Finalement, le seul reproche faisable à Unsere Mütter, Unsere Väter, c'est son titre à coucher dehors. Qu'il soit décliné en allemand ou en anglais, il ne rend pas véritablement honneur au produit dont il se fait pourtant faire-valoir. En dehors de ça, le Show de seulement 3 épisodes de 90 minutes fait tout simplement un sans faute. Le thème traité, déjà, est méritant. La Seconde Guerre Mondiale vu des yeux des allemands, ce n'est pas vraiment commun dans le microcosme du Cinéma et alors, encore moins dans l'univers des Séries. Je vous épargne mon laïus sur les sujets touchant de près ou de loin à l'Allemagne, depuis mes dernières aventures, vous êtes vaccinés ! Generation War s'attache au destin lié de 5 amis allemands, tous la vingtaine, tous impliqués dans ce conflit, quel que soit le corps de métier auxquels ils appartiennent.

Ce club des cinq si jovial au début de l'aventure se compose des frères Wilhelm et Friedhelm Winter, tous 2 engagés dans la Whermacht mais non encore mobilisé. Bien que se ressemblant physiquement, les commonalités s'arrêtent là. Wilhelm, l'aîné reconnait une fois inébranlable en l'autorité qu'elle soit paternelle ou militaire. Quand son jeune frère, Friedhelm, partage des valeurs humanistes le mettant en perpétuelle contradiction avec son engagement. Ses doutes, ses réticences et ses rébellions silencieuses l'ayant mis au banc de la considération de leur père, lui-même gradé de l'Armée Allemande. Les amis de la fratrie finissant de composer le groupe avec Charlotte, infirmière dévouée à la cause et au premier abord un peu décalé par rapport aux réalités qu'engendre la guerre. Greta Müller, chanteuse de music-hall promise à une brillante carrière bien éloignée des hostilités de la ligne de front, s'amourache de Victor Goldstein, juif de son état dont vous pouvez d'ores et déjà imaginé quelles répercussions auront les différentes facéties qu'auront occasionné le régime Nazi sur sa jusque ici tranquille petite vie.

L'angle d'attaque que propose la Série est plutôt innovant. L'intrigue ne consiste pas à connaitre l'issue de la guerre puisque la Série n'ira même pas jusqu'au dénouement du conflit. Unsere Mütter, unsere Väter se concentre uniquement sur le sort de nos 5 amis, leur destin et le cheminement de celui-ci jusqu'au fameux "Weinacht in Berlin" qu'ils se sont joyeusement tous lancés pour se retrouver à Berlin fêter Noël une fois le conflit terminé, quelqu'en soit l'issu (aucun n'étant animé d'une idéologie). Generation War s'attache aux personnages, et seulement à eux. Le conflit en décors sert l'évolution psychologique de chacun d'entre eux - les drames dont ils vont être témoins, les évènements dont ils vont être acteurs - , jamais l'inverse.

Le Show n'a beau durer que 4 heures 30 en tout. L'état dans lequel le spectateur retrouve chacun des personnages en fin d'épopée est sidérant (les retrouve t'on déjà ?). Changer, ils le seront tous pour sûr. Rare sont les oeuvres à démontrer cette capacité d'emmener et de transformer logiquement la personnalité d'un personnage qui ne pensera plus pareil, ne réagira plus pareil et ne croira pas plus comme aux belles heures de l'insouciance. Il s'agit là clairement de la réussite la plus évidente de Generation Wars, vous n'allez pas reconnaitre les protagonistes que vous avez appris à cotoyer avant que tout ne commence et surtout, vous allez trouver l'évolution de chacun aussi troublante (in fine) que totalement logique.

Les nombreuses scènes aussi horribles que poignantes mettent à profit la capacité d'adaptation psychologique de protagonistes qui seront changer par les évènements auxquels ils devront chacun faire face, qu'il s'agisse de situations d'urgences, de cruauté, de panique, de peur, de faiblesse, de prise de conscience soudaine. Ce serait vraiment débile de spoiler mais qu'est ce que ces épreuves sont bien trouvées. Comme si tout superflux avait été purement et simplement balayé pour ne garder que ce qui compte et met à profit le récit et le développement de chacun face à l'insoutenable. Il faut forger la Jeunesse disait je ne sais plus qui et force est de constater que le passage à la vie adulte est aussi soudain que violent que vide de sens que beau.

Nos Mères, nos Pères ne se regarde pas. Il se vit. Une rare intrusion et introspection dans un conflit aussi multi-exploité du côté des vainqueurs que sous-exploité du côté des vaincus. D’une justesse éloquente et d’une dramaturgie saisissante, Unsere Mütter, Unsere Väter kidnappe votre attention, affute vos sens et construit un capital empathique auquel vous n’échapperez pas. 5 destins arrachés avec une facilité d’apparence déconcertante ; traduisant la grande minutie employée par les parties prenantes de l’aventure pour déployer le caractère si particulier de l’œuvre. Le pari était aussi fou à relever qu’excitant à juger et je peux sans trop m’avancer concéder qu’ils l’ont pleinement réussi. Quant à moi dans tout ça, il me tarde forcément de mon côté de découvrir ce qu’à mijoté Ubisoft à travers son récit d’un autre club des 5 centré sur la Grande Guerre : Soldats Inconnus.

 

2014-2016, Time Neves, Unsere Mütter, Unsere Väter Reserved.