Pour reprendre ce blog en douceur, pas de news industrie cette fois (une fois n'est pas coutume), mais un billet purement personnel, lié à un coup de coeur que j'aimerais partager. Avez-vous eu, dans votre vie de gamers invétérés, de nombreuses fois l'occasion de vous émerveiller devant un jeu? D'écarquiller les yeux, de pousser un "wow" de circonstance, d'y repenser avec le sourire une fois sous votre couette? Ça m'est arrivé dernièrement, avec Xenoblade Chronicles.

Sans être un féru de JRPG, je connais assez bien le genre, et me suis essayé à de nombreuses séries, Final Fantasy bien sûr, mais aussi Dragon Quest, Tales Of, Grandia, Breath of Fire, Star Ocean, et quelques autres. Mon dernier gros coup de coeur de cette catégorie, et qui demeure toujours aujourd'hui un de mes jeux préférés, remonte à une dizaine d'années avec le sublime Skies of Arcadia d'Overworks. Depuis, j'ai navigué entre déceptions et indifférence, aucun titre ne parvenant à me faire "rêver" de nouveau. Jusqu'à aujourd'hui.

Pour bien comprendre ce qu'est Xenoblade, il faut imaginer des mondes connectés les uns aux autres, et dans lesquels on voyage plus ou moins librement, à la manière de Final Fantasy XII. Le système de combat y est en temps réel également. On croise des ennemis visibles à l'écran, et on a le choix d'engager le combat ou non, sauf si l'adversaire vient de lui-même se frotter à vous. Les mécaniques de jeu de Xenoblade sont bien huilées, et le titre de Monolith Soft comporte quelques idées très intéressantes, comme un sociogramme qui recense tous les personnages rencontrés, et les liens qui les unissent (un jeu qui vit avec son temps, dirons-nous!). De même, lorsqu'on meurt, on conserve systématiquement l'expérience et les objets accumulés, si bien que le joueur n'est jamais pénalisé de ses prises de risques, face à des ennemis trop forts pour lui.

Avec un gameplay bien construit, un système de combat dynamique mais pas forcément très tactique, et une histoire relativement "classique", d'où Xenoblade tire-t-il toute sa magie? Essentiellement de l'univers que l'on traverse, cette étrange ascension sur Bionis, Titan depuis longtemps "éteint", et qui recèle de mondes et peuplades en tous genres adossés à ses reliefs. Moi qui pensais ne jamais prendre un jour de claque graphique sur Wii, ce RPG m'a prouvé qu'il était possible d'accomplir des miracles, pour peu que la direction artistique soit à la hauteur. L'est-elle? Oui, à des niveaux vertigineux, everestiques! Variés, détaillés, vivants, sublimés par un travail des couleurs sidérant, les mondes de Xenoblade sont une incroyable démonstration de savoir-faire technique et artistique. Baladez-vous dans les plaines de Gaur, le village frontière ou la mer d'Eryth, et vous comprendrez ce que dépaysement et émerveillement veulent dire. Ce que gigantisme, aussi, veut dire, tant ces décors de "carte postale" s'étendent à perte de vue, vous laissant perdu et éperdu, rêveur aussi. Le cycle jour/nuit aidant, Shulk et sa clique verront défiler de majestueux couchers de soleil, des nuits emplies d'étoiles filantes, des ciels plus bleus que la mer elle-même. Tout en rencontrant d'innombrables espèces, animales ou végétales, de même que des peuples aux destins entrecroisés. Je vous assure que la voix des petits nopons vaut la peine d'être écoutée!

 

 

La découverte des plaines de Gaur, un moment rare

 

 

Les musiques, dont certaines ont été composées par Yoko Shimomura de Kingdom Hearts, sont absolument somptueuses, et présentes en deux versions (nuit et jour); inutile de vous dire que le plaisir de l'exploration n'en est que plus grand. Le jeu récompense d'ailleurs les plus curieux, en conférant de l'XP lors d'intéressantes découvertes (grotte secrète, promontoire isolé...). Pour apprécier Xenoblade à sa juste valeur, il ne faut pas être trop pressé, mais avoir le goût de flâner, de prendre chaque sentier, de dominer tous les points de vue. Comme dans Skies of Arcadia ou un certain Wind Waker, Xenoblade fait voyager, invite à la contemplation. De ce point de vue, il représente l'anti-FFXIII, gavé de couloirs, cinématiques et scènes surjouées. Il représente aussi la preuve "vivante" qu'un hardware peu puissant, mais bien exploité, peu aisément terrasser un autre plus en jambes. Croyez-le ou non, Xenoblade est parfois si beau (spoil), si majestueux, qu'on en vient à se demander s'il n'est pas lui-même d'origine divine! Mais aucun hasard là-dedans, la splendeur graphique de Baten Kaitos venant à nous rappeler que Monolith Soft est un orfèvre du genre. Non, le jeu vidéo japonais n'est pas mort, et ne demande qu'à s'exprimer pour capter nos petits yeux gavés de HD next-gen.

Il me vient d'autant plus l'envie de parler de ce soft qu'il ne réalisera à coup sûr qu'un dixième des ventes des mastodontes du marché, ce qui pourrait représenter une injustice aux yeux de certains. Pourtant, voilà bien un titre qui n'est pas "calibré" pour le succès de masse, comme d'autres avant lui (Shenmue, Okami, ICO...), et qui soudera ses quelques milliers de fans d'un lien indéfectible. Je pourrai vous en parler encore longtemps, mais vais simplement conclure en vous conseillant au plus haut point de jouer à Xenoblade tant que c'est encore possible (il sera un jour introuvable), de vous jeter dessus comme un mort de faim, mais d'en apprécier les saveurs sans excès, en les savourant. Dans le cas où vous n'ayez pas de Wii, faites-vous en prêter une, voire achetez-en une. Si vos finances vous le permettent, faites-le uniquement pour lui, car il n'est pas ici question de jeu ordinaire, mais d'un bijou, d'un ovni, dont les quelques défauts sont noyés dans un océan de ravissement. Après 20 ans de joutes vidéoludiques, après avoir mordu dans tant d'expériences jusqu'à en devenir blasé, on peut donc encore ressentir cela? Merci Nintendo.