D'aucuns pourraient aussi voir le travail de Naughty Dog comme celui de pionniers du détail, pourtant, et c'est peut-être aussi pour ça que cette suite tant attendue répond aujourd'hui aux attentes démesurées placées en elle. Et elle y répond avec le fracas d'une maîtrise unique - de celles qui nous décrochent littéralement la mâchoire toutes les 10 minutes. Car si Blockbusters il y a dans le jeu vidéo, Uncharted 2 en est la définition la plus rigoureuse qu'il m'ait été donné de jouer depuis longtemps.

Black and Draker

Plus sombres, mais aussi plus éclatantes, et plus "Drake" que jamais, les nouvelles aventures de Nathan pourraient se résumer en une succession de scènes cultes qui réunissent le meilleur de ce que le cinéma américain a pu produire en matière de films d'action et d'aventure à couper le souffle... avec vous aux commandes. Je vais faire le maximum pour vous spoiler le moins possible ce qui est d'ores et déjà pour moi, qui ait eu l'immense privilège de terminer cet Uncharted 2 il y a quelques heures à peine, un nouvel étalon du jeu d'action. C'est bien simple : si vous avez une admiration sans bornes pour les premiers Indiana Jones, si les héros qui s'en prennent plein la gueule et les courses contre la montre menées tambour battant vous passionnent, si le mystère et la découverte de lieux oubliés de tous et de légendes aux mythes teintés de réalité écarquillent vos yeux et stimulent votre imagination, Uncharted 2 pourrait vous faire frôler l'overdose d'extase. Tout commence par une situation apparemment désespérée, quelque part dans les montagnes du Tibet...

Oh... crap !

Nathan Drake se réveille ainsi, ensanglanté, sur la banquette d'un train qui ne roulera plus. Le temps de reprendre ses esprits, et la chienlit redémarre : le wagon est suspendu dans le vide à flanc de falaise, et commence à se désagréger. Tant bien que mal, Drake tente de s'en sortir et se retrouve effondré dans la neige, à progresser péniblement dans un blizzard neigeux qui n'est qu'une des raisons pour lesquelles il claudique laborieusement vers on ne sait où. Cette scène, vous la connaissez tous si vous avez vu ne serait-ce que la jaquette du jeu. Puis, flashback : retour au calme, quelque part dans les îles... pour revenir au début de cette aventure et de la nouvelle quête dans laquelle le jeune chasseur de trésor va se lancer : retrouver la flotte perdue de Marco Polo, et les trésors qu'elle cache. Trahisons, mythes et légendes, de l'Inde au Tibet, en passant par Bornéo et le Nepal, le voyage se transforme vite en course poursuite pour trouver la mystérieuse Pierre de Cintamani avant un adversaire qui ne fait pas dans la dentelle... et ce, sans la moindre interruption ni le moindre chargement !

Une leçon de narration

Le premier Uncharted était déjà un beau modèle d'histoire simple, mais passionnante, peuplée de personnages auxquels le joueur pouvait immédiatement s'identifier. Cette suite parvient à se surpasser en la matière, et si comme je le disais plus haut, elle n'innove pas de prime abord, en reprenant la formule qui a fait le succès du premier, elle réinvente cette roue du jeu d'action dans chaque animation, dans chaque détail visuel, dans cette riche narration dynamique entre les personnages luttant côte à côte face à des menaces humaines - ou autres - qui ont tout de la cause perdue. Le rythme ludique et narratif d'Uncharted 2 frôle le sans-faute. Vous trouviez qu'il y avait trop de fusillades dans le premier ? Il y en a tout autant dans cette suite. Mais elles sont plus trépidantes, plus variées, mieux équilibrées, et mieux entrecoupées d'autres scènes, tout en donnant bien plus de choix au joueur sur la manière de les aborder. Plutôt que d'amputer cet aspect de la formule, Naughty Dog a simplement enrichi au centuple tous les autres aspects du jeu. Oui, il y a des scènes de puzzle peu ou prou à la Tomb Raider, dans des temples aux mécanismes gigantesques (et la lecture du journal de Drake pour trouver des indices est une autre source de vannes et de plaisir). Oui, il y a de nouveaux moments, fuites endiablées ou scènes d'action inoubliables dans lesquelles il ne suffit pas d'arroser de balles des marées de soldats, et même une large portion d'infiltration, véritable nouveauté, qui offrira aux joueurs adeptes de la progression parfaite de quoi éviter certaines fusillades s'ils le souhaitent. Ou du moins à mieux s'y préparer en entamant la supériorité numérique constante de l'ennemi. Contre toute attente, on n'a pratiquement pas l'impression de faire deux fois la même chose, tout au long d'une aventure à la durée de vie plus importante que celle de l'épisode original - comptez une douzaine d'heures minimum. Et pas une n'est ennuyeuse.

Le sourire aux lèvres

L'écriture des dialogues, et le jeu des acteurs (préférez la V.O. sous-titrée accessible depuis les options), l'humour ravageur et omniprésent, le retour des anciens comme le vieux Sullivan ou la blonde Elena, comme l'arrivée de nouveaux à l'image du vieux pote Harry Flynt ou la sulfureuse Chloé Frazier : qu'il s'agisse de l'histoire, des dialogues, ou de l'action, quand on n'a pas la mâchoire décrochée, c'est pour sourire de plaisir. Et une bonne part de tout cela est directement imputable à la qualité du graphisme. Si vous trouviez le premier magnifique, celui-ci nécessitera l'invention d'un nouveau superlatif. Les décors, en particulier, mettent à l'amende la majeure partie des autres productions PlayStation 3. Le détail des visages, les vêtements qui se couvrent de neige ou s'humidifient à hauteur d'eau cette fois, les portions destructibles de décors volant en éclats sous les rafales de balles, les effets sous la pluie ou les plantes maltraitées par les rotors d'un hélicoptère menaçant Drake, les meubles volant dans tous les sens autour du héros alors que l'immeuble entier dans lequel il se trouve s'effondre dans une rafale d'explosions... le fossé visuel qui sépare Uncharted 2 d'autres jeux dits next-gen est d'autant plus impressionnant qu'il n'entame en rien la fluidité de l'animation et de l'action ! Je connais des programmeurs et des artistes partout dans le monde qui ne pourront que se prosterner d'admiration devant un tel spectacle... alors c'est dire pour nous, les joueurs.

Quand y'en a plus, y'en a encore

Et comme si le triomphe d'une aventure solo de laquelle on ne peut pas décrocher n'était pas suffisant, cette suite marque aussi l'arrivée d'un mode multijoueurs qui n'est pas non plus à sous-estimer. Certains d'entre vous ont pu s'y frotter avec la bêta, mais sans mesurer l'ampleur de l'offre finale. Car là encore, Naughty Dog s'est surpassé pour proposer quelque chose qui ne soit pas un simple gimmick. 10 modes de jeux (Deathmatch, solo ou équipe, une sorte de mode horde en Coop', mode de capture de zone ou roi de la colline, et même Machinima pour les amateurs), 7 cartes impeccables et variées, des options à gogo pour personnaliser ses parties et surtout une gestion grandiose des groupes pour jouer facilement entre potes, plus la possibilité de sauver les replays de parties, non seulement sur votre disque dur mais aussi sur les serveurs de Naughty Dog, pour prendre des photos, étudier des stratégies, ou revoir ses moments de bravoure : c'est du haut niveau, d'autant que tous les mouvements du solo sont dispos en multi ! Enfin, en solo comme en multi, débloquer des Trophées, trouver des trésors ou accomplir certains hauts-faits vous permettra d'accumuler de l'argent virtuel pour débloquer toutes sortes de choses, de vidéos making-of à de nouvelles fringues pour les personnages, en passant par des améliorations d'armes (plus ou moins à la Modern Warfare) et des galeries de pré-production.

Uncharted 2 a tout pour séduire. Magnifique visuellement autant que ludiquement et narrativement, le soin attaché à son solo confine au génie, et son multi n'est pas en reste non plus. En un mot comme en cent : si vous avez une PlayStation 3, passer à côté serait un crime. Si vous n'avez pas de PlayStation 3, Alléluia : achetez-en une avec le jeu, elle a baissé de prix. Vous ne le regretterez pas !