Petite Graine. C'est ainsi que cette voix enfantine vous appelle. Vous qui venez d'émerger des profondeurs de la Terre errez dans un lieu étrange et magique dénommé le Sanctuaire. Pour quelle raison foulez-vous ce sol sacré ? Accomplir le Rituel des Saisons. Ce qui ne sera possible qu'en trouvant un corps adapté à la tâche. Et justement, voilà qu'un renard vient d'arriver dans la forêt désertée où vous vous trouvez. En vous incarnant dans le roux quadrupède, vous allez être en mesure de vous rendre dans les antres des quatre Sages et récupérer de quoi remplir cette mission dont vous ignorez l'objectif réel...

Renard, chenapan

Si les contours de sa trame, très plaisante, sont assez mystérieux lorsqu'on se lance dans Seasons After Fall, avec pour principal accompagnement le timbre très doux d'Adeline Chetail (Ellie dans la VF de The Last of Us, entre autres) et les fantastiques mélodies à cordes composées par Yann van der Cruyssen, les intentions du jeu sont rapidement décelables : vous faire réfléchir. Bien que les composantes plate-forme et exploration soient omniprésentes, menant irrémédiablement à penser à un "Metroivania" aux airs d'Ori and the Blind Forest, il n'est pas question de skill, de courses folles au mépris de pièges plus vicieux les uns que les autres, d'ennemis à occire ou de pouvoirs nécessitant des manipulations parfois complexes et un sens du timing acéré. Il y a bien des capacités qu'il va falloir acquérir, mais celles-ci n'auront pour seule portée que de modifier votre environnement direct, de manière rapide.

Ruse de la saison

L'idée va être très rapidement, après s'être d'abord familiarisé avec le saut et le jappement, qui permet d'interagir avec certains éléments de décor, de manipuler les saisons comme vous l'entendez. Ou plutôt en fonction des endroits que vous devez atteindre. Il faudra toujours garder à l'esprit que l'été est propice au déploiement des branches, que l'automne est venteux et voit les champignons s'ouvrir, que le pluvieux printemps gorge d'eau certaines plantes et peut donc aider à faire faire pousser des arbres ou monter les lacs, ou encore que l'hiver gèle volontiers la surface de ces derniers, ce qui s'avère plus pratique pour galoper. Ce ne sont que quelques exemples pour dire qu'il faudra sans cesse songer à alterner pour que les conditions d'une progression sans accrocs soient réunies. Et composer parfois avec des bestioles rampantes ou volantes aux propriétés étonnantes ou encore des pierres capables de vous mener vers d'autres lieux.

Ça se goupil bien

Est-ce que tout cela fonctionne ? Complètement. Les mécanismes qui s'activeront du passage d'un cycle à un autre sont nombreux et proposés sur un bon tempo, histoire qu'on ne se sente jamais trop pris dans une spirale redondante. Les puzzles ne se révèlent pas toujours évidents, surtout dans la deuxième partie de l'aventure, qui demande un grand sens du détail, mais jamais insurmontables. La machine logique en route et le regard bien placé, on avance avec bonheur, en s'émerveillant à chaque découverte d'une nouvelle idée de gameplay. Seul véritable bémol, le manque d'aides, comme une carte ou un simple indicateur des objectifs, qui pénalise dès lors que l'on reprend après un temps passé loin de l'écran ou que la mémoire ne fonctionne pas à plein tube. Fort heureusement, les différentes zones, propices à du furetage de fond en comble pour trouver, notamment, de quoi accéder à la véritable fin de l'aventure, ne sont pas aussi immenses qu'elles y paraissent. Cet aspect condensé, qui n'en rajoute pas, est à saluer. Autrement, les multiples allers-retours auraient été un brin pénibles. Et au-delà de la dizaine d'heures qui suffisent pour en voir le (vrai) bout, avec davantage de marche ou de "collectibles", la rythmique n'aurait probablement pas été aussi réjouissante.

Sur les chapeaux de renard roux

Il ne s'agit pas d'un secret, et vous avez pu le constater dans les différents screenshots et trailers, Seasons After Fall bénéficie d'un autre atout de taille : sa patte artistique. Couplée à (j'insiste) une ambiance sonore vraiment impeccable, elle séduit immédiatement. Ce design crayonné du plus bel effet, qui évoque du Ghibli, Rayman Origins, Child of Light ou encore les esquisses de Saint-Exupéry pour le Petit Prince (dont la filiation se retrouve aussi dans le style employé par la narration et les thèmes abordés, comme la peur du changement) rend le tout irrésistible. Et même si l'on y est seul, presque abandonné dans une nature dont les teintes varient avec adresse à chaque manipulation météorologique, on a l'impression d'être toujours accompagné par les arrières plans vivants, animés, par les couleurs vibrantes qui s'affichent sur le moniteur de notre PC. On sent les rayons du soleil, la pluie, la chaleur étouffante, le froid mordant. La réussite réside dans le soin apporté au moindre détail. Du grand art. Pour une immersion digne d'un livre pour enfants, d'un joli conte animé. Ce que le jeu de Swing Swing Submarine est assurément, en plus d'une expérience contemplative rafraîchissante, séduisante et qui s'appuie sur des qualités ludiques indéniables.