Aujourd'hui, que ce soit dans les jeux vidéos, dans la BD ou dans le cinéma (mais surtout dans le cinéma), on ne peut pas s'empêcher lorsqu'une oeuvre est présenté, à la comparer. On la compare à d'autres jeux du genres, à d'autres films au concept similaire, ou à d'autres bandes dessinées au graphisme étrangemment approchant. En 2012, on est dans une époque où la pop culture est arrivée à une sorte de période où j'ai l'impression que l'on sature. Quand on regarde le monde du cinéma, on se rend compte que les scénarios originaux sont rares, et que la majorité des films sont des adaptations ou des remakes. Le monde arrive à un point où l'on a constitué des oeuvres cultes qu'on arrêtera pas de comparer lorsque des nouveaux venus tentent de percer. Quitte à parler de pompage ou de plagiat.

Ce ressentiment m'a encore plus interpellé à la suite de la bande-annonce du prochain Disney, Les Mondes de Ralph. Je me disais que Disney a trouvé un film avec un concept plutôt sympa, rafraîchissant, et qui rend un bien bel hommage à la culture vidéoludique. Sauf qu'évidemment, on a retrouvé un court-métrage français de l'ESRA, Un Mauvais Rôle, qui reprend le concept du méchant voulant changer de jeu vidéo. Beaucoup de sites ont repris la news en accusant Disney de plagiat. Personnellement, je reste persuadé que ce n'était pas leur but, et qu'ils ne sont peut-être même pas au courant de l'existence de ce court-métrage. Mais cette accusation montre une chose: il est pratiquement impossible aujourd'hui de proposer quelque chose de complètement original. Il suffit de regarder au cinéma, quand les films sortent du carcan des adaptations et des remakes, quand un réalisateur tente d'introduire un nouvel univers en se démarquant des autres, il se retrouvera forcément influencé par quelque chose ou avoir une histoire dont le déroulement sera déja vu ailleurs.

Je pense notamment à Avatar, qui a vraiment subi les foudres de ces râleurs qui préfèrent pester contre le "plagiat" du scénario ou du design. Avant la sortie, le film s'est vu déja accusé de copie ou de plagiat par des personnes cherchant absolument à comparer le film à autre chose. On a commencé par l'accuser de copier Aquablue, juste parce que les personnages sont bleus dans le film et que les créatures y ressemblent, puis on est arrivé à le comparer avec un film d'animation nommé Delgo, sorti un an plus tôt et dont l'univers ressemble à celui d'Avatar. Mais comment auraient-ils pu copier le film alors qu'il est en production depuis pas mal d'années? Mis à part de l'espionnage industriel, je ne vois pas. Une fois le film sorti, Avatar a fait un carton. Et comme tous les cartons, il y a toujours des gens cherchant à critiquer le film en pensant qu'il ne mérite pas son succès. Et ils pointent du doigt le point faible du film, à savoir son scénario juste, en accusant Cameron d'avoir repris l'histoire de Pocahontas: effectivement, l'ennemi qui tombe amoureux d'une fille de l'autre camp jusqu'à se retourner contre son peuple d'origine, ça ressemble à Avatar. Et ça ressemble aussi fortement à Danse avec les Loups, ou encore Le Dernier Samouraï. 

Cet état d'esprit est typique de ces dernières années. On ne pourra jamais en vouloir à James Cameron d'avoir voulu créer un univers SF complètement nouveau, comme l'a été Star Wars en son temps. Le cinéma fantastique en avait réellement besoin. Mais sortir un tel film à notre époque constitue un véritable challenge où Cameron n'a pas réussi à éviter un écueil et qu'il sera impossible d'éviter maintenant. Le monde du divertissement, que ce soit en BD, au cinéma ou en jeux vidéos est maintenant incroyablement riche, et même saturé. Lorsque quelque chose de nouveau sort, on fera obligatoirement la comparaison avec autre chose. Et c'est le cas de Cameron. Pour plusieurs raisons. D'abord, parce que j'ai la nette impression que l'entertainment est arrivé à une sorte de saturation de l'imaginaire, une époque où créer quelque chose de totalement nouveau, sans qu'on se dise que telle créature ou telle histoire rappelle autre chose, est devenu incroyablement difficile. Créer des créatures aussi cultes que l'Alien, que le vampire ou que le Predator est devenu de plus en plus difficile. On peut cracher autant qu'on veut sur l'Avatar de Cameron, mais les fameux Naavi's d'Avatar le sont devenus dans l'inconscient collectif, une sorte de porte-étendard de cette dernière décennie qui n'avait plus vu d'univers aussi riche et rafraîchissant depuis une paye.

Ensuite, parce que dans les années 80, des réalisateurs comme Spielberg avec son Indiana Jones, Zemeckis avec son concept de Back to the Future ou même Cameron avec Terminator étaient à l'âge d'or de la pop culture. Lorsqu'on cite des oeuvres cultes, on doit souvent partir dans les années 80/90. Aujourd'hui, c'est plus délicat. On peut citer Matrix ou Avatar. Un personnage comme Harry Potter pourrait en être un mais le concept du sorcier n'est pas nouveau. Tout comme le Seigneur des Anneaux dont le livre existe depuis un bon moment et qui était déja la base de l'héroïc fantasy. Mais surtout, les réalisateurs d'aujourd'hui qui tentent de créer des univers nouveaux le sont devenus parce que justement ils sont fans de cette pop-culture qui a bercé leur enfance. A l'époque des Spielberg et consors, ils n'avaient pas autant de base sur lequel s'appuyer, il ne pouvait compter que sur quelques références plus obscures et leur imaginaire, pour créer leur propre univers qui auront marqué une bonne génération. Cette génération aujourd'hui qui malheureusement fonctionne principalement en usant de références beaucoup plus connus, intentionnellement ou non. Qui pourrait citer des monstres aussi cultes que les vampires, les aliens, les elfes, les orques ou consors et qui a été crée dans les années 2000? L'imaginaire de ces univers est dans l'inconscient collectif, et créer une histoire ou un monde fantastique que l'on pensera nouveau sera surtout influencé par d'autres sans que l'on s'en aperçoive.

On vit dans une époque où on possède bien plus de cultures différentes qu'il y a trente ans par exemple. Entre le jeu vidéo, le cinéma, la BD ou la musique, on possède bien plus d'années d'oeuvres qu'avant, ce qui est logique. Et forcément, bien plus de choses ont été faites, et voir un film fera forcément ressortir une autre référence. Mais il ne faut pas que ça en devienne un point faible, vu que ça sera le cas pratiquement tout le temps. Un Avatar n'est pas mauvais parce que son histoire est proche de celle de Pocahontas. En partant de là, on pourrait aussi bien dire que Danse avec les Loups est mauvais aussi parce qu'il est dans le même cas. Ça en devient ridicule. Avatar se regarde, comme les autres films, en faisant abstraction des autres oeuvres. Un gars qui regarde un tableau dans un musée le regarde pour ce qu'il est et ne commence pas à comparer avec le tableau de gauche en prétextant que le visage de celui-ci ressemble à celui de l'autre. Avatar ne possède pas d'histoire originale et réellement étoffée, mais le film marche diablement bien parce que l'univers est vraiment original, et que la réalisation est très bonne. Tout comme Danse avec les Loups fonctionne parce que Kevin Costner est convaincant en tant qu'acteur et réalisateur et que l'histoire est bonne.

Je serais méchant, je pourrais dire que quelqu'un qui affirme que telle créature ou telle histoire ressemble à un truc qu'il connaît ne lui sert qu'à frimer vis-à-vis de sa culture des médias. Mais tout le monde est comme ça, moi y compris. Ces dernières années, il faut se rendre à l'évidence. Aussi bons soit-ils, les films qui ont marché et qui ont marqué les esprits sont des adaptations. Rien que cette année, les plus gros cartons sont les Avengers, Hunger Games et probablement Batman cet été. Prometheus aura été l'un des seuls à tenter un grand film de SF nouveau, mais même un film de cette trempe a été obligé de miser sa communication sur son affiliation avec la saga des Alien, alors que le film en lui-même tente de créer quelque chose de très différent, même si ce premier film boucle la saga Alien. Maintenant, il faut accepter ce que l'on a. Certes, il y aura toujours des remakes ou des adaptations, mais ça arrive que certains réalisateurs tente une nouvelle approche et arrivent à quelque chose d'intéressant. A chaque fois qu'un film original arrivera, il faudra certainement s'attendre à trouver des points communs avec autre chose. Comme Chronicle récemment qu'on a immédiatement comparé à Akira par exemple. Ou District 9 que beaucoup ont reproché le manque d'originalité des aliens. Mais il faut passer le cap, accepter le fait qu'au moins, ce n'est pas une adaptation et que le réalisateur tente de raconter son histoire, et que le film est de qualité. Arrêter de comparer les films avec d'autres mais prendre le film dans son entier. Laisser de côté sa culture et profiter simplement du film.