Je renouerais bien 5 minutes avec une vieille tradition d'un mag à pingouins, qui consistait à blablater en début de test, pour justifier par un laïus tout personnel les raisons du retard de ce test. Mais je taperai sur Bouygues Immobilier une autre fois. Quant à ma thèse sur la procrastination, elle attendra. Logique... L'urgence, c'est de vous parler, sans vous endormir, des qualités de ce Command & Conquer 3, que les vieux croutons du STR attendaient avec un oeil suspicieux et le sourcil interrogateur.

Welcome to the 90's !

Premier choc : outre de "classiques" cinématiques en 3D chatoyante pour vous mettre dans le bain, on assiste au retour de la bonne vidéo à l'ancienne, avec des acteurs en costumes et des décors qui sentent la kermesse de primaire... Non, attendez, je m'approche de l'écran... Mais mais mais... Ca pète ! Dire du mal de ces vidéos serait en fait une erreur. Déjà parce que le risque de se faire pourrir par une horde de fans nostalgiques est réel. Ensuite, parce que hormis un jeu d'acteur parfois un peu pitoyable, l'ambiance est là (surtout côté NOD), la réalisation est impeccable, la compression impressionnante par sa qualité. Bref, ça fonctionne, ces vidéos font leur boulot, même si je regrette qu'on ne puisse pas écouter la version originale avec des sous-titres français. Obliger nos compatriotes à se cogner une pure VF (doublée) est presque surprenant vu le niveau de finition du titre. Le casting donne au passage une vague idée du budget de ce C&C 3 : Tricia Helfer (brulante Cylon N°6 dans Battlestar Galactica), la très hooooot Grace Park (BSG également), Michael Ironside (Starship Troopers, Top Guns), Josh Holloway (Lost), Billy Dee Williams (Lando dans Star Wars, avec des rides en plus), etc. Rien que pour payer tout ce petit monde, il a dû falloir du cash. Et la distribution des rôles est bien vue. Tricia (vous permettez que je l'appelle Tricia) est décidément parfaite dans les rôles un peu ambigus. Coquine.

Ménage à trois

Une des règles tacites des bons STR semble être qu'il faut disposer de trois races pour réaliser un titre qui cartonne. Je schématise si je veux. Du coup, le NOD et le GDI voient débarquer un troisième larron, bien gluant : les Scrins. C'est le cadeau bonus de cet opus, puisqu'une fois les 2 premières campagnes terminées, celle des Scrins débarque, avec je dois dire un certain style. Ces aliens sont évidemment le centre du scénario que vous vivrez tour à tour dans les trois camps. Le Tiberium n'est bel et bien pas arrivé par hasard chez nous. Mais chuuuut !
Première mission et deuxième choc : c'est superbe. C&C 3 est un STR aux graphismes fourmillants de détails. Unités très travaillées, animations riches - jusqu'aux douilles éjectées par les armes de certains tanks -, effets des armes de bourrins toujours aussi jouissifs (aaaahh, le doux son du canon à ions au petit matin), bruitages et musiques sans failles... Les atours d'un gros blockbuster sont définitivement rassemblés. Le vernis est même impeccablement travaillé, EA peut être fier de ses ouvriers.

Intelligence virtuelle

Le gameplay lui-même est en revanche ultra classique. Ne pas perturber les habitudes semble avoir été le mot d'ordre. La campagne démarre doucement, seules deux ressources sont à gérer (argent, principalement par le Tiberium, et énergie) et on s'installe vite aux commandes d'une interface bien pensée, mais clairement dans la continuité de la série. Cela dit, pas question de flâner, C&C 3 se veut un STR nerveux, rapide, avec de l'action en flux continu. Si c'est très vrai en multi, la campagne souffre de quelques défauts qui ne permettent pas d'en profiter à 100%. Le plus gros concerne l'intelligence artificielle, aussi maligne qu'un poisson rouge mort. Selon son niveau de difficulté, elle va vous envoyer plus ou moins de monde pour vous contrer : plus nombreuses et plus fréquentes, ces vagues d'unités seront évidemment dangereuses. Mais vous attendrez longtemps une attaque-surprise... Une fois pigé le schéma tactique, on applique la solution, on gagne, on regarde la vidéo et hop, neeeeext. Un brin décevant. Surtout que parfois, le plus compliqué est d'éviter les bugs, toujours présents dans la version 1.04. Exemple, dans une mission on vous demande de détruire plusieurs bases. Dans la foulée et pour gagner du temps, j'en capture une avec un ingénieur. Il m'a fallu un petit moment avant de piger qu'il fallait que je détruise aussi cette base pour que le script de victoire se déclenche enfin. La variété des situations rattrape un peu cette faiblesse : infiltration commando, escorte, batailles en ressources limitées (genre attente de renforts), tout y passe. J'aurais quand même aimé un pathfinding moins brumeux et des réactions franches pour les unités. Voir un tank censé tenir une position se barrer sur 100 mètres pour poursuivre une unité fuyarde, c'est toujours agaçant. Surtout quand il n'arrive pas à se remettre en position.

Choisis ton camp camarade

Le plus gros défaut de ce titre concerne la ressemblance frappante entre les 3 races. Même les Scrins se jouent comme le NOD ou le GDI, avec à chaque fois simplement quelques unités qui diffèrent et n'ont pas d'équivalentes directes ailleurs. On est très loin de la prise de risque de ce vieillard de Starcraft. Dommage. Ca va donner des cartouches supplémentaires aux fanatiques de Supreme Commander pour tirer sur ce C&C 3 qui selon eux n'est même pas digne de venir chasser sur les terres de leur protégé. Mais comparer ces deux titres est une erreur. SC propose des guerres longues, avec des unités par paquet de 1000, le tout avec une gameplay qui oblige à passer sa vie en vue stratégique sans vraiment voir ce qui se passe au sol. C&C 3 privilégie l'escarmouche entre quelques tanks, avec une position de caméra volontairement basse même en zoom arrière maximum. De quoi rendre clostro les accrocs du titre de Chris Taylor qui aiment prendre de la hauteur. Mais C&C 3 est indéniablement fun et rapide d'accès, avec un atout de taille en multijoueurs (malgré encore quelques bugs) : proposer des parties relativement courtes. Ca permet aux polios comme moi de se faire rétamer rapidement, sans trop souffrir. Et rien que pour ça, merci aux développeurs d'EA...

Alors indispensable ou pas ? Le manque de véritables nouveautés côté gameplay pourrait faire hésiter pas mal de monde, mais ça serait se priver d'un excellent STR, qui se paye le luxe d'être beau, optimisé pour tourner sur des configurations très modestes (contrairement à Supreme Commander) et avec une durée de vie plus que correcte. Entre le mode campagne très riche, les escarmouches pour s'entrainer et le multi pour passer aux choses sérieuses, c'est le genre de produit qui ne prendra pas la poussière sur vos étagères avant un moment.