Je kiffe le personnage de Riddick. Et j'adore le mélange action, infiltration, aventure en vue subjective. Néanmoins, lorsqu'il s'agit de revivre une forte expérience passée, on n'est jamais à l'abris d'un retour au réel qui nous laisse entrevoir, d'une part, que notre mémoire peut nous jouer des tours, et d'autre part, que le nous d'aujourd'hui n'attend pas les mêmes choses que celui d'hier. Et puis, parfois, le plaisir d'hier devient celui d'aujourd'hui, et on prend d'autant mieux conscience de la valeur de ce qui fut.

"A long time between stops. A long time for something to go wrong..."

Car il s'en passe des choses en 5 ans. Surtout en matière de jeu d'action. Une génération de console a passé, une nouvelle est arrivée. Le ludisme s'est simplifié, cherchant l'essentiel et le divertissement plutôt que le challenge et la profondeur. La réalisation des blockbusters d'aujourd'hui éclipse, comme l'édicte nos Lois, celle de ceux d'hier... mais alors même que tout cela aurait pu entacher l'expérience de ce Chronicles of Riddick en polluant ma tête de réflexions superflues, la réalité fut tout autre. À peine lancé le début de Butcher Bay, si je tique sur le moteur graphique daté à bien des égards malgré sa révision récente, l'atmosphère, l'ambiance, les personnages, les dialogues, et l'aventure elle-même ont vite fait de me rappeler pourquoi c'était si bon hier, et pourquoi ça l'est toujours aujourd'hui : parce que c'est juste. Spot on.

"I just take the hand life deals me. Then I cheat."

Mais on ne peut pas en dire autant de l'épisode Assault on Dark Athena, malheureusement. Alors que Butcher Bay mélange toujours les genres en une valse au rythme narratif impeccable, tout du long jusqu'à la ligne droite finale, Dark Athena bascule dans le FPS simplet et simpliste un peu trop vite. Quand Butcher Bay nous offre de la mesure et construit habilement la tension de sa fin au fil des scènes, Dark Athena nous colle dans les mains un lance-grenades aux munitions infinies à la moitié du jeu, massacrant un début qui prolongeait pourtant à merveille l'expérience infiltration sur les bases de Butcher Bay. Il y avait même de vrais traits de génie en matière de game design (rattacher les armes à feu aux corps de drones, pour nous donner juste cette lichette de puissance de feu, mais nous faire préférer la liberté d'un corps à corps aussi brutal qu'articulé sur l'infiltration). Dommage...

"It's been a long time since I smelled beautiful"

L'histoire des jeux semble être celle des films ; après un Pitch Black impeccable, qui aura brillamment su s'accommoder de son petit budget en narrant son histoire avec passion et inventivité, Chronicles of Riddick a tenté de surfer sur ce premier succès en se laissant emporter par des moyens plus importants. Mais à trop soigner la forme il en a perdu une partie du fond. Et cet aspect un peu bancal se retrouve également dans le multi-joueurs. Une bonne partie de ce qu'il propose est agréable, mais dispensable, et un petit joyau se cache en son cœur : le mode Pitch Black. Un joueur dans la peau de Riddick, les autres à ses trousses, avec le faisceau d'une lampe torche à l'efficacité inversement proportionnelle à la puissance de l'arme sur laquelle elle est montée pour tenter de survivre au prédateur aux yeux de chouette. Un régal de tension, pour les deux camps.

Chronicles of Riddick : Assault on Dark Athena propose ce qui reste encore à ce jour l'une des expériences en vue subjective les plus marquantes de la galaxie Science-Fiction, riche d'un doublage irréprochable, d'une atmosphère délicieusement clair-obscur, et d'un subtil équilibre des genres curieusement jamais reproduit en 5 ans. Le reste, du disque, c'est du bonus. Les profanes comme les fans de l'original pesteront sur certains détails (IA parfois à la rue, des bugs ça et là, une réalisation datée, mais surtout de longs chargements qui agacent bien plus aujourd'hui qu'hier, surtout avec les allers-retours), mais rien que pour Butcher Bay et le plaisir de renouer avec ce salaud de Riddick, moi, je lâche mes euros.