Contre le jeu vidéo...

Le discours contre le jeu vidéo est malheureusement d'une bêtise insondable. Souvent télévisé, on invite des gens qui ne savent pas de quoi ils parlent, qui critiquent vertement le jeu vidéo sur sa violence, tout en laissant un gamer débile enfoncer le clou en racontant d'un air niais : "C'est cool de voler des voitures dans GTA 4".

La violence est effectivement le moteur du jeu vidéo. La violence est le moteur de la littérature, du cinéma, et du jeu. Dans Monopoly, aussi inoffensif que soit ce jeu, nous jouons à être des salauds de la finance, des Gordon Gecko. Dans Risk, nous envahissons le monde.

Au cinéma, même la plus mièvre des comédies sentimentales aura sa part de souffrance, de tromperie, de malentendus qui font mal. Qu'elle soit dramatique ou humoristique, la violence y est présente. On ne raconte pas d'histoire où tout va bien.

Si la violence est un moteur, c'est parce qu'elle existe dans la vie réélle, et qu'elle nous préoccupe tant qu'on l'analyse. Contrairement au cinéma, dans le jeu vidéo, nous n'assistons pas à la mécanique de la violence, nous y participons, ou nous la subissons (en cherchant à l'éviter, comme dans les survival-horror).

Certes, nous pouvons parfois être heurté par sa représentation, mais le plus souvent, le jeu vidéo n'est pas en cause. C'est la sensibilité du joueur qui, faisant face à une représentation qui lui rend la virtualité un peu trop réelle, réagit négativement. On peut s'en prévenir, soit par le contrôle parental pour les enfants, soit en apprenant à connaître nos limites une fois adulte, comme pour les films au cinéma.

Si discours critique il doit y avoir sur le jeu vidéo, car il y a des choses à pointer du doigt, il faudrait que celui-ci vienne des joueurs, qui eux connaissent le sujet et ne sont pas concernés par l'audimat.

Malheureusement...

Malheureusement, le discours des pro-jeux vidéo n'est pas tellement plus brillant et manque cruellement de sens critique.

Ce discours est pour l'instant absorbé dans une quête de reconnaissance aveugle. Tout est bon pour dire que le jeu vidéo est un art. Parfois, on inventera des références plus ou moins tirées par les cheveux, références à la peinture, au freudisme, etc., dont est d'ailleurs souvent victime Shadow of the Colossus où de nombreux gamers y voient tout et n'importe quoi.

Certains jeux se prêtent facilement à ce genre d'exercice. Avec la série des Metal Gear Solid de Kojima, on peut aller très loin dans le farfelu.

Le discours pro-jeux vidéo (amateur et professionnel) est aussi victime, depuis quelques années, de formules toutes faites, de mots qui sonnent creux. Le monde des gamers s'est inventé tout un vocabulaire qui semble en dire beaucoup, et qui est vide de sens.

Le mot "poésie" revient souvent. Flower et Shadow of the Colossus sont des jeux dits "poétiques". On comprend tous, à demi-mot, ce que cela veut dire. Pourtant, en creusant un peu, on se rend compte que ce mot est flou, approximatif, et que la poésie dans ces deux jeux, si elle existe, s'exprime de manière complètement différente. Pourtant, on se contente souvent de ces approximations.

Il y a parfois des mots que nous utilisons dans un sens détourné. Lorsqu'un jeu nous est présenté comme "mature", nous en déduisons, et cela nous est présenté ainsi, que c'est donc un jeu "adulte, sombre, avec des thèmes graves et profonds".

Pourtant, le contenu mature d'un jeu vidéo (ou d'un film) fait plus référence au fond qu'à la forme. Mature, cela veut seulement dire qu'il y aura du sexe et du sang, une représentation de la violence particulièrement brutale. C'est ainsi que Saints Row 2 est beaucoup plus mature que Grand Theft Auto 4. Ça n'en fait pas un jeu plus profond et plus adulte pour autant. Je dirai même ; bien au contraire ! 

Il me semble donc que, pour des raisons différentes, autant l'éloge que la critique du jeu vidéo cherchent, en général, à atteindre des buts intéressés, et non pas constructifs. Tous les deux se montrent du doigt, alors qu'ils ont beaucoup en commun.