A default d’innover

Tout le monde connait l'adage : C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes.
De ce point de vue-là, Bravely Default a tout pour plaire : un mets délicat aux saveurs à l'ancienne se permettant même de peaufiner la recette de Grand-Maman sur bien des points (une ergonomie aux petits oignons, entre autres).
Hélas, aussi savoureux que puissent être les ingrédients, il semblerait que le cuisinier ait décidé de chier dans le plat en guise de touche finale, si bien que ladite soupe laisse un goût bizarre dans la bouche de celui qui daigne la terminer (avec beaucoup de courage et en faisant la grimace) ... Enfin, goût bizarre, pas tant que ça en fait, si l'on en croit les critiques dithyrambiques reçues par le jeu ("le renouveau de Final Fantasy" ... ouais, mes couilles ouais).

En tout cas que peut-on dire de Bravely Default si ce n'est qu'il s'agit d'un énorme gâchis ?
Plus que correct dans sa première moitié, le jeu aurait pu être bon, voire même très bon, si toutefois il avait su s'en tenir à ça.
On aurait certes critiqué son manque de panache ainsi que son rythme un peu trop lent (le jeu est archi structuré et impose de longues séances de farming), mais on lui aurait pardonné au profit de ses nombreuses qualités : son univers charmeur, ses personnages mignons et attachants, le système de combat vraiment sympa grâce au système de brave/default rafraîchissant et le retour en force des jobs que l'on attendait tous.
D'autant plus que cette première partie dure déjà une bonne cinquantaine d'heures, alors pourquoi-the-fuck avoir décidé d'en rajouter et de tout foutre en l'air ? 

Les (rares) villes sont aussi belles (et petites) que les (nombreux)
dongeons sont moches (et chiants)

 « Le renouveau du RPG »

Car qu'est-ce que cette deuxième moitié si ce n'est une putain de blague ?!
Vous avez dépassé le chapitre 4 ? Vous savez donc de quoi je parle. Vous n'avez pas dépassé le chapitre 4 ? Grand bien vous fasse mais attention vous allez vous faire spoiler.
Chacun des chapitres 5 à 8 ne sont en effet que de vulgaires NewGame+ imposés (et à peine maquillés). Ainsi, il vous faudra recommencer sans cesse la même série d'évènements : Retraverser la majorité des dongeons, affronter de nouveau les boss et bien évidemment restaurer ces quatre saloperies de cristaux (la même scène - au dialogue gémissement près - copiée-colée 20 fois dans le jeu. Non mais sérieux ?).

Alors oui bien sûr, tout ça se fait en mode accéléré (Vous conserverez votre vaisseau, les "job boss" sont optionnels et apparaissent en chunk dans les deux derniers chapitres, et surtout vous skipperez toutes les scènes après avoir constaté que le jeu se fout bel et bien de votre gueule puisque les dialogues ne changent pas d'un iota...), mais sérieusement quel est - Ô Seigneur - le foutu intérêt de tout ça ?

Eh ben c'est simple. Ce bourbier se veut justifié par l'existence de pseudo-univers parallèles. Et à partir de là, c'est bien évidemment le festival de la couille et du non-sens. Il est d'ailleurs rigolo de constater que le scénario essaie tant bien que mal de s'accrocher - un peu - au début (avec la version complète/alternative du journal d'Alternis notamment), mais lâche très rapidement l'affaire face à un trop-plein d'ambition.
Attention, point de culpabilité pour autant : une fois le premier replay terminé, le jeu s'en branle et assume totalement ses contradictions... Quitte même à en devenir taquin, puisqu'après deux, puis trois, puis quatre replay, c'est un énorme majeur pointé que vous verrez (en 3D!) sortir de l'écran de votre 3DS. C'est beau la technologie!

Et quelle récompense pour les plus patients (persistants ? Acharnés ? Masochistes ?!) d'entre nous : un twist maladroit qui n'en est pas un, un plongeon tête la première dans un manichéisme primaire et simpliste (chose que le titre avait pourtant pris soin d'éviter dans ses premiers chapitres) et un combat de fin (sans fin) qui n'est là que pour justifier les fonctionnalités ultra-connectées (et ultra-reloues) du titre.

Les combats et les jobs sauvent (tout juste) la mise

Cerise sur le gâteau

Si je n'ai pas parlé de la difficulté qui va croissante à chaque replay (au point de devenir "Insane" sur les derniers chapitres, mais au moins cela permet de vous maintenir en éveil), elle n'égale en rien la bêtise gigantale des 4 héros de l'histoire.
En effet, bien au-delà du manque de fun, le plus énervant est de devoir subir leur passivité. Mais attention, j’insiste, on parle bien ici de VRAIE Passivité. Le genre dont ferait preuve un gouvernement de Gauche bien décidé à affronter un « ennemi sans visage » pour vous donner un exemple bien parlant.
Lors de ces 4 derniers chapitres, les personnages de Bravely Default sont complétements à L'OUEST. Car entre chaque univers, les bougres ne souffrent d'aucune amnésie, totale ni même partielle. Au contraire, ils incarnent le fil conducteur reliant les univers entre eux et sentent quand même venir l'enfumage (oui, ils sont très perspicaces). Or ça ne les empêche pas de se laisser trainer bêtement et tranquillement tel des technophiles lors d'une convention Apple; de reproduire les mêmes actes stupides (5 fois quand même) ; d'être surpris exactement aux mêmes moments ; Et surtout de ne JAMAIS essayer, ne serait-ce qu'une seule fois, de la jouer un chouïa différemment (un léger doute de la part de Ringabel à un moment donné mais... mais non en fait). J'exagère, parfois ils veulent jouer aux marioles, genre "Annh là je suis sûr que tu vas nous dire ça!"... Ridicule.

Dans tous les cas, cette idée de génie de quadruple replay - qui plus est très mal branlée - relève tellement du sabotage pur et dur que c'en devient impardonnable. Cela aurait pu (dû) se limiter à du Pur Gameplay : Une idée intéressante pour un vrai NewGame+ (Post-Ending donc), avec du challenge et nécessitant donc de maxer ses personnages et de peaufiner ses stratégies. Ou même à la limite, cela aurait été tolérable UNE seule fois (si les faits avaient étés correctement intégrés moyennant une écriture un peu plus soignée). Mais non, ici les 4 replays font partie intégrante de l'histoire et vous ne pourrez pas y couper si vous voulez voir la vraie fin du jeu. 

Le voilà donc l'étron qui vous attend patiemment au fond de votre savoureux petit bol de soupe.... Et comme le disait probablement vos Mémés : Si vous voulez profiter du dessert, il va falloir tout finir mes petits loups! 
Et justement terminons par le plus cocasse : Qu'est-ce qu'on vous propose en guise de dessert une fois l'aventure réellement terminée ? ... Eh bien de repartir pour un vrai NewGame+ pardi!