Sorti dans les obscures salles d'arcades Nippones au cours de l'été 2015, Pokkén Tournament à été mal reçu par les joueurs japonais, qui le qualifient souvent du doux sobriquet de "Kusoge" (abréviation pour "jeu de merde", littéralement). Pourtant, cela n'a pas empêché le titre de rencontrer le succès et même de se frayer un chemin jusqu'aux portes de l'EVO, un des plus grands tournois de jeux de baston. Une version Wii U updagrée pour l'occasion pointe donc logiquement le bout de son nez ce 18 mars 2016, et la voici testée par nos soins... Que vaut vraiment ce croisement complètement fou entre deux univers si différents ?

Le gameplay entre deux chaises

Pour les 20 ans de la série, les fans sont gâtés avec de nombreuses annonces et sorties, dont ce mix improbable. Si le premier contact avec Pokkén nous fera penser à un jeu de combat "pop corn spectacle" type Naruto ou DBZ, d'autres titres issus du giron Bandai Namco, on se rend très vite compte que ce n'est pas du tout le cas. Il ne faut pas oublier que la société Tokyoïte est aussi à l'origine d'autres séries autrement plus cotées auprès des fans de baston pure et dure, comme Tekken bien sûr ou Soulcalibur. Et c'est plutôt dans cette direction qu'il faudra lorgner.

En effet, ce qui va donner cette fausse première impression, c'est les combats coupés en deux phases. La première, dite de "terrain", consiste en un affrontement en 3D avec une vue isométrique, où le but sera de se rapprocher de son adversaire pour lui placer une attaque suffisamment puissante pour passer dans la seconde phase du combat, dite de "duel". Et c'est ici qu'on rentre dans ce qui fait véritablement tout le piment du jeu, avec du combat 2D nerveux, technique, et du combo dans l'air. Et ça tombe bien puisque c'est cette phase de gameplay qui occupera le plus de place dans les duels.

Toute la panoplie basique des jeux de combat est là, avec attaques normales, à distance, puissantes, aériennes et anti-aériennes, le tout articulé autour d'un système plutôt classique de "pierre feuille ciseau" : le coup est battu par la protection, mais la protection est battue par la choppe, qui est à son tour battue par le coup. Le tout avec un autre trouble-fête : le contre, qui va pouvoir battre un coup mais qui, s'il est trop chargé, sera battu par un enchaînement ou une choppe, un peu à la manière de la focus de Street Fighter IV. Votre Pokémon disposera aussi d'une jauge de "Synergie", qui une fois remplie vous donnera accès à "l'éclat synergique ", une transformation de combattant qui va lui permettre de taper plus fort et d'avoir accès à une "attaque d'éclat", sorte de furie qui va taper très très fort si vous arrivez à la placer !

Aussi, il faut noter que chaque Pokémon est classé selon son type, qui orientera votre façon de jouer, avec les Pokémon de Puissance qui tapent fort mais se déplacent lentement, ou les Pokémons rapides qui voient leur attaque baisser au profit d'une vitesse accrue. L'équilibrage à l'air d'être au rendez-vous malgré les différents types de monstres de poche, et au vu de mes affrontements en ligne, il est un peu tôt pour parler de Match Up, les seuls joueurs m'ayant posé quelques soucis étant pour l'instant les spammeurs. Et dans tout ça, je ne vous parle pas des moult autres subtilités incluses telles la possibilité de "cancel" certains coups, les attaques brise-garde, et bien d'autres encore.

Sans avoir la technicité d'un jeu du calibre du récent Street Fighter V, le gameplay est assez profond pour plaire aux férus de jeux de combat, qui trouveront leur dose de challenge contre d'autres adversaires capés, et un véritable intérêt à travailler leurs combos les plus puissants, tout en restant assez accessible pour proposer du fun immédiat au fan de Pokémon qui n'a jamais véritablement joué à un jeu de baston, avec des commandes simples qui ne requièrent pas de dextérité particulière (je pense ici aux dragons et autres quarts de cercle d'un Street Fighter).

Un contenu Dracolossal !

Un des principaux reproches faits à la version arcade à sa sortie était le manque de combattants et de boss. Leur nombre est passé de 10 à 16 (14 disponibles au départ), dont un boss exclusif à ce spin-off baston : Dark Mewtwo. Tout ceci avec 30 Pokémon de soutien qui pourront vous assister durant les affrontements. Vous pourrez de plus débloquer, au fil des combats, de nombreuses options de personnalisation cosmétiques pour votre avatar de dresseur, et faire passer des niveaux à vos Pokémon pour les renforcer en attaque, défense, technique et soutien.

Au niveau du solo, on trouve la ligue "Ferrum", qui vous fera affronter tout un tas de dresseurs avec leurs Pokémon, l'idée étant de monter dans les classements pour pouvoir participer au tournoi final de qualification pour la ligue supérieure. Le challenge ira bien entendu crescendo, avec des combats de plus en plus costauds. Ce mode est furtivement scénarisé avec l'apparition d'une mystérieuse dresseuse et de son surpuissant Dark Mewtwo... On pourra aussi profiter d'un versus classique contre l'IA, avec 3 niveaux de difficulté, et d'un mode training ultra complet. Le didacticiel vous initiera aux bases du déplacement, des phases et du gameplay, le dojo des techniques vous permettant d'approfondir le premier contact. Enfin, un véritable défi combos est présent, avec 6 épreuves par combattant, certaines étant bien plus retorses que d'autres. Comptez un bon bout de temps avant de maîtriser les différents enchaînements du jeu.

Enfin, quid de la partie online ? Cette dernière a de grandes qualités, comme une vitesse de recherche hallucinante (on trouve souvent son adversaire en deux ou trois secondes !), un leaderboard, des matches classés et amicaux... mais il souffre tout de même de quelques problèmes. L'absence de lobby, dans un premier temps, ainsi qu'un étrange choix de Netcode, qui fait que si vous vous battez contre un adversaire avec une connexion en carton, le jeu se met en pause pour reprendre exactement là ou il en était ! Ceci implique une gestion vraiment différente des téléportations d'un Street V ou du lag de n'importe quel autre jeu de baston en cas de problèmes.

Le GamePad Wii-Utile

Seul mode qu'il me reste à évoquer : le multi local. Qui n'a jamais pesté contre la difficulté de jouer en haut de l'écran dans un jeu de tennis ? Le problème pourrait se poser avec ce Pokken et sa phase de "terrain", car l'un des deux joueurs s'y retrouve forcément au fond de l'écran... mais ce n'est pas le cas ! En effet, l'idée est assez intelligente puisque grâce au GamePad, chaque joueur peut avoir son propre écran : Le joueur 1 est en bas sur l'écran de la mablette, tandis que le joueur 2 est lui aussi en bas de l'écran mais sur la télé. Une utilisation astucieuse, il faut bien le reconnaître.

Pour terminer ce test, j'évoquerais les deux accessoires compatibles avec la bête. Tout d'abord, les figurines NFC de Nintendo, devenues si peu rares une fois le consommateur habitué à lâcher 15 balles le bout de plastique. Leur utilisation est malheureusement ultra limitée. Avec un maximum de 5 utilisations par jour, vous pourrez, en approchant un amiibo près de votre mablette, débloquer un titre ou un élément de costume pour votre avatar... et c'est tout !

L'autre accessoire est un peu plus original : une des particularités de la borne d'arcade était de proposer de contrôler le jeu non pas via un stick arcade intégré, mais bel et bien via un pad, relié à la borne par un câble dans une gaine, à la façon des bornes de démo de magasin. Si vous voulez vivre "l'expérience arcade" à la maison, vous pourrez ainsi vous procurer pour 25 euros cette manette fabriquée par HORI (qui propose généralement du très bon matos, mais nous n'avons pas eu l'occasion de la tester). Toujours en parlant de contrôleur, il est aussi possible de continuer sa partie sur le GamePad uniquement, si jamais la télé est prise par un autre membre de la famille par exemple. C'est une option assez courante mais il était important de le signaler.

Pokken Tournament propose donc un gameplay original et intéressant, doublé d'un contenu plus que correct pour un jeu du genre. Seule ombre tableau : les graphismes qui ne sont pas vraiment à la hauteur des standards en vigueur, avec des modèles 3D qui "bavent" sur votre écran de télé et des arènes assez inégales, et ce malgré des effets visuels plutôt réussis qui pètent dans tous les sens ainsi qu'un framerate au taquet.