With a little help from my friends

Pour les plus fringants d'entre vous, il convient de rappeler que l'arrivée du jeu en ligne fut en son temps une véritable révolution : pour peu que vous disposiez d'un câble Ethernet et d'un abonnement coûteux au réseau des réseaux, vous ne seriez plus jamais seul ! Que ce soit lors d'escarmouches endiablées sur Alerte Rouge ou de quêtes entre amis avec Phantasy Star Online, une nouvelle manière d'envisager le jeu à plusieurs était en train de naître. Presque vingt ans plus tard, force est de constater que le jeu vidéo opère un retour vintage à ses premières amours : le sacro-saint multijoueur local. Après Nidhogg, Towerfall Ascension ou le plus récent Broforce, Push Me Pull You tape l'incruste sur votre canapé alors que les cartons de pizza partent à la poubelle et que le second pack de bières se fait copieusement décapsuler. Jouable exclusivement à plusieurs au sein d'une même pièce, le dernier-né du studio australien House House joue à fond la carte du grotesque potache pour décrocher un rire gras et spontané de la part de l'assemblée. Qu'on se tire la bourre à deux, trois, ou quatre, le but est plutôt simple (même si je dois vous avouer que je n'attendais pas à écrire un jour la phrase qui va suivre) : aux commandes d'un boudin humain bicéphale, vous devrez tant bien que mal coordonner les deux extrémités de cette improbable créature pour chaparder et déplacer une à plusieurs balles afin de marquer des points et remporter la manche.

Voilà, ça peut paraître étrange dit comme ça, mais c'est bien là que réside tout le potentiel de cette étrangeté visuelle et sonore : aux prises avec vos deux têtes de lard, il faudra se mouvoir le plus efficacement possible afin de piéger l'adversaire, alternant étirements flatulents et rétrécissements crispants. Déroutante de prime abord, c'est au sein d'un parc de jeux de plein air que la maniabilité de Push Me Pull You se laisse appréhender. Se faisant face tels d'étranges sumotori au sein desquels la nourriture entre mais semble ne jamais ressortir, les adversaires peuvent se lancer dans un haka plus ou moins coordonné, ou improviser une partie de foot ambiance baby.

« Arrête d'embarquer la manette ! »

À un contre un, il faudra scinder son cerveau et ses doigts pour tenter de briller par ses ondulations skillées, mais c'est véritablement à quatre que le jeu se savoure à sa juste valeur. Proposant de partager deux pads entre quatre convives dans un état second, les cinq modes disponibles promettent alors de beaux fous rires. Devant ce déluge de pagaille, il faudra se parler, essayer de détourner les adversaires qui hurleront au moins aussi fort que vous, quitte à mettre à mal une stratégie élaborée quelques minutes plus tôt. Avec quatre cerveaux à l'oeuvre, les duels pour choper la balle et scorer prennent alors parfois des airs de ballet délicieusement dérangeants : si le jeu se passe de musique, c'est pour mieux profiter des effets sonores monstrueusement débiles et des invectives de chacun. La gestion de zone devient alors décisive, et on prend un malin plaisir à défaire les alliances d'un soir en retournant contre leurs inventeurs les stratégies ondulées les plus improbables.

The Hangover

Mais déjà il se fait tard, les rires font place aux larmes (de sommeil) et chacun déserte progressivement l'assemblée... Au fur et à mesure que les joueurs s'amenuisent, le fun diminue, et on finira par ranger Push Me Pull You dans un coin de sa bibliothèque numérique jusqu'à la prochaine fois. Et c'est dans ce parti pris radical que le titre trouve sa raison d'être comme ses limites : parfois brillante de n'importe quoi à quatre, l'expérience reste gourmande en main d'oeuvre et se savourera aussi vite qu'un paquet de chips format familial. Rassasiant et satisfaisant donc, mais dont la saveur s'atténue un peu vite au fur et à mesure que l'on se resservira. C'est un peu court, jeune homme !