C'était il y a 21 ans, au Consumer Electronic Show. L'industrie du jeu vidéo était alors associée au monde des produits électroniques grand public avant que celui-ci ne prend son envol et inaugure - avec frasque - son premier salon en 1994, l'Electronic Entertainment Expo.

Ce millésime 1990 n'était pas le plus intéressant en soit mais il était annonciateur des plus grands bouleversements qui ont secoué tous les acteurs du marché durant cette décennie.

La NES, malgré le poids des années, affichait une santé insolente avec un seuil d'équipement record. 22% de taux de pénétration au sein des foyers américains (pour une part de marché de 90%), aucune autre console n'avait jusqu'ici côtoyé un seuil à deux chiffres. Nintendo n'était pas venu les mains vides, un certain Super Mario Bros 3 présenté en démo allait achever la concurrence encore groggy par l'avalanche de hits lancés sans relâche sur cette console. Touché par la grâce, le fabricant japonais présentait également la GameBoy commercialisée quelques mois avant l'ouverture du CES. Ce qui n'empêcha pas le stand d'être pris d'assaut par le public.

Sega venait de reprendre les droits de propriété de la Master System cédés par le passé à la société Tonka. Le géant de l'arcade arrive avec de nouvelles ambitions. La Genesis est lancée en août 1989 avec succès sur le territoire américain, la campagne marketing très agressive de Sega séduit une frange des joueurs lassée des univers sucrés de Nintendo (le célèbre argument "Genesis does what Nintendon't"). Lors de la sortie de la Super Nintendo, Sega troquera son argument choc pour une rhétorique moins rentre dedans : "Welcome to the next level". Le constructeur cèdera au strass et paillette, des personnalités du monde du sport, de la musique (Michael Jackson), du show-biz, des comics (spiderman) seront associées à la marque.

NEC surnageait dans un marché verrouillé par Nintendo. La division électronique grand public nord-américaine sera liquidée. Elle recentrera ses activités exclusivement dans le domaine des jeux vidéo. Un prototype de console portable réalisé sur le modèle de salon TurboGrafx-16 sera présenté dans un stand fermé au public. Seuls les journalistes et partenaires de NEC pouvaient voir le modèle derrière des portes closes.

Voici un plan d'ensemble dévoilant grâce à la taille des stands les rapports de force entre éditeurs et constructeurs. Nintendo avait logiquement le plus imposant du salon avec une surface commerciale représentant jusqu'à deux fois celle de Sega. Bien qu'inexistant sur ce marché, Sega pariait sur l'avenir avec sa Genesis. Son stand, un plus modeste que son concurrent direct, trahissait un désir de revanche assez marqué. En effet, les stands respectifs des deux grands constructeurs étaient face à face sur plusieurs centaines de mètre alors qu'ils sont d'ordinaire séparés par un patté de stands d'éditeurs. C'est le cas de NEC, un peu plus isolé mais loin d'être figuratif. A noter que le très réactionnaire éditeur Tengen, bête noire de Nintendo, possédait un stand de bonne dimension malgré son manque de marge de manoeuvre.