Lorsqu'on est un pirate renommé d'une grande famille de flibustiers, il ne faut pas s'étonner quand le danger croise son chemin. Surtout en visitant des ruines mystérieuses à la recherche de trésors perdus. Mais de là à se faire voler son âme par un seigneur des ombres avant de ressusciter deux semaines plus tard grâce à un rituel vaudou, c'est peut-être un peu over the top, comme on dit. Quoi qu'il en soit, vous voilà au milieu d'une invasion en provenance de l'au-delà, qui souhaite mettre la main sur les restes d'un monde déjà pas mal dévasté. Quel vil être néfaste se trouve derrière tout cela ? Vous le découvrirez bien assez tôt, occupé que vous serez à réunir les pontes de trois grandes factions pour vous aider. Les magiciens, les chasseurs de démons et les indigènes auront du taf pour vous avant de vous rendre à leur tour service par rapport à votre souci d'âme errante. Et il vous faudra jongler avec l'Inquisition, toujours aussi bornée, et les pirates, toujours aussi saouls.

Club Médiéval

Naviguant d'île en île, d'abord dans une coque de noix puis dans un vrai vaisseau de guerre lorsque vous aurez rejoint une faction, vous allez discuter avec de nombreux personnages et régler tous leurs problèmes du mieux que vous pourrez. À vous de rester honnête et « humain », ou de multiplier les coups en fourbe et vous rapprocher de votre côté démon. Cela influera sur les compagnons et pourra renforcer la rejouabilité de Risen 3, tout comme la possibilité de choisir entre trois camps distincts, même si très franchement, les conséquences de vos choix ne sont pas vraiment mises en avant du début à la fin de l'histoire. Les quêtes provoqueront quelques allers et retours, mais vous pouvez aussi vous balader au hasard et accomplir la majorité des missions avant même qu'on vous l'ait demandé, ce qui est pratique si vous décidez de simplement vous promener à l'aventure, une des activités les plus agréables du jeu. Vous dénicherez ainsi des trésors cachés, des histoires étranges, des objets légendaires et un milliard de palourdes... Si vous êtes un collectionneur compulsif et que vous détestez laisser un centimètre carré de terrain inconnu, Risen 3 est définitivement fait pour vous.

Les sentiers de la gloire

Toutes ces péripéties, très souvent ponctuées de combats, auront pour but de vous préparer à la tâche ultime qui vous attend : sauver le monde. Le système de progression imaginé par Piranha Bytes est carrément sympa. La gloire (l'expérience), gagnée en tuant des monstres ou en résolvant des quêtes principalement, sert à augmenter plusieurs attributs, qui regroupent à leur tour deux à quatre compétences. Ainsi, en dépensant vos points dans « combat à distance », vous renforcerez tout autant les mousquets (votre score influe sur les chances de toucher), que sur les fusils (cette fois les dégâts sont influencés avec ce type d'arme), ou encore le pourcentage de coups critiques. La ruse concerne les attaques secondaires (pistolets, couteaux de lancer, arbalètes). L'influence gonfle votre persuasion et votre intimidation. Et ainsi de suite. Et pour booster toujours plus chacune de ces compétences, vous pourrez payer des instructeurs, pour peu que vous ayez un score adéquat dans les attributs prérequis. Vous achèterez aussi des capacités uniques, comme les connaissances de chasseurs, des combos en plus ou des améliorations de santé.

Dur dur d'être un grosbill

Vous composerez ainsi le personnage qui vous convient, bien qu'il soit un peu dommage que chaque type de combat soit assez exclusif des autres. Il reste compliqué, vu l'interface et tout simplement l'intérêt en termes d'efficacité au final, de combiner par exemple épée et magie, ou fusil et vaudou, ou tout autre mélange de genre. Risen 3 est malheureusement terriblement déséquilibré de toute manière, et même en « difficile », vous vous en sortirez rapidement sans la jouer fine. On conseillera donc le corps à corps pour les fans de combats un peu tactiques. La magie restant la voie de la "bourrinitude" absolue. Bref, vous ferez attention à vos points de vie pendant quelques heures de jeu, durant lesquelles la présence de l'un de vos compagnons s'avérera utile en combat. Ensuite, ces derniers ne serviront qu'à faire des commentaires lassants sur vos exploits pendant que vous nettoierez le terrain en vous curant le nez nonchalamment.

Trop de lacunes

C'est dommage, car il y avait quelque chose de sympa dans les mécanismes d'attaque et de défense mis au point par les développeurs. Notamment dans la possibilité de charger un coup pendant 1, 2, 3 secondes... Avec un bonne IA en face, des face-à-face plus précis et des bons mouvements, ça aurait pu faire tout le sel d'un jeu qui propose tout de même énormément de combats. Malheureusement, on trouve peu d'ennemis différents, les attaques se ressemblent toutes, on répète toujours le même schéma, et même si on ne s'ennuie pas trop, car les rixes ont le mérite d'être rapides, on ne s'amuse pas non plus des masses. Au moins a-t-on une agréable sensation de puissance, peu méritée après avoir un poil peiné en début d'aventure.

Château de cartes instable

La plupart des à-côtés RPG alimentent le déséquilibre général de Risen 3. Il y a par exemple bien trop de bouffe et de boisson pour nous tenir en vie. L'alchimie ne sert pas à grand-chose, si ce n'est à préparer de gros élixirs qui augmentent de façon permanente certains attributs (gardez les plantes pour cette occasion !). Le vol est bien trop facile et l'IA trop laxiste pour qu'on en retire aucune excitation. D'ailleurs c'est à peine si on se déplace en utilisant la furtivité : autant piquer des objets au grand jour. Petite mention pour le mini jeu du crochetage, original et amusant quand on trouve une vraie serrure complexe, mais elles sont hélas trop rares. Quant à l'équipement, il souffre du manque de diversité dans le gameplay cité plus haut. Vous choisirez plus vos vêtements pour le style que pour leurs stats peu variées, et les ornements changeront rarement une fois sélectionnés. C'est d'autant plus vrai quand vous avez une faction, donc une spécialité... Le mieux aurait été de pouvoir équiper vos compagnons : cela aurait donné une utilité à 80% du matos dont vous ne vous servez jamais.

La balade de l'impossible

Cela aurait demandé un effort d'équilibrage de plus aux designers, et vu comment le reste est foutu... Parce que tout le problème est là : Risen 3 propose des mécanismes vraiment intéressants, mais il suffit qu'un élément foiré et tout s'écroule. Il faudrait encore du temps aux développeurs pour peaufiner la difficulté en manipulant une myriade de paramètres. Pour l'instant, on a vite fait de débrancher son cerveau et de parcourir ce monde pirato-fantastique en mode touriste. Le level design hérité de Gothic est toujours aussi extra. On aurait aimé quelques environnements un peu plus ouverts... D'ailleurs vous allez rire : la seule île qui offre cela, avec quelques paysages époustouflants, est dispo en DLC à la sortie. Le second DLC vous place sur une île de Gnomes où l'on vous demandera vaguement d'être furtif. Piranha Bytes a aussi bossé ses animations faciales et quelques autres. Ça reste un peu old-school tout de même dans l'ensemble, avec un moteur physique pas trop réaliste la plupart du temps, mais au moins ils ont mis la dose sur les effets spéciaux.

Risen 3 est donc un jeu d'exploration et de découverte, avec des vannes savamment distillées par un héros laconique à souhait. Malgré tous les défauts cités, le charme peut agir, pour peu qu'on n'espère pas un challenge ni de l'innovation : le recyclage est à la fête. Ainsi prévenu, on ne peut pas trop se plaindre, si ce n'est du scénario mollasson, probablement bateau pour rester dans le thème. Vous pouvez tenter le plus haut mode de difficulté d'entrée de jeu, même si l'effet est minime : cela ne rendra pas les combats plus durs, juste plus longs. Les affrontements à l'épée devraient aussi offrir un meilleur challenge. Dans l'ensemble, Risen 3 n'est clairement pas désagréable à parcourir et il ne bugge quasiment pas. Poussé à fond (sur PC), il peut se montrer très joli, bien qu'un poil raide, un peu comme son prix de 50 euros sur Steam.