Si vous suivez le blog, vous savez que je suis farouchement opposé aux pratiques de pass en ligne qui ont fleuries ces derniers temps avec tous les jeux qui sortent. On arrive même à des choses inadmissibles avec des jeux amputés volontairement (Batman) d'une partie de leur contenu. Mes mésaventures avec mon désormais ancien compte XBL n'ont fait que confirmer mes craintes face aux dérives de la dématérialisation. Eh bien l'UFC que Choisir vient de me faire un grand plaisir.

Je fais en effet partie de ceux qui ont apporté leur pierre à l'édifice qu'est en train de tenter de bâtir l'association de défense des consommateurs. Ce sont eux que j'ai choisi d'interpeller il y a quelques mois et j'attendais avec impatience qu'une association mette son nez dans les pratiques des éditeurs et distributeurs de jeux. J'ai évidement participé à l'audit lancé à l'époque pour évaluer ces pratiques. Il y a du bon et du moins bon dans les retours. Je suis content de voir que les choses bougent, mais il semble que les spécialistes de la consommation n'aient pas forcément cerné tous les aspects du jeu vidéo.

Des bugs partout

Le premier constat vise les nombreux bugs de certains jeux. Sauvegardes corrompues, freez en tous genres, passe muraille et autre incohérences. Electronic Arts, Ubisoft et Activision seraient les mauvais élèves de la classe. S'il est vrai qu'il est inadmissible de devoir subir les affres des bugs dans les jeux vidéos, il faut souligner que l'étude ne détaille pas du tout dans quelles conditions ces bugs apparaissent. Sur console ? Sur PC ? En jeu en ligne ? En outre, elle ne souligne pas non plus la fréquence de ces derniers. Les causes d'un bug peuvent être multiples et très variées. De plus, elles ne sont pas forcément liées au jeu lui même, mais à un paramètre tiers parfois dépendant de l'utilisateur. La lecture complète de l'étude souligne tout de même que dans près de 60% des cas les utilisateurs se plaignent de logiciels PC. En tête des jeux les plus cités dans les plaintes, Battlefield 3 (10%) et Call of Duty Black ops (9%). Suivent Dead island, Fall Out New Vegas et Rage à 5%. On constate évidement que ce sont les jeux les plus vendus qui cristallisent les problèmes.

  

Le premier paragraphe se conclue en affirmant que les éditeurs vendent des démos pour des jeux terminés. Faire le lien entre des bugs et un jeu non terminé est un raccourci réducteur et trop facile. Je pense que les centaines de personnes qui ont travaillé sur la série Assassins Creed apprécieront. Dommage, l'association montre ici qu'elle n'a pas vraiment compris ce qu'était un jeu vidéo.

Pour autant certains bugs restent inadmissibles. Le fait qu'aucune solution ne soit proposée par l'éditeur reste parfaitement scandaleux. Mais comment faire la part des choses entre un bug et un défaut facilement corrigeable ? Débat plus large et difficilement abordable en quelques lignes ici.

La connection ou la mort !

Quel que soit le moyen ou la plateforme de connexion, l'utilisation du jeu peut être assujettie à l'obligation d'être connecté pour bénéficier de tout ou partie du jeu. C'est le cas avec Steam et pour pouvoir lancer d'autres jeux. Des éditeurs ont même fait marche arrière après avoir imposé des DRM foireux. Il était alors plus facile de jouer pour un pirate que pour un utilisateur honnête...

On ne parle bien évidement pas des modes multi des jeux, mais bien des contenus utilisables seulement si le cordon ombilical internet est branché. L'argumentaire de l'UFC est cependant lézardé une fois de plus par des nuances à apporter.

La perte de connexion peut être due au fournisseur d'accès et non aux serveurs de l'éditeur. Dans ce cas, lorsque c'est l'éditeur qui en est la cause, comment le prouver ? Le service Elite de Call of Duty mis à genou par son trop grand succès serait-il attaquable ? On peut le penser dans ce cas précis, puisque c'est l'éditeur lui même qui l'a avoué et qui s'en sert même au passage pour faire un peu de promo.

Quoi qu'il en soit, le fait de devoir être connecté pour pouvoir profiter de l'ensemble du jeu (lorsque ce n'est pas un jeu destiné principalement au online) reste inacceptable.

Touche pas à mon occasion !

Dernier point et non des moindre les fameux pass en ligne qui permettent d'accéder aux fonctions connectés assez importantes pour représenter une partie incontournable du jeu. Je ne vous fait pas un dessin, vous savez tous de quoi il retourne. Alors que dans tous les autres domaines, on a le droit de revendre le support physique que l'on a acquis, les éditeurs veulent encore nous faire croire que le jeu vidéo est un média jeune qui se cherche et qui cherche ses modèles économiques. Christophe Ballestra l'assume pour Uncharted, les joueurs encaissent. Non, réflexion faite c'est plutôt Sony et Naughty Dog qui encaissent. C'est étrange, avant les pass en ligne les éditeurs arrivaient aussi à nous sortir de très bons jeux.

Le marché de l'occasion a toujours existé et il représente encore une part non négligeable d'aide à l'achat de jeux neufs justement. C'est ce que l'on appelle l'appropriabilité indirecte. Mais j'en ai déjà parlé ici, on ne va pas revenir dessus:) .

Que choisir est parvenu à saisir les différences parfois obscures entre clefs d'activation et pass en ligne. Le distingo est même fait entre les activations qui lient les jeux à un compte ou à une machine bien précise. Les utilisateurs se plaignent en outre d'avoir à installer pléthore de logiciels tiers afin de jouer à leurs jeux, chaque éditeur voulant imposer son propre système (un problème évidement lié aux PC).

L'étude fait aussi le distingo entre les différentes façons de gérer les DRM et les restrictions imposées. Par exemple en vendant un jeu en kit en ayant volontairement retiré un contenu qui devait pourtant en faire partie initialement. Les témoignages citent Deux Ex, Assassins Creed ou encore Tiger Woods qui s'il était complété à 100% attendrait la somme de 180 euros ! Ce qui était offert avant en récompense pour avoir progressé dans les jeux n'est plus aujourd'hui proposé que contre espèces bien réelles.

Je suis content qu'un organisme puisse au moins lancer une action pour faire bouger les choses et faire parler des soucis du jeu vidéo sur un support large public. L'UFC ne gagnera peut être pas sur tous les points, mais je suis persuadé que la petite pierre jetée dans l'eau pourrait faire naître de grosses vagues. A ce jour l'UFC Que Choisir a porté plainte pour pratiques commerciales trompeuses et tromperie contre 4 éditeurs (Codemasters, Warner Interactive, THQ, Bethesda Softworks) et 3 revendeurs (FNAC Direct, Micromania et Game France).

Sources :
Le communiqué officiel de l'UFC Que Choisir
L'étude complète au format PDF

Voir également :
L'occasion fait le larron : comment l'occasion sauve le marché du neuf
Banni du Live !
Je suis mort cette année