« Quoi de neuf, les garçons ? ». La voix sonne clair dans l'air de Leide. Enjouée, un rien moqueuse, avec un je-ne-sais-quoi de malice à vous faire chavirer le coeur. Casquette rouge vissée au sommet du crâne, Cindy vous accueille au portail du garage d'Hammerhead, plantée sur des jambes de sauterelle étirées à n'en plus finir, plus vallonnée dans sa silhouette que les collines de Duscae.

Il n'en aura pas fallu plus pour réveiller les ronchons d'internet et autres philosophes à douze de moyenne, pour qui l'indignation fait office de mode par défaut (voire d'économiseur d'écran mental - et Dieu sait qu'ils économisent !), quand ils ne la pratiquent pas comme un sport extrême pour faire monter l'adrénaline (« parce que s'inscrire au club de pelote basque de la MJC d'à côté, c'est trop cher et en plus il faut parler à des gens »).

C'est qu'on en bouffe, de la chialerie de groupe et de la pétition Avaaz, depuis l'avènement des Castors Juniors de la pensée que sont les soi-disant « Guerriers de la Justice Sociale » (Social Justice Warriors, en V.O., parce qu'en anglais, ça claque mieux, on dirait le titre d'un direct-to-DVD avec Steven Seagal).

Tristement authentique

 

Des idéologues autoproclamés qui ont appris à réfléchir devant Dora l'Exploratrice et qui sont au débat d'idée ce que l'Inquisition Espagnole (version Monty Python) est au prêche du dimanche matin dans une petite église de campagne.

Ou, pour être plus explicite, ce que sont les membres de la Confrérie des Mauvais Mutants à l'équipe des X-Men originelle.

Dit-il avant de le rouer de coups.

 

J'avais d'ailleurs moi-même caressé l'idée (non sans m'être d'abord assuré qu'elle était majeure) d'ouvrir mon Ecole Zaroff pour Jeunes Surdoués mais ça a mal tourné. Quand j'ai demandé des  candidatures de « prodiges », pas de souci, j'en ai reçu par milliers (pas beaucoup de prodiges de l'orthographe dans le tas, ceci étant), mais quand j'ai précisé que c'était « pour apprendre à chacun à respecter la différence de l'autre pour que nous puissions tous vivre en harmonie », ils se sont barrés sur Twitter. Alors je suis devenu Onslaugh (mais c'est une autre histoire que nous vous raconterons une autre fois. Si je commence à digresser maintenant, on est pas sorti du strip-club).

« Why is Final Fantasy XV sexist ? », « Final Fantasy XV Kingsglaive has a woman problem », « Final Fantasy XV fans are sexist pigs », autant de manchettes à sensation parmi d'autres qui ont fait le bonheur des sites à clics dans les mois précédant la sortie du jeu (« pourquoi les fans de Final Fantasy XV sont des gros cochons lubriques », pour les non-anglophones. Pour reprendre le jargon SJW, on appelle ça du womansplaining : des femmes qui prétendent expliquer les hommes aux hommes qui prétendent expliquer les femmes aux femmes. S'il y a bien la parité quelque part, c'est au niveau de la bêtise humaine, j'espère que vous avez de l'aspro à portée de main, on a pas fini d'en bouffer).

A la décharge de ces schtroumpfs grognettes (fusion en 4ème transformation du schtroumpf grognon et du schtroumpf à lunettes), il faut admettre qu'on se la prend de plein fouet, la mère Cindy, sans avoir le temps de s'y préparer psychologiquement ni rien. En moins de temps qu'il n'en faut pour charger la partie (BEAUCOUP moins de temps !), la voilà qui lustre généreusement la carrosserie de notre bolide de luxe, sensuelle, lascive (« mais... mais... mais... j'avais juste demandé le plein, moi ! »), en la polissant presque de ses généreux roploplos - nous rappelant ainsi les heures les plus sombres des troisièmes parties de soirées sur M6 d'il y a vingt ans de ça (et combien de réparateurs de clim' ou de photocopieurs, bravement tombés au champ d'honneur !). A tel point qu'on se demande même si on a pas lancé The Witcher par inadvertance.

Aussi est-ce sans surprise qu'on a retrouvé la donzelle en pleines formes sur Brazzers (avant même la sortie du jeu !), ou en couverture des premiers doujins consacrés à ce dernier (ne faites pas les innocents. Vous savez tous que les doujins sont des mangas auto-édités qui, la plupart du temps, mettent en scène vos héros préférés emboîtés les uns dans les autres. Je suis Psycho-Mantis, je l'ai lu dans votre historique de recherches Google).

  

Tous ceux qui ont joué au jeu savent qu'en effet, comme toutes les femmes,

Cindy peut tirer des rayons lasers avec sa poitrine.

 

(Dans l'intérêt de la science, les curieux 18+ pourront voir

GRATUITEMENT l'intégralité du film ici)

 

Entre l'absence dramatique d'individus de sexe-féminin-non-genrés-non-carnistes-non-oppressifs au nombre des protagonistes, et cette gourgandine format XXL qui a l'outrecuidance de s'exhiber comme un pavé de rumsteak sur une assiette de petites pommes de terres dauphines (Ignis, si tu nous lis. Ha ben non, mince, tu peux plus. Je suis con, moi, alors), on se doutait bien que le couperet tomberait tôt ou tard. Les joueurs de  Final Fantasy XV sont des porcs, or je joue à Final Fantasy XV, donc Socrate est mortel. On connaît la chanson, c'est quasiment du Jul'.

 

On la connaît même d'autant mieux qu'à nouveau, elle met ici en exergue les contradictions et la superficialité intellectuelle d'un groupe d'extrémistes plus occupé à repousser les limites de la mauvaise foi qu'à utiliser ses neurones pour produire une réflexion cohérente, planqué derrière ses grandes causes pour légitimer son comportement de gougnafier (le genre qui crame de la sorcière sans état d'âme si on lui fournit le bidon d'essence. Difficile de trouver plus oppressif que les adeptes du discours non oppressif. C'est un peu comme les frites Mac Cain - sauf que les frites, c'est bon. Note ça dans ton carnet, Ignis, ce sera essentiel pour la suite de l'aventure). Parce que les grandes causes, pour un SJW, c'est un peu le totem d'immunité à Koh Lanta : avec ça, on est intouchable au prochain conseil, on va pouvoir tout miser sur la stratégie et faire bouffer du ver à soie à l'équipe adverse (alors par contre, Ignis, tu me ranges ce carnet tout de suite sinon je te le fais avaler).

 

  

Pour la parité.

Vous savez ce qu'on dit : what had been seen...

 

 

Non que le look de Cindy ne soit pas gênant, bien sûr - et à plus forte raison pour quelqu'un d'aussi délicat que moi, qui ait découvert les filles avec Candy Neige André (aaaah, combien de fois lui ai-je envié son petit raton laveur ?). Sauf que quand on ne s'arrête pas aux apparences et qu'on creuse la question (c'est fatigant, je sais, on n'apprend pas ça sur Twitter. En 140 caractères, c'est chaud), Final Fantasy XV n'est pas sexiste, c'est même tout le contraire.


La preuve par sept (et demi).

 

 

 

 

 

- Cindy Aurum (Cidney/Sidonie/tchhh, whatever) : bon, d'accord, on ne va pas se mentir, même si bosser dans un garage demande d'être libre de ses mouvements et si ça exclue les robes à corset, et bien qu'on ait le droit de vouloir rester « femme » quand on passe sa vie la tête dans le cambouis, le look de Cindy embarrasse plus qu'il n'émoustille tant il semble déplacé dans ce cadre vidéoludique tout public, alors qu'il n'aurait entraîné qu'un haussement d'épaules affligé dans un énième God of War. Semblant cristalliser en un seul personnage tout ce qu'une production nippone peut contenir de fan-service, il est si ouvertement sexualisé qu'il en devient presque agressif - en ce sens qu'il s'impose au joueur dans toute sa suggestivité, sans lui laisser le choix de le subir ou non (le pauvre. Comme on le plaint. Ouin, ouin, :male tears:, tout ça).

Il faut dire qu'on imagine la donzelle (hum, hum, je voulais écrire : « qu'on s'efforce de ne pas l'imaginer, houlala, penses-tu, on lutte de toutes nos forces ! ») plus facilement sur une scène de pole dance qu'un tournevis à la main (même si l'un n'empêche pas l'autre) ; ce qui encouragera les esprits graveleux à se fendre de traits d'humour beauf' à base de châssis, d'airbags et de pare-choc - tant cette marie-couche-toi-là semble pousser à la faute. Mais enfin, il faudrait savoir, au bout d'un moment : soit la femme a le droit de s'habiller comme elle le souhaite (aussi « légère et court vêtues » que soient ses tenues), soit Cindy est lookée comme une traînée et il y a effectivement un problème. On ne peut pas prôner la tolérance d'un côté et fustiger ce genre de fautes de goût de l'autre, sans quoi on sous-entend que ces dernières sont fustigeables dans l'absolu, mais qu'on ferme les yeux à dessein dans certaines circonstances.

Et c'est là que triomphe le génie des Social Justice Warrior, car pour dépasser ce genre de contradictions (dont ils sont coutumiers), ils possèdent un joker magique parmi des centaines d'autres : le CONTEXTE. Pour eux, les vérités vont et viennent au gré du contexte, c'est-à-dire, grosso-modo, de la vitesse du vent et de la forme des nuages (ou plus prosaïquement : de ce qui les arrange sur le moment). Aussi rétorqueront-ils présentement (ils viennent de s'inscrire sur Gameblog exprès, et ils ont déjà commencé à rédiger leur commentaire) « qu'on ne peut pas comparer Cindy à une vraie femme », dans la mesure où une vraie femme aurait volontairement décidé de porter ces « vêtements » (faute d'un terme plus adapté). Inversement, en sa qualité d'entité virtuelle issue de l'imaginaire licencieux des créateurs du jeu (ces cochons phallocrates !), notre belle mécano n'a pas eu le choix, on lui a collé ces fringues sur le dos sans lui demander son avis, dans le seul but de titiller les bas instincts des (consom)mateurs de jeux vidéo (ces jambons de Bayonne !) (tu notes, Ignis ?). Car combien d'entre nous, phacochères puants que nous sommes, n'ont en effet acheté ce Final Fantasy XV que pour se rincer l'oeil ? Ha, je n'ose compter, mais je connais un Behemot qui l'a rincé trop fort (ça va, Ignis ? Tu parais bien pâle, tout à coup ? ! Il y a un problème ?) !

A gauche : la version PS4. A droite : la version XBOX1.

(Meuuuuh non, on rigoleeeee. A gauche : la version cinématique.

A droite : la version "moteur du jeu").

 

Cette pauvre Cindy a beau ne pas exister pour de bon, elle subit tout autant qu'une autre le poids de la domination patriarcale, changée qu'elle est en femme-objet pour donner corps (c'est le cas de le dire) aux fantasmes les plus caricaturaux du public masculin (vous êtes sérieux, les mecs ? On en est encore à baver sur des nanas en bikini qui astiquent des Rolls Royce ? Pardon, excusez-moi, je croyais qu'on était en 2017 ; et plus aux première heures de la révolution industrielle. Comme quoi, c'est Baloo qui avait raison depuis le début : il en faut peu pour être heureux). Ce personnage est donc tout le contraire de cette femme libérée, indépendante, qui décide la façon dont elle s'habille sans s'occuper du qu'en-dira-t-on. Bien qu'elles portent toutes deux objectivement les mêmes frusques et exhibent les mêmes pans de leur anatomie, sur le plan symbolique, leurs deux situations sont aux antipodes - ou du moins voudrait-on nous le faire croire. Parce qu'en langage de rhéteur, ça s'appelle noyer le poisson - et vu la taille du bestiau, c'est au moins le Seigneur du Lac Vesper.

 

> Déjà, parce qu'avant d'ouvrir sa grande bouche, personne n'a pris la peine de se renseigner sur le marcassin lubrique qui a créé Cindy (rares sauront me donner son nom, d'ailleurs) ! Vérifier ses infos, sur internet ?  "Where iz ze fun in zat ?", répliquera Jean-Brian en direct de sa kitchenette. Plutôt que de s'y abaisser, cette joyeuse cohorte d'indignés est spontanément partie du principe qu'il s'agissait d'un homme, sans d'abord s'assurer que son intuition était la bonne (comme à son habitude), ce qui relève tant du cliché sexiste et que de la paresse intellectuelle. Bon, il se trouve que coup de bol, c'est bel et bien le cas, mais enfin si on se contente d'avoir raison par accident et si ça nous va bien comme ça, c'est qu'on n'est quand même pas très ambitieux sur le plan cérébral. Quitte à s'en remettre au hasard, autant jouer au Loto, on pourra peut-être y gagner assez d'argent pour s'acheter une fierté, ce serait toujours ça de pris. Au lieu de quoi certains rétorqueront qu'« une femme n'aurait jamais représenté sa semblable de façon si dégradante », démontrant par là-même qu'ils ne sortent pas souvent de chez eux, et que leur culture geek a plus de trous que le scénario de Final Fantasy XV.

> Ensuite, parce que choisie ou subie, la tenue reste la même - et sa vérité, également. N'en déplaise à ces Garcimore de l'argumentation, une vérité, c'est précisément quelque chose qui vaut dans tous les contextes, quels qu'ils soient, et pas quelque chose qui fluctue en fonction de ce qui sert ou pas nos convictions. Sans cela, on n'aurait pas créé un concept exprès, on se serait contenté d'appeler ça une croyance ou une certitude (ce qui, au fond, revient au même). Au risque d'en choquer quelques-uns, non, la terre n'est pas plate un jour sur deux « en fonction du contexte », non, le soleil ne tourne pas autour de la terre parce qu' « enfin, c'est évident, regardez dans le ciel, on ne voit que ça », et arguer que les « vérités humaines » sont beaucoup plus complexes revient à essayer d'assommer l'interlocuteur avec le monstre de la Cygilienne (l'autre poiscaille légendaire du jeu). 

Ci-dessus : groupe de Social Justice Warriors en train de préparer leur argumentaire.

 

Précisément parce qu'il s'agit d'une contradiction dans les termes, en ce sens que la vérité n'est pas humaine (la vérité, pourrait-on dire, c'est ce qui reste du monde lorsqu'il n'y a pas un être humain pour le considérer). Par conséquent, elle ne dépend pas de notre bon vouloir. Une « vérité » qui n'en serait une qu'aux yeux de ceux qui la professent n'est pas une vérité du tout, mais une tautologie.

Ainsi, un être humain (qu'il soit homme ou femme ou les deux) n'est pas « beau » ou « laid » : ces deux jugements relèvent d'une appréciation individuelle, fondée sur des critères culturels et personnels subjectifs. Il n'existe pas d'absolu de la beauté, dans la nature : celui-ci est une invention humaine, au même titre que Cindy elle-même.

Vous voyez où je veux en venir, ou je continue ?

Allez, je continue - je sais pas pourquoi, quand je regarde vos têtes, j'ai pas confiance (déjà qu'il y a des petits malinous qui vont me casser les bonbons en commentaires, comme quoi « bien sûr que si, la beauté a un absolu, sinon comment expliquer Scarlett Johansson ? » - et encore, s'ils pouvaient faire preuve d'autant de second degré, ce serait un moindre mal...).

Bref.

Permettez que j'embraie, maintenant que la Regalia est réparée grâce à vous-savez-qui.

Partant de ces constats, on conclura que la femme (ou l'homme, ou le hamster, ou tout ce que vous voulez) a « une forme donnée » qui n'est ni belle, ni laide - et pardon si j'enfonce des portes ouvertes mais par les temps qui courent, il vaut mieux trop de tutos que pas assez, les éditeurs de jeu l'ont bien compris. Par extension, la vérité de la tenue de Cindy est indépendante du contexte dans lequel elle est portée : elle n'est ni « correcte », ni « incorrecte », si bien que Cindy elle-même n'est fringuée ni « comme une salope », ni « comme une femme libérée qu'il ne faut pas laisser tomber, tu vois, elle est si fragile ».

A des années lumières de considérations aussi superficielles, on se contentera de constater objectivement que cet ensemble sexualise le personnage, dans la mesure où il met en valeur les attributs de séduction qui, chez certains mammifères (dont ceux de son espèce), contribuent à initier les rites sociaux en lien avec la reproduction : la poitrine, les fesses, les jambes et le donjon optionnel qu'on trouve entre les deux (je ne développerai pas, je ne voudrais pas spoiler). Ce constat neutre vaut dans tous les contextes, que cette sexualisation soit volontaire, qu'elle soit accidentelle ou qu'elle soit imposée. Bonne, ou mauvaise chose ? La réponse ne dépendra pas de la réalité mais du regard que nous porterons sur elle - pour des raisons qui nous sont propres et que nous pourrons TOUJOURS justifier, convaincus que nous serons du bien-fondé de notre position (sauf si c'est celle du missionnaire, mais je m'égare). Par conséquent, dès lors qu'on aura la prétention (un peu fofolle) de penser de manière rationnelle, on jugera cette tenue admissible (ou inadmissible) DANS TOUS LES PUTAINS DE CAS DE FIGURE.

On ne tranchera pas au cas par cas en fonction de ce qui nous convient : ce sont les petits enfants qui font ça et passé six ans, il faut arrêter, vraiment, ne serait-ce que par amour-propre. Ou alors lancez-vous dans la politique, au pire, mais arrêtez de brouter votre prochain sur les réseaux sociaux.

 
> Enfin, pour ne laisser aucune bouche de ventilation ouverte aux Eugène Victor Tooms de l'argumentation, admettons deux secondes que le contexte ait son importance et puisse influer sur la vérité : la femme (soi-disant) « libérée » qui (soi-disant) « choisit de porter ce type de tenue » pour (soi-disant) « se plaire à elle-même, et pas aux australopithèques de boîtes de nuit » (j'adore l'humour) subit le diktat phallocrate autant que son homologue virtuelle. La liberté qu'elle exerce n'est qu'une illusion, elle subit tout autant que ses consœurs « soumises » l'oppression du sexe fort (je vous ai dit que j'adorais l'humour ?). La seule chose qui les différencie tient au fait que la femme « soumise » subit une oppression exercée sur elle de l'extérieur, alors que la femme « libérée » a culturellement intériorisée cette oppression, au point de la considérer comme sa volonté propre (comprendre, si ça ne vous semble pas clair, qu'elle ne s'est pas affranchie du regard de l'homme, elle l'a simplement intégré et substitué au sien. On a appelle ça se faire laver le cerveau à 40° pendant plusieurs milliers d'années en séparant bien le blanc des couleurs). Et alors là, je vois venir les détracteurs : pour la première fois de leur existence, ils vont réclamer des preuves - dont ils n'ont jamais eu besoin jusqu'ici pour aboyer quand on le leur ordonnait, mais soit. Je suis d'humeur généreuse, aujourd'hui. J'ai mangé un bol de chatons, je suis parfaitement détendu. Par contre je ne garantis pas que lesdits détracteurs soient capable de suivre. Ils font peut-être ça très bien sur les réseaux sociaux, mais ce n'est pas tout à fait la même chose non plus.

Ainsi donc, dans la mesure où il n'existe pas d'absolu de la beauté féminine (comme développé plus haut), les critères qui permettront d'évaluer celle-ci sont nécessairement subjectifs, c'est-à-dire propre à chacun - ou, a minima, à chaque sexe. Qu'ils soient communs aux hommes et aux femmes (ainsi qu'on peut le constater à tous les niveaux de la société) constitue une anomalie logique, puisqu'une telle unanimité est le propre d'une vérité objective - un peu comme si tout le monde se mettait à voir l'arbre « grand », même ceux de la tribu des types qui font six mètres. Cela suppose implicitement qu'un camp a imposé ses critères à l'autre - mais lequel ? Pas besoin de chercher bien loin : dans la mesure où les critères en question relèvent du champ de la séduction et, par prolongement, de la reproduction (comme développé plus haut également), il ne peut s'agir que de ceux des « reproducteurs ». Non, parce qu'au risque de spoiler davantage, fesses ou nichons, objectivement, c'est rien que des grosses boules de graisse, ça fait moins tripper le chaland quand ils se localisent à hauteur de bedaine. Or si leur intérêt (puisque a priori, il y en a un, vu tout le foin qu'on fait autour) ne relève pas du domaine de l'esthétique, il se situe forcément à un autre niveau, situé plus bas sous les boucles de ceinture - et il n'a rien à voir avec une quelconque « beauté » transcendante confinant au divin, réduit qu'il est à des impératifs biologiques ataviques. Aussi la femme libre qui choisit n'est-elle qu'un mythe (et l'homme qui choisit, de la même façon - les critères de beauté masculine étant pareillement définis par la gent féminine, pour des raisons identiques. Et encore n'est-ce là que le haut de l'iceberg car chacune de nos décisions est conditionnée, d'une manière ou d'une autre. Ceux qui pensent y échapper dormaient profondément pendant leurs cours de philo sur Gide et ses Faux Monnayeurs). Mais je sens que je suis en train de vous perdre et que si je persiste dans cette voie, je vais lire un paquet d'âneries en commentaire (oui, je sais, il est trop tard, la moitié d'entre vous est là pour s'en régaler).

Je referme donc la parenthèse et je reviens à nos moutons (puisque les Social Justice Warriors portent très bien le pelage bouclé). Parce qu'on digresse, on digresse, mais c'est pour le plaisir de s'agiter les neurones entre gens de bonne compagnie. J'aurais pu vous épargner les cours magistraux et attaquer direct par là où ça fait le plus mal, si j'avais voulu nous faire gagner de précieuses minutes. Mais comme je sais que vous auriez passé celles-ci à chercher un site où acheter le doujin de Cindy toute nue, je me suis dit qu'un peu de génuflexions cérébrales ne pourraient pas vous faire de mal. Non parce que le vrai coeur du problème, il est autrement plus concret, pas besoin d'aller le chercher à l'autre bout de la map, ni de revenir avec pour toucher la récompense.

Parce qu'à l'instar du gros lourdingue qui réduira la femme à ce qu'il en perçoit, et qui l'interpellera en conséquence (« saaaaaalope ») -, celui qui reproche à Cindy d'être un personnage sexiste s'arrête à sa seule apparence physique, il la juge sur la foi d'un contact visuel superficiel. Exactement comme le font les sous-hommes qu'il invective à longueur de forums - et tant pis si ce n'est que symbolique : que la nana existe ou pas, les mécaniques mentales sont les mêmes (que ce soit dans la façon dont elles construisent la pensée ou les conclusions qu'elles inspirent. Comme quoi ces donneurs de leçons assermentés ne sont pas aussi irréprochables qu'ils le croient, et n'ont souvent besoin que d'une bonne occasion pour basculer gaiement du côté obscur de la force. Ça surprend quelqu'un ?).

Or la vérité de notre jolie mécano est à l'opposé de ce que suggère son apparence : non seulement elle est plus âgée que la moyenne des héroïnes de chez Square Enix (ce qui nous change agréablement des clichés inhérents au J-RPG), mais elle est apparaît également comme une  femme volontaire, dynamique, indépendante, capable de faire tourner toute seule le garage où elle bosse (Cid passant plus de temps vautré dans sa chaise longue qu'à travailler, ce connard maculiniste). Elle ne dépend d'aucun homme, que ce soit personnellement, sentimentalement ou financièrement. OSEF, des beaux chasseurs du coin avec leurs plaques qui brillent et leurs pâtés en croûte, ils ne seraient pas là que ce serait la même chose. En dépit de son short moulant et de son décolleté en mode « buffet à volonté » (du calme, Ignis. C'est du transgénique), elle ne cherche pas à mettre le grappin sur un célibataire aux revenus confortables, ni à se faire offrir une bague vingt quatre carat (et pourtant, j'ai terminé le jeu avec un sac plein de ces merdes !), ni à se faire attacher au fond de l'arrière-boutique façon cinquante nuances d'huile de vidange. Elle se contente (excusez du peu !) de faire ce qu'elle aime, comme elle l'aime, sans que nul n'y trouve à redire. Ça, pour être bonne, elle est bonne, mais dans son domaine de prédilection avant toutes choses : la mécanique (domaine longtemps considéré comme exclusivement masculin, d'ailleurs, ça n'a rien d'anodin. Cindy aurait-elle huit ans, des couettes et une clé de douze en plastoc qu'elle serait l'égérie des catalogues de jouets non-genrés).

Sauf que voilà, comme nous sommes sur le net et qu'il faut gueuler pour gueuler, quelques valeureux BAC+10 (minutes) ont protesté à leur tour, comme quoi la mécanique était une discipline réservée aux individus intellectuellement limités, et donc avilissante. Parce que c'est vrai qu'il ne faut absolument AUCUNE intelligence pour pouvoir démonter, remonter, réparer ou améliorer des systèmes mécaniques complexes. Les mecs, ils ont besoin qu'on leur dise « appuie sur triangle pour sauter », mais ils pensent que changer un carburateur est à la portée de tout le monde juste parce les garagistes ils portent des blouses bleues. C'est bien connu : comme Cindy, on est tous capables de transformer une berline dernier modèle en voiture volante de Fantomas, du moment qu'on nous ramène les trois bons bidules piqués dans les bases ennemies. Est-il d'ailleurs utile de rappeler que Cid lui-même est mécano dans la plupart des opus précédents, sans que se soit jamais posée la question de la taille de son cerveau ? Pourquoi la mécanique serait-elle jugée dégradante pour une femme, mais pas pour un homme ? Ce ne serait pas un peu sexiste, tout ça, les enfants ?  Et puis d'ailleurs, ils étaient où, les défenseurs de la cause féminine, à la sortie de Final Fantasy X ? Non parce que je ne me rappelle pas qu'on se soit trop plaint du buste de Lulu, du short de Rikku (avec un plan fessier en cinématique, miam !) ou de cette serpillière de Yuna dans le rôle de la princesse Peach.

Et justement, puisqu'on en parle, il est temps d'avancer un peu.

 

 


- Lunafreya Nox Fleuret (Kingsglaive édition) : Alors Lunafreya, pour vous la situer, c'est un peu l'antithèse de Cindy. Silhouette évanescente, longue robe d'un blanc immaculé, courbes qui se devinent à peine, port altier, dignité et mesure en toutes circonstances. Compte tenu du tollé d'indignation suscité par notre miss super sans plomb, on aurait pu penser que cette représentation de la femme façon Sainte Vierge satisferait pleinement les chicaneurs, mais ça aurait été mal les connaître, ou prêter à leurs idéaux plus de cohérence qu'ils n'en auront jamais (même en DLC). Ce qu'on reproche à la donzelle, cette fois, c'est de se couler trop docilement dans le moule de la princesse Disney, option Cendrillon, avec ses grands yeux bleus tout tristes, sa peau d’albâtre toute douce, ses cheveux d'or tout lumineux, condamnée à briquer les sols de sa prison dorée jusqu'à ce que prince charmant s'ensuive.

Sitôt qu'elle ouvre la bouche, on a l'impression que des piafs vont tomber du ciel pour chanter avec elle le dernier tube de Laam. Aussi est-on en droit de poser la question : est-il acceptable qu'au XXIème siècle, on s'accommode de personnages féminins graciles, délicats, prompts à se faire enlever par de vilains machos pour donner au héros l'occasion de se faire mousser en leur prêtant assistance ? Trouvez-vous normal qu'en 2017, on dépeigne encore ce genre d'héroïnes fragiles, souffreteuses, qui ne songent qu'à gémir, pleurer, crier, longer les murs, faire ce que les hommes leurs commandent sans poser de question, attendre qu'on vole à leur secours, sauter du pont d'une navette en flammes, en détruire une autre, foncer pied au plancher sur l'autoroute sous les rafales de tirs ennemis, défier sans sourciller les fusils pointés dans sa direction, manipuler leur ennemi sans remord pour le pousser à se griller la gueule ? Je vous le demande, mes amis, de qui se moque-t-o... heuuuu, attendez voir, c'est quoi cette histoire de gueule grillée ? Et elle est pas accrochée dans le vide, là, à la merci d'un poulpe géant et de ses tentacules ? Pourquoi elle reste aussi imperturbable ? N'a-t-elle jamais lu de hentai, la pauvrette ?

 

 Too much sexism in this movie !

 

Pour peu, à nouveau, qu'on ne se contente pas de la juger sur la seule foi de sa photo sur la jaquette du DVD, on s'aperçoit vite que question Princesse Disney, elle se pose là. La Reine des Neiges, à côté, c'est la Belle aux Bois Dormant la tête collée dans le congélo. Parce que si Nyx n'a pas grand mérite à se conduire comme le héros de ses dames (doté qu'il est des pouvoirs magiques de tonton Régis), ça n'empêche pas notre blondinette taillée comme une brindille de lui en remontrer à maintes reprises, alors que ses seules capacités surnaturelles consistent à faire du bruit avec sa bouche et à regarder les gens avec les yeux du Chat Potté. Du coup, inutile d'ergoter sans fin, faites entrer l'accusée suivante. Ha ben non, tiens. C'est la même. Putain mais vous êtes quand même une belle brochette de cassos, les mecs.

 

 

 

- Lunafreya Nox Fleuret (game edition) : on retrouve la même, mais en moins évanescente. Enfin, quand j'écris « on retrouve », je m'avance un peu parce que justement, non, on ne la retrouve pas. C'est même le problème pendant les deux tiers du jeu : arriver à la retrouver (et après on s'étonne qu'il y ait des maris un peu nerveux qui enferment leurs femmes à la maison. Elles cherchent bien, aussi, ces emmerdeuses). Expulsée du récit par une narration lacunaire, la pauvre pépette s'efface pour que Môssieur son futur époux puisse briller aux yeux de ses potes body-buildés (derrière chaque grand homme, dit-on, il y a une bobonne qui fait la popotte et qui lui recoud ses chemises - sans vouloir t'offenser, Ignis).

Oh ça, quand il s'agit de réveiller des dieux au risque de se prendre un coup de savate taille cent-vingt-douze dans les chicots, on est content de l'avoir, la Lulu, mais dès qu'il s'agit d'en reconnaître les mérites et de lui dérouler le tapis rouge, y'a plus personne (à part Ardyn et son couteau non-oppressif, merci à eux). On le tient enfin, notre flagrant délit de machisme phallocrate cis-genre carniste genré approprié culturellement ! Alors bien sûr, elle est omniprésente dans les cutscenes (au point de les monopoliser presque - et d'y apparaître après son décès - c'est qu'elle s'incruste, en plus, la radasse !). Bien sûr qu'en dépit de son absence dans le jeu, elle est omniprésente, bien sûr qu'elle marque de son empreinte l'aventure toute entière, bien sûr qu'elle est la seule avec Regis à prendre son destin à bras le corps sans se chercher d'excuses !

Mais c'est un peu facile, tout ça (il faut croire) ! Parce qu'on a chronométré son temps de parole total, et quand on le compare à celui de Prompto, le résultat est édifiant ! La différence s'évalue en heures ! Non parce qu'aussi grotesque que ça paraisse, sachez-le, il existe des individus qui jugent pertinent de chronométrer le temps de parole (ou d'apparition à l'écran) des personnages féminins - que ce soit, par exemple, dans Doctor Who ou dans The Big Bang Theory. Et là, permettez-moi d'insister parce que je ne sais pas si vous vous figurez bien le truc. Il y a sur terre des mecs (et des nanas) qui regardent The Big Bang Theory avec un calepin et un chronomètre. Moi, rien que de penser qu'on puisse regarder The Big Bang Theory, déjà, ça me colle le bourdon, vu que je trouve ça aussi drôle qu'une jambe pétée, alors de m'imaginer Charles-Edouard qui fait ses tableaux croisés dynamiques en pensant qu'il est en train de sauver le monde, ça me donne carrément envie de me pendre avec un élastique de Jokari. A ceux-là, s'ils me lisent, j'aimerais adresser un petit conseil d'ami : si jamais, d'aventure, vous escomptiez passer un test d'intelligence dans un proche avenir, gardez plutôt vos précieux euros pour investir dans une production artistique à caractère philosophique qui vous élèvera davantage, telle que Oui-Oui et les Ballons. Parce qu'il faut vraiment être (pardonnez mon oppressivité) FINI A L'EAU DE JAVEL pour prendre au sérieux une activité relevant de la PATHOLOGIE MENTALE (ah, c'est bizarre, j'ai la touche caps lock qui déconne...), jusqu'à en faire des VIDEOS et DEMANDER DE L'ARGENT POUR CA (alt + quelque chose si tu veux une cédille. Je suis pas l'armée du Salut), au lieu d'aller se cacher DANS UN TROU SANS FOND en attendant que le processus de sédimentation FASSE SON OFFICE. De l'histoire d'internet, jamais Youteubés n'auront si bien mérité leur nom, et c'est peu de le dire.

Je devrais même m'arrêter là tant je trouve insultant de devoir expliquer en quoi cette façon de penser est (attention, oppressivité encore !) d'une CONNERIE ABYSSALE (à l'image de la rhétorique SJW elle-même, qui n'est qu'apparences de raison, et non raison dans l'absolu).

Grâce à ces Abert Einstein de la lutte sociale, vous serez en effet soulagés d'apprendre que Blanche-Neige n'est pas un dessin-animé sexiste, parce Blanche-Neige y parle vachement plus que le Prince Charmant. Même chose dans le domaine du jeu vidéo avec Bayonetta :  on ne voit qu'elle à l'écran (et même TOUTES LES PARTIES D'ELLE EN GROS PLAN !). Par contre, Zorro est une série qui discrimine clairement les sourds-muets : Bernardo n'a pas une seule ligne de texte ! Voilà exactement à quel genre de contresens on aboutit quand on utilise des outils intellectuels complètement foireux. Vous le voyez, le vice de forme ? Je vous en supplie, confirmez-moi que vous le voyez ! Non parce qu'en procédant ainsi, on s'intéresse uniquement à la quantité, pas à la qualité, comme si seule la première était significative alors que c'est tout le contraire. Rien d'étonnant que cette grille de lecture soit tant prisée par des internautes dont la réflexion est profonde comme une citation de Sacha Guitry puisque dans l'absolu (on y revient toujours), c'est du caca de taureau, comme disent nos amis les anglais.

Au risque d'insister comme un harceleur de rue : comment peut-on accorder le moindre crédit à des mecs qui se tamponnent de la qualité et pour qui seule la quantité compte ? Je sais bien qu'il faut être ouvert d'esprit et faire preuve de bienveillance envers son prochain, mais là, c'est comme si ces gars-là réclamaient à grands cris qu'on vienne leur péter les phalanges, histoire que plus jamais ils puissent utiliser un clavier d'ordinateur. Alors on va l'écrire noir sur blanc en tapant très fort sur les touches en imaginant que c'est leur visage : seule la qualité est porteuse de sens. La quantité ne relève que de l'ordre du détail formel. Prenons Doctor Who, par exemple, puisqu'il en a été question : oui, il dégoise sans arrêt, un vrai moulin à paroles, ça fait partie du personnage, seulement il brasse beaucoup de vent pour dissimuler la vacuité de ses grands discours en parlant, parlant, parlant sans cesse pour que nul n'ait le temps de réaliser qu'il débite des âneries (est-ce à dire qu'il s'agit d'un SJW de l'espace?).

Le message était clair, pourtant : "ne te contente pas d'entendre. Ecoute".

Sauf que quand il se tait enfin, et que sa compagne du moment ouvre la bouche à son tour, en quelques mots à peine, elle le remet en place et elle prend l'ascendant sur la conversation. C'est même expressément pour ça que les auteurs font tant bavasser le bonhomme : pour mettre d'autant mieux en valeur les réparties de celle qui se tient dans l'ombre - sa sagesse, sa compassion, son humanité, tout ce qui lui manque cruellement -, avec d'autant plus d'impact sur le spectateur que ce qui est rare apparaît précieux et n'en gagne que plus de relief. Autant de considérations fondamentales en matière d'écriture, qui font toute la beauté et la difficulté du travail d'auteur, mais qui sont éludées par ce chronométrage absurde, prônant une égalité de temps de parole contre-nature (je vous colle un lien Youtube vers un débat politique random, ou ça va aller sans ?). Mais je suppose que quand on se borne à écrire de la fan-fiction sur les Petits Poneys dans le monde d'Hunger Games, tout ça doit paraître bien abstrait. Faut-il être demeuré, quand même (et non, inutile de répondre, ce n'est pas une question) !

Alors effectivement, du point de vue quantité, Lunafreya, c'est le Joker dans Suicide Squad - le sourire en moins. Du point de vue qualité, par contre, on n'est pas volés. Il faut la voir faire face à ses gardiens armés sans trembler d'une paupière, se prendre pour notre bon Président Whitmore (« nous n'entrerons pas dans la nuit sans combattre l'Adamankhelone pendant deux heures avant de se faire éjecter par un bug du jeu et de devoir tout recommencer  ! »), ou la jouer modo, prête à coller un averto à une divinité qui n'a visiblement pas lu la charte du forum ; pendant que Noctis... euh... pêche, qu'Ignis prépare un soufflé au Schmeurgueule, que Gladio s’empiffre de Cup Noodles et que Prompto ne-ferme-jamais-sa-gueule.

Alors bien sûr, elle ne distribue pas des mandales, mais enfin, on n'est pas dans Astérix : si on en est réduit à juger l'importance d'un personnages aux baffes qu'il distribue, autant faire vœu de silence tout de suite et partir dans une abbaye faire du Chaussée aux Moines. On se rendra utile, ce sera déjà ça. D'autant qu'au risque de paraître insistant, on ne les a pas beaucoup entendu piailler, les ligues de vertu, quand Yuna faisait sa nouillasse de temple en temple sans entraver que pouic à ce qu'elle foutait là, qu'elle traçait la route en ligne droite parce que c'était ce que sa religion (patriarcale) attendait d'elle, et qu'elle se faisait enlever toutes les vingt minutes pour que le Frank Ribéry local puisse lui sauver la mise. La SEULE fois où elle fait preuve d'initiative, il faut encore lui sauver les miches parce qu'elle a eu une idée à faire passer Will Coyote pour Light Yagami - idée qui consistait, accrochez-vous, à fausser compagnie au groupe pour aller épouser en cachette le zombie d'un homme qu'elle n'aime pas sous prétexte « qu'en tant qu'épouse, elle pourra peut-être le dissuader de vouloir cramer Spira » (entendons-nous bien. Je n'exagère pas. Le mec est vraiment cané, et seul subsiste de lui son fantôme gorgé de rancœur. Excellent plan, Fantômette. Je ne vois pas du tout ce qui pourrait mal tourner). Ah ça, c'est sûr que c'est vachement moins glauque qu'un mariage arrangé avec un gentil garçon qu'on aime bien - et surtout, TELLEMENT, TELLEMENT MOINS CON ! Et lorsqu'enfin, elle s'émancipe un peu, c'est pour faire chanteuse de J-Pop vulgaire, montrer son nombril et partir à la recherche de son Jules (ou de son Brandon, plutôt, vu le niveau du type) « parce qu'elle n'est rien sans lui ». Youhou ai-je envie de crier. Encore une belle victoire du féminisme. C'est sûr qu'à côté, Lunafreya face à Léviathan, c'est bien peu de choses (ce qui lui fait un gros point commun avec le QI de nos amis SJW). Allez, on enchaîne.

 


- A
ranea Highwind : alors, Aranea, bon, c'est quoi le problème, avec elle ? Attendez, je consulte mes fiches. Ha mince, y'a rien dessus - on aura oublié de me les remplir, c'est ballot. Alors bon, je lis dans son C.V. qu'elle a trente ans mais je suppose que c'est pas le problème, vu qu'un perso féminin qui a passé la vingtaine sans être assignée à résidence avec toute une portée de chiards, il n'y en a pas des masses non plus, tous médias confondus. Surtout que vu les sauts qu'elle fait (en bonne Highwind qu'elle est), elle doit pas être trop sujette aux crampes ou à l’ostéoporose.

Je lis également qu'elle exerce le beau métier de mercenaire et qu'elle est à la tête d'un bataillon de plusieurs centaines de soldats (MÂLES), et je subodore que c'est pas ça qui coince non plus, vu qu'elle est son propre patron et qu'aux dernières nouvelles, « mercenaire » ne figurait pas sur la liste des métiers potentiellement sexistes. Je note au passage qu'elle fait ce qu'elle veut quand elle veut et que personne ne moufte, y compris quand elle décide de trahir l'Empire et d'embarquer son matos et ses hommes. Oh et si, ça y est, je sais, elle ne porte pas une armure de plate an acier massif lestée à l'orichalque, et du coup on voit son nombril (c'est pas pareil que pour Yuna parce que chez Yuna et ben c'est la preuve qu'elle est émancipée ! Le contexte, les enfants ! N'oubliez pas le contexte ! Et n'oubliez pas que dans « contexte », il y a « texte » !). Rien à cirer du côté « femme accomplie qui porte bien sa trentaine » !

On retombe dans les travers des armures à la World of Warcraft, qui couvrent en intégralité le corps de ces messieurs, mais protègent à peine la vertu de leurs homologues féminines - et ça c'est un scandale, d'autant plus que rien ne le justifie ! Parce qu'une armure de paloche de quarante kilos, pour faire des sauts tactiques de deux cent mètres, c'est effectivement ce qu'il y a de plus pratique et de mieux adapté, on est d'accord. Vous êtes des génies, les mecs. Ça m'étonnerait pas que vous finissiez par vous marier avec un zombie pour l'empêcher de cramer votre putain de bled.     

 

 

 

- Iris Amicitia : haaaa, Iris, la girl next door par excellence, avec sa petite frimousse angélique, ses tendres sentiments à l'égard de Noctis et sa jolie coupe garçonne (genre parce qu'elle a pas les cheveux longs elle a une coupe de garçon ? TRIGGERED !). Là, les enfants, je sens qu'on tient le bon bout. On a un peu cafouillé au début mais c'est de l'histoire ancienne, on va enfin pouvoir mettre en lumière toute l'ignominie de ce jeu ! Parce qu'Iris, au fond, c'est la lycéenne japonaise typique : douce par obligation, soumise par devoir, affectant un retrait discret ainsi qu'on lui a appris à le faire (et quand j'écris « on », vous savez bien à qui je pense !).

Pire ! Elle prépare de bon petits plats, elle s'occupe des enfants, elle sourit quand on lui offre des fleurs, elle sent bon la guimauve et l'eau de rose et c'est pour ça qu'on l'aime, pour la touche de fraîcheur et de convention qu'elle apporte à l'aventure (honte à nous ! Honte !).

Rien ne saurait faire oublier cette abjectitude ! Rien ! Ni le fait qu'elle soit indépendante malgré sa jeunesse, ni sa maturité, ni la force de caractère avec laquelle elle traverse les épreuves (douloureuses) qui jalonnent sa route, ni le fait qu'elle intègre l'équipe le temps d'un voyage vers le sud et qu'elle s'y batte à armes égales plutôt que de se borner à administrer des sorts de soin !

A coups de Moggle en peluche, certes. Mais elle n'en a que plus de mérite.

Comme d'habitude, tout ça importe peu, même si Noctis et ses amis l'emmènent avec eux explorer le bois de biduletruc (130 heures de jeu et j'ai pas été fichu de retenir un nom), au lieu de l'enfermer dans la voiture avec une gourde et quelques biscuits secs, sous prétexte que « c'est dangereux comme endroit, pour une fille » ! Une honte je vous dis, même si je suis mal placé pour proférer de telles accusations dans la mesure où, pour ma part, j'y réfléchirai à deux fois avant d'emmener une gamine de quinze piges affronter un Gigantosaure level je-sais-plus-combien, responsable de la mort tragique d'au moins un chasseur de bestioles professionnel (je le sais, j'ai dû retourner chercher sa plaque).

Déjà que pour aller faire les courses au Leclerc, j'hésiterais à me la coltiner, c'est pas pour répondre aux accusations des flics quand ils me verront sortir son cadavre du coffre de ma safrane (« enfin, vous voyez bien que les traces de dents ne correspondent pas aux miennes, m'sieur l'agent ! »). Comme quoi l'accusation se fonde à nouveau sur des détails superficiels et ne résiste pas à une analyse qui l'est pourtant à peine moins. Ça vous surprend ? MOI PAS. Perso suivant !

 

 

- Gentiana : je... je ne sais pas, je ne sais plus, je ne veux pas savoir - je suis si fatigué, patron, fatigué de devoir courir les routes et d'être seul comme un moineau sous la... Oh et puis zut ! Vu que je suis lancé, je vais me risquer à émettre une hypothèse un peu fofolle, histoire de boire le calice jusqu'à l'hallali : en une décennie au service de la maison Tenebrae (et sans doute plus que ça), l'intéressée n'a pas pris une ride, pas une patte d'oie, un bec de lièvre ou un cul de Garula.

 

Non, pas elle.

 

Eux :

 

 

En cela, elle s'inscrit dans une dynamique de body-shaming, refusant symboliquement à la femme le droit de s'épanouir avec les années, tout ça pour permettre au lobby cosmétique de vendre des crèmes de jour hors de prix et de complexer davantage les petites filles impressionnables en leur imposant une idée photoshopée de la beauté propre à faire naître des désordre identitaires de gravité variable. J'ai bon ? Non ? Rah, dommage, je le sentais bien, sur ce coup. Alors ça vient peut-être de son caractère effacé, discret, servile ? Pas un mot de plus, j'ai compris, je sors mon chronomètre. Voyons, voyons... Une minute, deux  minutes... cinq minutes quarante en tout et pour tout - soit moins de temps de parole que Prompto en deux minutes (oui, c'est un des paradoxes propres à l'intéressé). Par contre, on ne peut pas lui reprocher de ne pas apparaître dans le jeu vu qu'elle photobombe les deux tiers de ses photos (une bien belle revanche sur la vie, moi je dis). Après, bon, je pourrais écrire qu'elle sert d'intermédiaire entre les dieux et les hommes et que c'est pas du job d'été chez Mac Donald, ça - sans compter qu'elle fait également office de réceptacle à Shiva la Glaçéenne (qui relève quand même de l'ordre du divin et tout), mais je me risque ici à émettre une autre hypothèse un peu moins fofolle que la précédente, à savoir que tout le monde s'en fout. Elle est gentille, elle sourit tout le temps, c'est une victime de l'oppression masculiniste et puis c'est tout, le reste n'a que peu d'importance - y compris la manière dont elle change le bad guy en glaçons pour Ricard, suite à une réflexion déplacée frisant le harcèlement de rue (« wesh mademoizelle t'es aussi belle qu'en ton dernier jour zarma ». Elle te l'a bien calmé, le sauvageon. D'un doigt. Chez moi, on appelle ça « refroidir ses Ardyn » - Jean Bloguin, humoriste). Alors bon, c'est vrai, je suis pas psychologue, je ne sais pas ce qu'il faut aux gens mais à mon avis, c'est des tartes dans la gueule et puis basta.

 


- Camélia Claustra : c'est une femme d'âge mûr et elle est à la tête de la cité la plus riche et la plus civilisée de l'aventure. D'autres questions ou ça va ? Surtout, vous me le signalez, hein, si je vais trop vite ou si mes raisonnements sont trop compliqués.

 


- Ignis Stupeo Scientia : il fallait bien que ça arrive. Cette fois, j'ai eu beau chercher, je n'ai rien trouvé pour prendre la défense de ce triste personnage. En effet, Ignis représente tout ce qu'on ne peut plus tolérer dans une œuvre de fiction contemporaine : elle cuisine, elle coud, elle veille sur le reste de l'équipe comme une nounou, entièrement dévouée qu'elle est à Noctis, son maître phallocrate. Autant de clichés rétrogrades, qui contribuent à renforcer des stéréotypes malsains dans l'inconscient du grand public. 

Alors bien sûr, des petits malins pourraient objecter que c'est un homme, sous le fallacieux prétexte que c'en est un, mais à mon sens, c'est quand même un peu fastoche, comme sophisme. Genre parce que c'est un homme, ça peut pas être une femme ? Ha ben bonjour les mentalités réactionnaires ! Voilà comment on en arrive à nier l'existence des genderfluid, des fluctuosexuel et des vampires de Twilight (Team Edward en force !)...

 

Fort de ces considérations, on est en droit de se demander où elle peut bien se situer, la prétendue dimension sexiste de cet épisode XV ? Au niveau des romances expurgées de la trame narrative - bon sang, un RPG sans affaires de cœur ni bisous mouillés dans la flotte, qu'est-ce que ça fait du bien (même l'histoire d'amour principale est aussi froide qu'un poisson crevé) ? Du côté des femmes actives de Lestallum, qui en remontreraient aux malabars les plus robustes dans l'exécutions de tâches manuelles complexes, et qui jouissent d'une liberté totale questions sorties nocturnes ? Au fait qu'on puisse leur adresser des signes de main, et que ça puisse être interprété comme du harcèlement de rue ?

Ou simplement au fait qu'il n'y ait pas de femmes dans l'escorte du Prince ? Non parce que si on va par là, il n'y a pas de Mexicains non plus. Est-ce à dire que le jeu est raciste, de surcroît ? Que l'équipe de développement ne peut pas saquer les gros moustachus qui jouent du banjo entre deux combats de lucha libre ?

C'est bien les niakoués, ça !

Tous des fachos, en plus d'être fourbes, cruels et de manger du chien (Ignis, à toi de jouer, prépare-nous un de ces hot-dogs dont tu as le secret) !

Parce que oui, j'ai oublié de vous avertir, pour les SJW (qui sont à la surdouance ce que le Caméléon était à la Trilogie du Samedi), l'absence de quelque chose est automatiquement assimilé à la présence de son contraire (à la manière du tristement célèbre « si tu n'es pas avec moi, tu es contre moi », qu'ils mettent en pratique plusieurs fois par jour). Par exemple, s'il n'y a pas de personnage de couleur dans une œuvre de divertissement, alors c'est qu'elle est raciste (d'un autre côté, s'il n'y a pas de personnage blanc, l’œuvre n'est pas raciste pour autant parce que « ta gueule c'est le contexte »). Même problématique en ce qui concerne la gent féminine qui, si elle est absente du casting principal, suffit à démontrer le sexisme dégueulasse qui règne dans le monde du jeu vidéo (tant pis pour l'aspect « enterrement de vie de garçon ». Le contexte, on l'a dit, c'est uniquement quand ça nous arrange. De toute façon, les enterrements de vie de garçon, c'est sexiste aussi. Mais pas les enterrements de vie de jeunes filles. Parce qu'elles font partie d'une minorité opprimée, m'voyez ?).

Alors je ne sais pas pour vous mais moi, de toutes les âneries prodigieuses que peuvent aligner les SJW au kilomètre carré de commentaires, j'ai une tendresse particulière pour cette dernière, parce qu'elle repousse les limites de la crétinerie avec un tel aplomb qu'elle en devient presque émouvante.

Les Trois Mousquetaires ? Raciste, y'a pas de noirs ! The Full Monty ? Sexiste, y'a pas de femmes ! Les Moomins ? Racistes, ils sont blancs ! Les Schtroumpfs ? Sexistes, y'a qu'une femme et elle a été créée par Gargamel (et racistes aussi à cause des Schtroumpfs noirs, qui se mordent la queue pour se transmettre des maladies) ! Les Eddas nordiques ? Racistes, y'a pas de noirs dedans, et c'est un peu facile de prétexter que les mecs qui ont écrit ça ne connaissaient pas leur existence, ils avaient qu'à se documenter ! Seul au Monde avec Tom Hanks ? Raciste ET sexiste (y'en a que pour les ballons gonflables, dans ce putain de film ! ça devrait être puni par la loi) ! Le dernier porno trash de chez Brazzers ? Ni raciste, ni sexiste par ce qu'il y a un grand black hermaphrodite dedans. Les jeux de la série Hyperdimension Neptunia ? Carrément féministes, on y croise que des fillettes « qui s'habillent comme elles le veulent » !

C'est un peu pareil dans le joyeux monde du petit déj', d'ailleurs, quand on y pense : quand vous choisissez de vous faire une tartine de confiote, c'est FORCEMENT parce que vous ne pouvez pas blairer le Nutella, c'est bien connu. Que... quoi ? Comment ? « Pas du tout, vous pouvez aimer les deux » ? Je... hein ? Le monde ne serait pas entièrement composé de 0 et de 1 ? Les frères-soeurs-cousins-grand-oncles Wachowski nous auraient menti ? On ne serait pas dans la Matrice ? Ha merde. Moi qui me réjouissait de vous savoir tous à poils dans une cuve à alimenter des Iphone 7...

Mais enfin, je n'empêche personne de persister à penser le contraire.

D'ailleurs, si vous êtes dans ce cas, surtout, n'hésitez pas. Envoyez-moi juste une vidéo de votre prochaine soirée resto, quand vous enchaînerez coup-sur-coup grec-thaï-chinois-japonais-arménien-antillais-martiniquais-marocain-algérien-tunisien-égyptien-italien-anglais-etc, en terminant par un petit goulash de patates à l'auberge Polonaise pour faire glisser tout ça (pardon aux minorités opprimées que j'ai oubliées - et plus particulièrement au peuple Flunch -, mais ce papier est déjà assez long comme ça), histoire d'être sûr de ne discriminer personne. Après quoi passerez-vous les deux semaines qui suivent à vous ronger les ongles en vous posant la brûlante question : « fréquenter ces restos ne relève-t-il pas de l'appropriation culturelle, et ma démarche gustative n'aurait-elle pas une connotation colonialiste ? » (vous avez deux heures). Ou sinon vous pouvez aussi arrêter d'être con, mais j'ai bien peur que ça vous demande davantage d'efforts et c'est pas trop votre truc, les efforts, j'ai remarqué.

Sachez donc, chers guerriers de la justice sociale, que la vérité objective d'un casting de jeu sans persos féminins, c'est que le jeu comporte un casting sans persos féminins et que le reste, c'est dans vos PUTAINS DE TÊTE - à plus forte raison quand, comme ici, les personnages secondaires du « beau sexe » (encore ne faut-il pas le regarder de trop près) sont si loin des clichés qui nous hérissent le poil (parce qu'on ne s'épile pas, vu que ça aussi c'est sexiste). Une œuvre sexiste, c'est une œuvre qui présente la femme comme inférieure à l'homme, et comment voulez-vous qu'on la présente comme inférieure à l'homme si on n'en présente pas ! Pareil pour le racisme, le carnisme, le rétrogradisme religieux et tous les mots en « isme » que vous pourrez bien inventer le soir quand vous vous ennuyez parce que vous n'avez pas de vie. Si demain, vous écrivez une histoire qui mettrait en scène l'un des derniers peuples libres d'Amazonie, vous allez y coller aussi un Portugais et un Chinois pour ne pas qu'on vous accuse de racisme ? Si vous écrivez une histoire qui se passe dans une prison, vous allez prétexter qu'il s'agit d'une prison mixte pour y coller des hommes ET des femmes, en nombre égal, dont vous chronométrerez les temps de parole avec du matos d'entraîneur pro ?

 

 

 

Sérieusement, les mecs. Pardonnez-moi si je digresse en conclusion mais il faut arrêter. On ne joue pas, là. Ce sont des problèmes de société graves, dont il est question dans ces lignes, pas un de vos challenges ou de vos chaînes Facebook "à reposter douze fois sinon le fantôme de Gwendolynne il va tro tro sortir de ta télé pour te léché les piés la nuis". Ils ne sont pas destinés à vous divertir, encore moins à vous faire mousser. Ce sont des affaires de grandes personnes, et pas des gamineries en monde ouvert pour s'occuper entre deux jobs (notez le subtil parallèle avec la structure du jeu, ce sera bien le seul truc un peu fin de cet article). Alors si vous ne voulez pas vous sortir les doigts du cul, au moins, sortez-les de celui des autres parce qu'à force d'y chercher la merde, vous allez la trouver. Je n'invente rien, c'est physiologique.

 

Vous voulez d'un monde meilleur, plus juste, plus équitable, plus civilisé ? J'ai un scoop pour vous : vous n'êtes pas les seuls. Sans doute est-ce même en partie pour cela que certains joueurs se sont tourné vers ces univers imaginaires, « améliorés », sur lesquels ils ont prise et qu'ils peuvent sauver d'une menace concrète, sans avoir à se résigner ou à se compromettre. La grosse différence, c'est que nous, gens du commun qui ne passons pas des heures à chasser du salopard sur le net, nous avons un peu d'éducation. Nous nous souvenons de nos cours d'histoire. Nous savons que les avancées sociales, les vraies, ne se font pas planqué derrière un écran, en braquant davantage les gars réfractaires au progrès et en les confortant dans leurs opinions rétrogrades à force de les traiter de tous les noms. On n'a jamais vu quelqu'un évoluer dans le bon sens parce qu'une troupe de ninjas du web lui est tombé dessus à quinze pour le traiter publiquement de gros enfoiré. Ça ne marche pas comme ça, quand bien même aurait-on raison de le faire.

 

Au contraire, on ne fait qu'envenimer les choses, renforcer la position de l'interlocuteur, monter les individus les uns contre les autres, blancs contre noirs, noirs contre blancs, femmes contre hommes, hommes contre femmes et quand on a fini, qu'on s'est bien défoulé sur le clavier, on n'a rien apporté, rien changé, rien produit, on a juste remué la boue, attisé la haine, fait passer les féministes pour des hystériques et les anti-racistes pour des fanatiques forcenés, contribuant ainsi à discréditer par l'exemple les mouvements d'idées dont on se réclame (abusivement). 

 

 

 

Du génie, comme d'habitude.

 

 

Mais c'est pas important, pas vrai ? L'important, c'est que vous puissiez gueuler comme des bœufs et vous défouler gratuitement en tapant en groupe sur des « méchants » : ça fait monter l'adrénaline, et puis ça donne l'impression mensongère qu'on appartient à une élite.

 


C'est là que le bas blesse.

 

Autant on ne peut qu'approuver, respecter, admirer celles et ceux qui luttent au quotidien pour que la femme jouisse (ce serait déjà pas mal, tiens, pour un début !) des mêmes droits que l'homme (oui, aussi), qu'elle bénéficie d'une équité en termes de salaire (comme c'est déjà le cas dans la fonction publique), qu'elle puisse disposer de son corps comme elle l'entend, qu'elle soit libre d'aimer qui elle le désire, autant on doit conchier (et dans « conchier », il y a...) celles et ceux qui militent pour le port du string ficelle au bureau ou qui font une affaire d'état du sexe présumé d'un PUTAIN DE DINOSAURE DE JEU VIDEO (qui n'en a pas, vu qu'il n'est qu'un PUTAIN D'ASSEMBLAGE DE PIXELS). Comment voulez-vous que le grand public prenne le mouvement féministe au sérieux quand les deux se posent sur un pied d'égalité ? Nan mais si vraiment, ton kiff, c'est d'aller bosser avec une ficelle dans la raie, vas-y, fais-le, vis ton rêve les cheveux au vent, fais ta révolution, ça va changer ta vie ! Mais attends d'avoir obtenu les avancées sociales qui comptent, avant de pinailler pour des broutilles (en plus, mon exemple est pourri, tout le monde a le droit d'aller bosser avec les sous-vêtements de son choix, du moment qu'il met un truc par-dessus. Mais vous m'aurez compris) (écrit-il pour s'en persuader).

 

 

 

 

Comment celles et ceux qui hurlent au harcèlement de rue dès qu'on leur dit bonjour peuvent-ils avoir l'indécence de se croire l'égal de celles et ceux qui luttent contre l'excision, contre le mariage forcé, contre la traite des de-la-couleur-qui-vous-plaira-je-ne-veux-stigmatiser-personne ? On parle bien là d'un putain de BONJOUR ! Le genre de trucs un peu bizarre que les êtres humains s'adressaient encore spontanément il n'y pas si longtemps quand ils se croisaient dans la rue, avant que vous deveniez tous des robots égotistes et que vous cessiez de considérer votre prochain comme un autre vous-même !

 

Et même quand ce « bonjour » s'accompagne d'un compliment ou d'une demande de numéro de téléphone, où est le problème, du moment que le type reste poli et qu'il n'insiste pas ? Comment, oui, peut-on avoir la dégueulasserie de comparer ça à ce que subissent les vraies victimes de harcèlement de rue, celles qu'on pelote, qu'on colle, qu'on insulte, qu'on menace, qu'on moleste ou qu'on viole ? Je l'entends bien le « mais j'ai pas envie qu'on me dise bonjour, moi ! J'en ai assez qu'on me dise que je suis belle ! », mais hé, c'est la vie en société, ça, cocotte, moi aussi, des fois, on me parle et j'ai pas envie de répondre , mais si c'est ce que tu subis de plus oppressif dans ta vie, tu pourras t'estimer heureuse, y'en a même qui aimeraient être à ta place (tu le crois, ça?). Oser assimiler ça à un « suce-moi, salope », c'est à vomir.

 

Luttons activement contre ce sexisme-là, avant de jeter en prison les mecs qui disent « bonjour ». De la même façon, avant de coller un hashtag #pas dans la rue dans son profil, penser à celles qui voudraient pouvoir aller boire un verre tranquille sans que ce soit forcément interprété comme une invitation à la séduction, merci pour elles.

 

 


 

 

Au-delà, si vraiment, vous aspirez à être un authentique « guerrier de la justice sociale », éteignez votre PC, quittez votre chambre, arrêtez de vous chercher des excuses, engagez-vous dans une association de proximité qui œuvre dans le sens de vos convictions. Il y en a toujours, quand on fait l'effort de chercher, et elles ne bouderont jamais une paire de bras supplémentaires. Aussi serez-vous accueillis chaleureusement et contribuerez-vous POUR DE VRAI à rendre le monde meilleur - par petites touches, oui, mais c'est toujours ainsi que celui-ci a progressé : pas à pas, grâce aux actions SUR LE TERRAIN des petites gens, plutôt que les grands discours démagos de ceux qui braillent dans les micros (ne parlons pas des BD complaisantes qui ne prêchent que des converti-e-s).

 

Allez-y, si vous êtes sincères. Ne vous contentez pas d'un don paypal de temps en temps, impliquez-vous personnellement, agissez, confrontez-vous à la réalité, dans ses aspects qui vous agréent comme dans ceux qui vous agréent moins (parce qu'il y en aura toujours, et votre vision de la société n'en mûrira que davantage - je le sais bien, j'en ai pris pour cinq jour par semaine pendant sept ans). Seulement voilà, je sais, ça demande des efforts, un investissement personnel, un peu de temps donné et bien que vous l'ayez, ce temps (personne ne vous demande de signer pour 35 heures), vous vous trouverez toujours des excuses pour ne pas franchir le cap. Parce que le bénévolat, c'est pas glamour, c'est pas payé et ça fatigue. Alors que se connecter sur Twitter, ça prend dix secondes et deux clics, c'est pas comparable - mais c'est révélateur de la portée véritable de votre engagement. Hashtag #c'estquoitonexcuse? Or pendant que vous vous y répandez en injures, en moqueries, en pavés redondants - comme autant de quêtes annexes dépourvues de sens (alors qu'il vous suffirait de signaler les propos que vous jugez problématiques) -, le monde tourne sans vous, il ne vous attend pas. Ça vous rappelle quelque chose ?


Aussi reprendrais-je à mon compte les propos du père Ardyn (dont j'ai tendance à partager le point de vue, quand je vous lis) : « pendant que des femmes de chair et de sang étaient battues, torturées, vendues, trahies, bafouées, alors qu'elles souffraient le martyr, toi, au même moment, tu étais assis en pyjama devant ton écran, un paquet de chips à portée de main, en train d'essayer de faire entendre raison à Naruto_du_69_leBOSS. Pendant que d'autres militants étaient dans la rue, au contact de celles et de ceux qui en avaient besoin, en train de poser les pierres de l'avenir en lequel tu crois, tu t'indignais en meute d'un sexisme de jeu vidéo qui, le cas échéant, n'en est pas un ».

 


Ce temps et cette énergie pourraient-ils être mieux employés ?


Sans doute que non, pour un vrai samouraï de l'internet.

 

 

 

Allez hop, générique !

 

Lyrics : le Comte Zaroff.

"Chant" : Liehd

Sur une musique de J.Porry/G. Salesse avec Bernard Minet en fond bien dégueulasse parce que ce fichu Comte n'a même pas été fichu de m'en trouver une version instrumentale.

(rends-toi service : protège tes tympans dans les aïgus - et le reste du temps aussi)

(Non mais moi je ne voulais pas le faire mais il a menacé ma famille, vous comprenez ?)

 

Et pour le Karaoke, c'est par ici.

 

*

 

Pour prolonger :

 

Un post incontournable et édifiant de l'Odieux Connard, jamais aussi bon que quand il s'attaque à des questions de société :

 

John Smith, Social Justice Warrior

 

A lire jusque dans les nombreux échanges qui ont suivi en commentaires (auxquels j'ai moi-même ajouté quelques pierres - que j'ai jetées parfois très fort, et parfois moins).

 

Par contre, je le précise à toutes fins utiles, dans la mesure où certains comprennent de travers : non, ce post ne parle pas des Indiens d'Amérique. Enfin si. Mais en fait non.

 

*

 

 

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