Bien qu'elle fut ma toute première console, la Nintendo NES continue de chauffer très régulièrement chez moi et sa ludothèque ne cesse de me surprendre malgré le temps qui passe. Qui peut se targuer d'avoir joué à tous ses hits étant gamin ?! Encore aujourd'hui, il m'arrive de prendre un jeu qui traine dans ma ludothèque depuis des années, et de le faire jusqu'à en voir l'écran de "FIN". Dernièrement, ce fut au tour d'un titre ô combien significatif, l'incarnation même d'un premier épisode qui pose les bases d'une série devenue culte : Castlevania.

Eh oui, j'ai la NES depuis ma plus tendre enfance, mais je me penche sur ce Castlevania seulement 30 ans après sa sortie ! Pourtant, j'apprécie énormément la série et j'ai d'ailleurs bravé bon nombre d'épisodes majeurs : Castlevania IV, Chi no Rondo, Symphony of the Night, Aria of Sorrow, Portrait of Ruins... L'envie de saisir du bout des doigts les origines de cette série qui accompagne ma vie de joueur depuis si longtemps m'a poussé à lancer ce premier épisode fondateur. Et malgré certaines craintes liées à l'ancienneté du jeu, je ne regrette pas le moins du monde.

Pour un jeu sorti aussi tôt dans la vie de la console (on parle d'une sortie en 1986 sur Famicom au Japon), Castlevania tranche avec les jeux de son époque. La Famicom a connu en effet une longue vague d'adaptation des hits de l'arcade du début des années 80 : Donkey Kong 1/2/3/jr, Mario Brothers, Ice Climber, Kung Fu, Popeye, Urban Champion etc. Mais si... vous les connaissez ces jeux, il s'agit de ceux qui revêtent une jaquette illustrée en gros pixels ! Tous ces titres sont assez pauvres graphiquement (souvent des fonds noirs, sprites rudimentaires, scrolling limité) et possèdent un gameplay très typé arcade. Castlevania débarque et participe à lancer la nouvelle vague de jeux plus élaborés sur le support (qui comptera d'autres hits comme Rockman ou Contra en 1987, entre autres).

Castlevania est remarquable. Et cela commence par le gameplay qui allie parfaitement action et plateforme pour un mélange particulièrement savoureux. Le personnage se contrôle à la perfection : il est réactif et précis dans ses déplacements / attaques, et les sauts sont ajustables en fonction de la pression sur le bouton. Un seul détail vous fera pester mais seulement si vous êtes du genre mauvais joueur : le backdash après avoir été touché (qui se révèle souvent fatal lorsqu'il y a des trous ou de l'eau). Loin d'être un "défaut" à proprement parler, il s'agit d'un choix des développeurs (qui restera une caractéristique de la série pour tous les Castlevania avant leur mutation en metroid-like) pour permettre un recovery aisé du personnage et impose de redoubler de vigilance dans les passages de plateformes au-dessus d'éléments mortels.

Le genre de passages où le backdash recovery s'avère souvent fatal. Cela dit, tout est question de timing, et pour les plus fainéants, l'utilisation d'une montre à gousset qui fige le temps fait disparaître tout risque.

Le level design est clair, carré, sans fioritures et permet pas mal de variations dans la traversée des niveaux. Le level-design fait littéralement coeur avec le gameplay pour proposer soit de l'action pure, soit de l'action ET de la plateforme simultanément. Vous ne trouverez donc pas de passage uniquement basé sur votre dextérité à vous déplacer et sauter, il y aura toujours des ennemis pour menacer votre progression. J'ai particulièrement apprécié la façon dont les niveaux s'enchainent avec cohérence au sein d'une MAP crédible qui fait sens et renforce le sentiment de véritablement braver du début à la fin l'antre de Dracula. 

Graphiquement, c'est extrêmement propre et lisible (c'est ce que j'aime beaucoup sur Nes). Les sprites sont variés avec une multitude d'ennemis très identifiables (zombies, chauves-souris, squelettes, hommes-poissons, têtes de Medusa, gnomes, armures blindées etc.). Les décors fourmillent de détails qui participent à instaurer une ambiance gothique. Et même si l'on peut regretter un "manque de couleurs", chaque niveau possède sa propre atmosphère renforcée par une teinte qui lui est exclusive (de loin, vous me mettez un screenshot de n'importe quel niveau, bien que myope, je vous reconnais le niveau facilement ^ ^ !).

Ce fichu boss (surtout son ignoble gnome yolo en fait !) fut l'un des seuls "pics" de difficulté du jeu. Tout le reste se parcourt relativement aisément.

Niveau musiques, Kinuyo Yamashita (qui a oeuvré aussi sur le remarquable Power Blade) s'est allié à Satoe Terashima pour pondre des mélodies mémorables, qui seront reprises, réarrangées et réorchestrées sur presque tous les épisodes de la série. Pour vous situer, ma compagne a juste halluciné en entendant la musique du niveau 3 : "Whoua, c'est juste de la NES et pourtant, comment la musique envoie !" . Pas de compositions d'ambiance, pas de brouhaha pseudo-gothique/horrifique, juste des mélodies qui envoient ce qu'il faut dans nos oreilles pour sublimer le périple. 

Composition picturale sublime pour un décor emblématique, futur symbole d'une fin de parcours et d'une confrontation imminente contre Dracula. Scène qui sera réinterprétée moult fois dans les épisodes suivants. 

Je dois avouer que j'ai commencé le jeu habité par la crainte d'un gameplay désuet qui renforcerait une difficulté injuste, punitive et teintée d'aléatoire. Quelques accrocs dans ma progression m'ont laissé envisager la résignation face à un jeu issu d'un autre temps (j'ai mis du temps à saisir le pattern du boss Frankenstein et de son horrible gnome sniper !). Cela dit, il n'en est rien. Si vous perdez, c'est que vous vous y prenez mal, que vos placements ne sont pas bons, que vos assauts manquent de discernement ou que vous cherchez trop à "bourrer" les boss.

En réalité, Castlevania se révèle à ma plus grande surprise plutôt simple. Les 6 niveaux du jeu se parcourent rapidement et ne présentent pas de danger insurmontable, les boss font peur car ils peuvent vous annihiler en 3-4 touches mais sont extrêmement vulnérables et le gameplay est infaillible.

J'ai jubilé : manier Simon Belmont est un véritable plaisir, écouter les compositions originelles de la série en mode chiptune 8bits est un enchantement et découvrir les sprites des ennemis iconiques émerveille le fan d'Histoire du Jeu Vidéo que je suis. Je ne peux que vous recommander de faire le jeu (ET de le finir, sans faillir), quiconque possède un intérêt pour le média vidéoludique y trouvera son compte. Le temps n'a pas abimé le moins du monde cette petite pépite du passé !

Exemple d'astuce pour contrer facilement un boss. La Mort est un ennemi particulièrement retors mais en optant pour le bon placement et le bon choix d'arme secondaire, on peut en venir à bout en moins de temps qu'il faut pour le dire. Placez-vous au niveau du rectangle bleu, et sautez tout en lançant la potion au niveau du rectangle rouge. Faites cela à l'entrée en scène de La Mort, répétez l'action plusieurs fois, elle ne pourra rien faire !