Il y a de cela un peu plus de 5 ans, une partie de la presse
vidéo ludique déclarait le PC comme une plateforme à l'agonie pour le jeu vidéo. Les
ventes de jeux pc souffraient du piratage et du développement de consoles qui
désormais permettaient de jouer en ligne et d'intégrer de nouvelles
fonctionnalités réservées jusque là aux pc.

En effet, l'arrivée de la Xbox de Microsoft qui
intégrait une carte réseau et un disque dur (et qui a été suivie par ses
concurrentes) semblait marquer un tournant dans la « guerre » qui
opposait le PC aux consoles.

C'est à cette époque
qu'à débarqué un jeu PC qui a chamboulé ces prédictions en devenant une des
plus grosses réussites commerciales du secteur. Il faut dire que Blizzard, son
développeur, avait déjà marqué de son emprunte l'histoire des jeux vidéo sur
cette plateforme à de nombreuses reprises avec des titres de qualité tels que Diablo, Starcraft et bien entendu Warcraft.
Ce jeu, vous l'avez déjà deviné, s'appelle World
of Warcraft
(WoW pour les intimes) et c'est sûrement le jeu qui a fait
connaitre les MMORPG au grand public.

La force de WoW c'est d'abord que le piratage le concernant
est tout à fait anodin. Le faible nombre de serveurs pirates qui existent
proposent une expérience de jeu de bien moindre qualité que les serveurs
officiels et font presque plus office de publicité pour ceux-ci que de
concurrents.

Cela ne suffit pas à en faire le succès planétaire qu'on lui
connait, d'autres MMORPG existaient bien avant lui et de grosses licences
étaient déjà exploitée sous ce format (je pense notamment à Final Fantasy XI, d'autres ont suivi
tels que Star Wars Galaxies ou encoreWarhammer online) et n'ont pourtant
jamais vraiment dépassé la barre du
million d'abonnés. Son succès, WoW le doit d'abord au savoir faire de Blizzard
qui en a fait un produit léché et surtout abordable, ce qui était loin d'être
le cas de la plupart des autres MMO, ce qui a permis de scotcher de nombreux
joueurs qui l'ont testé, soit parce qu'ils étaient fans de la licence, soit
parce que leur curiosité a été piquée par la très bonne communication marketing
autour du titre.

Pour de nombreux
joueurs, WoW était leur premier MMORPG, un genre de jeux très méconnu et peu
médiatisé. Pour moi, les MMORPG sont des « social games » avant
l'heure, des jeux qui proposent aux joueurs de jouer et de communiquer ensemble
pour progresser et dont les intérêts principaux sont sociaux : Rencontrer
des gens, faire partie d'une communauté, se mettre en avant par rapport aux
autres (grâce aux levels, équipements, achievements, etc.). Au final ce sont
les mêmes fondements qui forment la base du social gaming aujourd'hui si on y
réfléchit un peu.

Du coup, et là on aborde pleinement la question posée par
cet article, pourquoi Farmville et
les autres social games grouillants sur les réseaux sociaux tel que Facebook
(le plus répandu) arrivent-ils à réunir autant de joueurs (65 millions pourFarmville à comparer aux ~12 millions d'abonnés de WoW) alors que presque tout
le monde s'accorde pour dire que le gameplay de ces derniers est souvent bien
médiocre ? Et que va-il se passer quand la nouvelle génération de social
games arrivera avec des jeux, on l'espère, bien plus intéressants et
réfléchis ?

Procédons avec méthode afin d'essayer de répondre à ces
questions.

Tout d'abord,
écartons une des premières réponses possibles : Non, ce n'est pas le
système économique de ces jeux qui leur vaut leur succès.
Ces jeux ont
opté pour la plupart du temps pour un système d'items mall qui leur permet
d'appâter le joueur sur un jeu qui
parait de prime abord gratuit, or, ce système existe depuis bien longtemps
dans le monde des jeux online de tout types et même si il a pu faire des
merveilles, il n'a jamais justifié à lui seul une telle différence d'audience avec les
autres jeux proposant un système économique plus classique (comme
l'abonnement). Pour ceux que cela intéresse d'ailleurs, j'ai déjà eu l'occasion
d'écrire un article sur ce modèle économique que vous trouverez ici.

Si ce n'est pas un
modèle économique miraculeux qui leur a offert le succès, il faut peut-être
chercher du coté du game design et/ou du placement du jeu (de son public
cible) ? Encore une fois, je répondrai par la négative à cette hypothèse,
mais en étant un peu plus tempéré.

C'est vrai que l'on pourrait imaginer que la force de ces
jeux réside dans leur gameplay
simpliste, compréhensible par tous. Mais encore une fois, les exemples ne
manquent pas et il existe tellement de petits jeux flash par exemple qui
suivent cette règle et essayent de viser un large public. Par contre, il est
aussi certainement exact de dire que la simplicité de ces jeux les a bien aidés
à s'imposer.

En fait, on arrive à
la conclusion que je tirerais de ces réflexions : un Farmville sans
Facebook n'aurait évidemment pas le succès qu'il a actuellement. Du coup, la
vraie recette derrière les social games de ce type, au final, ce n'est pas les
jeux en eux mêmes, mais bien le support (leur canal de diffusion).

Et au final, ce n'est pas aussi surprenant que cela. Si on y
réfléchit bien, les social games ne sont pas les seuls jeux à bénéficier de
l'arrivée d'un nouveau support. En effet, une autre catégorie de jeux est revenue sur le devant de la scène depuis peu, il s'agit des jeux indépendants et une
des raisons de leur succès est à n'en point douter l'arrivée des plateformes
dématérialisées que sont le Xbox Live Arcade, le PSN et Steam. Ces plateformes
de distribution dématéraialisée apportent certes un gros bouleversement dans la répartition des
revenus issus des ventes des jeux qui ne disparaissent plus autant dans les
poches des chaines de distribution traditionnelle. En dehors du prix qui n'est d'ailleurs pas
toujours inférieur aux prix pratiqués en boutique, ces nouveaux supports
ont apporté quelque chose de très important : de la visibilité pour de
nombreux jeux, de la pub qu'ils n'auraient pas eue dans les rayons des magasins.

Le vrai plus de Facebook et des réseaux sociaux, au final,
c'est la visibilité des jeux, leur accessibilité (pas leur ergonomie, mais bien
la facilité avec laquelle on va les trouver et les utiliser). J'en prends d'ailleurs pour meilleur preuve
que les réseaux sociaux sont même devenus un vecteur de publicité puissant pour
les jeux « normaux » vendus en magasin qui n'hésitent pas à faire
parler d'eux en proposant des « pages de fans » ou même des applications pour réseaux
sociaux, juste pour faire parler d'eux. La meilleure et moins chère des
publicités a toujours été le bouche-à-oreille, les réseaux sociaux la magnifient de manière impressionnante, c'est cela la communication virale.

Farmville et les autres jeux jouables directement depuis les
réseaux sociaux profitent donc d'une publicité incroyable et d'une
accessibilité immédiate, voilà leurs véritables points forts. Une des preuves
les plus évidentes, d'ailleurs, reste le fait que ces dernières semaines,Farmville a perdu près de 8 millions de joueurs (alors que les chiffres ne
faisaient que grimper jusqu'à maintenant) à partir du moment où Facebook à
interdit les applications de spammer autant nos murs. Plus de notifications,
plus de pubs, et en quelques jours ce sont des millions de personnes qui
arrêtent de jouer et surtout un nombre de nouveaux inscrits en énorme baisse
également.

C'est bien là une mutation de la plateforme qui a impacté
entièrement des jeux et il sera important de suivre les prochaines évolutions
du social gaming Facebook vu qu'apparemment le groupe Facebook aimerait
récupérer beaucoup plus d'argent sur les jeux qu'il accueille, ce qui ne plait
pas trop aux développeurs principaux, Zynga et son Farmville en tête. Ces
derniers réfléchiraient d'ailleurs à créer leur propre plateforme de social
gaming, du coup. Mais ne déclareraient-ils pas leur mort en faisant de la
sorte ?

Pour ma part, j'ai testé pas mal de ces social games et les
ai tous abandonnés. Ce qui m'a accroché au début tenait au fait qu'une grande partie de
mes contacts y jouaient et qu'en y jouant, je pouvais coopérer avec eux, mais
aussi essayer de devenir par exemple le meilleur cuisiner virtuel parmi eux.

Au final, la lassitude est venue assez vite à cause du
gameplay primitif et du temps de plus en plus important que ces jeux prenaient
et je suis finalement retourné sur des MMORPG. Je pense que ces social games sur
réseaux sociaux vont devoir évoluer pour survivre (eux ou les réseaux sociaux),
et que la mine d'or espérée par certains n'est au final pas plus importante que
celle que les gens ont cru voir dans les clones de WoW ou les productions Wii
vite faites, mal faites.

Personnellement je verrais plus l'avenir du social gaming de
ce type sur la nouvelle génération d'appareils portables connectés en permanence (iPhone en tête), ou dans des jeux au gameplay solide qui n'espèreront pas se contenter de profiter
de la pub et de l'exposition offertes par les réseaux sociaux.

Et vous, qu'en pensez-vous ? Avez-vous testé ces jeux
et y jouez-vous encore ou les avez-vous abandonnés ? Quel avenir leur voyez-vous ?