Grim Fandango a toujours été cité en exemple parmi les titres faisant partie de la grande histoire du jeu vidéo, et spécialement pour le style qu'il représente et l'histoire qu'il raconte. Sorti en 1998, il avait littéralement défrayé la chronique pour le thème novateur qu'il abordait, mais fut également une gageure pour les développeurs, qui avaient préféré délaisser le point and click classique à la souris, au profit d'un jeu entièrement réalisé en 3D, jouable au clavier.

Développé et inspiré notamment par un Tim Schafer au sommet de son art (Full Throttle, Day of the Tentacle, The Secret of Monkey Island...), le titre raconte l'histoire de Manuel Calavera, un agent de voyage mortuaire qui se pose des questions sur les "clients" qu'on lui donne. Ou plutôt qu'on veut bien lui laisser.

Vous l'avez compris, l'intrigue se déroule au pays des morts, plus précisément dans un monde inspiré de la mythologie aztèque. Les trépassés, qui ressemblent alors à des squelettes, voyagent quatre années à travers le Pays des Morts vers le Neuvième Monde, où se trouve le repos éternel. Et en fonction de leur vie passée, certaines âmes ont le droit d'utiliser un moyen de transport, et d'autres pas...

Plus mort, tu meurs

Si son boulot consiste à aller récupérer des personnes décédées pour les amener au Pays des Morts, son but est de les faire "voyager" une dernière fois en leur vendant, ultime choix du roi, une croisière de luxe via le Neuf Express, direct jusqu'au neuvième monde, endroit idéal pour un repos éternel bien mérité. L'endroit que Calavera, in fine, veut également rejoindre.

Le problème de "Manny", qui devient de plus en plus récurrent, c'est qu'il ne récupère que des mauvais clients, comprenez par là peu fortunés (et à la vie dissolue), qui n'ont les moyens que de s'offrir un aller simple de seconde zone. Tout cela alors même que son collègue, un certain Domino, s'accapare les meilleurs forfaits et fait du coup la joie de son patron... Un complot ? Manny veut en avoir le coeur net...

A mourir de rire ?

Directement inspiré du jour des morts et du folklore mexicain, l'apparence même des personnages est là pour vous en convaincre, l'humour noir est évidemment toujours présent et fait mouche, pour peu que vous y soyez réceptifs. D'autant que les doublages, en français ou en anglais, sont forcément corrosifs dans toutes les situations. Ajoutez à cela une musique magnifique, type jazzy et orchestrale s'il vous plaît, et vous avez là une ambiance macabre des plus originales.

Et que dire des énigmes ? Ces dernières sont, comme vous pouvez vous y attendre, "à l'ancienne". C'est-à-dire à la fois loufoques et logiques. Suffisamment logiques pour vous faire réfléchir, parfois longuement, et assez loufoques également pour vous faire pester quelques longues minutes contre ce fou de Schafer. Mais c'est aussi pour ça qu'on l'aime...

Tu claques des dents

La petite astuce de l'époque, qui fut en vérité très compliquée à développer, était de faire en sorte que le personnage ait le regard attiré par les éléments interactifs du décor. Si aujourd'hui ce système est évidemment basique, en 1998 c'était un véritable défi. De quoi vous aider efficacement dans vos recherches côté gameplay, mais n'oubliez pas qu'il faudra tout de même faire fonctionner vos méninges pour avancer.

Moi qui ne l'avait pas fait à l'époque (oui, honte sur moi, mais j'ai encore sa version PC sous blister que je peux revendre 5.000 euros sur eBay), je peux vous dire que certaines énigmes sont bien retorses. Et c'est tant mieux. Du coup, il vous faudra pas moins d'une bonne quinzaine d'heures, réparties sur 4 années fictives, pour en venir à bout. Ou bien 3 heures si vous vous aidez de la solution...

Remasterisation, vraiment ?

Si le système d'inventaire a été conservé (assez galère d'ailleurs...), rappelons que cette adaptation était censée proposer des textures en haute résolution, un système d'éclairages dynamique, une bande-son orchestrale... et pourtant... Bon ok, c'est le cas, arrêtez de flipper. Mais graphiquement, les améliorations se portent uniquement sur certains élément du décor, que l'on distingue à peine, et sur les personnages, qui du coup semblent reprendre... vie. Admettons quand même que tout cela fait plutôt léger. Voir des textures en HD pour éviter d'avoir les rétines qui saignent, en 2015, disons que c'est tout de même le minimum syndical.

D'autant que quelques méchants bugs subsistent. Des routines de déplacements étranges, des sons qui bloquent, des portes qui se "ferment" sans raison... on aurait aimé un travail plus soigné.

S'il est évidemment fort louable qu'une telle remastérisation puisse exister, à mon sens, il eut été préférable de le sortir plus tard et d'en faire un véritable petit bijou à la manière de Monkey Island... D'autant plus, et là je m'insurge, que le format vidéo choisi est le 4:3, avec des bandes latérales toutes moches. Oh, oui il est toujours possible de mettre le jeu en 16:9, mais c'est tout simplement... horrible et sans intérêt. L'écran et les textures sont alors totalement étirées et vous donnent un format visuel qui pique les yeux. A proscrire donc, pour votre intégrité physique.

Tim Schafer raconte...

Chose amusante cependant, il est possible de switcher de la version "classique" de l'époque à celle d'aujourd'hui, d'un simple clic sur le stick droit de la PS4 pour ne parler que de cette console. Amusant, mais vous ne le ferez que deux ou trois fois. Ou 666 fois si vous êtes totalement barge comme moi.

Idem pour entendre les commentaires audio de Tim Schafer et autres développeurs de l'époque, qui pour le coup apportent une vraie plus-value au jeu, avec moult anecdotes bien sympathiques. Là, j'avoue que je me suis régalé les cages à miel. Plus de deux heures à entendre ces gus sortir moult anecdotes sur le ton de l'humour, à la volée, comme ça au coin du feu. Dommage que ce ne soit pas plus fourni d'ailleurs...

Ne boudons toutefois pas notre plaisir : ce titre-là, peu de gens ont eu l'occasion de le faire, et particulièrement la jeune génération. Pour une fois, laissez de côté les FPS (désolé, ce cliché...) et lancez-vous sur ce titre qui vous fera passer un sacré bon moment malgré ses quelques bugs. Et même si le prix peut sembler encore un chouia trop élevé, à savoir 14,99 euros sur PS4 et PS Vita (le jeu est cross-buy) ou 11,99 euros sur PC, des heures de bon jeu vous attendent.