Alerte spoiler dans l'intérgalité de ce post

Il y a deux semaines, j'ai été intrigué par l'annonce de mon programme télé, qui annonce la diffusion de Duel sur ARTE. Ayant déjà entendu parler de ce film (d'abord un téléfilm, en réalité), je me suis confortablement installé devant ma petite télé. Quel en est le verdict?

Avant de commencer, rappelons que Duel peut être considéré comme le tout premier film de Steven Spielberg, dont au moins un de ses films figurent dans votre top 10 des meilleurs long métrages. Non? Pas grave, sinon. Comme on peut s'en douter, ce film tourne autour de l'escarmouche entre un honorable monsieur et un conducteur de camion. En l'occurence, Dennis Weaver incarne David Mann, un monsieur qui a le look de l'époque, au volant d'une rutilante Plymouth rouge, pas discrète du tout sur les routes un tantinet désertiques (tournées au nord-est de Los Angeles pour information). Tout va pour le mieux jusqu'à ce qu'il rencontre un camion citerne en piteux état, couvert de rouille et de crasse. Après l'avoir doublé, il se rend compte que le camioneur n'a visiblement pas apprécié, le double et se met à rouler encore plus lentement. Notre ami David va recommencer sa manoeuvre... et se rendre compte qu'il n'est pas au bout de ses surprises.

Ce film est une véritable leçon de suspense. Tout est bien mis en oeuvre: rythme des scènes, éléments scénaristiques arrivant au compte-goutte, tout en se focalisant sur ce mystérieux chauffeur dont on ignore sa véritable ambition et surtout, son identité. Un adversaire de taille (le mot est faible) qui représente le parfait contraire de David: gros véhicules, conduite douteuse, manipulation du personnage principal, et j'en passe. C'est admirable de voir la manière dont est traité l'adversaire. Sa présence est pesante, le véhicule est assez souvent filmé en gros plan. Sans parler du fait qu'il y a un contraste entre le beau rouge de la Plymouth et la crasse du gros camion. Plus que le camion, c'est son conducteur qui attire les convoitises. A aucun moment on ne voit son visage dans le film. On voit juste ses bottes et un bras, lorsqu'il signale de doubler. De quoi maintenir le spectacteur en haleine...

De son côté, David est un bon exemple du héros au caractère évolutif. Au début du film, il semble respecter méticuleusement le code de la route, mais la présence du camion dans son rétroviseur lui fait perdre un peu les moyens. Plus on avance dans le film, moins il respecte les limitations de vitesse, c'est comme si il semblait de lâcher, dans l'unique but de narguer son adversaire. Il oublie de moins en moins son rôle initial (retourner à la maison) et songe de plus en plus à sa survie.

Ce qu'il faut remarquer aussi, c'est que le camioneur ne souhaite s'en prendre qu'à David, seulement lorsqu'il est au volant de sa voiture. Mais par la suite, il est prêt à écrabouiller le monsieur alors qu'il était en train de faire une pause, sortant tout à fait du contexte routier. On peut penser que c'est de la provocation, c'est le cas, puisque le camioneur veut poursuivre le duel entre les deux véhicules à tout prix.

Parlons de la structure du film, à proprement parler. La grande partie du film consiste entre cette course poursuite entre David et "l'inconnu". Pourtant, certaines scènes viennent un peu casser le rythme; généralement, c'est l'occasion pour le conducteur de la Plymouth de se demander pourquoi le camioneur agit de la sorte. De plus en plus anxieux, il songe à identifier qui est son adversaire; ne trouvant pas la réponse à sa question, il passe au plan B et tente en vain de prévenir la police. Le duel aura lieu jusqu'au bout...

Si vous avez déjà vu le film, vous avez certainement noté le rythme très particulier de ce duel. Loin des Fast and Furious que nous connaissons de nos jours, c'est assez... lent, les véhicules n'atteignent pas des vitesses incroyables, et pour ne rien arranger le décor est particulièrement monotone. Des routes mi-californiennes mi-désertiques, en plein caniar, la journée. C'est tout juste si on arrive à deviner qu'à la fin du film, le soleil commence à se coucher, ce qui suggère tout de même que la couse entre les deux véhicules dure un certain temps. On pourrait croire que c'est pénible à regarder, mais il n'en est rien, c'est bien rythmé et on ressent une certaine tension. Mais c'est en partie grâce au suspense et à l'attribution du "rôle dominant" dans le film. Le gros camion du début dominant largement son adversaire, il se laisse surprendre vers la fin par le piège qui lui est réservé. Le tout est agréablement présenté et regorgeant de petites subtilités. Pour l'avoir vu, je n'ai en aucun cas trouvé le film ennuyeux.

Moralité? Duel est un film surprenant, qui parvient à surprendre le spectacteur en mélangeant habilement suspense et action, le tout dans une seule et unique course poursuite. C'est assez couillu (pardonnez-moi l'expression) de faire un film reposant sur un duel entre deux véhicules, mais si Spielberg a réussi, c'est en donnant un réel intérêt à son histoire, qui donne un peu envie d'y croire, tout en faisant preuve d'imagination, un peu comme si on lisait un livre. Et justement, Duel est inspiré d'une nouvelle, dont son auteur a eu une histoire similaire dans la vraie vie.

Je veux ce camion dans MotorStorm... :bave: