Le site Industrygamers entame de la plus polémique des manières son tour de table des studios de développement impliqués dans le boum des social games et jeux sur formats mobiles. Les journalistes ont approché les deux dirigeants de Fun Games afin de recueillir leur opinion sur l'impact de cette tendance venant à l'encontre du modèle industriel sur lequel repose historiquement le cycle des consoles de jeux vidéo.    

Et le responsable John Welch n'y va pas de main morte pour décrire la véritable révolution de palais que les nouveaux usages imposent à tout un chacun. Il s'attaque à un symbole pour éclairer son opinion : << Le monde de Miyamoto qui consiste à être très tôt sensibilisé aux spécificités d'une console, aider au processus de production, imaginer la manette et réaliser des choses ridicules que personnes d'autres n'étaient en mesure de se représenter, ce temps là est révolu. >> Il veut croire qu'avec l'explosion d'Internet et ses corolaires le free to play avec l'avènement du contenu roi réalisé par des anonymes, qu'une rupture est en train de se produire.  

Un nouveau paradigme émerge et échappe au domaine réservé des acteurs traditionnels de la réalisation d'un jeu : << Dorénavant, le développement d'un titre est entre les mains de centaines de milliers d'équipes à travers le monde qui ne demandent la permission à personne. Ils créent [...] c'est dans ce monde que nous évoluons, dans la catégorie des jeux sur mobiles et social games, j'espère qu'il façonnera rapidement celui du téléviseur. >> J. Welch a à l'esprit le phénomène envahissant Minecraft sur Internet et Angry Birds sur la scène Flash qui ont bousculé bien des certitudes sur la radicalité semi-autonome de son mode de production et de croissance.    

Une telle expérience console a bien été tentée avec le jeu Little Big Planet sur PlayStation 3. Sony avait fait de son titre le chantre du contenu roi dans lequel les joueurs avaient toute la latitude pour laisser libre cour à leur soif d'imagination. Mais le géant japonais s'était laissé déborder par l'énergie créative sans bornes des concepteurs en herbe qui ont fait fi des lois de propriétés intellectuelles, amalgamant des univers appartenant à la concurrence. LBP a mis en lumière les limites de la production collaborative dont les ressorts liberticides sous-jacents menacent l'intégrité de l'univers ainsi réalisé. Si bien que le numéro deux mondial de l'électronique grand public a changé son fusil d'épaule pour accompagner ce nouvel élan économique. Le PlayStation Suite et le Sony Online Entertainment entrent dans cet ordre d'idée.    

Le constructeur japonais mise sur l'interaction entre tous ses écrans (Bravia, Vaio, Xperia, PlayStation) avec ceux de la concurrence (PlayStation Certified) , à l'aide d'une interface et de services en ligne unifiés. Une révolution pour un groupe dont le modèle de développement repose depuis toujours sur la création de produits électroniques évolués : << ne cherchez plus rien qui soit propre à Sony soulignait dernièrement David Mignot de la branche Mobile. La bataille du hardware est morte ! >> L'innovation matérielle n'est plus essentielle pour le fabricant seul compte ses usages qui n'obéissent par nature à aucune marque propre. Le label PlayStation est né.    

Tous les regards se tournent à présent vers Nintendo dont la tour d'ivoire est régulièrement assiégée par les tenants d'une plus grande ouverture au monde très flexible de la technologie. Taxée de société conservatrice qui ne prend jamais le train en marche des différentes évolutions techniques qui bouleversent continuellement l'industrie du jeu vidéo, le leader des consoles fait une nouvelle fois l'objet de vives critiques sur son prétendu retard face à Sony qui pour la première fois étend ses services à des produits concurrents des siens (smartphone sous Android et bientôt tablette).  

Le président du roi de l'édition est à ce sujet catégorique : << nous n'avons nullement l'intention de distribuer nos créations sur l'ensemble des plate-formes mobiles [...] Nintendo est une société qui essaie de maintenir une certaine valeur ajoutée à ses jeux. >> Le matériel propriétaire est donc indissociable de la spécificité des jeux Nintendo << je ne veux pas du tout m'engager dans une autre direction >> précise Iwata.    

Manifestement en désaccord total avec le haut dirigeant de Nintendo, les responsables de Fun Games pensent que les constructeurs << détruiront de la valeur si ils campent sur leur position [...] d'autres compétiteurs embrasseront cette ultime évolution à leur place au risque d'effacer d'un trait >> le modèle vieillissant des fabricants traditionnels.

Et ce d'autant que le marché se rétrécira : << Microsoft et Sony se partageront les miettes d'un gâteau amené à drastiquement diminuer de taille. >> Nintendo appelée à disparaître ?