Je me rappelle encore de certains posts de blogs à l’époque, ça devait être en 2013 par là où un savoyard de la communauté s’amusait à retracer les différents lieux de la série Les Revenants en nommant nommément la véritable identité des lieux ainsi que leur fonction réelle. Des lieux, vous l’avez compris, renommés et utilisés autrement dans la fiction par rapport à la réalité. Je regardais ça d’un air assez distant, je ne connaissais pas Les Revenants à l’époque, ou bien vaguement, ça ne m’intéressait pas. Mais je trouvais la démarche pas conne du tout. Puis, j’ai succombé à Les Revenants l’année dernière et j’ai compris la hype. Franchement une série sans flingue, sans hôpital, sans complot, si bonne ? Seriously ? Ouiiiiii !!!!

Les Revenants se passe en Savoie, province alpine française. Le coin aussi tranquille que rustique a été frappé d’un tragique accident de bus scolaire il y a de ça 8 années dont les conséquences hantent encore certaines familles endeuillées par la perte de leur enfant. C’est dans ce contexte que l’une d’entre elle, Camille, revient, sans raison rationnelle. Elle a bien sa stèle au cimetière mais elle se tient là debout dans la cuisine devant sa mère avec le même corps que la veille de son décès, comprendre qu’elle ne revient pas grandit de 8 ans, elle revient telle quelle. Ainsi, sa sœur jumelle n’est plus son double puisqu’elle a subit les lois de la science. Etrange ? Que dire alors quand d’autres Revenants apparaissent ? Et quand ceux sont morts l’année dernière (l’action se passe en 2012) ou il y a 40 ans ? Un phénomène déroutant pour un concept aussi habile qu’innovant.

Dès lors, une ribambelle légitime de questions assène le spectateur. D’où sortent-ils ? Comment est-ce possible ? Sont-ils bien vivants ? Qu’est-ce que cette marque sur leur corps qui grandit jour après jour ? Bref, Les Revenants réussit sans mal à étayer sa palette historique pour vampiriser l’esprit du lecteur obnubilé par sa quête de compréhension. Surtout lorsqu’on sait que ces retours coïncident avec des évènements étranges : coupures inopinés d’électricité quand le canton d’à côté en jouit pleinement, montée des eaux du lac – le patelin comporte un barrage – sans raison ni possibilité de réguler. Des éléments ravivant le souvenir de la population ayant subi il y a une trentaine d’année de ça la rupture du barrage, des inondations et donc, des victimes. Décidément, la Savoie, il vaut mieux y aller en Hiver.

A mon sens, outre un concept très différenciant dans le monde des séries – l’intérêt relevant de la compréhension du pourquoi du comment, pourquoi sont-ils là mais aussi de l’impact d’une telle sidération en série sur les familles et la population en général, les craindre, les choyer ? – c’est par son ambiance, son ton que Les Revenants se démarque et impose son emprunte. En effet, la série est très calme. Pas calme dans le sens, il ne se passe rien, mais calme, dans le sens posé, avec les petites musiques d’ambiances aussi discrètes qu’évocatrices et véritablement de bon gout. Une discrétion à même de laisser la place aux envolées lyriques comme gestuelles lors de scènes poignantes en émotion, la compulsion on appelle ça, je crois. Un plaisir de tous les instants bien aidé par un casting franco-français vraiment bien ficelé et des décors savoyards fortement portés sur le naturel plutôt que la construction humaine sans âme.

C’est véritablement bluffé de tous les instants que j’ai parcouru la dizaine d’épisodes que composent la série, d’une intimité rare, elle s’érige avec brio au Panthéon des plus belles réussites de cette cuvée 2015 avec American Crime et True Detective. Se permettant le luxe de conclure sur une fin ouverte dans le bon sens du terme – comprendre qu’elle suscite des théories plus divergentes et farfelues les unes que les autres – Les Revenants démontre qu’on peut s’attacher au relationnel humain ainsi qu’à l’évolution psychologique sans arme, ni haine, ni violence. Avec juste ce qu'il faut de connivence et de mystique. Et rien que ça, si vous voulez mon avis, cela mérite le succès. Surtout quand c'est fait avec brio.

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