L'histoire de Mirror's Edge se déroule dans une grande ville moderne. Une ville blanche, lisse et propre. Presque éblouissante. Une ville à l'image du système qui la régit... Une cité attirante, qui vous tend les bras, qui vous tente avec un beau sourire pour mieux resserrer son emprise sur vous. Car pour mener une vie sûre et tranquille, ses citoyens ont accepté, pour la plupart, de mettre de côté ce qui leur restait de libertés individuelles. Les quelques réfractaires ont fini par vivre en marge de la société, bien planqués. Les moyens de communication étant totalement sous contrôle gouvernemental, ces marginaux ont désormais recours aux "messagers" pour se transmettre missives et autres objets. Les messagers usent de leurs talents athlétiques pour exploiter l'une des rares parcelles de territoire les moins surveillées : les toits de ces gigantesques buildings immaculés. On incarne ainsi Faith, une jeune femme messager qui, bien malgré elle, se retrouve vite impliquée dans une sombre affaire de meurtre...

Scénario sur le fil...

... Ou plutôt sur un coin de nappe en papier ! Autant être clair tout de suite : la principale qualité de Mirror's Edge ne se trouve définitivement pas dans son scénario. L'univers créé par les talentueux développeurs de DICE est vraiment fort et intéressant, mais le développement et la fin précipitée de cette histoire ultra classique fera plus glousser qu'autre chose. C'est bien malheureux, ma foi, mais il faudra bien l'accepter pour pouvoir profiter au mieux du reste. Car Mirror's Edge transporte le joueur pour bien d'autres raisons ! Tout part d'une idée toute simple : faire avancer le schmilblick de la vue subjective. Combien de FPS ne profitent pas de ce postulat de départ pour immerger le joueur aussi profondément que possible dans la peau de leur avatar ? Faire progresser le joueur à la première personne représente pourtant la plus belle des occasions ! Pour ne rien perdre du challenge que DICE s'était lancé, il n'était pas question de pondre un vulgaire shooter, mais de pousser un peu plus le bouchon en se lançant dans le développement d'un jeu de... plateforme ! Car finalement, Mirror's Edge est un jeu d'action, mais aussi et surtout un jeu de plateforme. La formule peut se rapprocher de celle d'un Prince of Persia, par exemple, car il est avant tout question ici de se déplacer de manière rapide et acrobatique dans un environnement regorgeant d'interactions et de gaps à franchir. Désarmer un ennemi est possible, utiliser son flingue aussi, mais cette alternative n'est (presque) jamais favorisée, contrairement à la vitesse, à la fluidité et l'ingéniosité de vos déplacements. Faith peut courir, sauter, glisser, s'aggriper, et lorsqu'on en prend le contrôle, tout est fait pour nous offrir des sensations d'immersion parfaites. Le vent siffle dans nos oreilles lorsqu'on prend de la vitesse, les mains s'élancent devant nos yeux, le souffle se fait progressivement haletant, l'image se floute autour du point qu'on fixe, la tête se balance au moment où l'on force une porte, le bruit des pas résonnent...

Grisant !

À toutes ces petites astuces visuelles et sonores, qui font la différence et font naître le "body awareness" (la conscience du corps, quoi), s'ajoutent un level design et un gameplay bien sûr étudiés, eux aussi, pour offrir au joueur de belles sensations. Concrètement, le jeu est divisé en neuf actes qui vous feront traverser toute une journée, du petit matin au soir. Il proposent tous un environnement différent, sur les toits des immeubles mais aussi à l'intérieur, au niveau du plancher de vaches ou encore dans le métro. Il sera toujours question de fuir, de poursuivre ou simplement d'explorer, de trouver son chemin. Dans tous les cas, tout est basé sur le déplacement et la rapidité. Il faudra donc savoir tracer sa route, et c'est dans cette optique qu'on dispose d'une touche qui, une fois pressée, tourne votre regard vers l'objectif final. De plus, l'option "sens urbain", activée par défaut (sauf en mode difficile), colore en rouge vif les différents éléments exploitables du décor, qu'il s'agisse d'une porte à ouvrir, d'un tuyau à agripper ou encore d'un promontoire qui permettra d'atteindre une plateforme haut-perchée. Grâce à tout cela, mais aussi grâce à une jouabilité étonnamment efficace et intuitive (on a complètement évité l'écueil tant redouté), on se prend très vite au jeu, on accueille avec bonheur toutes ces sensations sans se poser d'autre question ; elles sont tellement bonnes et nouvelles ! Se jeter dans le vide pour s'agripper à un tuyau sur l'immeuble d'en face donne presque le vertige dans Mirror's Edge, c'est réellement impressionnant. A quelques exceptions près, qui font parfois du gameplay un vaste "die and retry" à l'ancienne, la difficulté est assez bien dosée et les événements renouvelés à bon rythme pour qu'on ne décroche pas. On peut passer par exemple d'une phase d'exploration assez zen à une poursuite stressante, où l'erreur n'est pas permise et ou une petite musique bien sentie ajoute volontiers un peu de tension...

Parkour toujours

Bref, malgré quelques passages où la progression par l'échec énerve un peu et casse le rythme, malgré ce scénario de nanar et malgré la relative répétitivité de l'ensemble, ce qu'il faut clairement retenir de Mirror's Edge, c'est tout de même ces incroyables sensations, cette immersion fantastique, cet aspect innovant et cet univers au design et à l'ambiance hyper réussis... Il s'agit là avant tout d'un "jeu trip". Un jeu assez court aussi, tiens, mais personnellement je ne me lasse pas de recommencer encore et encore les différents actes du scénario. Notez d'ailleurs la présence d'un mode Time Trial, pour péter les records et les balancer sur le net, mais aussi de quelques autres challenges à base de checkpoints, qui fonctionnent sur le même principe. J'y passerai du temps, d'autres non, c'est une évidence. Je me retrouve un peu à la place de RaHaN l'année dernière avec Assassin's Creed (le trip de l'année ?)... je pardonne volontiers tous ses petits défauts à ce jeu unique, novateur et bourré de ces petits moments sensationnels qui me font tant aimer le jeu vidéo.