temps.jpgLa communication faite par les éditeurs autour de leurs jeux a bien changé. Aujourd'hui on n'hésite plus à faire des teasers à foison, des comptes à rebours d'annonce et même des annonces d'annonces. Une manière comme une autre de faire monter le buzz. Logique lorsque certains développements sont annoncés près de 4 ans avant la date de sortie (Killzone 2, Resident Evil 5 en sont des exemples récents). Et une fois le jeu disponible, pouf, on l'oublie et on passe à autre chose, non sans se remémorer quelques chefs d'œuvre du passé...

Lorsqu'on tient un magazine ou un site d'actualité sur le jeu vidéo, on en revient souvent à tenter d'analyser les tendances du marché et l'attitude des joueurs envers ce même marché. Ceci bien sûr afin de proposer un contenu à la hauteur des attentes. Et ceux qui suivent assidument notre media auront remarqué que le phénomène de la news prédomine (depuis quelques années déjà, la tendance étant plutôt à la hausse ces derniers temps). On nous abreuve des screenshots d'un titre, on nous dévoile des cinématiques, des making-of, le rythme s'accroissant à mesure que la date de sortie du "produit" se rapproche. Si bien que le jeu disponible, on a la sentiment d'avoir tout vu. Et il est de bon ton aujourd'hui de pratiquer le black-out autour d'un jeu qui nous tient à cœur si on veut conserver quelques surprises en jouant.

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Tout ça pour dire que l'industrie (et les joueurs) ont constamment le nez tourné vers le futur. Des salons comme l'E3, très apprécié par la majorité, sont d'ailleurs devenus les lieux privilégiés pour opérer un teasing sur les deux années à venir. Au fur et à mesure, les previews s'enchainent, les versions jouables débarquent et la communication se fait inévitable. Le marathon Metal Gear Solid 4 a tenu en haleine les fans pendant de longues années, par exemple. D'ailleurs, nous, joueurs, sommes toujours en attente. Un gros titre débarque ? On est déjà à lorgner sur le suivant. Une nouvelle console sort ? Quelques six mois après on commence à rêver à la prochaine.

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Ceci est dû au fonctionnement très particulier de notre industrie, où il faut toujours vendre du rêve, prouver la supériorité technique de son produit, etc. Citons un exemple pour mieux comparer. Au cinéma, on ne trouve pas d'évènements où les studios font des annonces fracassantes sur les films qu'ils vont sortir dans 4 ans. Et ce n'est qu'une fois le film quasi-achevé que les bandes-annonces débarquent. D'ailleurs, il n'est pas rare qu'un film terminé ne sorte que de longs mois après (le futur Harry Potter en est la preuve tangible). Ma démonstration ne vise pas à déterminer que "c'est mieux au cinéma". Il s'agit juste de deux industries très différentes. Cependant notre mode de fonctionnement peut parfois être néfaste pour tous (démo rushée pour un événement, les journalistes sont déçus et enterrent quasiment le jeu un ou deux ans avant sa sortie), mais c'est au autre débat.

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Ainsi focalisé sur le futur ou sur l'instant très présent, les joueurs ont impacté les sites d'actualité. Sur un très gros site de jeux, une fois le titre testé, toute l'avalanche de communication et de parlotte autour du soft s'arrête d'un coup. Le test reste trois ou quatre jours en tête de gondole, puis disparaît. Voilà le triste sort d'un titre attendu 4 ans et qui passe à la trappe quasi-immédiatement après la sortie. D'où un regret, avant tout en tant que lecteur : peu de site ou de mag proposent de traiter d'un jeu après la sortie. Pourtant les analyses ou les avis plus complets demandant du recul ne pourront être vraiment pertinents qu'à ce moment là. On se retrouve en fait dans une course à la rapidité pour proposer son test le plus promptement, en zappant tout ce qu'il y aurait à dire sur le sujet. On rentre dans une problématique du vite consommé. La durée de vie d'un jeu dans les medias ne devraient pas s'arrêter quelques jour après la sortie, car c'est bien une fois le jeu disponible que ça devient intéressant, non ?

Ce manque de suivi est vraiment dommageable car il ne permet pas une bonne appréhension de ce qui compose notre univers.

Enfin, deuxième phénomène troublant de notre milieu : le culte du retro. L'exemple de la Dreamcast, dernière console de Sega est, à ce sujet, édifiant. Déjà, la firme de Haneda ne se trouvait pas au top de la popularité après l'échec, commercial, de la Saturn. Et pour beaucoup (media comme joueurs), l'arrivée de la Dreamcast n'était pas perçue comme viable. On a même parlé de console morte-née. Les critiques ont fusé et Sega a bien eu du mal à se remettre de ce déficit d'image. Et aujourd'hui ? La Dreamcast est vanté comme LA console ultime. Elle jouit à l'heure actuelle d'une réputation incroyable et du soutien de TOUTE la communauté. Ses jeux sont de vrais perles, et même quelques titres plus moyens ont acquis le statut de cultes. La seule conclusion à tirer est que le joueur est nécrophile. Incapable de se débarrasser des tendances d'un marché au jour J, on ne percute souvent qu'après coup des bonnes choses, là encore une fois que le recul a fait son effet. Car, ne nous leurrons pas, si tous les gens qui disent apprécier la Dreamcast aujourd'hui l'avaient acheté à l'époque, nul doute que Sega fabriquerait encore des consoles à l'heure actuelle.

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Mon propos n'est pas de démontrer que media comme joueurs (moi y compris bien entendu) sont des idiots qui ne comprennent rien au marché. Je pense juste que nous nous laissons guider sur une voie qui ne nous sert pas, et qui influence toute l'industrie de façon négative. Traiter le marché avec plus d'égard et de recul me semblerait être une direction plus enrichissante pour nous tous.

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