Je me souviens quand maman m’a laissé seul dans la cour de récréation. J’étais peut-être un grand mais j’ai pas pu m’empêcher de pleurer. Discrètement, en me cachant dans la manche de mon pull mais quand même…c’est dur de me dire que je repars de zéro, que je perds tout mon petit monde, inconnu en milieu hostile.

La cour me semblait immense, j’étais là, juste devant la grille, et je ne savais pas où aller, à qui m’adresser ni même quoi faire. Quelques secondes de paralysie totale. Serrant mon poing gauche, je me décidai enfin à bouger.

Poursuivant ma marche, je croisai quelques vilaines trognes. J’avais l’impression que tous les yeux étaient fixés sur moi…moi, le nouveau ! La bête de foire en plein milieu de la piste, ciblé par tous ces regards. Que pensaient-ils de moi ? Se moquaient-ils ?

La rumeur

J’accélérai le pas, j’étais trop mal à l’aise. Arrivé au préau, en courant presque, mon cœur battit beaucoup moins fort, beaucoup moins vite. Il y avait des feuilles accrochées sur chaque poteau. Je ne savais pas trop où regarder, ça ressemblait à un jeu de piste mais le plaisir en moins. Je sentis dans mon dos une présence bien plus grande que moi. Une main s’écrasa sur mon sac, c’était un surveillant.

La surprise

  • Tu cherches ta classe ?
  • Oui, je suis en CM1
  • Ton nom ?
  • Oscar D.

L’adulte a regardé ses feuilles et m’a dirigé vers un espace délimité à la craie. Il m’a dit que c’était là, qu’il fallait attendre. Tout le monde était déjà deux par deux, j’ai commencé à longer la file. Pas une place, pas un visage amical. Au fond, j’allais retrouver peut-être un peu d’anonymat…

Dépassant le dernier binôme, je découvris pourtant quelqu’un. Plus grand que moi, un peu enveloppé, emmitouflé dans une espèce de grosse doudoune, une raie au milieu des cheveux et tenant fermement son sac à dos qui était posé au sol, à moitié déséquilibré par le poids de son contenu. Il dirigea alors avec lenteur ses petits yeux et me tendit sa main : « Salut, moi c’est Geoffrey ».

Geoffrey

Geoffrey

A relire