Il n'y a donc que les imbéciles qui ne changent pas d'avis. Et Hideo Kojima, maître d'œuvre de la saga depuis la saint glinglin, n'a rien d'un imbécile. Merci pour lui. En effet, je me souviens encore que lors d'une entrevue avec lui en 2005 (c'était lors d'un E3, paix à son âme), le père de Snake m'avait révélé "je ne pense pas que nous réaliserons un jour un Metal Gear Solid traditionnel sur PSP. Les contrôles ne sont pas assez adaptés". Ok. Je le note. Alors bien sûr, la série s'est depuis "acidifiée" sur la portable de Sony... Deux tentatives plus ou moins convaincantes : Snake qui se la jouait avec des cartes... Mouais. Finalement deux essais aussi sympathiques qu'anecdotiques, si vous voulez mon humble avis de gamer pénitent. Et puis voilà qu'aujourd'hui, par la divine opération du saint esprit, le bad trip s'estompe et Snake décide de dompter la PSP et de lui montrer qu'il peut aussi lui offrir une aventure, une vraie. Et moi qui croyait qu'Hideo Kojima ne disait que la vérité...

UMD crousti-moelleux...

Dans la grande chronologie métaphysique des MGS, Metal Gear Solid Portable Ops se veut la suite directe de MGS 3 Snake Eater. En clair, vous incarnez à nouveau Naked Snake, alias Big Boss, et pour un épisode portable, avouons qu'il y a pas mal de croustillances à se mettre sous les quenottes niveau scénar'. Du genre (sans spoiler) : Guerre froide. Stop. Menace nucléaire. Stop. Révélations cosmiques. Stop. Backgrounds inédits sur certains persos clefs comme Roy Campbell. Stop. Cut-scenes en mode Comic Book super stylisées. Stop. Histoire tarabiscotée mais pas trop longue. Stop. Les fans apprécieront. Stop. Les autres trouveront ça sympatoche... mais zapperons. Stop. Ah oui, on peut accélérer les cut-scenes. Stop. Mais c'est un peu con. Stop. Enfin je ne suis pas votre père d'abord. Stop. Quoique...

Vous reprendrez bien un Dual Shock

Bon, ça c'était pour la storyline, you know. Sauf que si pour ce nouvel épisode sur PSP Snake a changé d'orientation ludique en privilégiant le retour à l'action tactique pure et dure, la console, elle, n'a pas changé. En clair, si jadis Kojima la trouvait mal branlée niveau précision et disposition des contrôles... eh bien il a dû faire avec. Et là, je vais être clair, direct, cash, tac tac : non, la jouabilité de ce Portable Ops n'est pas exempte de défauts. En effet, si Snake se dirige avec la croix directionnelle, il faut très fréquemment recadrer la caméra avec le stick analogique... sauf que bien évidemment, à moins d'être un poulpe, il est impossible d'effectuer cette action tout en se déplaçant. Et vous en conviendrez, dans un jeu d'infiltration, perdre du temps à se battre avec les angles de vue n'a rien d'anecdotique. C'est dit. Dommage alors que le nouveau radar prenant en compte le son ne soit pas plus efficace, ou que les développeurs aient décidé de faire fondre l'intelligence artificielle de vos ennemis pour compenser le tout. Car oui, soyez prévenus : ce n'est pas la course à la réactivité dans le camp adverse. Pour autant, si le titre ne se montre pas irréprochable en termes de prise en mains, le calvaire n'a rien de trop accablant. Non. Peace.

Constituez votre Dream Team

Pour s'adapter à l'aspect nomade de la PSP, l'aventure est découpée en missions. Même si cela coupe un peu l'élan romanesque de l'ensemble, et si certains actes ne se révèlent pas transcendants (le "va au point B et... basta", on s'en serait passé), ce nouveau canevas n'a rien de choquant ici. Mais la vraie trouvaille du titre réside dans la possibilité d'enrôler des soldats ennemis (après une petite scène de conviction "Jack Bauerienne"). En effet, il est possible de capturer des ennemis et de les incarner par la suite. Chacun d'eux dispose de capacités, d'accoutrement et d'équipement spécifiques... Et même si vous ne l'aviez pas senti venir, du coup, l'aspect camouflage passe à la trappe ! Il est ainsi remplacé par l'obligation d'alterner entre tel ou tel soldat pour passer incognito dans certains lieux bien gardés. Le pire (ou le meilleur), c'est que l'idée fait son chemin et s'intègre plutôt bien dans le tableau général. En début de mission, on prépare son petit rooster de persos, et puis on se prend au jeu en les incarnant. Bien évidemment, ne faites pas le gogo, car si vous rampez avec un officier, vous serez automatiquement démasqué. Ouaip, on ne rigole pas avec les gradés !

Bonne mue ou à la rue ?

A noter aussi qu'un mode online a été intégré (WiFi). Rien de transcendant ici puisqu'il s'agit finalement de shoot un rien bourrin, comme dans la version Subsistence de MGS3 nous en avait offerte. Sauf qu'une fois de plus, la jouabilité de la PSP rend le tout un peu plus branli-branlo.

Et là vous allez me dire que c'est l'heure du méga bilan final. Et je vais vous le dire : vous avez bien raison. Ainsi, ce Metal Gear Solid Portable Ops porte les stigmates de l'œuvre au sang mêlé. Car si la réalisation 3D impressionne, si l'ambiance sonore enveloppe tout avec onctuosité, si le scénario attire et si le système de jeu innove par touches subtiles, d'un autre côté, les quelques combats contre les boss n'ont rien d'anthologiques, l'IA des ennemis prête parfois à sourire et la prise en mains aurait mérité un bon Dual Shock. C'est dit. D'un autre côté, le sang mêlé n'a jamais été synonyme de malaise obligatoire. Bien au contraire, il a parfois le mérite d'ouvrir d'autres perspectives. Ainsi, avec ses forces et faiblesses, ce nouveau MGS moins expérimental que le binôme ACID trouve donc dignement sa place dans la grande famille des serpents au sang froid.

Kojima n'avait donc que partiellement raison. Oui, la PSP n'est pas vraiment faite pour accueillir un "vrai" MGS... mais comme tous les serpents, Snake a su ruser...