Loin de moi l'idée qu'il serait temps d'oublier la tragédie de la Seconde Guerre Mondiale. Ou celle de la première, ou de toute autre guerre, d'ailleurs. Malheureusement, il arrive qu'en souhaitant nous concerner avec, on ne suscite l'effet inverse pour nos générations qui ne l'ont pas connue. Une sorte de trop plein de sentiments inhérent à une maladresse narrative, à une mise en scène qui en fait finalement trop. C'est peut-être le principal écueil de ce nouveau Brothers in Arms, un écueil d'autant plus flagrant que l'aspect purement ludique montre rapidement, lui-aussi, ses limites.

Les chiens ne font pas des chats

Comme ses prédécesseurs, Brothers in Arms : Hell's Highway propose une action tactique mêlant l'approche d'un Full Spectrum Warrior à celle d'un first person shooter classique. Une formule intéressante qui permet de mêler immersion du joueur, qui assume à nouveau le rôle du sergent Matthew Baker de la 101e, et dimension tactique avec un système d'ordres simples pour diriger les escouades qui l'accompagnent. Fermement ancrée dans l'Histoire en retraçant l'Opération Market Garden de septembre 44 aux Pays-Bas, la narration reste le principal intérêt de l'ensemble pour les amateurs de la série, car ce nouvel épisode n'introduit finalement que peu de vraies nouvelles mécaniques. On dirige toujours, en pressant la gâchette de gauche, un curseur à l'écran qui sert à placer ses escouades (en général une ou deux) de couverture en couverture, à leur ordonner des tirs de suppression, ou des attaques plus soutenues, suivant leur spécialité. Le joueur passe ainsi son temps à échafauder des tactiques de contournement assez basiques pour pouvoir progresser sans encombre et repousser les lignes ennemies avec sa tête plutôt que la fleur au fusil. Certes, il y a quelques nouveaux éléments, comme un système de couverture à la Gears of War, et des décors en partie destructibles, mais le coeur du jeu souffre toujours des mêmes travers : un IA ennemie beaucoup trop statique pour présenter un réel danger, des situations qui peinent à se renouveler passée la première moitié de la campagne, et un rythme global qui semble diluer quelques scène fortes et réussies dans un océan d'automatismes vite acquis, donc vite répétitifs.

Trop c'est trop

Cette répétitivité ludique ne serait donc qu'un problème mineur si la scénarisation et la mise en scène parvenaient à mieux nous tenir en haleine. Malheureusement, BiA : HH en fait trop. Oui, ces soldats sont morts pour libérer l'Europe du joug Nazi, oui, l'amitié particulière des hommes forcés de traverser ensemble les atrocités de la guerre a tout pour émouvoir, oui, il ne faut pas cesser de raconter ces histoires par-delà les siècles, sous toutes les formes. Mais à trop chercher à émuler Band of brothers ou Il faut sauver le soldat Ryan, Brothers in Arms : Hell's Highway a tendance à sonner faux, et en abusant de flashbacks pas toujours très clairs ou utiles, il distrait l'attention de toutes ces valeurs simples qu'il tente, et c'est tout à son honneur, de faire passer. On pourrait aussi lui reprocher une technique datée (surtout regrettable pour les visages dans les cinématiques, qui y perdent en puissance), ou un mode en ligne plutôt dispensable, mais en vérité, Brothers in Arms : Hell's Highway reste un bon jeu. Mais un jeu qui aurait sans doute pu être excellent s'il avait su convertir son trop-plein narratif en audace ludique.