La fainéantise qui sommeille dans mon corps a quelque peu contribué au fait que cet article pointe le bout de son nez si tard. Assez de blabla, place à la troisième partie de mon dossier sur la conduite dans les jeux vidéos.

 

 Il n'y a pas de jeux de course sans circuits. Cette évidence est on ne peut plus vraie. Ce qu'on oublie souvent, par contre, c'est sur quel genre de circuits. Tout comme les voitures que l'on pilote, c'est un élément fondamental du gameplay. Il contribue au plaisir qu'a le joueur à foncer pied au plancher. Il y en a pour tous les goûts. L'amateur de simu arpentera le Nürburgring tel un brave chevalier; le dingue d'arcade fonce entre les voitures et fait des bonds prodigieux dans Crazy Taxi; l'amateur d'urbanisme fait peur aux piétons dans Midnight Club. C'est une évidence, mais allons un peu plus loin dans la réflexion.

Au début, un circuit, c'était souvent un enchainement gauche-droite, avec quelques lignes droites de temps en temps, et un paysage qui varie si on joue à OutRun. Bien que le plaisir de jeu était au rendez-vous (et il l'est toujours, d'ailleurs) on a fait des progrès considérable en terme de "track-mapping" (désolé pour ce terme barbare probablement dénué de sens). Il aura fallu compter sur certains jeux, que ce soit sur arcade ou console, pour apporter un vent nouveau. Prenez F-Zero: profitant du fameux mode 7, Nintendo offre quelque chose de peu courrant à l'époque, et particulièrement technique. Les tracés font la part belle aux pièges, virages serrés, tremplins malicieusement placés, afin d'offrir des courses ultra jouissives. Cerise sur le gâteau, les graphismes apportent beaucoup de charme à l'ensemble. C'est un point à ne pas négliger: c'est comme une assiette qu'on vous sert au restaurant. Vous êtes plus motivés à déguster un plat si il est bien servi. Dans les jeux de courses, c'est pareil. Il faut bien présenter un circuit dans ses moindres détails. Textures, couleurs de fond, "thème" (genre futuriste, western, urbain, ou je ne sais quoi d'autre...) contribue beaucoup au charisme des circuits. Mais je vais y revenir plus loin.

Ce qui intéresse le pilote, c'est le tracé. Différentes questions sont à se poser: est-ce un circuit facile à parcourir? Est-il tortureux? Le relief est-il important? Le trafic (le cas échéant) est-il dense? L'intégration des véhicules dans le circuit est-elle réussie? Et dans le cas d'une map urbaine, quelles sont les possibilités de pilotage offertes? Est-on réellement libre?

C'est souvent un bon dosage entre ces critères qui font les bons circuits. Alors qu'on se le dise: les capacités techniques d'une console (ou plus généralement le jeu en lui même) ne permet pas de rassembler toutes les qualités. On peut aisément rassembler la plupart des critères évoqués ci-dessus dans le cadre d'une simulation, comme Gran Turismo. Les circuits, souvent très exigeants, peuvent pousser le joueur à adopter un comportement très spécifique. Ce comportement peut se traduire par une remise en cause de son pilotage, un réglage de sa voiture... Aussi compliqué soit-il, un tracé, aussi technique soit-il peut se révéler faisable dans une simulation. Tout simplement parce qu'on peut presque faire les mêmes choses en vrai!

Le cas des jeux plus orientés vers l'arcade est différent. Prenons l'exemple d'un PGR. Offrant des tracés urbains très techniques pour la plupart, le gameplay bien calibré permet de profiter des subtilités offertes par chaque tracés. Une impression renforcée par les véhicules utilisés, qui permettent de redécouvrir sous un autre angle les circuits parcourus.

C'est le moment d'évoquer la synchronisation entre le gameplay et les tracés. Voici une idée simple: pour avoir un bon gameplay, il faut de bons circuits. Le but n'est pas de jouer la surenchère, surtout pas! Le piège à éviter, c'est de faire des circuits qui ressemblent à rien, ou même des circuits trop centrés sur les caractéristiques du jeu. Prenez le dernier Mario Kart 7, par exemple. Le but n'est pas d'offrir systématiquement des passages sous l'eau ou en deltaplane. Abuser du gameplay n'est pas franchement une bonne idée, puisqu'on bloque le gameplay sur ses spécificités, oubliant tout le reste. Kézako? Il faut revenir à ce qui est fondamental: le fait d'être pilote et de courir. Il faut se comporter d'une certaine manière à un certain moment. Si on oublie cet état d'esprit, le but du jeu serait d'être en deltaplane le plus longtemps possible, au lieu de gagner du temps en soignant ses trajectoires. Absurde, n'est-ce pas? Je ne dirais pas que MK7 a un mauvais gameplay, bien au contraire. Mais certains jeux le prouvent. Deux exemples: Blur et Rally Cross, un jeu sur PsOne.

Dans le cas de Blur, il y a un manque d'inspiration assez flagrant dans les circuits. D'une part, les tracés sont peu inspirés, la grande plupart étant très peu aboutis. Le comportement des voitures n'est guère meilleur, mais heureusement la gestion des items est bien plus agréable. Si les développeurs avaient eu l'idée de mieux soigner le comportement des voitures, d'une part, et de rendre les tracés plus intéressants, moins "vides" d'autre part, le gameplay aurait été largement meilleur. Y a pas photos, nous avons affaire à une partie du gameplay que je qualifierai de négligée. Combien de fois voit-on les concurrents se jeter sur le mur en bordure de virage alors qu'ils essayent simplement de tourner...

Autre exemple découvert récemment: Rally Cross. Le déséquilibre entre les circuits assez complexes (de part le relief très important) et le comportement des voitures est très flagrant. Avec des suspensions en guimauve, il est formellement impossible de prendre plaisir à tracer sa route. Ce jeu en procure très peu, de toute manière.

Certains cas sont excusables. Prenez le premier Destruction Derby, avec des tracés ultra simplistes mais très symboliques (le fameux tracé en forme de 8 ). C'est tout plat, c'est ultra dur de prendre un virage sans se rapprocher d'un mur, mais rien n'empêche le jeu d'être jouissif. Tout l'enjeu est de faire preuve de subtilité. Prendre plaisir à parcourir les circuits en premier lieu, et appliquer les "atouts charme" en second lieu.

Ces atouts charme, ça peut être les items de Blur, le boost d'un Burnout, la technique de dérapage d'un Sega Rally, bref ce qui forme l'identité du jeu de course, ce qui fait que "c'est lui et pas un autre".

Dans le cas d'un environnement libre, les règles sont les mêmes. Un bon vieux Midtown Madness permet de mettre en avant les points forts du jeu. Une conduite simple, une map bien fichue, avec son lot de raccourcis, une inspiration de la vie réelle grâce à un trafic particulièrement dense, et bien sûr les différents véhicules que l'on vous propose de conduire, de la petite New Beetle au gros bus qui détruit tout sur son passage. Si on apprécie tout ce qui fait le charme de ce jeu, c'est en partie grâce aux lieux explorés. Le plaisir d'aller où on veut, de prendre des raccourcis à l'arrache, les sauts digne de films hollywoodiens... tout cela est possible grâce à la map! Imaginez un Driver sans ruelles... est-ce que ce sera le même jeu? Je ne le pense pas.

Reste une grosse plus-value que j'ai évoqué un peu plus haut: les graphismes, et surtout l'ambiance, donne le charme aux circuits. Un jeu comme WipeOut propose un futurisme assez dépaysant et relaxant malgré la vitesse à laquelle se déroule les courses. Un Cruis'n'World nous fait découvrir très caricaturellement différents Etats de notre monde. Megarace nous fait découvrir un futur... futuriste, mais quelquefois douteux (surtout Megarace 3...). Midnight Club séduit pour son allure un tantinet wesh-wesh, genre street-racer du ghetto. Et des exemples, il y en a plein.

 

Résumons! Outre le fait qu'il est nécessaire d'avoir une bonne synergie entre le gameplay et le tracé, le circuit doit non seulement procurer du plaisir au joueur, mais aussi lui apporter un intérêt, une raison de conduire. Trouver un raccourci, adapter une trajectoire, contrôler sa vitesse... Autant de petits détails qui, alliés à une atmosphère adéquate, font des circuits une partie intégrante du gameplay, et donc de la conduite pour les apprentis pilotes que nous sommes.

 

Prochaine partie conscré à un autre élément indispensable du bon jeu de course: les véhicules!