MACHINARIUM

 

Voici maintenant le jeu qui à véritablement fait exploser Amanita Design sur la scène du jeu vidéo indépendant, et par la même d'affirmer encore plus cette scène créatrice dans le monde du jeu vidéo, après des chefs d'œuvres comme Braid ou The Path.

Le jeu est sorti le 16 octobre 2009, sur PC, Mac et Linux. Vous êtes au contrôle d'un petit robot injustement jeté dans une décharge et dépossédé de ses membres. Vous apprendrez que ce petit robot, à la bouille absolument adorable, à en fait été chassé de sa ville par trois grosses brutes, et séparées de sa petite amie. La narration de Machinarium ne comporte aucune parole, et l'on suit le cours de l'histoire à travers des bulles de dessins animés, principalement des flashs back, et les sentiments des personnages se manifestent par des onomatopées. L'histoire, bien que simpliste, à son petit effet, et la fin à un coté mignon  très agréable. On y trouvera bien évidemment une certaine vision de la narration telle qu'elle est vue dans les contes, et la fin est totalement prévisible. Mais qu'importe, le charme des personnages et des décors opère toujours, comme dans toutes les productions d'Amanita d'ailleurs.

Machinarium est un jeu qui se joue avant tout pour son univers, une merveille crée par Jakub Dvorsky et Adolf Lachmann. Un univers qu'il ont puisé dans leur passé culturel, empreint de Stanislav Lem, Douglas Adams, Jules Verne, Ray Bradbury, Stanley Kubrick et Karel Zeman, mais aussi leur passé vidéoludique, avec des titres comme Monkey island, Myst, Dicworld ou Grim Fandango. Le monde de Machinarium n'est qu'un monde mécanique, constitué de clous, rivets, tuyaux, engrenages, ou subsiste parfois des fragments de nature.  On pourrait s'attendre à un univers froid, impersonnel et glauque. Mais Lachmann arrive à l'empreindre d'une sublime poésie et d'une mélancolie de tous les instants. Cet univers à une âme, une aura envoutante, par la force esthétique de ses décors et de ses personnages. Personnages au chara design fantastique, tellement simple mais tellement expressifs, qui reflètent parfois si bien des sentiments humains (paradoxe pour des robots), comme cette vielle dame et son chien, ce vieillard apathique qui fonctionne à l'huile végétale ou encore ce magnifique trio de musiciens de rue dépossédé de leur raison de vivre. Et puis ce personnage principale, si craquant avec ces yeux naïfs et son large sourire métallique.

Machinarium est sans conteste l'un des plus beaux jeux de l'histoire. Tous les décors sont réalisés à la main, la ligne parfaite, la couleur parfaite n'existe pas. On voyage dans des artworks, des artworks sublimes, ou le fond est griffonné au crayon, ou les détails fourmillent. Chaque tableau pourrait être un wallpaper, la couverture du jeu. Lachmann à crée une merveille entre chaos et contrôle total, ou l'énergie et le lâché prise du trait est étrangement controlé.

Coté BO, Floex réalise encore une fois un travail de grande classe, transposant à merveille l'univers mélancolique et mécanique de Lachmann en musique. Les thèmes sont tout en douceur, point d'action dans Machinarium. Mais un contraste entre une atmosphère calme et reposante et des sons électro industriels distordus, saturés, complétés par des sons de clarinette ou du saxophone. Mais aussi des morceaux plus jazzy. L'OST de Machinarium fait partie de celles que l'on écoute sans problème en dehors du jeu, car l'ambiance est toujours intacte. Voici ma sélection. J'ai eu du mal. Je voulais vous passer toute la BO, mais je suis finalement limité à 5.

The Bottom, morceau principal du jeu, l'instaurateur de la patte musicale.

Un de mes morceaux préférés, pour son aspect angoissant et ses notes délicates au trois quart du morceau.

Un peu de jazzy funky, avec cette piste mélangeant l'industriel et les basses.

Le passage avec la nature, la piste la plus mélancolique du jeu.

Enfin, le morceau du trio de musiciens.

 

Machinarium est une prouesse visuelle, et sonore, mais c'est aussi un jeu.Fort de l'expérience acquise sur Samorost, Amanita nous propose encore une fois un point n'click assez classique. Notre petit robot est en effet capable de s'étendre verticalement et de récolter toute sortes d'objets qu'il stocke dans son ventre. Ces objets vont vous servir à résoudre les nombreuses énigmes du jeu, en interagissant avec l'environnement. Il va falloir d'ailleurs parfois les combiner afin d'obtenir le résultat esconté. Il y aura également des casses têtes plus ou moins tirées par les cheveux. On retrouvera aussi quelques mini jeux, notamment dans la salle d''arcade, comme un clone de space invader ou de puissance 5, permettant de varier les plaisirs.

Si vous butez sur les énigmes, Machinarium propose un système d'aide. Il se divise en deux étapes. La première, c'est une petite bulle donant un petit indice. La seconde vous donnera la solution de l'énigme à travers de magnifiques planches de BD réalisées par Lachmann, à la manière de vieux livres oubliés. Sachez tout de même qu'un niveau de shoot em'up sera à traverser au préalable pour obtenir cet solution.

Le jeu reçu de nombreux pris, comme celui de la meilleure bande son de jeu vidéo en 2009, le prix du meilleur jeu indé de Gamasutra et VGCharts (2009 toujours), et celui de l'excellence visuelle à l'IGF 2009.


Machinarium est un chef d'œuvre, une merveille artistique, une merveille sonore, une merveille de poésie mélancolique et de cohérence. On doute souvent du jeu vidéo comme forme d'art. Mais quand on voit un jeu comme celui ci, comment ne pas se poser la question?