Deus Ex premier du nom se résume pour moi à la toute première mission du jeu, à la statue de la Liberté. A l'époque, j'étais incroyablement excité par le jeu, qui me proposait dès la première mission, une multitude de possibilités pour remplir mon objectif. Grimper sur les caisses derrière le bâtiment, aller voir le gars sur le port de l'autre côté pour qu'il me donne le code de la porte, pirater un robot pour affronter les méchants, ou tout simplement y aller à la barbare. Sauf qu'au moment de passer le couloir pour aller voir le débriefing dans le bâtiments à côté, hop!, un écran de chargement et un joli bug qui ralentit tout le jeu et m'empêche de franchir la porte suivante. Impossibilité de résoudre cette saleté de bug. Depuis, je n'ai pas retenté. Et c'est là que Human Revolution pointe le bout de son nez. Sur 360, pas de saleté de bugs de chargement, je peux faire le jeu en toute quiétude.

Il y a un truc qui m'a marqué dans ce nouvel épisode, c'est cette énorme affiliation à la série des Metal Gear Solid. Certains ont fait le rapprochement avec Alpha Protocol pour tout le côté piratage et dialogues, mais j'ai trouvé qu'au niveau sensations de jeu, c'est incroyablement proche de Metal Gear Solid 2. Pas forcément au niveau jouabilité, mais plutôt au niveau mécaniques globales et plaisir d'infiltration. Mais surtout, les deux titres ont énormément de points communs:
- Système d'alarmes identique, avec caméra en sus.
- Evolution dans des conduits d'aérations.
- Possibilité d'attaquer les ennemis en les tuant ou juste en les assomant, puis de les planquer.
- Système de couverture.
- Styles visuels, couleurs et design très similaires ainsi que l'univers: robots assez proches dans leur conception, camouflage optiques, etc...
- Thèmes très proches sur la relation entre la technologie et l'homme.
- Sans oublier la conversation sonore après les crédits de fin avec le logo du jeu sur fond noir!

Par contre, loin de moi d'en faire un défaut, je me fiche pas mal de savoir s'ils ont repris la même animation que Snake quand il fait des roulades. Mais le plaisir que j'ai eu sur MGS2, je l'ai retrouvé avec Deus Ex: ce cache-cache avec les gardes, cette observation des lieux avant de trouver le petit conduit qui permettra de contourner un groupe de soldats... Le feeling est très proche et ce fut un bonheur de parcourir les niveaux avec cette sensation.

Le gros plus de Deus Ex est d'évoluer avec ce côté RPG. De plus en plus dans les jeux plus ouverts, le titre vous propose plusieurs choix à faire, qui déterminent plus ou moins ce qui va se passer dans le jeu. Les conséquences de certains choix dans le jeu sont réels et servent très bien le gameplay en apportant ou en enlevant un élément crucial d'une phase en particulier, ce qui est très bien trouvé. Plus encore, certains choix que vous pourriez juger anodins se révèleront plus importants que prévus, et le choix que vous ferez pourra être influencé fortement par les indices que vous trouverez dans les documents trouvés ou certaines scènes cinématiques, qui vous dévoileront des pans de l'histoire plus complexes. Par contre, les quatre fins proposées ne seront absolument pas influencés par vos actes durant le jeu, mais seulement sur la fin. De ce côté, c'est un peu dommage, mais le nombre de ramifications étaient peut-être trop complexe pour ce genre de jeu.

Deus Ex est divisé en deux grandes phases qui se mélangent extrêmement bien. On aura les grosses missions principales sur des niveaux en particulier et qui dévoileront des pans importants de l'histoire. Mais entre ces gros niveaux, le jeu vous parachutera dans des "hubs", représentés par des villes, plus exactement deux, Détroit et Hengsha. Ces villes seront l'occasion de faire progresser l'histoire en enquêtant sur place et en affrontant ou pas des groupes de personnages pour continuer votre avancée. Ce sera aussi l'occasion d'effectuer des quêtes secondaires diverses qui ne sont pas sans rappeler les quêtes de Fallout New Vegas par exemple, des quêtes à tiroirs. Elles évolueront en fonction de vos actions, et mieux encore, pourront être complètement loupés si vous avez fait les mauvais choix. Et ce sera impossible de recommencer, ce qui n'est pas plus mal et force le joueur à prendre des risques. Ces petites histoires sont vraiment intéressantes et changent agréablement des gros niveaux qui vous demandent simplement d'aller d'un point A à un point B en choisissant son chemin.

C'est d'ailleurs ce qui va m'empêcher de passer Deus Ex d'un très bon jeu à un titre culte. Effectivement, le jeu vous laisse le choix de votre progression, de se la jouer furtif ou à la bourrin. Mais cette liberté d'action est finalement assez réduite. Les niveaux se contentent au final de vous forcer à trouver LE conduit d'aération (d'ailleurs, c'est toujours le même) qui vous fera contourner les ennemis, ou trouver LE poste de sécurité qui fera retourner les robots contre les ennemis. En passant du côté furtif, au lieu de pouvoir tenter des choses plus avancées comme créer une diversion ou peut-être soudoyer un garde par exemple, on se contentera de fouiller toutes les pièces pour déplacer des objets et trouver un conduit. Finalement, se la jouer furtif, ça restera du piratage et du conduit d'aération. Pour ma part, j'ai tenté de faire au feeling et d'y aller d'abord discrètement, et si l'alarme était donné, de me défendre corps et âme. Ça m'a permis de tester un peu de tout niveau gameplay, et c'est comme ça que j'ai pris du plaisir. Faire l'un ou l'autre à fond et en chargeant la partie à chaque tentative ratée vous privera peut-être de bon nombre d'éléments de gameplay.

J'en viens aux petites frustrations qui ont parsemées le jeu, à savoir le système d'augmentations. Le jeu ne fournit pas énormément de points pour améliorer votre personnage, et sur la fin du jeu, j'ai l'impression que je n'avais que deux tiers de ses capacités. Il faut donc choisir très soigneusement ce que vous voulez améliorer, suivant votre manière de parcourir les niveaux, sachant que certains d'entre eux ne sont pas forcément utiles si vous n'y allez pas furtivement. Mais même si le level design du jeu est franchement aux petits oignons, il faut le reconnaître, il y a certains endroits où le jeu me forçait tout simplement à prendre une voie que je ne souhaitais pas suivre parce que je n'avais pas la bonne amélioration. Il y a eu plusieurs passages secrets que j'étais content d'avoir trouvé, et qu'au final je ne pouvais pas emprunter parce qu'il était rempli de gaz toxiques ou que le sol était électrifié, et que je n'avais pas la bonne augmentation pour passer. Ou encore cette salle remplie de deux robots en états d'alerte. Il faut évidemment les désactiver d'une manière ou d'une autre pour ouvrir la porte du hangar. Ni une ni deux je me déplace discrètement à la recherche du moniteur de sécurité pour constater que le niveau de sécurité est trop haut pour mon augmentation de piratage. Cherchant une autre solution et n'en trouvant pas, j'ai été obligé d'y aller à la sulfateuse pour dégommer les robots. Heureusement des munitions était répartis dans la pièce, mais si jamais je n'avais plus eu de balles, j'étais tout simplement incapable de terminer le niveau.

Tout ça pour dire que cette liberté d'action a un prix. Il y aura forcément des frustations où l'on sera obligé de choisir une voie qu'on ne veut pas vu qu'on ne pourra pas anticiper les obstacles du prochain niveau. Ce défaut trouve son apogée dans les boss. Maintenant, tout ceux qui ont lu les tests savent qu'ils ne servent à rien et forcent le joueur à se la jouer gros bourrin, ce qui résume bien les frustrations décritent ci-dessus. On imagine bien que le gars qui aura dans son inventaire uniquement des choses pour assomer les soldats ne fera pas le poids face aux boss, même si les salles d'affrontements sont bien garnis. Ça sera bien plus difficile pour quelqu'un qui s'y est préparé et ce n'est pas forcément juste pour le gars qui s'est cassé le cul à traverser un niveau sans déclencher d'alarme sans avoir pris le soin d'emporter une mitraillette au cas où...

Heureusement, ce n'est pas quelque chose qui fait foirer le jeu. N'empêche qu'on devine très vite les limites de cette liberté de jeu, là où un titre comme Fallout New Vegas avait mieux géré la chose, en proposant de véritables alternatives aux missions. Reste que Deus Ex Human Revolution est un jeu qui se parcourt avec un certain délice. La direction artistique est à tomber: tout l'univers y est mûrement réfléchi et se balader dans ces deux villes en observant le monde qui vous entoure et constater sa crédibilité est un vrai bonheur. Les robots qui se déplacent de façon cohérent, cette homogénéité dans le design des bâtiments jusqu'aux vêtements, tout est fait avec bon goût avec des couleurs que beaucoup trouvent trop "pisseux" mais qui au final rajoute un certain cachet au titre. Surtout que techniquement le jeu est très riche dans ses détails mais assez faible. C'est encore plus dommage quand on constate qu'au niveau interactivité du décor, mis à part les objets que l'on peut déplacer et les vitres cassables, c'est très réduit. Du coup, les gunfights sont très statiques niveaux environnements, surtout dans les bureaux avec les dossiers entassés qu'on a envie de voir voler...

Musicalement, c'est très très bon. On a déja pu entendre l'un des thèmes dans le trailer, absolument sublime, et le reste est du même calibre: discret mais pas trop, cyberpunk dans l'âme sans aller vers le Daft Punk et qui colle parfaitement à cet univers adulte et sombre. Côté scénario, on est dans du classique, avec tout ce qui faut de conspiration et de complots, et même un discours de fin très "MGSien", qui rappelera de bons souvenirs aux fans de la saga. L'un des points forts de l'histoire, c'est ces petites séquences qui oppose le héros à des personnages principaux. Le but est souvent de le convaincre à aller dans votre sens, ce qui permet de faciliter la tâche de votre objectif. Pour cela, il faut répondre de la bonne façon par rapport à ces arguments. Ces petites séquences sont bien plus complexes qu'il n'y paraît, car contrairement aux autres scènes de dialogues, votre interlocuteur est "motion-capturé" et on sent que ses mouvements sont bien plus complexes et difficiles à déchiffrer, avec un jeu d'acteur plus soutenu, et ce sera seulement en faisant attention à ce qu'il dit et à sa façon de le dire que vous arriverez à le faire rentrer dans votre jeu.

Deus Ex Human Revolution est un grand jeu, il n'en fait aucun doute. Mais pour ma part, il reste deux-trois ajustements à voir pour en faire un titre culte, surtout au niveau game design: les possibilités de libertés sont surtout réduites à des chemins à suivre plutôt qu'à de réelles possibilités de faire les choses autrement. On les retrouve beaucoup plus dans certaines situations, plus intéressantes, qui vous demanderont de faire certains choix plus complexes. En sus, le faible moteur graphique n'est pas à la hauteur de la direction artistique, et j'espère sincèrement que leur futur titre pourra lui rendre honneur tellement la DA le mérite. Et les temps de chargements très longs (surtout dans les chargements de sauvegardes) sont vite casse-burnes. Mais n'y voyez pas signe de mécontetement, Deus Ex HR mérite largement de s'y intéresser, il possède d'énormes qualités et est extrêmement rafraîchissant par rapport aux jeux couloirs qu'on voit défiler sans cesse. Deus Ex est un grand titre, qu'on se le dise, avec quelques petites erreurs de jeunesse très facilement pardonnables.