fait encore frais à la fin mars, et il n'est pas rare de voir la neige tomber. C'est exactement ce qu'il nous est arrivé. Je vous laisse imaginer la scène: vous vous baignez dans des eaux à 55, voire 60 degrés, tandis que la neige tombe et blanchit, au fil des heures, le paysage de carte postale dans lequel vous vous prélassez.

Je ne vous cache pas que j'ai très largement abusé de la chose: s'il est d'ordinaire conseillé de ne pas dépasser 20 minutes dans les eaux des onsens, c'est en heures que le bonheur s'est cette fois mesuré, là-bas. Au point aussi que je me suis éveillé très tôt le lendemain matin pour pouvoir immortaliser cet incroyable panorama sans gêner les baigneurs - avant de retourner à l'eau moi-même une dernière fois. Ce sont ces photos qui illustrent les mots que vous lisez. Vous pouvez aussi y découvrir quelques-unes des spécialités qui sont servies en ces lieux. Si le prix de la chambre peut sembler assez onéreux (environ 250 euros la nuit pour une chambre deux personnes), il est en réalité très raisonnable si l'on considère qu'il comprend l'accès aux onsens, mais aussi le dîner - de la cuisine japonaise traditionnelle - et le petit déjeuner - japonais ou "western", au choix.

Je précise ici que ce n'est de loin pas le premier ryokan avec onsen que je fais au Japon. Mais c'est à mon goût l'un des meilleurs et des plus sympas...

 

Et vint Hanami...

Autant dire, donc, que c'est des étoiles plein la tête que je suis retourné vers Tokyo pour profiter du week-end. Changement radical d'ambiance, puisque le temps de l'escapade, les cerisiers avaient fini de fleurir. Et le parc d'Ueno d'être envahi par des dizaines de milliers de personnes: c'est une coutume à Tokyo, lorsque les cerisiers ont fleuri, l'on vient entre amis, en famille, pour pique-niquer à l'ombre des arbres. Là encore, un incroyable spectacle, et une superbe occasion de faire la fête, les stands fleurissant eux aussi un peu partout pour accompagner l'événement. Un final parfait pour un voyage qui le fut, l'un dans l'autre, tout autant.

Et vous, vous partez quand ?