Certains voyaient dans ce Tron: l'Héritage un extraordinaire défi de faire d'un vieux film visionnaire des années 70 l'un des blockbusters de l'année. D'autres, les blasés du manque de créativité du cinéma Hollywoodien, attribuaient ce film à l'avalanche de suites, remakes, reboots et autres adaptations qui trônent sur les productions majeures du cinéma Hollywoodien, à tel point que les studios n'en finissaient plus de fouiller dans leurs vieux cartons pour remettre des licences au goût du jour. Si vous m'aviez demandé mon sentiment avant la projection sur ce Tron, j'aurais certainement été plus proche de la deuxième option.

Mais quoiqu'il en soit, Tron c'est avant tout l'histoire d'un film annonciateur du phénomène qui a englouti notre génération:

LES GEEKS!!!

 

Le film, en avance sur son temps, exploitait déjà la fascination pour les mondes virtuels et l'engouement crée par l'apparition des ordinateurs qui représentaient alors l'inconnu. Néanmoins, le public n'était pas prêt pour un tel discours et le film fit un bide monumental au box office. Au fil du temps et au fur et à mesure que le virtuel faisait parti intégrante de notre quotidien, une communauté se créa autour du film et lui voua un culte. Captant cet engouement autour de l'oeuvre, Disney décida alors de remettre la licence au goût du jour, un choix au risque tout à fait calculé. En effet si le public de l'époque de Tron n'était que peu sensible aux problématiques virtuelles du film, ce second opus arrive à une époque où les individus ont grandi avec les ordinateurs et ne pourraient plus s'en passer, de telle sorte que le film avait bien plus de chances de trouver écho auprès du public.

Et le moins que l'on puisse dire, c'est que ce Tron: l'Heritage est bel et bien un film de geeks, je sais que ce terme revient de plus en plus fréquemment dans mes articles mais il est difficile de ne pas le mentionner compte tenu du nombre hallucinant d'influences qui parsèment ce Tron: l'Heritage. Tout y passe, de Star Wars à Matrix en passant par 2001 et Blade Runner voir carrément Ghost In The Shell et Dune, le film en viendrait presque à toucher la fibre nostalgique des cinéphiles. Pour être à la hauteur de ses influences, le réalisateur Joseph Kosinski, jeune prodige de la pub débutant dans le long, a doté son film d'une esthétique électronique absolument démentielle, chaque plan étant esthétisé à outrance. Soutenu par son impact visuel saisissant, par la meilleure 3D qu'on ait vu depuis Avatar et par une bande son jubilatoire (merci Daft Punk) le spectacle de Tron: l'Heritage est assuré.

Walt Disney Studios Motion Pictures France

 

Et comme cela arrive souvent dans ce genre de cas, cette perfection visuelle ne peut trouver écho auprès de l'aspect narratif. Le film comporte tous les éléments emblématiques du genre mais les exploite souvent avec une maladresse enfantine. Là encore, tout y est, de la métaphore biblique tellement explicite qu'elle n'en est même plus une métaphore, les discours philosophiques sur la création et le libre arbitre, sans oublier l'inévitable dimension familiale susceptible de réunir les foules et rappelant la présence de Disney en arrière fond. Un peu comme si le film voulait allier l'intelligence des Wachowski à l'accessibilité d'un Pirates des Caraïbes. Néanmoins, malgré ses défauts évidents et qui seront impardonnables pour beaucoup, l'histoire se laisse suivre avec un plaisir véritable, principalement grâce à son choix d'accorder une grande importance à la relation père-fils qui demeure le coeur du récit, fort heureusement plus que les discours métaphysiques qui tombent souvent à l'eau, et par la capacité assez inattendue du film de plaire à un public beaucoup plus large que les habituelles productions live de Disney clairement destinées à un jeune public.

Alors certes ce n'est pas un film qui nous empêchera de regretter le temps où Disney était l'auteur de grandioses dessins animés auxquels même les Pixar actuels ne peuvent rivaliser (Alladin, le Roi Lion etc etc) avant de décider d'investir dans la production de films live. Certes je ne serais pas hypocrite, sans sa dimension visuelle et auditive absolument extraordinaire, le film perdrait 80% de son intérêt. Mais en l'état actuel des choses, voilà un blockbuster tout à fait honnête et respectable qui hausse clairement le niveau comparer aux Pirates des Caraïbes, Monde de Narnia et autres Prince Of Persia. Et honnêtement, on n'en attendait pas tant.

Garrett Hedlund. Walt Disney Studios Motion Pictures France

 

Un dernier mot (encore une fois) sur la 3D du film qui dispose, outre sa réelle qualité, d'une caractéristique assez particulière. Ne soyez pas surpris lorsque vous verrez au début du film un message vous annonçant que certaines scènes du film sont en 2D. En effet, les scènes se déroulant dans notre monde réel sont dans un format traditionnel tandis que le passage dans le monde virtuel de Tron est également le passage du film dans la 3D. Durant une ancienne vidéo où je m'étais interroger sur la montée en puissance des images de synthèse dans le cinéma, j'avais vers la fin opérer un rapprochement entre cet intérêt du public pour le virtuel avec l'affirmation alors nouvelle de la 3D ( https://www.youtube.com/watch?v=-aa2a2MIJ44 ) . Je n'aurais pas pensé voir aussi vite une démonstration si explicite de cette théorie.

Walt Disney Studios Motion Pictures France

Daft Punk. Walt Disney Studios Motion Pictures France