Depuis déjà quelques cycles, chaque fois qu'une génération de machines s'achève en fait, les prophètes de mauvais augure s'en donnent à cœur joie pour agiter cette peur collective, la perspective n'est donc pas nouvelle.

              Alors qu'est ce qui change cette fois-ci ? Déjà, premier signe : le nombre d'acteurs du milieu  qui témoignent ici de la disparition d'un des trois constructeurs pour la prochaine génération, et là surtout des nouveaux axes de bataille du divertissement numérique : la Convergence Numérique. Ainsi que la dématérialisation des supports des logiciels, puis à terme des machines elles-mêmes, par le biais du Cloud Computing (ou l'hébergement de toutes vos données sur des serveurs et ordinateurs à distance, l'utilisateur ne téléchargeant que le rendu final sur son ordinateur ou terminal portable divers).

Le premier de ces exemples de mutation du marché s'illustre parfaitement par la tendance qu'ont vos Smartphones, tablettes tactiles, ou même dernièrement l'interface de votre Xbox 360, à centraliser tout un tas de fonctions et services en un seul appareil : messagerie instantanée, phototèque, musique, vidéos en streaming, ainsi que nos chers jeux vidéo. Et ce phénomène est encore plus flagrant avec les Box internet, avec leurs services "triple/quadruple play " désormais, qui chaque année s'ingénient à saper l'utilité d'un autre appareil hifi du salon/bureau pour vous offrir toujours plus de fonctionnalités du quotidien (certaines de ces Box s'imposent dernièrement lecteur bluray, enregistreur numérique - parfois multiflux-, player radio, serveur autonome, et d'autres choses certainement). Et quand certains opérateurs Télécom dotent leur "Boîte magique" d'un simili pad en complément de petits jeux addictifs, comme ces jeux en Flash trouvables sur internet depuis son P.C. (Free), ou s'associent avec de grands acteurs du Cloud Gaming (Bouygues), dont le concept est expliqué plus haut, on peut craindre pour la légitimité du concept de la console.

A savoir acheter chèrement une boîte dédiée au jeu, finalement.

Enfin dès que ces services seront rodés,évidemment. Mais à ce titre, regardez le marché du jeu vidéo mobile sur Smartphone et la qualité atteinte  aujourd'hui (similaire au moins visuellement aux jeux de la génération de consoles PS2,Gamecube), par rapport à ses balbutiements... datant seulement du milieu des années 2000 environ, avec ses softs assez courts en 2D qui pullulaient ! Quel bond en moins de dix ans, hein !

 

Qui n'a pas (ou ne possédera pas prochainement) une Box capable de proposer du jeu-vidéo désormais?

Quand à la dématérialisation générale du divertissement vidéoludique et l'ère du Cloud Gaming, c'est évidemment les perspectives de la diminution des coûts ainsi que la lutte contre le piratage qui attirent inexorablement toute l'industrie vers ces nouveaux moyens de distribution. Mais pour rassurer et convaincre leurs joueurs ou consommateurs, les acteurs mettront plutôt en avant le besoin émergent de nous autres joueurs, de pouvoir profiter partout et instantanément de toute la ludothèque actuelle, parce que « c'est quand même trop bien monsieur le client, non ? »

Et de s'appuyer sur les succès insolents des plateformes d'achats en ligne Itunes Store pour la musique ou Steam pour le jeu vidéo, qui ont redynamisé  puissamment (pour ne pas dire sauvé, tant la proportion de piratage était élevée désormais) respectivement les marchés de la musique et du jeu P.C. Alors, quel acteur du secteur ne voudrait pas sa part du gâteau de ce nouveau mode de consommation qui tente de séduire les joueurs par son instantanéité (plus besoin de sortir faire les magasins pendant des heures, tout arrive tranquillement chez moi après 5 minutes de recherche et de prise de renseignement sur le site), et son innovation constante (extraits de musique en ligne, avis et notations des autres clients, réductions fréquentes sur les anciens jeux à la sortie du nouvel épisode afin de faire redécouvrir la série, sauvegarde du jeu en ligne voire de la configuration personnelle des commandes,et accessibles de n'importe quelle machine depuis le même compte utilisateur, etc...) ?

                Bon, là ce n'étaient que les transformations du secteur du divertissement numérique remettant en question l'utilité de l'achat et de l'existence même du produit "Console de jeu". Abordons maintenant le plus désolant pour nous autres joueurs : comment les consoles actuelles elles mêmes, ainsi que l'évolution de notre façon de jouer, portent à leur disparition à plus ou moins long terme du marché du divertissement.

En faisant simple, c'est principalement la perte progressive de leurs spécificités propres, celles là même qui les distinguent historiquement d'un P.C. par exemple (et qui ont permis d'alimenter la guerre entre "pécéistes" et "consoleux" depuis des lustres, hé oui cela ne nous rajeunit pas! ), qui est désormais responsable de la remise en question de leur place au sein d'un foyer aujourd'hui déjà bien équipé.

Gameboy originale / D.S. dernier modèle: même destin! : "Je vous parle d'un temps que les jeunes de vingt ans ne POURRONT PLUS connaître..." ??

A l'origine, les consoles se sont répandues dans le but d'amener le plaisir des salles d'arcade à la maison, c'est à dire du fun vidéoludique instantané et partageable entre amis (ou en famille avec les machines de salon!). Aujourd'hui les salles d'arcade ont quasiment disparu, et il reste peu de jeunes nés depuis le milieu des années 90 qui aient grandi dans la culture des salles et bornes d'arcade.

Les jeux console se sont progressivement démarqués de leur inspiration arcade et sont devenus plus sophistiqués, contemplatifs et complexes à prendre en main au fur et à mesure des générations de machines. De même que les genres de jeux, très différents et bien établis selon le support console ou P.C., ont peu à peu été adaptés sur l'un comme l'autre(avec plus ou moins de réussite dans les portages selon les époques), et avec des ludothèques très similaires aujourd'hui, les impératifs de rentabilité pour les éditeurs de jeux ayant généralisé ce décloisonnement entre ces deux "mondes".

Par ailleurs, un autre atout de la console (particulièrement de salon puisqu'elle ne nécessite qu'une seule machine) est rapidement venu de sa capacité à proposer un environnement multi-joueurs en local (sur une seule TV, ou plusieurs consoles portables connectées par câble de liaison, ou protocole radio sans fil  pour les dernières). Grâce à la généralisation de deux ports manettes, puis quatre depuis l'ère 64 bits (avant il existait quand même des quadrupleurs, exclusivement pour quelques rares jeux développés pour en tirer parti...), les consoles étaient le média de jeu incontournable pour les challenges familiaux ou entre amis.

Oui, mais voilà : quoique les machines actuelles soient toujours bien pourvues en ports et connectique, la majorité des éditeurs ne pensent plus leurs jeux dans cette optique conviviale, et misent désormais tout sur le multijoueurs en ligne, de plus en plus compétitif de surcroît. Et si c'est très pratique de jouer à distance avec des amis qu'on ne peut plus voir aussi régulièrementque dans sa jeunesse, au final on joue chacun de son côté, dans les conditions d'un solo où l'ennemi fait  seulement preuve des travers et du sadisme signé de votre pote de toujours... (Vous aurez compris ma passion pour le multi online et mon désarroi devant sa domination progressive cette dernière décennie, sniff !)

Enfin, dernier atout charme de la console de jeu (et pas des moindres vous verrez !) face à ses multiples prétendants au titre d'incontournable support de jeu vidéo, mais qui s'est vu sauvagement démembré au fil de ces dernières générations de hardware : son côté "Plug and Play ", qu'on traduira universellement par : « tu t'emmerdes pas : tu insères le jeu, tu branches, et ça marche ! ».

Voilà, ça c'était l'argument bombe atomique du joueur console. Et je dis bien c'était parce que je ne remercierai jamais assez l'Industrie, qui a redoublé d'efforts et d'expérimentations ces dernières années (et comme je dis toujours, pour rassurer les gens normalement : « et le meilleur est  à venir... »), afin de rendre l'expérience  du jeu  sur console pénible et aléatoire. Le bonheur a commencé avec les temps de chargements des supports disques, mais ces derniers temps, on a atteint le nirvana de l'expérience vidéoludique avec des installations préalables obligatoires et bien longues sur disque dur, des bonus de jeu (accessoires, skins, armes) voire des modes complets à télécharger en sus après l'achat, des mises à jour obligatoires également, avant toute autre utilisation de la console, du contenu payant supplémentaire aujourd'hui défini pendant l'élaboration même du jeu (donc certainement ôté de l'expérience initiale, humm).

Tout cela sur un service en ligne propriétaire qui nécessite au minimum la création d'un compte personnel, au pire un abonnement payable selon plusieurs tarifications. Depuis ces portails connectés, on pourra acheter une infinité de services n'ayant rien a voir avec le jeu, ou bien d'ores et déjà se procurer des jeux en dématérialisé, qui ne seront ni échangeables, ni revendables, ni praticables sur une autre console chez un ami. Vive le Jeu Vidéo Social du futur.

Ah j'allais oublier la dernière trouvaille en date : le "Pass Online", passe-droit payant pour tout acheteur du jeu en occasion qui voudrait profiter des fonctionnalités multi-joueurs en ligne, soit désormais une bonne partie de l'intérêt des jeux actuels.

Ceci dans le but de lutter contre le marché de l'occasion, nouveau cheval de bataille de l'Industrie du Jeu vidéo. C'est dans l'optique de cette lutte que la prochaine génération de consoles sera très probablement munie d'un système de signature à utilisation unique du jeu, peut être lié à la nécessité d'une connexion permanente en ligne durant toute la partie, comme sur certains gros jeux P.C. actuels d'ailleurs. Des pratiques dont je me "lèche les babines" par avance tant elles vont encore compliquer la simplicité d'utilisation du concept de la console de jeu. 

Tout cela avant la fameuse dématérialisation totale, source d'un pari sur la satisfaction des nouvelles générations de joueurs/consommateurs, et dont on peut déjà prédire avec tristesse la disparition programmée de nos chères machines dans la course effrénée à la maximisation des profits.

Et après ça ?

 

Article proposé par RUDIO