Encore peu de temps avant qu'il ne soit jouable via force démos et bêtas, Anthem était bien mystérieux. Difficile de savoir en effet s'il s'agissait d'un jeu 100% multijoueur ou d'un titre moitié solo moitié multijoueur. Bref, la communication autour du titre était pour le moins kafkaïenne. Maintenant que nous l'avons entre les mains, c'est évidemment infiniment plus clair et on commence à comprendre pourquoi les explications étaient si floues.

Un Avatar du pauvre

L'histoire prend place à Bastion, un royaume humain qui gravite autour de l'Hymne de la Création, une relique permettant de façonner la vie. Evidemment une faction mi-religieuse mi-militaire du nom de Dominion souhaite s'en emparer. Et votre rôle sera évidemment de l'en empêcher. Mais comme tout n'est pas aussi simple dans la vie, le fait d'utiliser cette relique va faire sortir des entrailles de la terre par des portails des créatures titanesque (des titans donc). On vous le dit tout de suite, le scénario ne brille pas par ses spécificités, on est entre Avatar pour le coté nature et Cloverfield pour sa gestion des monstres et des failles/portails spatio-temporels. Pour contrer la menace, la race humaine fait appel à des super soldats utilisant des javelins : des armures ultra sophistiquées façon Iron Man pour aller casser du monstre. L'histoire est des plus laborieuses à se mettre en place et même si durant les premières heures on découvre avec plaisir le lore, on finit rapidement par décrocher.

Une scénario convenu

En fait, pour saisir la substantifique moelle du scénario et comme pour mettre sous le tapis les faiblesses de la narration, le jeu nous force quasiment à lire les différents codex pour bien comprendre tout ce qui se passe. Les doublages sont bons et on saluera le travail des acteurs à ce propos, mais hélas ce n'est pas suffisant. Au bout de 3 heures de jeu, on finit par ne même plus écouter les dialogues lors des missions tellement l'ensemble est convenu et mou. L'histoire se répète, les missions s'enchaînent et notre personnage fait toujours la même chose avec les mêmes objectifs. Et cerise sur le gâteau les protagonistes sont bourrés de clichés, rien n'est fait pour vous apporter un peu d'immersion. Et pourtant on comprend et on sait que de nombreuses personnes ont travaillé dur pour rendre cet univers cohérent ; c'est finalement le plus triste dans l'histoire. Heureusement la partie technique du casting est bluffante avec des animations faciales plus vraies que nature, qui vient relever le tout et apporter un peu de profondeur à l'ensemble.

Une répétitivité à toute épreuve

Le manque de contenu est au coeur du problème et il est étroitement lié à ces invraisemblances de scénarios. Il faut attendre une dizaine d'heures (niveaux 14/15) pour enfin rencontrer des ennemis de taille (Titan), le reste du temps on rencontre sempiternellement le même type d'ennemi : des scorpions, des soldats du Dominion, des oiseaux agressifs et des loups. Pour ne rien arranger les objectifs sont souvent les mêmes, à savoir récupérer des orbes et libérer des gens et bien évidement... tuer des monstres.

Ce n'est pas le end-game qui sauvera la mise, avec ses 2 donjons spéciaux et son loot "haut de gamme" puisque ce n'est clairement pas suffisant pour faire tenir les joueurs sur la longueur. On espère sincèrement que le contenu qui viendra par la suite (voir actu par ailleurs) sera suffisamment dense pour rattraper tout ceci et que BioWare possède plein (vraiment plein) de nouvelles portions de jeu à dégainer dans sa besace.

Sapés comme jamais

Techniquement le jeu est une énorme claque et c'est sans conteste l'un des plus beaux mondes ouverts à l'heure actuelle. Le monde n'est pas si vaste car en vol atmosphérique on traverse rapidement les zones, mais cela reste tout de même très impressionnant. Le moteur Frostbite fait un travail... de Titan (désolé...) et c'est un plaisir de chaque instant pour nos rétines. Effets volumétriques, lumières, textures... Rien ne manque niveau détails et somptuosité. En combat, le coté nerveux permet d'apprécier une multitude d'effets visuels et d'en prendre plein les mirettes une fois encore. Le visuel est de plus épaulé par une direction sonore de belle facture avec des musiques d'excellentes qualité, oscillant entre Avengers et Star Wars. Les divers effets sonores sont aussi très bons et c'est un vrai petit plaisir auditif.

Combat et vol atmosphérique grisants

Le combat est d'ailleurs, au même titre que le vol en armure, terriblement grisant. On enchaîne les combos (surtout avec une classe nerveuse comme l'Interceptor) et on assiste à un déferlement de coups et de démonstrations de force. D'autant que les classes sont suffisamment intéressantes pour proposer des choses variées comme du combat au corps à corps pour l'un (Interceptor) et une classe tank pour l'autre (Colossus). Il est préférable d'ailleurs de réussir au mieux la constitution des groupes avec le plus de diversité possible pour exploiter au maximum ce que propose Anthem. Hélas, à ce niveau aussi le titre a le postérieur entre deux chaises car il peut être joué en solo une grande partie du temps tout en forçant artificiellement la coopération à certains moments comme les phases de partie libre. En gros il s'agit d'avoir accès à l'ensemble du monde ouvert pour participer à des événements mondiaux et profiter de loots spéciaux. Par événement, entendez par là, la nécessité de tuer X monstres ou récupérer X objets. À l'image de ce qui se faisait déjà dans les MMO... il y plus de 15 ans. Pour un AAA en monde ouvert de début 2019, c'est tout de même assez gênant.

Le combat est en tout cas suffisamment intense et bien travaillé (feeling des armes notamment) pour nous occuper de nombreuses heures avant que la magie ne s'essouffle.

La magie de la découverte laisse place à l'ennui

On a en réalité l'impression désagréable d'avoir en face de soi une très belle coquille vide (pour le monde ouvert notamment). Le jeu est splendide et on a l'impression, dès les premières heures de jeu, de pénétrer dans un univers magique digne du film Avatar, alors qu'en réalité l'intérieur s'avère au final très artificiel. C'est un peu comme si on vous permettait de conduire une belle Aston Martin mais sans les sièges ni une partie de l'habitacle. Difficile de trouver du sens à tout ça et surtout de comprendre comment BioWare, un studio autrefois si prestigieux a pu se tromper à ce point. Le jeu aurait en fait toute sa place en version free-to-play mais n'a clairement pas ce qu'il faut en l'état pour être proposé au public comme un jeu complet avec la tarification correspondante.

Et comme un coup de pelle derrière la nuque, la surprise ne s'arrête pas là. Le jeu possède quelques (gros) problèmes techniques comme des temps de chargement partout et tout le temps et pour toutes les occasions, et ce malgré le Patch Day One appliqué. Sur une configuration de PC de monstre avec un SSD d'excellente facture c'est déjà un problème majeur, à tel point qu'on a du mal à imaginer à quoi peut bien ressembler les versions consoles (nous n'avons pas eu le temps de nous y mettre, puisque les codes sont arrivés assez tardivement).